Saint-Paul – La Poudrière
Texte intégral
1La poudrière se trouve en bordure du chemin du Tour des Roches, entre Grande Fontaine et l’étang de Saint-Paul (fig. 1).
2Elle figure parmi les bâtiments les plus anciens de La Réunion. Construite en 1724, elle a été utilisée comme magasin à poudre jusqu’à la fin du xixe s., avant le transfert des explosifs hors du quartier s’urbanisant. Devenu dans le courant du xxe s. un magasin de stockage, le bâtiment a été abandonné dans les années 1970.
3Placée au pied des rampes de Bellemène, alors à l’écart de la ville, elle est constituée du bâtiment de stockage de 7,5 m de long et de 4,65 m de large, à l’intérieur. Les murs, épais de 1,30 m, sont percés par des évents, une porte au centre du pignon nord-ouest et une fenêtre actuellement bouchée à l’opposé. La salle voûtée est couverte par un toit à deux pans. Une enceinte, haute de 2,60 m et ouverte au sud-ouest, renforce le dispositif de défense, formant une cour étroite de 1,90 m de large autour de la poudrière.
- 33 FR ANOM 23DFC0201C : Plan de la poudrière de St. Paul. 1822, ingénieur en chef Gaubin.
4Un plan du xixe s. montre un corps de garde et une guérite, aujourd’hui disparus, construits au sud-ouest de l’enceinte33. Par ailleurs, certains éléments historiques et architecturaux permettent de démontrer que le bâtiment a subi plusieurs transformations, au niveau de ses ouvertures et de sa toiture passée de quatre à deux pans (Fontaine 2009, p. 15 et 17).
- 34 Équipe de terrain et de post-fouille : Thierry Cornec , Joël Cornec, Morgane Legros (étude des mobi (...)
5La poudrière, protégée au titre des monuments historiques depuis 1994, a bénéficié d’une étude historique détaillée en 2009 (Fontaine 2009) et d’une première intervention archéologique légère en 2013 (Jacquot, Motte 2017), en prémices d’une première campagne de restauration. De nouvelles dégradations ont conduit à la prescription d’un diagnostic en 2018, en amont des travaux nécessaires à la présentation de l’édifice au public (Cornec 2019). En plus d’une campagne de sondages complémentaires à l’extérieur, cette opération a pu explorer l’intérieur du bâtiment et de la cour, et étudier partiellement les élévations34 (fig. 2).
Fig. 2 – Plan général de la poudrière, des sondages et des nouveaux vestiges observés
DAO : T. Cornec (Inrap) ; fond topographique : F. Cadjee ; relevés : Outre-mer topographie.
L’extérieur
6Les cinq sondages réalisés à l’extérieur n’ont toujours pas permis de repérer le corps de garde, probablement détruit par la construction d’un bâtiment technique repéré en sondage 2, ou la guérite, qui devait sans doute consister en une installation légère.
- 35 Le principe du paratonnerre a été découvert au milieu du xviiie s. par B. Franklin, soit postérieur (...)
7Un aménagement inédit a pu être découvert au nord-est de la poudrière. Il s’agit du conduit du paratonnerre encore en place sur la toiture du bâtiment. Cette structure consiste en un canal maçonné de briques, étanche, comblé par des charbons de bois et/ou des galets de pierre ponce, au sein duquel est installé le conducteur : une barre de fer, remplacée par un filin de cuivre dans la partie nord. Ce conduit isolant est aménagé selon un plan en demi-cercle, entre le pied du gouttereau nord-est de la poudrière et la limite nord de la parcelle. Il est postérieur au mur d’enceinte35 (fig. 3 et 4).
L’intérieur
8Sous le sol de galets récemment mis en place dans la cour, un vestige ténu de sol damé a pu être dégagé dans le sondage 6. Il est coupé par l’installation du paratonnerre mais couvre le glacis extérieur du mur de la poudrière.
