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Jean et Olivier de Bretagne, comtes de Penthièvre, vicomtes de Limoges (1384-1433)

John and Oliver of Brittany, earls of Penthièvre and viscounts of Limoges (1384-1433)
Marjolaine Lémeillat
p. 69-83

Résumés

La vicomté de Limoges, passé sous la tutelle bretonne suite au mariage d’Arthur de Bretagne avec Marie de Limoges, fait l’objet d’un long litige durant les années 1310 : entre la duchesse Isabelle de Castille, duchesse de Bretagne, épouse de Jean III, d’une part et son beau-frère, Guy de Bretagne, d’autre part. En effet, le duc a attribué successivement cette terre à l’une, à titre de douaire, puis à l’autre, comme apanage. Il en résulte un conflit assez violent, lors duquel la duchesse va jusqu’à faire intervenir sa mère, reine et régente de Castille, ainsi que le pape, ceci tandis que Guy entreprend de s’imposer dans la vicomté grâce à plusieurs coups de main, mais aux dépends des seigneurs locaux, qui s’en plaignent. Jean III reste quant à lui en retrait. L’affaire ne prend fin qu’avec l’intervention royale française, qui impose la restitution de Limoges à Isabelle de Castille et l’attribution du Penthièvre à Guy, en compensation.

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Chronologie :

XIVe siècle
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Texte intégral

  • 1 Il m’est agréable de dédier cette contribution à Cassandre, toujours prête à rendre service e (...)
  • 2 Il est généralement crédité de peu de personnalité, chez les rares historiens qui donne (...)
  • 3 Surtout chez les historiens du xixe siècle, aux accents volontiers patriotiques et qui voient (...)
  • 4 Ses faits d’armes se retrouvent sous la plume, entre autres, du Héraut Berry, Les chron (...)

1Jean de Penthièvre reste une figure effacée1, en Bretagne comme en Limousin2. Olivier est quant à lui plus connu, mais doté d’une mauvaise réputation : en Bretagne, parce qu’il est un des principaux exécutants de l’enlèvement du duc Jean V (1420) ; en Limousin, parce qu’il est en partie responsable d’une tentative manquée de s’emparer par la force de la ville de Limoges (1426). Aussi certains jugements sont-ils très durs à son égard3. Par ailleurs, d’un point de vue chronologique, il subit, à son détriment, la proximité et la comparaison avec son frère cadet Jean de L’Aigle, chef de guerre de Charles VII et vicomte de Limoges (1433-1454) à l’efficace gestion4.

  • 5 Voir à ce sujet ma contribution dans ce même volume : « Deux titulaires pour une vicomté ? (...)

2Rappelons que les ducs de Bretagne de la maison de Dreux entrent en possession de la vicomté de Limoges, à la suite du mariage de Marie, héritière de cette seigneurie, avec Arthur, petit-fils du duc de Bretagne Jean Ier (1275). Arthur lui-même, puis son fils Jean, sont tous deux vicomtes de Limoges (respectivement en 1279-1301, 1301-1314 et 1318-1341), le dernier en alternance avec son frère cadet Guy (1314-1318) qui, en compensation, se voit attribuer le comté de Penthièvre5.

  • 6 Jean de Montfort est alors emprisonné et sa protestation officielle reste sans effet.

3Par suite du décès sans héritier de Jean III, de la guerre de Succession qui s’ensuit et du décès de son époux Charles de Blois à la bataille d’Auray (1364), la Bretagne échappe finalement à Jeanne de Penthièvre, au profit des Montfort, alors représentés par le duc Jean IV (1364-1399). La question s’est réglée plus simplement en Limousin : d’abord échue à la duchesse douairière Jeanne de Savoie († 1344), veuve de Jean III, cette terre est ensuite transmise au couple Blois-Penthièvre6, auquel succèdent leur fils aîné Jean, puis leur petit-fils Olivier, ceux-ci mêmes qui retiennent ici mon attention. Que deviennent ces seigneurs, issus d’une branche cadette de l’ancienne maison ducale de Dreux, après la perte de la Bretagne ?

Jean de Bretagne : otage, seigneur rebelle, puis assagi

  • 7 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, t. i, Paris, Vve F. Muguet, 1707, t. i(...)
  • 8 Même dès ses premiers mois, dans un mandement de Louis, comte de Blois, frère de Charles de (...)
  • 9 Ibidem, nos 95, 97, 152, 153, 156, 161n, 166.
  • 10 Jones, Michael, « The Ransom of Jean de Bretagne, count of Penthièvre: an aspect of Englis (...)
  • 11 Jones, Michael, Recueil des actes de Charles de Blois…, op. cit., n181.

4Jean est né à La Roche-Derrien, le 5 février 13457. Fils de Charles de Blois et de Jeanne de Penthièvre, prétendants à la couronne ducale de Bretagne, il apparaît assez jeune dans les sources8. Son père est pris par les Anglais à La Roche-Derrien, le 20 juin 1347, et gardé en otage les neuf années suivantes. De nombreuses négociations visent à assurer son retour dans les plus brefs délais, mais sont peu fructueuses9. C’est finalement le 9 août 1356 que les parties s’entendent lors du traité de Londres qui prévoit la libération de Charles, fixe le montant de sa rançon, en précise les échéances de versement ; lui-même s’engage, « pour graindre seureté », à laisser en otages ses fils Jean et Guy (présents en Angleterre depuis 135310), sachant que l’aîné, Jean, peut rentrer dès le premier paiement de la rançon, fixé au 31 octobre 135611.

  • 12 Arch. nat., J 241/45 ; Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 165, n° 18, E 165, n° 19 et E 6, n (...)
  • 13 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 513 et Morice, Pierre-H (...)
  • 14 Au contraire, il bloque tant qu’il le peut toute velléité anglaise d’accueillir fa (...)

5Cela ne se fait pas. Les termes du traité ne sont pas respectés par Charles de Blois, qui reprend son combat, sans assurer de paiement. Il est tué à la bataille d’Auray, le 29 septembre 1364. Aussi le traité de Guérande du 12 avril 1365 consacre-t-il la victoire des Montfort : Jeanne de Penthièvre renonce au duché pour elle et ses héritiers, mais conserve le Penthièvre, les autres terres qu’elle détient en Bretagne et la vicomté de Limoges (Jean IV est d’ailleurs supposé l’aider à la conserver)12. Plusieurs clauses concernent Jean de Bretagne : « pour bien de paix nourrir et oster toutes matieres de debats pour le temps present et advenir », son mariage avec Jeanne, sœur de Jean IV, est prévu et ce dernier est supposé octroyer 100 000 francs et son aide pour la libération de celui qui, tant qu’il n’y a pas de descendance mâle chez les Montfort, reste l’héritier de la Bretagne13. Dans ces conditions, le duc régnant ne tient donc ni à voir rentrer son rival, ni à potentiellement reprendre un conflit à peine clos. Aussi n’exécute-t-il aucun de ses engagements14. Jean de Bretagne va rester encore vingt-deux ans en Angleterre (soit un séjour total de trente-quatre ans).

  • 15 À ce sujet, Michael Jones propose une intéressante suggestion : Jeanne, en échange de son (...)
  • 16 Le décès de Guy, le 22 janvier 1385 (ibid., « The Ransom », art. cit., p. 268, n. 2), renf (...)
  • 17 La question est discutée au conseil le 4 octobre 1384 (Jones, Michael, Recueil des (...)

6Les deux frères ne sont pas pour autant oubliés. Leur mère Jeanne négocie toujours leur retour, mais sans résultat concret15. Sa mort, en 1384, provoque apparemment une réelle inquiétude car, avec elle, disparaît une des dernières aides sérieuses dont les otages pouvaient bénéficier16. Par ailleurs, si Jean de Bretagne prend dès lors les titres de comte de Penthièvre et vicomte de Limoges, cette succession reste nominative. Il est absent du duché et Jean IV place ses terres sous son contrôle17. C’est à ce moment qu’intervient Olivier de Clisson.

