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Le chief tranché

Têtes coupées des saints au Moyen Âge.
Martyrs, miracles, reliques

Edina Bozoky
p. 133-168

Résumés

Cet article présente le thème des têtes coupées des saints sous trois aspects. Les miracles de têtes coupées des martyrs attestent la force vivante qui y réside : la tête peut être réunie au corps sans traces ; elle rend une source guérisseuse ; elle continue à parler ; et, enfin, certains saints portent leur tête vers leur lieu d’inhumation. Les péripéties de la tête coupée de Jean Baptiste sont l’objet de plusieurs récits d’invention et de translation en Orient et en Occident. Quant à l’enchâssement des reliques de têtes dans des reliquaires, la diversité des solutions est remarquable, allant des chefs- et bustes-reliquaires « parlants » aux crânes habillés de tissus.

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Texte intégral

1Le thème des têtes coupées est omniprésent dans les légendes hagiographiques et se matérialise par les chefs-reliquaires, sans parler des représentations figuratives des scènes de martyres. Dans le cadre d’un article, il n’est possible que d’effleurer les divers aspects de ce thème, allant de la décollation des saints à l’exposition des reliques de tête dans des reliquaires de formes variées.

  • 1 Baudouin de Gaiffier, « La mort par le glaive dans les Passions des martyrs », p. 75.
  • 2 Alan Thacker, « Membra Disjecta : The Division of the Body and the Diffusion of the Cult »,.
  • 3 Abbon de Fleury, Vita S. Eadmundi regis Anglorum et martyris, PL 139, col. 507-520.
  • 4 Vita prior S. Adalberti, § 30 ; cf. Geneviève Bührer-Thierry, « Autour du martyre de saint Adalbert (...)

2Dans un grand nombre de Passions des martyrs chrétiens, c’est la décapitation qui met fin aux tortures auxquelles ils résistent longtemps, grâce à des interventions célestes. Les auteurs des légendes pensaient probablement « que le moyen le plus sûr de donner la mort était la décapitation », même s’ils ne le formulaient pas expressément1. Dans certains cas, les bourreaux ont séparé le corps et la tête pour empêcher qu’ils soient réunis pour une inhumation décente. Le corps du roi de Northumbrie, Oswald, tué en 642 à la bataille contre Penda, roi païen de Mercie, fut coupé en pièces ; sa tête et ses bras furent fichés sur des poteaux comme des offrandes de sacrifice, sur l’ordre du roi Penda2. Selon sa Passion, écrite par Abbon de Fleury (985-987), Edmond, roi d’Est-Anglie, fut tué en 869 par les Danois. Ceux-ci l’ont décapité et ont caché sa tête dans la forêt pour priver le roi d’une sépulture décente. Le peuple qui se mit à la chercher, la retrouva sous la garde d’un loup qui avait empêché les animaux de lui nuire3. Adalbert, évêque de Prague, parti pour christianiser les Prutènes (ancêtres des Prussiens), fut décapité par les païens en 997 qui ont empalé sa tête4. La scène de décapitation est représentée sur l’un des bas-reliefs de la porte de bronze de Gniezno (1170-1180 ; fig. 1).

Fig. 1 : l’exécution de saint Adalbert (portail de la cathédrale de Gniezno).

Miracles de têtes coupées

  • 5 Grégoire le Grand, Dialogues, III, 13.
  • 6 Ivanka Petrovic, « L’hagiographie latine et vernaculaire de l’espace croate des origines à 1350 », (...)
  • 7 Acta martyrii S. Basilei episcopi Amaseae auctore Joanne presbytero Nicomediensi, AASS Apr. III, § (...)
  • 8 Abbon de Fleury, Vita S. Eadmundi regis.

3Plusieurs miracles sont censés attester la force vivante qui résidait dans la tête coupée d’un martyr. La cicatrisation post mortem des blessures d’un saint constitue un signe attestant cette force qui agit dans le corps après la mort. Grégoire le Grand évoque le cas de l’évêque de Péruse Herculan, décapité par Totila, roi ostrogoth, en 547. Quarante jours après sa mort, les fidèles l’exhumèrent pour l’enterrer plus dignement. Son corps était non seulement intact, mais la tête était si parfaitement unie au corps qu’elle ne paraissait pas avoir été coupée et qu’on n’y voyait aucune cicatrice. Ils retournèrent le corps et cherchèrent si l’on pouvait y découvrir quelque trace d’incision ; mais ils le trouvèrent si entier que le fer semblait ne pas y avoir touché5. Plusieurs légendes rapportent la réunion miraculeuse du chef coupé et du corps. Le martyr Chrysogone d’Aquilée, décapité, fut jeté à la mer (fig. 2). Ses restes furent ramenés sur la rive où un prêtre nommé Zoïle (Zoilo) les découvrit. Quand il réunit la tête et le tronc, le corps du martyr se retrouva intact6. On a jeté dans la mer la tête et le corps de Fabius de Césarée (+ v. 303, Mauritanie) ; mais quelques jours plus tard, on les a retrouvés réunis, avec une simple cicatrice sur le cou. Ce fut le sort aussi de Basile, évêque d’Amasée (+ v. 320) ; les deux parties nagèrent jusqu’à Sinope ; lorsqu’elles émergèrent de l’eau, elles furent réunies7. Après l’invention de son corps et de sa tête d’Edmond, roi d’Est-Anglie, on les réunit. Miraculeusement, lors de la translation des restes, on constata l’absence des cicatrices : « le corps du martyr apparut dans tout son éclat sans blessures, semblable à un vivant. Au cou seulement, en signe de martyre, rougit une mince veine, tel un fil d’or »8. Au milieu du xie siècle, quand on réexamina les reliques, on vit avec étonnement que la tête était soudée au corps.

Fig. 2 : Martyre de saint Cgrysogone (eau-forte de Jacques Callot, Les images de tous les saincts et Saintes de l’Année, 1636).