9À l’intérieur du bâtiment, sous le plancher démonté en amont de l’intervention, deux sondages ont pu être pratiqués pour explorer la stratigraphie. Au-dessus du substrat, atteint à environ 20 cm de profondeur, et d’un niveau damé en lien avec à la construction des maçonneries, le sol de mortier rose mis en place sur un solide radier a pu être observé. Il correspond, sans aucun doute, au sol fini d’origine, au vu de ses rapports avec les parements et les enduits (fig. 5).
Les élévations
10Afin d’étudier les éventuelles traces de reprises de maçonneries, les enduits ont pu être enlevés à l’intérieur du bâtiment, sur le pignon sud-est autour de la fenêtre obstruée, et à l’extérieur, autour de la porte (fig. 6).
Fig. 6 – Reprises des ouvertures observées dans les élévations intérieures et extérieures
DAO : T. Cornec (Inrap) ; cliché et redressement : P. Brial (Outre-mer topographie).
11La fenêtre, encadrée de piédroits et d’une allège, a clairement été percée a posteriori au centre de la maçonnerie du pignon. Son rebouchage a précédé la mise en place d’un évent carré, au dessus. En pied de mur, la solive maçonnée est construite sur le sol de mortier et par-dessus les enduits d’origine du parement.
12Si cette observation partielle a pu mettre en évidence plusieurs réaménagements, ils concernaient uniquement la transformation des ouvertures. Aucun indice de la refonte majeure de la toiture n’a pu être discerné dans ce pignon.
13La porte du bâtiment a aussi clairement été modifiée. Une reprise nette de l’appareil est visible, à l’extérieur et à l’intérieur de l’édifice. Les cartouches portant les dates 1724 et 1857 peuvent indiquer à quelle époque ces transformations sont intervenues.
14Cette opération de diagnostic a pu mettre en exergue plusieurs éléments inédits, améliorant notre connaissance, uniquement historique, de la poudrière. Si la découverte du conduit du paratonnerre peut rester anecdotique, c’est celle du sol d’origine du bâtiment et surtout les traces des nombreuses reprises et transformations des ouvertures qui retiennent l’attention. Elles documentent l’étude historique, complètent les données architecturales et démontrent l’évolution complexe du monument.
Notes
33 FR ANOM 23DFC0201C : Plan de la poudrière de St. Paul. 1822, ingénieur en chef Gaubin.
34 Équipe de terrain et de post-fouille : Thierry Cornec , Joël Cornec, Morgane Legros (étude des mobiliers) ; moyens techniques : STROI (mécanisation) et OMT (topographie).
35 Le principe du paratonnerre a été découvert au milieu du xviiie s. par B. Franklin, soit postérieurement à la construction de la poudrière.
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Fig. 1 – Vue générale de la poudrière depuis le sud |
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Crédits | Cliché : T. Cornec (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,1M |
Titre | Fig. 2 – Plan général de la poudrière, des sondages et des nouveaux vestiges observés |
Crédits | DAO : T. Cornec (Inrap) ; fond topographique : F. Cadjee ; relevés : Outre-mer topographie. |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 342k |
Titre | Fig. 3 – Vue du conduit du paratonnerre dans la cour |
Crédits | Cliché : J. Cornec (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,2M |
Titre | Fig. 4 – Vue du conduit du paratonnerre à l’extérieur du bâtiment |
Crédits | Cliché : J. Cornec (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,5M |
Titre | Fig. 5 – Vue du sol à l’intérieur du bâtiment |
Crédits | Cliché : J. Cornec (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 915k |
Titre | Fig. 6 – Reprises des ouvertures observées dans les élévations intérieures et extérieures |
Crédits | DAO : T. Cornec (Inrap) ; cliché et redressement : P. Brial (Outre-mer topographie). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/37960/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 463k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Thierry Cornec, « Saint-Paul – La Poudrière » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Océan Indien et TAAF, mis en ligne le 01 septembre 2020, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/37960
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