  • 18 C’est une des raisons principales, jointe à la volonté de causer du tracas à Jean IV, qu’il (...)
  • 19 Jeanne de Penthièvre meurt le 10 septembre 1384. Dès le 6 janvier 1385, Jean de Bretagne fa (...)
  • 20 Bibl. mun. de Nantes, fonds Bizeul, ms 1692, n° 3 ; Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoi (...)
  • 21 Le Conseil royal anglais octroie régulièrement sa protection aux envoyés venus discuter de (...)
  • 22 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 528 et pour l’éc (...)
  • 23 De manière générale, celle-ci s’investit beaucoup pour ses frères, après le décès de leur (...)
  • 24 Le « fait de Jehan de Bretaigne » est régulièrement évoqué entre Marie de Blois et Olivier (...)
  • 25 La dispense pour celui-ci est accordée par le pape durant l’été 1385 et réglée par la duche (...)

7Connétable de France depuis 1380, un des plus puissants et riches seigneurs de Bretagne et régulièrement opposé à Jean IV, il voit tout l’intérêt que représente un parti tel que Jean de Bretagne : terres, seigneuries, revenus et places fortes18. Il met en œuvre un projet d’alliance qu’il prépare sans doute depuis quelque temps19. Entré en contact avec l’otage, il offre de payer sa rançon, en contrepartie d’une union avec sa fille puînée Marguerite. Jean accepte et Olivier de Clisson retire rapidement les premiers bénéfices de cet accord. Le comte de Penthièvre le nomme lieutenant et gouverneur de ses terres en Bretagne et de la vicomté de Limoges, ce qui lui donne la marge de manœuvre nécessaire pour récupérer certaines des places prises par le pouvoir ducal20. Par ailleurs, les négociations pour une libération se poursuivent, sans réel blocage de la part des Anglais21, indisposés par le peu de fiabilité de Jean IV, dont ils attendaient un soutien plus affiché lors de leur dernière intervention en Bretagne. Leur otage est mis à rançon pour 120 000 francs22. En France, Olivier de Clisson et Marie de Blois, duchesse d’Anjou et sœur de Jean de Bretagne23, s’activent pour réunir l’argent demandé24 et conclure le mariage projeté entre Jean et Marguerite25.

  • 26 Henneman, John Bell, Olivier de Clisson, op. cit., p. 174-175. L’intervention de Clisson (...)
  • 27 Sur l’ensemble de l’affaire, ibidem, p. 180-187.
  • 28 Bibl. mun. de Nantes, ms 1696, n° 12, indiqué par Michael Jones, Recueil des actes (...)
  • 29 Arch. nat., J 243/72 ; Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit (...)
  • 30 D’autant que l’affaire va pour le mieux : Jean a déjà quitté l’Angleterre. Il est à Calais, (...)
  • 31 Moranvillé, Henri, Journal de Jean le Fèvre, op. cit., t. i, p478-479 ; Chroniq (...)

8Ces négociations et la prise en main des terres de Penthièvre, jointes aux multiples griefs qu’il a déjà contre le connétable, amènent Jean IV à une décision radicale26. Le 27 juin 1387, profitant de la venue d’Olivier de Clisson à Vannes pour les États de Bretagne, il l’invite au château ducal de l’Hermine, le fait emprisonner et ne le relâche qu’à de drastiques conditions27. Des clauses particulières concernent Jean de Bretagne : Clisson doit remettre toutes les forteresses au duc et ne doit plus s’occuper « de ses terres, de sa delivrance, ne de son gouvernement, ne ne lui pourvoira, ne autre par lui, de chevance, par prest, ne autrement, ne autre confort ne lui fera ». De plus, « le mariage parlé dudit Jehan et de la fille dudit sire de Cliçon sera nul et ne se fera jamais, et les alliances d’entr’eulx seront nulles28 ». Ce traité reste sans effet : parce qu’il a été signé sous la contrainte, le connétable refuse de l’appliquer et demande réparation auprès du roi de France qui rend, le 20 juillet 1388, un jugement en sa faveur29. Entre-temps, relâché en juillet 1387, il reprend ses manœuvres pour le retour de celui qu’il compte bien avoir pour gendre30. C’est un succès : Jean est libéré en décembre suivant, et le 16 de ce mois, il est à Paris où il épouse Marguerite par procuration. Leur mariage est célébré le 20 janvier 1388, à Moncontour31.

  • 32 Contrairement au portrait brossé par d’Argentré (voir note 2). Je remercie Michael (...)
  • 33 Avec des préliminaires tendus (Jones, Michael, Recueil des actes de Jean IV…, op. cit., t. (...)
  • 34 Cela se voit sur son signet dès cette même année 1392 (Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 20 J 1 (...)
  • 35 En juin 1392, Jean IV se plaint des officiers du comte de Penthièvre, qui ont cherché à emp (...)
  • 36 Ibid., nos 962, 968, 983A et B, 985, 988.
  • 37 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. i (...)

9Jean IV revient ensuite sur ses terres bretonnes et ce retour est marqué par une série de rébellions au cours des années 1389-1395. C’est là une succession de coups de main armés, de prises de places fortes, de trêves et paix conclues et peu respectées ; et la question de la part d’initiative personnelle du comte de Penthièvre se pose, d’autant qu’il reste en position de débiteur vis-à-vis d’un beau-père auquel il doit sa liberté. Il est cependant loin d’avoir été un fantoche en la matière32 et son attitude lui vaut les foudres de Jean IV, qui lui reproche notamment de s’intituler « Bretagne » et d’arborer des armes herminées. La situation politique instable que traverse le duché retient l’attention du pouvoir politique français et Philippe, duc de Bourgogne, s’emploie à plusieurs reprises à pacifier la situation. Une première paix est conclue à Tours, le 26 janvier 139233. Le non-respect de celle-ci par les parties va en nécessiter une deuxième, lors de laquelle deux clauses sont définies et immédiatement appliquées : Jean de Bretagne renonce aux hermines pleines34 et prête hommage au duc. Toutefois les frictions et conflits armés35 se poursuivent nécessitant la négociation de nouveaux accords, en 139436, puis 139537.

  • 38 Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 217, n° 11 et Michaux, Adrien Joseph, Chronologie historique, op (...)
  • 39 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. i,  p. 504 ; Couffon, (...)
  • 40 Duchesne, André, Histoire de la maison de Chastillon sur Marne, avec les généalogies et ar (...)
  • 41 Concernant les enfants puînés du couple : Jean († 1454), sire de L’Aigle, succède à (...)

10Jean de Bretagne apparaît ensuite plus rarement dans les sources. En 1398, il rend hommage au bailli de Hainaut, pour la seigneurie d’Avesnes, dont il hérite par suite du décès de Guy II de Châtillon, comte de Blois († 1397) ; il récupère en outre les terres de Landrecies et Nouvion-en-Thiérache38. Menant apparemment une existence plus retirée, il meurt le 16 janvier 140439 et, comme Jeanne de Penthièvre, est inhumé dans le couvent des franciscains de Guingamp40. De son union avec Marguerite de Clisson restent cinq enfants : Olivier, Jean, Charles, Marguerite et Jeanne41.

Olivier de Bretagne : jeune seigneur prometteur et coupable de lèse-majesté ducale

  • 42 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. i, col. 836 ; Jones, (...)
  • 43 Blanchard, René, Lettres et mandements de Jean V, duc de Bretagne, de 1402 à 1442, (...)
  • 44 Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 733.
  • 45 Les premières négociations ont sans doute lieu en juin 1405, (Schnerb, Bertrand, Jean sans (...)
  • 46 Cette union reste non consommée : Jeanne a moins de douze ans à sa mort (Schnerb, Bertrand, (...)
  • 47 Ibidem, p184-185.
  • 48 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 836 ; Pocquet du (...)
  • 49 Il fréquente soit Paris et sa région, soit les états de Bourgogne (Petit, Ernest, Itinérair (...)
  • 50 Notamment les tournois (Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur…, op. cit., p. 500 et 502 (...)
  • 51 Il est présent lors du fameux développement de la théorie du tyrannicide, suite au meurtre (...)
  • 52 Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur…, op. cit., p. 306.
  • 53 Id., « Des Bretons à la cour de Bourgogne sous les deux premiers ducs de la Maison (...)
  • 54 Il se distingue en région parisienne avec le comte de Nevers quand, fatigués des excès (...)
  • 55 Il est retenu le 5 décembre 1418 comme homme d’armes avec 100 hommes de trait (Mori (...)