  • 9 Grégoire de Tours, Liber S. Iuliani, § 3, MGH SRM I/II, p. 565-566.
  • 10 Il s'agit de l'actuel Saint-Julien en Corrèze.
  • 11 Grégoire de Tours, Liber S. Iuliani, § 41, p. 581 : Haec sunt certae reliquiae, quas martyr paradis (...)
  • 12 Flodoard, Historia Remensis Ecclesiae, I, 8, MGH SS 13, p. 420 ; trad. M. Lejeune, p. 51-52.

4La tête coupée d’un martyr rend une source guérisseuse. Julien de Brioude, soldat romain devenu chrétien, fut décapité en 304 ; sa tête, avant d’être envoyée à Vienne comme un trophée, elle fut lavée dans une source. L’eau devint guérisseuse, soulageant les aveugles et les malades souffrant de fièvres9. Cette eau était considérée comme une véritable relique : Grégoire de Tours en recueillit le témoignage du prêtre limousin Yrieix (Aridius). Ce dernier avait élevé une basilique en l’honneur de Julien10, et, avec quelques hésitations, il avoua à Grégoire qu’il était allé chercher de l’eau de la source où la tête de Julien avait été lavée, et il en avait rempli une fiole « pour la bénédiction » (pro benedictione), c’est-à-dire pour s’en servir comme eulogie. L’eau s’était transformée en baume (balsamum) ; l’évêque qui venait faire la dédicace de l’église, ne voulut déposer dans l’autel rien d’autre que cette fiole, en déclarant que c’étaient de véritables reliques que le martyr avait imprégnées des vertus paradisiaques11. Dans son Histoire de l’Église de Reims, rédigée entre 948 et 952, Flodoard rapporte un miracle similaire du martyr Oricle (Oriculus), victime des Huns ou des Vandales dans le diocèse de Reims, au village de Senuc. « On lit de lui qu’après avoir été décollé, il lava lui-même sa tête dans une fontaine, et que de son sang il traça avec son doigt le signe de la croix sur une pierre où l’on le voit encore aujourd’hui. […] Une nuit, un paysan du village eut en songe une révélation qui lui ordonnait de couvrir d’un toit où le saint avait lavé sa tête. […] Depuis, l’eau de cette fontaine est en grand renom et guérit ceux qui en boivent de diverses maladies »12.

  • 13 Alia Vita Agrippani, AASS Febr. I, p. 205.
  • 14 Nova legenda Anglie as collected by John of Tynemouth, John Capgrave, and others, 1901, t. II, p. 9 (...)
  • 15 Cf. Louis Servières, Histoire de saint Hilarian, 1895.

5Les légendes attribuent le jaillissement d’une source miraculeuse là où la tête coupée d’un martyr tombe. Une variante de la Vie d’Agrève (Agrippanus), martyr du viie siècle, raconte l’apparition d’une fontaine guérisseuse là où la tête coupée du saint a roulé en bas de la montagne13. Selon sa légende tardive, l’ermite Justinian (vie siècle) vécut sur l’île de Ramsey ; il a été décapité par ses servants. À l’emplacement de cet endroit apparut une source guérisseuse14. Le prêtre Hilarian d’Espalion fut tué et décapité par les Sarrasins en 793 pendant qu’il célébrait la messe à Perse. Il prit sa tête et la lava à la source de Fontsonge qui devint miraculeuse15.

  • 16 Bernard Flusin, Saint Anastase le Perse et l’histoire de la Palestine au début du VIIIe siècle, p. (...)
  • 17 « Histoire de la translation miraculeuse du chef de saint Sever depuis l’Espagne », dans Chartes et (...)
  • 18 Chronique minorite anonyme, insérée dans Chronicon Dubnicense, Historiae Hungaricae Fontes Domestic (...)

6Quelques récits rapportent des miracles spécifiques opérés par des reliques de tête : fuyant l’invasion arabe, des moines palestiniens ont apporté la tête du martyr Anastase le Perse, mort en 628, à Rome où ils ont fondé un monastère. Au début du viiie siècle, la fille d’un évêque d’origine syrienne, torturée par un démon, fut libérée grâce à cette relique. Comme aucune femme n’avait pas le droit d’entrer dans le monastère, son père obtint que l’on apporte le chef du saint à la chapelle de Saint-Jean-Baptiste. D’abord on a prélevé une des dents d’Anastase qu’on suspendit au cou de la fille. Mais le démon résista ; c’est seulement lorsque les moines placèrent la relique du saint sur la tête de la jeune fille, que le démon sortit de son corps au bout de vingt-six jours16. Le récit de la translation du chef de saint Sever, évangélisateur de l’Aquitaine, victime des Vandales vers 409, raconte que lors d’une grave famine, les prélats, religieux, prêtres, comtes et barons se réunirent et prièrent le saint afin de leur conseiller un moyen pour affronter ce fléau. Le saint leur apparut et leur dit de se rendre en Espagne pour y acheter du blé, en y laissant en gage son chef. Les Gascons obtinrent une grande quantité de blé. Après une bonne récolte, ils désirèrent récupérer la relique, mais les Espagnols ne voulaient pas la rendre, car elle produisait beaucoup de miracles. Quand les Gascons étaient sur le point de recourir aux armes pour recouvrer la tête, un 11 octobre, la tête fut ramenée par un ange dans le monastère et déposée sur l’autel17. Selon une légende, en 1345, lors des luttes de roi Louis d’Anjou contre les Tartares, la relique de tête de saint Ladislas disparut de son lieu de conservation à Varad (aujourd’hui Oradea, Roumanie). Après quelques jours, elle fut retrouvée, tout en sueur, comme si elle était vivante et revenue d’un labeur épuisant. Un vieux captif tartare raconta que la victoire sur les Tartares avait été due à saint Ladislas18.

  • 19 Flodoard, Historia Remensis Ecclesiae, I, 6, MGH SS 13, p. 419 ; trad. M. Lejeune, p. 41.
  • 20 Gautier Map, De nugis curialium, I, 19, 1993, p. 99.

7La tête coupée de quelques martyrs se met ou continue à parler. La décapitation n’arrêta pas la psalmodie de saint Nicaise, victime des barbares. Flodoard raconte qu’« au milieu de la psalmodie, tandis qu’il chante d’une voix pieuse ce verset de David : ‘Mon âme s’est abaissée jusqu’à terre’, sa tête tombe tranchée par le glaive, sans que les pieuses paroles expirent dans sa bouche ; car la tête tombant à terre poursuivait, dit-on, cette sentence d’immortalité : ‘Vivifiez-moi, Seigneur, conformément à notre parole (Ps 118, 25)’«19. Dans son ouvrage De nugis curialium (rédigé entre 1181-1194), Gautier Map raconte un miracle censé se passer au xiie siècle. « Les Sarrasins lardaient un clerc de flèches pour qu’il renie sa religion. Un autre, qui l’avait déjà reniée, se tenait à ses côtés et lui reprochait sa stupidité de continuer à croire. À chaque flèche il lui disait : ‘Est-ce bon ?’ Le clerc ne répondait rien. Quand l’autre homme vit sa constance, il lui trancha la tête d’un seul coup, en demandant : ‘Et ça, est-ce bon ?’ La tête coupée, parlant avec ses propres lèvres, répondit : ‘Maintenant c’est bon.’«20.

  • 21 Pierre Saintyves, « De la première idée de la céphalophorie : rite ? image ? ou métaphore ? » ; A.  (...)
  • 22 Jean Chrysostome, Homilia in SS.martyres Juventium et Maximinum, PG 50, I, col. 576 ; avec trad. fr (...)
  • 23 Michael Lapidge, Hilduin of Saint-Denis, The Passio S. Dionysii in Prose and Verse.
  • 24 M. Coens, « Nouvelles recherches sur un thème hagiographique : la céphalophorie » ; Id., « Un fragm (...)

8Parmi les miracles attachés à la tête décapitée des saints, la céphalophorie est la plus extraordinaire. Un nombre important de légendes hagiographiques raconte comment le saint décapité prend sa tête et l’emporte à l’endroit où il veut être inhumé21. L’origine de ce motif est discutée. Il remonte peut-être à un passage de Jean Chrysostome dans son Homélie sur les saints Juventin et Maximin : « Comme des soldats s’adressent avec confiance à leur roi lorsqu’ils peuvent lui montrer des blessures reçues à son service, de même ces saints martyrs, se présentant devant le roi du ciel, avec leur tête entre les mains, obtiennent de Lui tout ce qu’ils désirent »22. La légende la plus connue est celle de saint Denis, premier évêque de Paris (fig. 3). Le motif apparaît dans sa Passion « anonyme » (rédigée entre 778 et 834) que Hilduin, abbé de Saint-Denis développe dans sa Passion (entre 834 et 840). Denis fut capturé par le préfet païen et jeté en prison en compagnie de Rustique et d’Éleuthère. Après avoir subi une série de supplices – gril de fer, bêtes féroces, fournaise – desquels ils réchappent, tous les trois furent décapités à la hache ; mais leur langue continua à confesser le Seigneur. Denis se releva et, guidé par un ange, accompagné d’une armée céleste, il porta sa tête sur une distance de deux milles jusqu’à l’endroit où il se trouvait alors inhumé23. Le motif figure déjà dans la Passion de saint Just, martyr de Beauvais, composé probablement au viie siècle24. Selon ce récit, le jeune garçon avait été décapité pour sa foi. Quand son père et son oncle le retrouvèrent, il était assis, tenant sa tête dans ses mains. Il leur demanda d’inhumer son corps dans une grotte des environs, et d’emporter sa tête à sa mère à Auxerre pour qu’elle puisse l’embrasser. Selon sa légende du ixe siècle, Chéron (Caraunus), d’origine romaine, partit évangéliser la Gaule.

Fig. 3 : Saint Denis céphalophore
(tympan du portail nord de la basilique Saint-Denis).

  • 25 Acta S. Carauni martyris, AASS Maii VI, p. 741-745. Voir sur son dossier hagiographique J.-F. Honet (...)

9Prêchant près de Chartres, il fut décapité par des brigands. Il porta alors sa tête jusqu’au lieu qu’il avait choisi pour y être enseveli. Ses compagnons le retrouvèrent à genoux, tenant sa tête avec le bras droit. Sur son lieu de sépulture, appelé « Sainte Montagne », on fonda plus tard un monastère25.

  • 26 Passio S. Eliphi, AASS Oct. VII, p. 799-816.
  • 27 Ibid., § 11, p. 814.
  • 28 Le souvenir des Carolingiens à Metz au Moyen Âge. Le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul, § 12, p. 24- (...)
  • 29 Notice historique sur Saint Aventin d’Aquitaine, martyr, par un prêtre du diocèse.
  • 30 Albert Le Grand, La Vie des saints de Bretagne armoricaine, p. 157-164.