11Olivier est né en 1393, sans doute le 7 septembre42. Il est mineur au moment du décès paternel et sa tutelle est assurée par sa mère, Marguerite de Clisson43. Celle-ci se montre fort efficace, que ce soit pour la défense de ses propres droits ou de ceux de ses enfants, dont elle veille par ailleurs à augmenter le patrimoine foncier (elle est ainsi à l’origine de l’acquisition de la seigneurie de L’Aigle44) et pour lesquels elle conclut des unions avantageuses. Concernant Olivier, elle s’entend avec Jean sans Peur, duc de Bourgogne, pour un mariage avec la jeune Jeanne45. Celui-ci est célébré à Arras, le 12 juillet 140646, ce qui n’est pas sans inquiéter le pouvoir ducal breton47. Jean sans Peur prend son gendre sous sa tutelle dès ses 14 ans (ce qui lui permet d’étendre son influence en Bretagne48) et l’intègre à la cour de Bourgogne, dont le jeune homme accompagne les déplacements49 et les festivités50. Il prend part aux grands événements politiques51 et fréquente le cercle des proches et alliés du duc (Charles, comte de Charolais, Adolphe de Clèves, Waleran de Luxembourg, comte de Saint-Pol, Guillaume II, comte de Namur, Robert de Bar)52. À partir des années 1410, il est à la tête de compagnies d’hommes d’armes pour le compte de son beau-père : il commande 137 combattants en septembre 1410 et plus de 280 en 141153. Il sert aussi bien en région parisienne qu’au siège de Bourges54. Cependant, ses états de service auprès de Jean sans Peur prennent fin avec le décès de son épouse. Il est ensuite plus proche de la cour de France, mais surtout de celle du dauphin Charles, tout comme son frère Jean de L’Aigle, membre de la maison delphinale depuis 141855.

  • 56 Bourdeaut, Arthur, « Jean V et Marguerite de Clisson. La ruine de Châteauceaux », (...)

12Les tensions avec la maison ducale de Montfort n’en ont pas moins persisté. La succession du connétable, décédé en 1407, a été cause des premiers conflits. Marguerite de Clisson cherche alors à s’assurer la possession de la place de Moncontour, ce à quoi Jean V se refuse. Tout cela dégénère en chicaneries procédurales, jalonnées d’épisodes très tendus : emprisonnement et mort de sergents de part et d’autre (1408) ; Marguerite décrétée coupable de félonie ; pillage de l’île de Bréhat par des Anglais appelés par le duc (1409)56… La paix est finalement rétablie en 1410 : le duc conserve Clisson contre un dédommagement de 2 000 livres de rente en faveur de Marguerite.

  • 57 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 966.
  • 58 Avec une pension annuelle de 500 livres (ibidem, t. ii, col. 896).
  • 59 Dont son absence de soutien face à la maison de Bourgogne (Cosneau, Émile, Le conné (...)
  • 60 La responsabilité du dauphin est indiscutable : après l’enlèvement, il déclare que Jean V e (...)
  • 61 Ce rapt et ses suites militaires ont été maintes fois narrés. Voir notamment Le Baud, Pierr (...)

13Les années 1410 sont plus calmes. Les frères de Bretagne paraissent même de loin en loin à la cour ducale. Olivier accompagne le duc dans certains de ses déplacements : à Paris, par exemple, en 141857. Charles est quant à lui « marechal et gouverneur de la noblesse », « chargé de la garde du duc »58. Malgré ces signes d’apaisement, il n’en subsiste pas moins une certaine rancœur, que d’aucuns, à la cour du dauphin Charles, vont exploiter. Lui-même et son entourage nourrissent en effet à l’encontre de Jean V plusieurs griefs, principalement son absence de soutien dans les difficultés qu’ils traversent59. L’idée de le punir fait son chemin. Elle aboutit à la mise au point d’un complot dont la réalisation est assumée par les Penthièvre60, charge à eux d’enlever le duc ; en contrepartie, le duché de Bretagne leur est promis. Jean V et son frère Richard sont ainsi attirés dans un guet-apens et emprisonnés, au début de février 1420. Successivement détenus dans diverses places fortes, ils restent quelques mois aux mains des Penthièvre, dont la « felonnie et [le] crime de leze majesté » suscitent une réaction très vive de la part de la duchesse Jeanne de France et de la noblesse de Bretagne. Une armée, rapidement levée, prend plusieurs places appartenant aux Penthièvre, mais surtout met le siège devant Champtoceaux que, en dépit de sa résistance, Marguerite de Clisson se résout à livrer le 5 juillet 142061.

  • 62 Blanchard, René, Lettres et mandements, op. cit., t. iii, Nantes, Société des (...)
  • 63 Ils soupçonnent que leur condamnation est inévitable, bien que Jean V ait offert son pardon (...)

14Les biens des Penthièvre sont aussitôt saisis et distribués aux fidèles de Jean V62 et les coupables sont convoqués devant les états de Bretagne réunis en parlement. Bien qu’ils se soient engagés à se présenter, aucun ne vient63. Le 7 octobre 1420, ils sont donc finalement condamnés par contumace à la prise de corps et à la confiscation de leurs biens. Cette affaire entraîne en outre un changement sémantique. Les Blois-Penthièvre ont en effet toujours été appelés Bretagne, une dénomination logique pour les membres d’une branche cadette de l’ancienne maison ducale de Dreux. Jean est appelé « de Bretagne », tout comme Olivier et ses frères (même si Olivier est parfois davantage qualifié de comte de Penthièvre), que ce soit par l’administration ducale bretonne ou française. Mais après l’attentat, cette branche est systématiquement qualifiée de « Blois », à la rigueur de « Penthièvre » ; apparemment, on ne peut laisser le nom de « Bretagne » aux auteurs du fameux « cas de felonnie et crime de leze majesté ».

  • 64 Guillaume, dernier des fils de Jean de Bretagne et Marguerite de Clisson, a été laissé en o (...)
  • 65 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. i, p. 556.

15En attendant, ses membres encore libres64 se sont retirés en Limousin. Marguerite de Clisson et Jean de L’Aigle s’y fixent, ce dernier comme lieutenant pour son frère aîné, qui juge prudent de gagner ses terres les plus éloignées de la Bretagne et part pour Avesnes. Il n’y arrive pas sans péripéties : il est pris en otage par Bernard, marquis de Bade, en représailles à une affaire de vol entre serviteurs. Jean V cherche alors visiblement à racheter son ancien geôlier, afin de le ramener, mais Bernard de Bade traite directement avec celui-ci, dont il retire 30 000 écus65.

  • 66 Il obtient de Jacqueline de Bavière, comtesse de Hainaut, la possibilité de lever p (...)
  • 67 Ibid., p. 291.
  • 68 Stroobant, Corneille, « Services religieux fondés par Jeanne de Lalaing, comtesse de Penth (...)
  • 69 Fille de Simon de Lalaing, seigneur de Quiévrain et d’Écaussinnes, et de Jeanne (ou Isabeau (...)
  • 70 Waudru est la sainte patronne des Avesnois : le choix de ce prénom semble attester d’une (...)
  • 71 À ce sujet, je signale une étrangeté. L’épitaphe d’Olivier de Bretagne, qui figurait sur so (...)

16Une fois libre, Olivier veille à faire fortifier son château d’Avesnes66, mais il n’y reste pas enfermé. En tant que seigneur local (et peut-être aussi en tant qu’ancien compagnon d’autres seigneurs qu’il a connus durant sa jeunesse), il prend part à divers évènements de la vie politique. En 1427, il est à la diète des seigneurs du Hainaut ; le 23 juin, il assiste à la prestation de serment de Philippe de Bourgogne, qui, en tant qu’héritier présomptif de cette terre, s’engage à en respecter les coutumes et privilèges67. L’année suivante, il reçoit de ce même Philippe, par l’intermédiaire de son procureur Jean de Croy, l’hommage pour la seigneurie d’Etrœungt-la-Chaussée. Il assiste surtout à la cession du Luxembourg par Jacqueline de Bavière, au profit dudit Philippe de Bourgogne. Pour autant, Olivier n’admet pas la confiscation de ses terres bretonnes : il conserve l’intégralité de sa titulature, dans ses actes et sur son sceau, et son épouse porte le titre de comtesse de Penthièvre68. Il s’est en effet remarié : le 22 avril 1428, il épouse Jeanne de Lalaing, dame de Quiévrain69. Trois enfants naissent, mais ne vivent pas longtemps. Quand Olivier meurt, le 18 septembre 1433, il laisse deux filles illégitimes : Waudru et Marguerite70, future épouse de Brandélis de Caumont. Ses biens passent donc à son frère puîné, Jean de L’Aigle71.

Gestion des terres et administration des biens

  • 72 Il s’est engagé à rembourser les 60 000 francs qu’il a coûtés à son beau-père, d’où ses (...)
  • 73 Evans, Claude, L'abbaye cistercienne de Bégard des origines à 1476 : histoire et chartes, (...)
  • 74 Telles la cession de Nouvion, Bergues et Barzy à Jean de Luxembourg, comte de Ligny (1429) (...)
  • 75 Voir infra pour Limoges.
  • 76 Sénéchalat de Lamballe octroyé à Mathurin Le Maître (1417) (Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 1 (...)
  • 77 Don de 20 livres tournois à son écuyer Jean Bourdon (1419) (ibidem, 1 E 101).
  • 78 Un marché est conclu le 9 janvier 1418 pour la reconstruction du portail du château (...)
  • 79 En 1430, il reconnaît n’avoir aucun droit dans « la Franche-Haye de Fontaine-au-Bos (...)

17Quelques traces des activités administratives de Jean et Olivier, de leurs goûts ou de leurs entreprises personnelles, transparaissent dans les sources qui nous sont parvenues. Celles-ci sont relativement nombreuses. Mis à part les actes strictement politiques, on trouve des transactions financières. Jean de Bretagne n’en finit pas de s’acquitter de sa rançon, pour laquelle il souscrit emprunts et obligations72. On relève également quelques dons aux serviteurs et communautés religieuses, telle Notre-Dame de Bégard73. L’ensemble des actes signés par Olivier de Bretagne est plus diversifié : transactions financières74, procès75, nominations et paiements d’officiers76, dons aux fidèles77, travaux au château de Lamballe78. Un goût pour la chasse est aussi attesté79.

  • 80 S’il se déplace afin de prêter hommage pour Avesnes, c’est dans le cadre d’une succession. (...)
  • 81 Telle l’intervention sur la possession des terres de Saint-Bonnet[-La-Rivière], Chabrignac (...)

18Ce sont là des existences nobles classiques (mises à part les pièces relatives à l’enlèvement ducal). L’exploitation et la défense de la seigneurie sont aussi assurées, sachant que le comté de Penthièvre et les autres possessions bretonnes sont le principal centre d’attention de Jean et Olivier. Cela s’explique pour le premier, à cause de ses trente-quatre ans d’absence : à son retour, il porte davantage attention à sa terre d’origine qu’aux autres80. Ceci étant, l’absence de son seigneur n’empêche pas la gestion la vicomté de Limoges, assurée par des officiers locaux, qui exercent en son nom81.

  • 82 Il entretient la lutte contre les tentatives ducales de prélever l’impôt sur ses terres ou (...)
  • 83 Le vicomte est normalement bénéficiaire de privilèges, telle l’aide aux quatre cas, mais ce (...)
  • 84 BnF, Collection Doat, t. 246, p. 29, 89 et 205. La sentence royale finale du 28 août 1415 é (...)
  • 85 Pour plus de détails, voir Ducourtieux, Paul, Histoire de Limoges…, op. cit., p. 94-95. À n (...)
  • 86 Guibert, Louis, Documents…, op. cit., p. 121.
  • 87 Il veille constamment à faire prêter hommage et serment de fidélité. Pour des actes émis pa (...)

19Olivier est quant à lui beaucoup plus attentif à ses droits et privilèges. Il les défend en Bretagne82, mais également à Limoges, où il entend récupérer les droits vicomtaux sur le Château83. Il entame une procédure en 1414, mais est débouté de ses prétentions par le roi l’année suivante84. C’est pourquoi des moyens plus directs sont ensuite envisagés. C’est alors Jean de L’Aigle, « lieutenant general pour [son] tres chier seignour et sire monseignour le comte de Peinthievre, vicomte de Limoges », qui gère cette opération (1426). Pour ce faire, il achète la complicité du prévôt-consul Gautier Pradeau, afin que celui-ci ouvre à ses troupes une des portes du Château. Or, le guet donne l’alarme, après avoir repéré des mouvements suspects. C’est donc un échec, que Pradeau, confondu et reconnu coupable, paye de sa vie85. Quant à Jean de L’Aigle, il ravage tout d’abord les faubourgs de la ville pour passer sa fureur, avant de conclure une trêve, sous la pression royale86. Il continue par la suite à gérer la vicomté, de manière plus pacifique, mais toujours en s’assurant de la fidélité de ses vassaux87.

  • 88 Des préventions existent à l’égard du reste de la fratrie. Olivier l’évoque dans sa donatio (...)
  • 89 Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 642 et publication partielle par Gustave Clément-Sim (...)

20De fait l’intérêt des Blois-Bretagne pour Limoges croît, surtout après la confiscation de leurs terres bretonnes. Jean de l’Aigle a visiblement craint de ne pas y avoir une succession facile88. Il est vrai qu’il y a consacré du temps et de l’énergie : arrivé dans les années 1420, il y est connu, s’y fait globalement respecter (excepté le cas du Château), a commencé à s’y bâtir son propre fief en devenant seigneur de Ségur. Est-ce lui qui a sollicité Olivier (je penche pour cette éventualité) ou est-ce ce dernier qui a pris l’initiative ? En tous les cas, celui-ci cède sa vicomté à son frère et n’en conserve que le titre en viager (1432) un an avant sa mort89.

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  • 90 Je renouvelle mes remerciements à Christian Rémy, qui m’a très gentiment transmis ses infor (...)

21Cette succession, et de manière générale, la situation des Blois-Bretagne, à partir de ces années 1420, a une incidence sur le personnel de la vicomté de Limoges90. En effet, les officiers vicomtaux étaient, depuis les Dreux, majoritairement d’origine bretonne. Sous Jean et Olivier de Bretagne, on trouve encore les sénéchaux Hugues de Kerautret (1359-1365) ou Jean Herpedanne (1399). En revanche, cela change avec la confiscation des terres bretonnes de la famille. Dès lors qu’ils sont contraints de se replier sur Limoges, leurs officiers n’ont plus de raison de venir de Bretagne et c’est donc un recrutement local qui s’opère. Aussi voit-on Pierre Davineau procureur de la vicomté (1433-1441) ou Antoine de Pérusse, sénéchal (1467). Une recomposition du personnel administratif en Limousin directement issue d’un coup politique manqué en Bretagne. Quant à la branche cadette de la maison ducale de Dreux, elle est désormais définitivement évincée de toute prétention sur le duché : à la mort d’Olivier, il ne leur reste de leurs héritages bretons, acquis ou revendiqués, que la vicomté de Limoges.

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Notes

1 Il m’est agréable de dédier cette contribution à Cassandre, toujours prête à rendre service et à qui je dois l’accès au dernier ouvrage qui me manquait pour compléter mes recherches. Je remercie en outre Michael Jones pour sa relecture de cette contribution et ses observations.