10Les légendes plus tardives amplifient souvent le motif de céphalophorie, y ajoutant un détail étiologique. Le martyr lorrain saint Elophe (Eliphius) aurait été décapité au ive siècle pour ne pas avoir sacrifié aux idoles païennes. Son culte est attesté en 964 à l’occasion de la translation de ses reliques, mais sa Vie est écrite seulement au xie siècle par un auteur anonyme26, puis par Rupert de Deutz vers 1130. Elophe porta sa tête au sommet d’une colline ; en montant, il s’arrêta dans une sorte de grotte appelée « reculée », puis arrivé en haut, il s’assit sur une pierre blanche qui conserva sa trace27. De même, il aurait fait jaillir une source pour y laver sa tête. Saint Livier, vénéré à Metz, apparaît dans le Petit cartulaire de Saint-Arnoul28, rédigé au xiiie siècle, mais appuyé sur des textes plus anciens. Livier était originaire de la région de Metz. Quand il vit les sévices infligés aux chrétiens par les Huns, « il se jeta audacieusement au milieu de ces païens. » Ceux-ci l’enchaînèrent et l’emmenèrent au pied d’une colline où ils le décapitèrent ; son sang versé fit jaillir une source. Puis le saint prit dans ses mains sa tête coupée et la porta au sommet jusqu’au sommet de la colline. C’est là qu’il fut inhumé. Aventin d’Aquitaine, victime des Sarrasins au viiie siècle, prit aussi sa tête sous le bras et marcha vers son village natal pour tomber à terre quand il l’aperçut29. Selon sa légende du xvie siècle, Gohard (Gunhardus), évêque de Nantes, décapité en 843 par les Normands dans son église, sortit du bâtiment qui allait être incendié, et, tenant sa tête, alla jusqu’à la Loire, et monta dans un bateau. Il navigua sans pilote ni guide jusqu’à Angers où les prêtres et chanoines de l’église Saint-Pierre montèrent dans le bateau, prirent le corps et l’emportèrent dans leur église30.

Les péripéties de la tête de Jean Baptiste

  • 31 Sur ce thème, il existe deux ouvrages anciens : Charles du Cange, Traité historique du chef de S. J (...)
  • 32 Sozomène, Historia ecclesiastica, VII, 21, PG 67, col. 1482-1484. Voir aussi Chronicon Paschale, a. (...)

11Les translations et inventions de la tête tranchée de Jean Baptiste doivent être présentées à part31. Précurseur du Christ et martyr, il est aussi l’archétype de toutes les victimes des persécutions chrétiennes. Selon la première version de la légende de sa translation, rapportée par Sozomène au ive siècle32, sa tête fut emportée d’abord à Jérusalem, puis en Cilicie. L’empereur Valens ordonna de l’apporter à Constantinople ; mais les mules qui tiraient le chariot avec la relique s’arrêtèrent à Pontichion près de Chalcédoine. Elle y resta jusqu’à l’époque de Théodose le Grand, qui se rendit à cet endroit et persuada la gardienne de la tête de la lui céder. Il l’emporta à la capitale vers 390 et fit construire pour elle l’église de l’Hebdomon, située à sept lieues du Forum de Constantin.

  • 33 Selon Flavius Josèphe, Jean Baptiste aurait été emprisonné et exécuté dans le palais de Machéronte (...)
  • 34 Denys le Petit, De inventione capitis sancti Ioannis Baptistae, PL 67, col. 420-432 ; voir aussi Ma (...)

12D’après une autre version, la tête fut retrouvée suite aux révélations de Jean Baptiste. Il apparut d’abord à deux moines, en pèlerinage à Jérusalem, en leur ordonnant de se rendre à l’ancien palais d’Hérode33 pour y découvrir sa tête. Les moines obéirent, repartirent avec la tête, mais, sur leur route, ils rencontrèrent un potier qui leur prit la relique et l’emporta à Ephèse sur la côte ouest de l’Asie Mineure. Avant de mourir, il laissa la relique à sa sœur. Puis la relique passa dans la possession d’un moine arien près d’Emèse (actuellement Homs, Syrie). Il l’utilisa pour faire des miracles en s’attribuant le pouvoir thaumaturgique de la relique. Sa tromperie fut dévoilée et il fut chassé de la ville ; mais avant de partir, il cacha la relique dans une grotte. Plus tard, Jean Baptiste apparut et révéla la cachette à l’higoumène du monastère ; vers 450, l’évêque d’Emèse, Uranicus, procéda à l’élévation de la relique34. Selon un autre récit, c’est Justinien, qui fit restaurer l’église de l’Hebdomon, qui la fit venir à Constantinople, avec la main de Jean-Baptiste qui se trouvait à Antioche. Suivant une autre version, la tête fut d’abord emportée d’Emèse à la ville de Comane dans le Pont, et c’est l’empereur Michel III (842-867) qui la retrouva et la fit apporter à la capitale.

  • 35 Constantin Porphyrogénète, Liber de ceremoniis, II, 13, p. 562, 563.
  • 36 Cedrenus, Historiarum compendium, PG 122, col. 211-212 (éd. Bonn, t. II, p. 479-480).

13Aux xe-xie siècles, la tête était conservée dans le monastère Saint-Jean-Baptiste de Stoudios, l’un des plus importants de Constantinople. À la fête de la Décollation, le 29 août, la cour impériale s’y rendait pour vénérer la relique35. En 1025, l’higoumène du monastère, Alexis, apporta la tête à l’empereur mourant Basile II36.

  • 37 Translatio capitis Angeriacum, AASS Iun. V, p. 650-653.
  • 38 Le Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, p. 62-63.
  • 39 Adémar de Chabannes, Chronicon, p. 175 sq.
  • 40 Guibert de Nogent, De pignoribus sanctorum, PL 156, col. 624 : Quid ergo magis ridiculum super tant (...)