2 Il est généralement crédité de peu de personnalité, chez les rares historiens qui donnent un avis sur le sujet : « Ce comte Jean fut homme plein de pieté et religion envers Dieu, au reste, homme de simple entendement et à qui il chaloit peu des curiositez de ce monde, obeyssant en tout à son beau père, sans le conseil duquel il n’osoit rien entreprendre » (Argentré, Bertrand d’, L’Histoire de Bretaigne, des roys, ducs, comtes et princes d’icelle, depuis l’an 383 jusques au temps de Madame Anne, reyne de France dernière duchesse, Paris, N. Buon, 1618 [3e éd.], p. 712).

3 Surtout chez les historiens du xixe siècle, aux accents volontiers patriotiques et qui voient en Olivier un « lâche déserteur des combats, […] un chevalier félon qui, à défaut du courage qui honore, n’avait su recourir, pour se venger de son ennemi, qu’à d’odieuses violences » (Marvaud, François, Histoire des vicomtes et de la vicomté de Limoges, t. i, Paris, Dumoulin, 1873, p. 52). Adrien Joseph Michaux lui attribue un caractère désastreux forgé par sa mère : « Olivier lui emprunta ses mauvais penchants, son mauvais esprit. Comme elle, d’ailleurs il avait un cœur dur et déloyal » (Chronologie historique des seigneurs d’Avesnes, Avesnes, C. Viroux, 1844, p. 274). François Clément résume : « on ne voit pas qu’il ait rien fait de mémorable pour cette portion de ses domaines » (L’art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques et autres anciens monuments depuis la naissance de Nostre Seigneur, t. x, Paris, Valade, 1818, p. 398). Le plus virulent reste Gaston du Fresne de Beaucourt, sur les « descendants dégénérés de Charles de Blois » (Histoire de Charles VII, t. i, Le dauphin : 1403-1422, Paris, Librairie de la société bibliographique, 1882,  p. 203).

4 Ses faits d’armes se retrouvent sous la plume, entre autres, du Héraut Berry, Les chroniques du roi Charles VII par Gilles Le Bouvier, dit le Héraut Berry (Courteault, Henri et Celier, Léonce, avec la collaboration de Jullien de Pommerol, Marie-Henriette (éd.), Paris, C. Klincksieck, 1979, p. 88, 362, 364-366, 373, 387, 388, 391, 395, 398, 443).

5 Voir à ce sujet ma contribution dans ce même volume : « Deux titulaires pour une vicomté ? Les démêlés d’Isabelle d’Espagne, duchesse de Bretagne, vicomtesse de Limoges, avec Guy de Bretagne, vicomte de Limoges ».

6 Jean de Montfort est alors emprisonné et sa protestation officielle reste sans effet.

7 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, t. i, Paris, Vve F. Muguet, 1707, t. i, Paris, éd. du Palais Royal, 1973 [réimp.], p. 336.

8 Même dès ses premiers mois, dans un mandement de Louis, comte de Blois, frère de Charles de Blois, par lequel il autorise le versement de 30 florins à l’écuyer Alain de Lorgeril, « pour les lettres qu’il nous apporta de la nativité de Jean de Bretaigne, nostre neveu » (Jones, Michael, Recueil des actes de Charles de Blois et de Jeanne de Penthièvre, duc et duchesse de Penthièvre, 1364-1394, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1996, no 63n).

9 Ibidem, nos 95, 97, 152, 153, 156, 161n, 166.

10 Jones, Michael, « The Ransom of Jean de Bretagne, count of Penthièvre: an aspect of English Foreign Policy, 1386-1388 », Bulletin of the Institute of Historical Research, t. xlv, 1972, p. 7-26, réimp. dans The Creation of Brittany: a late medieval state, London, Hambledon Press, 1988 (édition employée ici), p. 266.

11 Jones, Michael, Recueil des actes de Charles de Blois…, op. cit., n181.

12 Arch. nat., J 241/45 ; Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 165, n° 18, E 165, n° 19 et E 6, n° 3 ; publication notamment dans Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, t. ii, contenant les preuves et pièces justificatives, col. 512-514, et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de la Bretagne, t. i, Paris, Osmont, 1742, réimp. Paris, Éd. du Palais-Royal, 1974, col. 1590-1592.

13 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 513 et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. i, col. 1592.

14 Au contraire, il bloque tant qu’il le peut toute velléité anglaise d’accueillir favorablement une demande de libération des otages (Jones, Michael, « The Ransom », art. cit., p. 267 et Recueil des actes de Charles de Blois…, op. cit., n° 250).

15 À ce sujet, Michael Jones propose une intéressante suggestion : Jeanne, en échange de son soutien à Jean IV lors de son retour en 1381, a pu solliciter son aide pour la libération de ses fils (ibidem, p. 27, n. 52).

16 Le décès de Guy, le 22 janvier 1385 (ibid., « The Ransom », art. cit., p. 268, n. 2), renforce ensuite encore la solitude de Jean de Bretagne, qui traverse visiblement une phase de dépression dans la seconde moitié des années 1380 (Froissart, Jean, Chroniques, Collection des chroniques nationales françaises écrites en langue vulgaire du treizième au seizième siècle, éd. Buchon, Jean-Alexandre, t. x, Paris, Verdière-Carez, 1825, p. 310).

17 La question est discutée au conseil le 4 octobre 1384 (Jones, Michael, Recueil des actes de Jean IV, duc de Bretagne, t. ii, Paris, C. Klincksieck, 1983, n° 521) et la mainmise est par la suite effective.

18 C’est une des raisons principales, jointe à la volonté de causer du tracas à Jean IV, qu’il déteste (Henneman, John Bell, Olivier de Clisson ou la société politique française sous les règnes de Charles V et de Charles VI, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2011, p. 174-175).

19 Jeanne de Penthièvre meurt le 10 septembre 1384. Dès le 6 janvier 1385, Jean de Bretagne fait d’Olivier de Clisson son lieutenant pour toutes ses terres (Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 511) ; le 18 janvier, Rolland de Coestelles, chanoine de Nantes, reçoit de Richard II un sauf-conduit pour sa venue en Angleterre, afin de négocier la libération des otages (Rymer, Thomas, Foedera, conventiones, litterae et cujuscumque generis acta publica, t. vii, 3e éd. Londres, Jean Néaulme, 1742, p454 ; Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 677-678 et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 482-483). Le laps de temps écoulé est trop court pour qu’il y ait improvisation de la part de Clisson, qui réalise son projet dès le décès de Jeanne de Penthièvre. Celle-ci pouvait être en effet un obstacle : une union entre son fils aîné et la fille d’un des principaux combattants montfortistes n’aurait probablement pas été agréée, une hypothèse que valide Erika Graham-Goering, que je remercie pour notre échange à ce sujet.

20 Bibl. mun. de Nantes, fonds Bizeul, ms 1692, n° 3 ; Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 482-483. Le duc de Bretagne s’en plaint, rappelant que c’est à lui de garder les terres de ses vassaux (Jones, Michael, Recueil des actes de Jean IV…, op. cit., t. ii, n° 551 et Henneman, John Bell, Olivier de Clisson…, op. cit., p. 174).

21 Le Conseil royal anglais octroie régulièrement sa protection aux envoyés venus discuter de cette libération (Jones, Michael, La Bretagne ducale : Jean IV de Montfort entre la France et l'Angleterre : 1364-1399, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 1998, p. 118. Michael Jones a aussi mis en évidence un « lobby anti-breton », actif en Angleterre durant ces années 1380, d’où les facilités qu’ont les négociateurs de Clisson (Ducal Brittany, 1364-1399. Relations with England and France during the reign of Duke John IV, Oxford, Oxford University Press, 1970, p. 102-103 et La Bretagne ducale : Jean IV, p. 118-121).

22 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 528 et pour l’échéancier des paiements, Jones, Michael, « The Ransom », art. cit., p. 274-275.

23 De manière générale, celle-ci s’investit beaucoup pour ses frères, après le décès de leur mère : outre son souhait affiché de rendre hommage pour son frère au duc de Bretagne (même si celui-ci le refuse), elle s’occupe de leur libération, ainsi que de leurs intérêts financiers et seigneuriaux (Moranvillé, Henri, Journal de Jean Le Fèvre, évêque de Chartres, chancelier des rois de Sicile Louis Ier et Louis II d'Anjou, t. i, Paris, A. Picard, 1887, p. 56, 68, 74-75, 92, 330-333, 366-367).

24 Le « fait de Jehan de Bretaigne » est régulièrement évoqué entre Marie de Blois et Olivier de Clisson, au conseil ducal angevin ou avec des membres du conseil royal français, en 1385-1387 (Moranvillé, Henri, Journal de Jean le Fèvre, op. cit., t. i,  p. 89, 330, 339, 340, 468). Marie apporte en outre sa propre contribution financière, en mettant en gage certaines de ses terres (ibidem, p. 340 et 417). Concernant l’avancée des discussions en Angleterre, voir le détail donné par Michael Jones, « The Ransom… », art. cit., p. 269-271, La Bretagne ducale : Jean IV, op. cit., p. 121-123 et Ducal Brittany, 1364-1399, op. cit., p. 99-105 ; sur les menées d’Olivier de Clisson, voir les travaux de John Bell Henneman, Olivier de Clisson…, op. cit., p174-176 et 186-188.

25 La dispense pour celui-ci est accordée par le pape durant l’été 1385 et réglée par la duchesse d’Anjou (Moranvillé, Henri, Journal de Jean le Fèvre, op. cit., t. i, p312 et 317).

26 Henneman, John Bell, Olivier de Clisson, op. cit., p. 174-175. L’intervention de Clisson en vue de faire libérer Jean de Bretagne n’est cependant qu’une des raisons de ce geste. Jean IV souhaitait par ailleurs se débarrasser d’un personnage qu’il détestait, tout en contribuant ainsi à faire échouer les projets d’attaque maritime française en Angleterre, ce qui aurait pu lui permettre de rentrer en grâce auprès des Anglais devenus méfiants à son égard (Henneman, John Bell, Olivier de Clisson, op. cit., p181-186).

27 Sur l’ensemble de l’affaire, ibidem, p. 180-187.

28 Bibl. mun. de Nantes, ms 1696, n° 12, indiqué par Michael Jones, Recueil des actes de Jean IV, op. cit., t. ii, n° 624 et notamment publié par Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 678-680 et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 540-541.

29 Arch. nat., J 243/72 ; Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 685-688 et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 552-555. Voir aussi Jones, Michael, « The Ransom », art. cit., p. 263-282 et Henneman, John Bell, Olivier de Clisson, op. cit., p187-192.

30 D’autant que l’affaire va pour le mieux : Jean a déjà quitté l’Angleterre. Il est à Calais, en avril 1387 (Moranvillé, Henri, Journal de Jean le Fèvre, op. cit., t. i, p340). Quant à Clisson, il parvient même à obtenir des ducs de Bourgogne et de Berry qu’ils soient garants du paiement de la rançon (Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. ii, col. 684 et Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 528 ; Henneman, John Bell, Olivier de Clisson, op. cit., p. 186-187).

31 Moranvillé, Henri, Journal de Jean le Fèvre, op. cit., t. i, p478-479 ; Chronique du religieux de Saint-Denys contenant le règne de Charles VI de 1380 à 1422, Bellaguet, Louis éd., t. i, réed. Paris, CTHS, 1994, livre i, p. 498, tous repris par les auteurs bretons. Je signale à ce sujet une erreur de dom Lobineau : il estime que Moncontour est impossible, au motif que Jean se trouve alors à Angers auprès de sa sœur. C’est inexact : Jean ne rejoint sa sœur qu’au printemps (Moranvillé, Henri, ibidem, p516).

32 Contrairement au portrait brossé par d’Argentré (voir note 2). Je remercie Michael Jones des observations complémentaires qu’il m’a données sur ce point.

33 Avec des préliminaires tendus (Jones, Michael, Recueil des actes de Jean IV…, op. cit., t. ii, nos 795, 797-798). Pour la paix en elle-même, voir Arch. nat., JJ 142, f° 179-180 ; Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne…, op. cit., t. ii, col. 757-760 ; Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 581-585.

34 Cela se voit sur son signet dès cette même année 1392 (Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 20 J 1).

35 En juin 1392, Jean IV se plaint des officiers du comte de Penthièvre, qui ont cherché à empêcher la levée d’impôts par les officiers ducaux, à La Roche-Derrien (Jones, Michael, Recueil des actes de Jean IV…, op. cit., t. ii, no 818). Chicaneries et autres lui font reprocher au roi d’Angleterre la libération de Jean de Bretagne, qui est à « grand damage de lui et de son paiis », ibidem, no 958.

36 Ibid., nos 962, 968, 983A et B, 985, 988.

37 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 633-643, indiqué par Michael Jones, Recueil des actes de Jean IV…, op. cit., t. ii, nos 996 et 1003. Pour la ratification, voir Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 167, n° 15, Lobineau, Guy-Alexis, dom, Histoire de Bretagne…, op. cit., t. ii, col. 790-791 et Morice, Pierre-Hyacinthe, ibidem, t. ii, col. 655-656.

38 Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 217, n° 11 et Michaux, Adrien Joseph, Chronologie historique, op. cit., p. 266. Il rend aveu au roi Charles VI le 31 janvier 1399 pour ses terres en Thiérache (Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 90, n° 6). Je renouvelle mes remerciements à Michael Jones pour avoir attiré mon attention sur cet acte.

39 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. i,  p. 504 ; Couffon, René, « Nécrologe des Jacobins de Guingamp », Bulletin et mémoires de la société d’émulation des Côtes-du-Nord, t. lvii, 1925, p59.

40 Duchesne, André, Histoire de la maison de Chastillon sur Marne, avec les généalogies et armes des illustres familles de France et des Pays-Bas lesquelles y ont été alliées, Paris, S. Cramoisy, 1621, p. 249.

41 Concernant les enfants puînés du couple : Jean († 1454), sire de L’Aigle, succède à Olivier comme vicomte de Limoges et sire d’Avesnes en 1433, et prend en 1437 le titre de comte de Périgord, acquis auprès de Charles d’Orléans (Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques,  E 642). Charles († 1434) est seigneur d’Avaugour et père de Nicole, elle-même vicomtesse de Limoges (1454-1480), suite à son oncle Jean. Marguerite († 1414) est mariée à Jacques II de Bourbon, comte de la Marche (1393-1438). Jeanne († 1459), enfin, épouse d’abord Robert de Dinan, baron de Châteaubriant († 1430), puis son cousin Jean III de Harpedanne, sire de Belleville (1434-1462) (ibid., respectivement p. 256-259 et p. 249-251).

42 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. i, col. 836 ; Jones, Michael, « Marguerite de Clisson, comtesse de Penthièvre, et l’exercice du pouvoir », dans Femmes de pouvoir, femmes politiques durant les derniers siècles du Moyen Âge et au cours de la première Renaissance, Bousmar, Éric, Dumont, Jonathan, Marchandisse, Alain, Schnerb, Bertrand (éd.), Bruxelles, De Boeck, 2012, p. 363, n. 50.

43 Blanchard, René, Lettres et mandements de Jean V, duc de Bretagne, de 1402 à 1442, t. i, Nantes, Société des bibliophiles bretons, 1889, n° 7.

44 Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 733.

45 Les premières négociations ont sans doute lieu en juin 1405, (Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur : le prince meurtrier, Paris, Payot, 2005, p. 184). Olivier est un beau parti, d’après Michel Pintouin : « qui inter omnes barones Britanie dicior reputabatur » (« lui qui entre tous les barons de Bretagne était réputé le plus riche »), Chronique du religieux de Saint-Denys…, op. cit., t. ii, livre iii, p396. Quant à Marguerite, « si estoit moult haulcee et eslevee de ce que le comte son fils avoit espousé la fille de Bourgoigne », commente Pierre Le Baud (Histoire de Bretagne avec les chroniques des maisons de Vitré et de Laval, Paris, G. Alliot, 1638, p. 442).

46 Cette union reste non consommée : Jeanne a moins de douze ans à sa mort (Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur, op. cit., p185).