14En Occident, on redécouvrit la tête de Jean Baptiste en 1016 dans le monastère d’Angély (Charente-Maritime). Une légende raconte l’arrivée miraculeuse de la tête de saint Jean Baptiste en Aquitaine par la Méditerranée. À l’époque de Pépin, roi d’Aquitaine (814-838), un ange apparut à un moine appelé Félix à Jérusalem, et l’envoya à Alexandrie pour y retrouver la tête du Précurseur ainsi que les corps de trois saints Innocents ; il devait les transporter en Gaule, dans la région d’Aquitaine. Le moine et ses compagnons partirent pour Alexandrie, prirent les reliques qu’ils enfermèrent dans une corbeille. Arrivés en cachette au bord de la mer, ils y trouvèrent un navire « préparé par Dieu », avec des rameurs et un gouvernail. Une colombe blanche, assise sur la poupe du bateau, les accompagna jusqu’à leur arrivée au port d’Angoulins (côte atlantique, Charente-Maritime), au moment où le roi Pépin combattait les Vandales (en réalité, il s’agissait des Vikings). Grâce aux reliques, vingt hommes tués dans la bataille furent alors ressuscités37. Le Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle souligne que lors de sa translation, le chef « sur mer, il chassa bien des tempêtes »38. L’« invention » est rapportée par le chroniqueur Adémar de Chabannes qui évoque la tradition selon laquelle la tête de Jean Baptiste aurait été apportée d’Alexandrie à Angély à l’époque de Pépin, roi d’Aquitaine. Adémar fait preuve d’un certain esprit critique à l’égard de ce récit, car il connaît la translation de la relique par Théodose à Constantinople. Malgré ses réserves, Adémar décrit longuement les festivités organisées par le duc d’Aquitaine Guillaume le Grand pour exposer la tête de Jean-Baptiste. Pour la vénérer, Robert le Pieux et Sanche, roi de Navarre y vinrent. Un rassemblement de reliques fut aussi organisé, avec celles de Limoges et d’Angoulême ; et ce fut le duc d’Aquitaine qui décida la fin des cérémonies39. Au siècle suivant, l’authenticité de la relique fut mise en doute par Guibert de Nogent dans son traité sur les reliques. Il y rappelle que la tête de Jean-Baptiste se trouve à Constantinople et ajoute que si l’on voulait croire les moines de Saint-Jean-d’Angély, on devrait admettre que le saint avait deux têtes40.

  • 41 Nicolaus Thingeyrensis, Catalogus reliquiarum C. P., dans Exuviae sacrae Constantinopolitanae, p. 2 (...)
  • 42 Ibid., p. 231.
  • 43 Le trésor de la Sainte-Chapelle [catalogue] : « L’occiput de saint Jean Baptiste », p. 79-81 ; « Le (...)

15Une partie de la tête de Jean Baptiste se trouvait dans la chapelle de la Vierge du Phare du Palais sacré de Constantinople : elle fut mentionnée par Nicolas de Thingeyar en 115741 et par Robert de Clari en 120442. En 1247, elle faisait partie des reliques cédées à Louis IX par l’empereur latin Baudouin II. Elle fut enfermée ensuite dans un reliquaire, offert par Louis XI en 1472, représentant une tête couronnée et nimbée dans la Grande Châsse de la Sainte-Chapelle. Mais le reliquaire original byzantin fut aussi gardé, d’après l’inventaire de 1534 et le procès-verbal de recollement de 1630. Il s’agissait probablement d’un coffre-reliquaire rond43.

  • 44 Richard de Gerberoy, De capta et direpta a Latinis Constantinopoli, & quomodo Walo caput S. Iohanni (...)
  • 45 Georges Durand, Monographie de l’église Notre Dame cathédrale d’Amiens, p. 619-620 ; notice de Jacq (...)

16En 1204, Wallon de Sarton, chanoine de Picquigny, trouva une autre relique de tête de Jean Baptiste. Il se trouvait à Constantinople lors de la prise de la ville d’où il voulait absolument ramener des reliques dans son pays natal. La veille de la Nativité de la Vierge (le 8 septembre), il se retira derrière l’autel dans une sorte de passage (in appendicio) entre l’église et le Palais impérial ancien. Il pria ardemment pour trouver un beau reliquaire. Il aperçut une petite fenêtre à la base d’une pile. C’est dans ce coin qu’il découvrit deux récipients (vasa) : l’un contenant un doigt, l’autre, le bras de saint Georges. Le lendemain, il retourna au même endroit, et il y découvrit en plus deux grands plats (boîtes ?) d’argent ronds (duos discos argenteos magnos, rotundos) qu’il cacha. Le jour suivant, il emporta secrètement tous les reliquaires dans son logement. Les deux plats portaient des inscriptions : AGIOS GEORGIOS et AGIOS IOANNIS PRODROMOS. Il les brisa pour les vendre, mais conserva les parties dans lesquelles les têtes avaient été enchâssées. Il repartit à la fin septembre en France. Il offrit le chef de Georges à Marmoutier, son bras à Picquigny, son doigt à son village natal, Sarton, et la tête de Jean le Baptiste, à la cathédrale d’Amiens44. Douze ans plus tard, la cathédrale subit un incendie ; pour sa reconstruction, la possession de la tête de saint Jean fournissait une aide décisive. Les dons permirent de fabriquer un reliquaire splendide pour le chef dont on connaît la description d’après l’inventaire de 1419. La relique était placée sous un cristal, dans un plat d’argent orné de pierres précieuses et de perles. Le haut de tête était aussi orné de saphirs, d’émeraudes, de topazes et de perles et la face était recouverte d’un masque d’argent à laquelle de nombreux joyaux étaient attachés. Plus tard, un plat d’or remplaça celui en argent (fig. 4). La relique a été sauvée à la Révolution, mais seul le cristal est conservé de l’ancien reliquaire45.

Fig. 4 : Relique de la tête de saint Jean Baptiste,
Amiens (gravure de Charles du Cange, 1665).

Reliques de tête, chefs-reliquaires

  • 46 Liber pontificalis, p. 434. La tête a dû être apportée par des chrétiens fuyant la conquête musulma (...)
  • 47 Liber pontificalis, p. 57-58, 60.
  • 48 Le reliquaire du chef de saint Sébastien a été conservé (Musée chrétien de la Bibliothèque Vaticane (...)
  • 49 Liber pontificalis, t. II, p. 116.
  • 50 Notice de Guido Cornini dans Restituzioni 2004 : Tesori d’arte restaurati, p. 136-138.