47 Ibidem, p184-185.

48 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 836 ; Pocquet du Haut-Jussé, Barthélemy-Amédée, Deux féodaux : Bourgogne et Bretagne (1363-1491), Paris, Boivin et Cie éditeurs, 1935,p. 40, repris par Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur, op. cit., p185.

49 Il fréquente soit Paris et sa région, soit les états de Bourgogne (Petit, Ernest, Itinéraires de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur, ducs de Bourgogne (1363-1419) d'après les comptes de dépenses de leur hôtel, Paris, Imprimerie nationale, 1888, p. 370, 374, 376, 384, 387 et 390-391).

50 Notamment les tournois (Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur…, op. cit., p. 500 et 502-503).

51 Il est présent lors du fameux développement de la théorie du tyrannicide, suite au meurtre de Louis d’Orléans (1407) (Petit, Ernest, Itinéraires de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur, op. cit., p. 250-251).

52 Schnerb, Bertrand, Jean sans Peur…, op. cit., p. 306.

53 Id., « Des Bretons à la cour de Bourgogne sous les deux premiers ducs de la Maison de Valois (du milieu du xive au début du xve siècle) », dans Le prince, l’argent, les hommes au Moyen Âge. Mélanges offerts à Jean Kerhervé, Cassard, Jean-Christophe, Coativy, Yves, Gallicé, Alain et Le Page, Dominique (dir.), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 462.

54 Il se distingue en région parisienne avec le comte de Nevers quand, fatigués des excès des gens de guerre, des paysans en viennent à la quasi-rébellion. Tous deux s’emploient alors à calmer la foule par le verbe, sans recourir aux armes (Chronique du religieux de Saint-Denys…, op. cit., t. ii, livre iv, p514). Il est présent à Bourges entre le 11 juin et le 13 juillet 1412 (Guenée, Bernard, « Le voyage de Bourges (1412). Un exemple des conséquences de la folie de Charles VI », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1996, vol. 140/2, 1996, p. 787).

55 Il est retenu le 5 décembre 1418 comme homme d’armes avec 100 hommes de trait (Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 987). Ceci étant, il accompagne déjà le dauphin depuis quelques temps : il est présent quelques mois plus tôt au siège de Sully-sur-Loire (Les chroniques du roi Charles VII, Courteault, Henri et Celier, Léonce (éd.), op. cit., p. 88).

56 Bourdeaut, Arthur, « Jean V et Marguerite de Clisson. La ruine de Châteauceaux », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de la Loire-Inférieure, t. 54,‎ 1er semestre 1913, p. 337-344.

57 Morice, Pierre-Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 966.

58 Avec une pension annuelle de 500 livres (ibidem, t. ii, col. 896).

59 Dont son absence de soutien face à la maison de Bourgogne (Cosneau, Émile, Le connétable de Richemont : Arthur de Bretagne : 1393-1458, Paris, Hachette, 1886, p. 53). Et au-delà, la lettre de soutien du dauphin aux Penthièvre énumère toute une série d’accusations ou de soupçons contre Jean V : l’« abstinence de guerre » contre les Anglais lors de leur descente en Normandie ; un supposé accord secret, toujours avec les Anglais (que le duc est accusé de ravitailler), pour dépecer le royaume et « pour en débouter de tout mon dict seigneur [le roi] et nous » ; le blocage d’aides armées espagnole et écossaise ; la production de fausse monnaie ; et de manière générale, une aide apportée aux sujets rebelles (Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 640 et publication, ibidem, p. 494-497, appendice xii).

60 La responsabilité du dauphin est indiscutable : après l’enlèvement, il déclare que Jean V et Richard sont ses prisonniers et ordonne d’en faire bonne garde (ibidem, p494-497, appendice xii). Dans l’entourage princier, le principal incriminé est Guillaume Louvet, président du parlement de Provence (Trevedy, Julien, « Attentats des Penthièvre contre le duc Jean V (1420-1422) », Revue de Bretagne et de Vendée, t. xl, 1908/2, p. 110, n. 5). Tanguy du Châtel, déjà auteur de l’assassinat de Jean sans Peur, en a aussi été chargé, mais a toujours clamé son innocence (Cassard, Jean-Christophe, « Tanguy du Chastel, l’homme de Montereau », Le Trémazan des du Chastel, du château fort à la ruine, dans Coativy, Yves (dir.), Brest/Landunvez, Centre de Recherche Bretonne et Celtique/Association SOS Château de Trémazan, 2006,  p. 102).

61 Ce rapt et ses suites militaires ont été maintes fois narrés. Voir notamment Le Baud, Pierre, Histoire de Bretagne…, op. cit., p453-457 ; Bouchart, Alain, Les grandes cronicques de Bretaigne, nouv. éd., Rennes, Caillière, 1876, f° 175 v-178 v ; Argentré, Bertrand d’, L’Histoire de Bretaigne, op. cit., p. 735-741 ; Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne…, op. cit., t. i, p543-549 ; Morice, Pierre-Hyacinthe, Histoire de Bretagne…, op. cit., t. i, p473-479 ; La Borderie, Arthur Le Moyne de [continuée par Barthélemy-Amédée Pocquet du Haut-Jussé], Histoire de Bretagne, t. iv, (1364-1515), Rennes/Paris, Plihon et Hommay/Picard, 1906, réimp. J. Floch, 1972, p. 196-211 ; Trévédy, Julien, « Attentats des Penthièvre… », art. cit., p. 109-117.

62 Blanchard, René, Lettres et mandements, op. cit., t. iii, Nantes, Société des bibliophiles bretons, 1892, nos 1414, 1417, 1422, 1425n, 1426, 1428, 1431, 1436.

63 Ils soupçonnent que leur condamnation est inévitable, bien que Jean V ait offert son pardon, en échange d’une reconnaissance publique de leur responsabilité par les Penthièvre, (Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne…, op. cit., t. i, p. 550-551 ; Morice, Pierre-Hyacinthe, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, t. i, Paris, Osmont, 1742, réimp. Paris, Éd. du Palais-Royal, 1974, p. 480-481 et Mémoires pour servir de preuves, op. cit., t. ii, col. 1038, initiative qui suscite l’extase d’Arthur de La Borderie : « Ah ! oui ce duc était bien Jean le Bon », Histoire de Bretagne, op. cit., t. iii, p. 213. Ceci étant, les craintes des Penthièvre ne sont pas infondées. D’autres faits tendent à montrer un duc plus vindicatif. Ultérieurement, son acharnement à récupérer ses ravisseurs, jusqu’en Flandre, ne plaide pas pour une personnalité habitée par le pardon.

64 Guillaume, dernier des fils de Jean de Bretagne et Marguerite de Clisson, a été laissé en otage à Jean V et reste captif jusqu’en 1448.

65 Lobineau, Guy-Alexis, Histoire de Bretagne, op. cit., t. i, p. 556.

66 Il obtient de Jacqueline de Bavière, comtesse de Hainaut, la possibilité de lever pendant six années une taxe de 6 deniers par lot de vin ou de bière, et ce afin de contribuer aux travaux de fortifications ; une taxe ensuite prorogée par Philippe de Bourgogne (1423) (Michaux, Adrien Joseph, Chronologie historique, op. cit., p. 290-292).

67 Ibid., p. 291.

68 Stroobant, Corneille, « Services religieux fondés par Jeanne de Lalaing, comtesse de Penthièvre, dans l’église de Quiévrain », Annales de l’Académie d’Archéologie de Belgique, t. 12, 1855, p. 224-231.

69 Fille de Simon de Lalaing, seigneur de Quiévrain et d’Écaussinnes, et de Jeanne (ou Isabeau) de Barbançon, fille de Jean de Barbançon, seigneur de Jeumont, et de Jeanne du Chasteler (Brassart, Félix, Histoire et généalogie des comtes de Lalaing, Douai, A. d’Aubers, 1854, p. 7). Olivier est ainsi lié à l’importante famille des Croy : Marie, sœur de Jeanne, est l’épouse de Jean de Croy, comte de Chimay, grand bailli de Hainaut.

70 Waudru est la sainte patronne des Avesnois : le choix de ce prénom semble attester d’une dévotion pour celle-ci. Marguerite rappelle, bien sûr, Marguerite de Clisson.