17Le traitement spécial des reliques de tête est attesté dès le haut Moyen Âge, qu’il s’agisse de placer la tête des martyrs décapités dans un reliquaire, ou de séparer la tête d’autres saints pour pouvoir l’exposer à la vénération dans le chœur de l’église ou dans un trésor. À Rome, les papes ont procédé dès le haut Moyen Âge à la glorification et à l’enchâssement des reliques de tête. Le pape Zacharie (741-752) trouva dans le palais pontifical le crâne du martyr Georges conservé dans un coffret, comportant l’authentique (morceau de parchemin identifiant la relique) écrite en grec. Il a organisé la translation solennelle de la relique dans l’église de Vélabre46. Pascal Ier, qui a retrouvé le corps de sainte Cécile, a d’abord donné un tissu pourpre pour couvrir le reliquaire (arcella) où il a fait déposer sa tête, puis il lui a offert un reliquaire d’argent47. Il enleva la tête de saint Tiburce et la fit placer dans une châsse d’argent, et fit porter la tête de sainte Agnès dans la chapelle Saint-Laurent du palais pontifical (connu sous le nom du Sancta Sanctorum). Léon IV fit déposer plusieurs têtes-reliques dont celle de Cécile et de saint Sébastien48 sous l’autel de l’église des Quatre-Saints-Couronnés49. Honorius III fit fabriquer un reliquaire d’argent pour la tête de sainte Agnès. C’est une boîte rectangulaire décorée simplement aux bords supérieur et inférieur d’une frise de feuilles épineuses50.

  • 51 Daniele Mondini, « Reliquie incarnate. Le ‘sacre teste’ di Pietro e Palo a San Giovanni in Laterano (...)
  • 52 Ugo Mioni, Il culto delle reliquie nella Chiesa Cattolica, p. 134.

18Les têtes de saint Pierre et de saint Paul51 auraient été séparées de leur corps lors des persécutions de 258. Au xie siècle, elles se trouvaient dans le Sancta Sanctorum, dans un autel secondaire, avec les têtes des saintes Agnès et Euphémie. Au xiie siècle, elles furent transférées au maître-autel. Honorius III fit porter en procession la tête de saint Pierre à l’église Sainte-Marie-Majeure pour être exposée au peuple avant la Ve croisade en 121752. En 1368, après son retour de l’exil avignonnais, Urbain V fit leur ostension au peuple à partir de la loge qui donnait sur la place. Il fit fabriquer ensuite deux bustes-reliquaires qui furent installés dans la basilique Saint-Jean-de-Latran, au-dessus du baldaquin, soutenu par des colonnes entourant l’autel papal, dans la croisée du transept. Ces reliquaires, détruits en 1799, furent remplacés par les œuvres de Giuseppe Valadier en 1804.

  • 53 Eva Kovacs, « Le chef de saint Maurice à la cathédrale de Vienne (France) ».

19À partir de la fin du ixe siècle, l’enchâssement des reliques de têtes dans des reliquaires « parlants », de forme anatomique, rendait présents les saints dont le visage semblait vivant. De plus, les chefs-reliquaires étaient mobiles, pouvant être déplacés, portés en procession lors des fêtes ou lors des calamités. Le premier exemple connu — malheureusement seulement par une description et un dessin de Nicolas-Claude Fabri de Peiresc datant de 1612 — est celui du buste-reliquaire de saint Maurice, offert par le roi de Bourgogne Boson (879-887) à la cathédrale de Vienne. « En l’église Saint-Maurice… est le chef S. Maurice tout garny de lame d’or dez le temps de Boson, roy […] représentant la teste d’ung homme ayant un peu de barbe et une moustache comme celle de Louys le Debonnaire avec les yeux composez d’agathe et de calcedoine… couronné d’un diadème d’or de cinq pieces assemblées en charnière, enrichie d’un tour de perles grosses comme des gros pois entre deux rangs de caillous de rubis et des gros saphirs sur des assemblages des charnières avec des esmeraudes en croix »53.

  • 54 Par exemple, le chef-reliquaire de saint Benoît (xiiie siècle, trésor de l’église Saint-Polycarpe, (...)
  • 55 Cf. Beate Fricke, « Visages démasqués. Un nouveau type de reliquaire chez les Anjou ».

20La plupart des chefs-reliquaires de l’époque romane, voire certains des xiiie-xive siècles54 se caractérisent par la représentation idéale et hiératique des saints, avec des traits schématiques. Les yeux, particulièrement soulignés, parfois avec des incrustations, semblent fasciner le spectateur. Ce regard intense pouvait établir une communication entre les saints et les fidèles. Ce ne sont pas des « portraits » : l’apparence terrestre de ces saints, en grande partie fort anciens, n’était pas connue55. À l’instar de l’enveloppe corporelle de l’âme, ces chefs- et bustes-reliquaires constituent des réceptacles somptueux pour les restes matériels, mais imprégnés de la virtus thaumaturgique immatérielle, véritable essence des saints.

  • 56 Candidus exempto dum sic mucrone litatur / spiritus astra petit, pro nece vita datur. Cf. Daniel Th (...)
  • 57 Herbert Grundmann, Der Cappenberger Barbarossakopf ; Thomas Dale, « Convention, Vision, and Real Pr (...)
  • 58 Bruxelles, Musées royaux d’Art et d’Histoire. Cf. Karl H. Usener, « Sur le chef reliquaire du Pape (...)

21Fait rare, sur la base du chef-reliquaire de saint Candide (réalisé entre 1150 et 1180 ; fig. 5), la scène de la décapitation est représentée sur un relief en méplat, accompagnée d’une inscription : « Tandis que par le glaive Candide est sacrifié, son esprit gagne les astres ; en échange de la mort, la vie est donnée56 ». Les traits individuels apparaissent sur le reliquaire de Cappenberg (v. 1160, Selm, Westphalie, église collégiale de Cappenberg), abritant des cheveux de saint Jean-Baptiste ; c’était à l’origine une effigie de l’empereur Frédéric Barberousse. Otto de Cappenberg, parrain de l’empereur, fit transformer le portrait en reliquaire, monté sur un socle soutenu par des anges57. La tête du pape martyr Alexandre, placée sur un autel portatif, (vers 1140-1145), réalisée pour l’abbaye de Stavelot, semble s’inspirer des portraits romains58.

  • 59 Cf. le catalogue « Et ils s’émerveillèrent ». L’art médiéval en Croatie, n° 10, p. 48.
  • 60 Ibid., n° 30, p. 77, reliquaire de saint Laurent (Dubrovnik, trésor de la cathédrale) ; fig. 22, p. (...)
  • 61 Légende dorée du Limousin. Les saints de la Haute-Vienne, n° 19 : reliquaire de crâne de saint Mart (...)

22Toutes les reliques de tête n’ont pas été placées dans des reliquaires « parlants ». Il existe toute une série de reliquaires cylindriques fermés avec un couvercle en forme de calotte. Leur aspect se réfère à leur contenu sans leur prêter un visage. Sur le reliquaire de la tête de saint Jacques l’Intercis (début du xiie siècle, Zadar, trésor de la cathédrale) sont figurés le Christ, la Vierge et les apôtres59. Plusieurs chefs-reliquaires, œuvres des orfèvres de Dubrovnik autour du milieu du xive siècle, portent des décorations de rinceaux à feuillages (sur la calotte, rinceaux ajourés ; fig. 6)60. Aux xviie-xixe siècles, on déposa les reliques de tête des saints limousins dans des coupes-reliquaires pourvues de couvercles demi-sphériques, avec une ouverture permettant de voir la relique61.

Fig. 5 : Buste-reliquaire de saint Candide (trésor de Saint-Maurice d’Agaune).

  • 62 C. M. Fandrey, Das Oswald-Reliquiar im Hildesheimer Domschatz ; M. Brandt, R. Kunz, R. Röthinger, P (...)
  • 63 REX PIUS OSWALDUS SESE DEDIT ET SUA CHRISTO LICTORIQUE CAPUT QUOD IN AURO CONDITUR ISTO.

23Plusieurs chefs-reliquaires exaltent les saints rois. La fabrication de celui de saint Oswald (datée entre 1185 et 1189, probablement en Basse-Saxe ; fig. 7)62 est liée au couple Henri le Lion, duc de Saxe et Mathilde, fille d’Henri II Plantagenêt. La représentation de la tête du roi Oswald, de dimensions modestes, surmonte un dôme, dont la base octogonale porte une inscription du xive siècle : « Le pieux roi Oswald donna lui-même et ses biens au Christ, et au bourreau, sa tête qui est enfermée dans [ce récipient] en or »63. Le roi porte une couronne d’or richement ornée de filigranes, de pierres précieuses et de plaques émaillées. Sur la base du reliquaire sont gravées des images de huit rois, tous – sauf un (Sigismond, roi des Burgondes, † 523) – rois d’Angleterre. La série de rois souligne la continuité de la royauté d’Angleterre en dépit des changements dynastiques. Elle met aussi en valeur l’adoption d’un nouveau saint protecteur par Henri le Lion, et sert aussi à rappeler le lien entre la royauté d’Angleterre et le duc.

Fig. 6 : Chef-reliquaire avec les reliques des saints Laurent, Achilée, Etienne et Nérée (cathédrale de Dubrovnik).

  • 64 Elizabeth A. R. Brown, « Philippe le Bel and the remains of Saint Louis » ; Le Trésor de la Sainte- (...)

24En 1305, Philippe le Bel obtint du pape Clément V l’autorisation de translater la tête (à l’exception du menton, des dents et de la mâchoire inférieure) de saint Louis de l’abbaye Saint-Denis à la Sainte-Chapelle de Paris. Il avait commandé dès 1299 un chef-reliquaire à l’orfèvre Guillaume Julien. On connaît son aspect par les descriptions dans les inventaires de la Sainte-Chapelle, et par une gravure publiée par Charles Du Cange en 1668. C’était un buste de grandeur nature, tenu par quatre anges, debout sur un entablement, sur lequel étaient représentées les effigies des rois de France de Clovis à Philippe le Bel, identifiés par des inscriptions. La translation de la relique eut lieu le 17 mai 130664.

Fig. 7 : Reliquaire de saint Oswald (trésor de Hildesheim).

  • 65 Aix-la-Chapelle, trésor de la cathédrale.

25Le chef-reliquaire de Charlemagne a été réalisé avant 1349 en argent repoussé et doré ; il contient la calotte crânienne de l’empereur. Selon la tradition, c’était un don de Charles IV à l’occasion de son couronnement comme roi à Aix-la-Chapelle. Sur le buste sont représentés les emblèmes de l’Empire – des aigles – et du royaume de France – des fleurs de lys65. On le porta en procession devant les futurs rois venus pour être couronnés.

  • 66 Illés Horvath, « Szent Laszlo fejereklyetartoi », p. 1-18.

26Le premier chef-reliquaire du saint roi Ladislas de Hongrie († 1095 ; canonisé en 1192) a disparu dans un incendie en 1406 à Varad, mais la relique de tête du roi fut miraculeusement préservée. Elle fut déposée dans un nouveau reliquaire, conservé aujourd’hui dans la cathédrale de Györ (Hongrie) (fig. 8)66.

Fig. 8 : Buste-reliquaire de saint Ladislas de Hongrie (cathédrale de Györ).

  • 67 Currente 1380 hoc insigne opus factum fuit tempore libertatis regiminis popularis et artium communi (...)

27À l’époque de l’essor du culte civique en Italie, plusieurs exaltations de reliques de tête ont eu lieu sur initiative communale. À Bologne, la commune a commandé en 1312 la fabrication d’un reliquaire pour la tête du martyr saint Floriano. La séparation de la tête de son corps de l’évêque Felice est moins bien documentée ; elle a dû avoir lieu également durant la première décennie du siècle. En 1380, c’est la tête de saint Petronio, évêque patron de Bologne, qui a été enfermée dans un reliquaire réalisé par Jacopo Roseto. L’inscription sur la base indique qu’il a été fabriqué « au temps de la liberté du régime populaire et des arts de la commune de Bologne »67.