71 À ce sujet, je signale une étrangeté. L’épitaphe d’Olivier de Bretagne, qui figurait sur son tombeau, en la collégiale Saint-Nicolas d’Avesnes-sur-Helpe, a été publiée par Corneille Stroobant, « Services religieux fondés par Jeanne de Lalaing… », art. cit., p. 224. Le tombeau ayant été détruit en 1793, il doit le texte à une copie, mais la titulature est invraisemblable pour Olivier, qualifié de « comte de Painthevre, et de Perigort, viscomte de Limoges, seigneur d’Avesnes, heritier de la duché de Bretaigne, etc. [sic] ». Or, il n’a jamais été comte de Périgord, puisque cette seigneurie est acquise après son décès par son frère Jean de L’Aigle. De deux possibilités, l’une : ou le facteur du tombeau a repris la titulature de Jean, en la pensant identique pour les deux frères ; ou cette épitaphe a été ultérieurement modifiée. À titre personnel, je penche pour la première option. Toutefois, en l’absence de toute certitude, il est prudent de ne pas extrapoler outre mesure sur la mention « heritier du duché de la Bretagne ».

72 Il s’est engagé à rembourser les 60 000 francs qu’il a coûtés à son beau-père, d’où ses emprunts ultérieurs, au sire de Coucy ou à Jacques de Bourbon (Arch. dép. de Loire-Atlantique, E 217, nos 6, 8 et 9).

73 Evans, Claude, L'abbaye cistercienne de Bégard des origines à 1476 : histoire et chartes, Turnhout, Brepols, 2012, nos 104 et 105 (1390 et 1392) et Jones, Michael, Recueil des actes de Charles de Blois, op. cit., n° 160. Peut-être est-il aussi l’auteur des dispositions mises en œuvre après son décès : une vigile des morts, quatre messes et deux cierges ardents sont prévus chaque jour à Notre-Dame de Lamballe (Blanchard, René, Lettres et mandements, op. cit., t. iii, n° 1424).

74 Telles la cession de Nouvion, Bergues et Barzy à Jean de Luxembourg, comte de Ligny (1429) ou la cession de la terre de Guise (1432) (Melleville, Maximilien, Dictionnaire historique du département de l’Aisne, t. ii, éd. fac-similé, Paris, Le livre d’histoire, 2000, p. 81).

75 Voir infra pour Limoges.

76 Sénéchalat de Lamballe octroyé à Mathurin Le Maître (1417) (Arch. dép. des Côtes-d’Armor, 1 E 94 ); 120 livres de gages annuels pour Alain de La Motte, capitaine de Lamballe (1414) (ibidem, 1 E 97) ; paiement des dépenses faites par les procureurs envoyés aux plaids de Rennes (1416) (ibidem, 1 E 418).

77 Don de 20 livres tournois à son écuyer Jean Bourdon (1419) (ibidem, 1 E 101).

78 Un marché est conclu le 9 janvier 1418 pour la reconstruction du portail du château de Lamballe (Geslin de Bourgogne, Jules et Barthélémy, Anatole de, Anciens évêchés de Bretagne. Histoire et monuments, t. vi, Paris, Dumoulin, 1879, p. 241).

79 En 1430, il reconnaît n’avoir aucun droit dans « la Franche-Haye de Fontaine-au-Bos » appartenant à Guillaume de Lalaing, seigneur d’Hordain, et que s’il y a chassé, c’est avec le bon plaisir de ce dernier (Michaux, Adrien Joseph, Chronologie historique…, op. cit., p. 292).

80 S’il se déplace afin de prêter hommage pour Avesnes, c’est dans le cadre d’une succession. Il n’est en revanche pas avéré qu’il soit jamais allé à Limoges, terre pour laquelle il ne subsiste d’ailleurs qu’un seul acte émis directement par lui (ce qui est fort peu, même en prenant en compte les pertes d’archives) (Arch. dép. de Haute-Vienne, 1 E 1/159). Les autres sont établis en son nom par ses officiers (ibidem, 1 E 1/304).

81 Telle l’intervention sur la possession des terres de Saint-Bonnet[-La-Rivière], Chabrignac et Puyphelip par Audoin de Pérusse (1399) (ibidem, 1 E 1/304).

82 Il entretient la lutte contre les tentatives ducales de prélever l’impôt sur ses terres ou dans ses ports, en particulier le havre du Légué (Blanchard, René, Lettres et mandements…, op. cit., t. i, n° 97).

83 Le vicomte est normalement bénéficiaire de privilèges, telle l’aide aux quatre cas, mais cela fait longtemps qu’il n’en dispose plus. Limoges a profité des changements successifs de seigneur au gré des cessions et reconquêtes entre Anglais et Français, pour se faire confirmer ses privilèges, sans rappeler ceux du vicomte (Ducourtieux, Paul, Histoire de Limoges, Limoges, H. Ducourtieux, 1935, réimp. Marseille, Lafitte, 1975, p. 90-91 et 93).

84 BnF, Collection Doat, t. 246, p. 29, 89 et 205. La sentence royale finale du 28 août 1415 été publiée par Louis Guibert, Documents, analyses de pièces, extraits et notes relatifs à l’histoire municipale des deux villes de Limoges, t. ii, Limoges, H. Ducourtieux, 1902, p. 77-80, n° cccclxxxii.

85 Pour plus de détails, voir Ducourtieux, Paul, Histoire de Limoges…, op. cit., p. 94-95. À noter que Pradeau n’était sans doute pas seul à fomenter ce coup. Un parti vicomtal semble avoir existé à Limoges dans les années 1420-1430 (Tricard, Jean, « Une ville et son traître : Limoges et l’affaire Gaultier Pradeau (xve-xxe siècle) », dans Bourin, Monique (éd.), Villes, bonnes villes, cités et capitales. Études d’histoire urbaine (xiie-xviiisiècle) offertes à Bernard Chevalier, Tours, Publications de l’Université de Tours, 1989, p. 215-216).

86 Guibert, Louis, Documents…, op. cit., p. 121.

87 Il veille constamment à faire prêter hommage et serment de fidélité. Pour des actes émis par lui en tant que lieutenant d’Olivier, voir Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 733, 766, 789, 862 et 878.

88 Des préventions existent à l’égard du reste de la fratrie. Olivier l’évoque dans sa donation de la vicomté, quand il promet à Jean de le défendre « envers et contre touz, et expressement de noz autres freres et suer et de touz autres aiant droit et cause d’eulx » (Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 642). Est-ce la crainte que les cadets ne disputent la vicomté à Jean, déjà seigneur de L’Aigle et de Ségur alors que Charles n’a qu’une terre et Guillaume (toujours captif de Jean V) aucune ? Ou la crainte que les Montfort n’utilisent Guillaume pour appuyer une potentielle revendication et semer le trouble dans la famille ?

89 Arch. dép. des Pyrénées-Atlantiques, E 642 et publication partielle par Gustave Clément-Simon, Documents sur l’histoire du Limousin, tirés des archives du château de Bach, près Tulle, Brive, Imprimerie Roche, 1904, p. 184-188, n° xxxv.

90 Je renouvelle mes remerciements à Christian Rémy, qui m’a très gentiment transmis ses informations sur les officiers de la vicomté de Limoges afin que je puisse les confronter aux miennes et compléter celles-ci.

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Pour citer cet article

Référence papier

Marjolaine Lémeillat, « Jean et Olivier de Bretagne, comtes de Penthièvre, vicomtes de Limoges (1384-1433) »Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, 126-2 | 2019, 69-83.

Référence électronique

Marjolaine Lémeillat, « Jean et Olivier de Bretagne, comtes de Penthièvre, vicomtes de Limoges (1384-1433) »Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest [En ligne], 126-2 | 2019, mis en ligne le 01 janvier 2022, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/abpo/4502 ; DOI : https://doi.org/10.4000/abpo.4502

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Auteur

Marjolaine Lémeillat

doctorante en histoire médiévale, université de Paris-Est-Créteil, Centre de recherche en histoire européenne comparée

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