  • 68 Bologne, église Saint-Dominique. Cf. Venturino Alce, Il reliquiario del capo di s. Domenico.

28L’intervention la plus importante du gouvernement communal concerne la relique de tête de saint Dominique. C’est pour la vénération publique que la tête du saint a été séparée de son corps : « pour être montrée à tout le peuple chrétien et avant tout à celui de Bologne ». Son reliquaire a été commandé à Jacopo Roseto en 1376. Achevé en 1383, le reliquaire monumental de 1,27 m est constitué de 2946 pièces. Le buste du saint – fortement restauré en 1576-80 – domine la structure architectonique. Sur le socle, huit émaux représentent des scènes de la légende de Dominique, puis en allant vers le sommet, se trouvent des figurines d’anges musiciens sur la terrasse du piédestal ; prophètes et sibylles sur la loggia du nœud. La relique du crâne est abritée dans une sorte de mausolée-monstrance qui permet de l’entrevoir68.

  • 69 Pierre Kerbrat, « Corps des saints et contrôle civique à Bologne du xiiie siècle au début du xvie s (...)
  • 70 Œuvre d’Arditi Andrea, v. 1331-1338 (Florence, Museo dell’Opera del Duomo). Cf. Filippo Rossi, Ital (...)

29Pierre Kerbrat, qui a étudié le rapport entre le culte des reliques et la religion civique à Bologne, a souligné que « l’attention du gouvernement urbain se concentra sur des reliques mobiles […], de préférence des crânes ». Il a émis l’hypothèse que la mise en valeur de ces reliques par la commune avait lieu à des moments d’« acéphalie du régime politique » ; « les reliques retenues fonctionneraient donc pour le pouvoir communal comme des objets de compensation. Objets du pouvoir, du moins partiellement, les reliques civiques seraient ainsi des figures de l’impossibilité de ce même pouvoir69 ». À Florence, après l’invention du corps de saint Zénobe (Zanobi), premier évêque légendaire de la ville (+ 417) en 1331, on a translaté une partie de sa tête dans un buste reliquaire d’argent, de pierres précieuses et émail70.

  • 71 Scott B. Montgomery, « Mittite capud meum … ad matrem meam ut osculetur eum:”.
  • 72 Sant’Agata. Il reliquiario a busto. Contributi interdisciplinari ; Sant’Agata. Il reliquiario a bus (...)
  • 73 Pierre Colman, René Sneyers, « Le buste-reliquaire de saint Lambert de la cathédrale de Liège et sa (...)

30À la fin du Moyen Âge, les chefs- et bustes-reliquaires se diversifient et gagnent aussi en expressivité et complexité. Celui de saint Juste met en scène l’épisode final de sa Passion. Le reliquaire fabriqué vers 1488 représente la tête aux cheveux bouclés, tenue par deux mains devant le buste acéphale71. Des œuvres monumentales tels le buste-reliquaire de sainte Agathe, fabriqué par l’orfèvre Giovanni di Bartolo (1376, Catane, cathédrale)72 ou celui de saint Lambert (œuvre de Hans von Reutlingen, av. 1512, trésor de la cathédrale de Liège, fig. 9)73 glorifient les saints patrons d’une cité. Une nouvelle forme de présentation des reliques de Jean Baptiste apparaît aussi, reflétant la dévotion exacerbée vouée à la souffrance, au sacrifice : la tête coupée du Précurseur, avec les yeux fermés, repose sur un plat rond (par exemple, Engelberg, Benediktinerkloster, v. 1430-1440 ; Zürich, Schweizerisches Landesmuseum, v. 1500 ; Francfort/Main, Liebieghaus, v. 1490, fig. 10), parfois monté sur un piédestal, à l’instar de l’offrande eucharistique.

  • 74 Gustave Schlumberger, « Une relique byzantine », p. 385-387 ; Byzance. L’art byzantin dans les coll (...)
  • 75 Der heilige Schatz im Dom zu Halberstadt.
  • 76 Enrica Follieri, « Un reliquiario bizantino di S. Simeone Stilita » ; Jannic Durand, « Reliques et (...)

31Les crânes-reliques constituent une catégorie spécifique. Il s’agissait d’orner les crânes nus. Plusieurs sont d’origine byzantine. Sur la calotte du martyr Akyndinos, compagnon de saint Georges, sont clouées trois (à l’origine quatre) bandes de métal ; au milieu, un médaillon doré porte l’image du buste du saint et son nom en caractères grecs (2e moitié du ixe siècle [ ?], église Saint-Just d’Arbois). À l’origine, une bande de métal entourait aussi la base de la relique74 comme sur la crâne-relique de saint Jacques le Mineur du trésor d’Halberstadt (fig. 11)75. Sur la calotte de Siméon le Stylite, conservé à Arezzo (Chiesa dell’Archicenobio di Camalduli), deux bandes d’argent forment une croix. Elles portent l’inscription d’une épigramme grecque de six vers76.

Fig. 9 : Buste-reliquaire de saint Lambert (trésor de Liège).

Fig. 10 : Tête de saint Jean Baptiste sur un plat
(Johannes Schüssel, vers 1490, Francfort-sur-le-Main).

Fig. 11 : Crâne-relique de saint Jacques le Mineur
(trésor de Halberstadt).

  • 77 Philippe George, « Saint-Trond, un import-export de reliques des Onze Mille Vierges dans la seconde (...)
  • 78 Gold, Perlen und Edel-Gestein : Reliquienkult und Klosterarbeiten im deutschen Südwesten ; Le Jardi (...)

32À la fin du Moyen Âge, apparaît aussi une nouvelle mode de présentation des crânes-reliques : leur habillement avec des tissus, de broderies et d’autres ornements précieux, spécialité des moniales dans les pays germaniques. Selon les inventaires, l’abbaye cistercienne Saint-Trond possédait 90 crânes-reliques, en particulier celles des Onze mille vierges de Cologne. Ils ont été enveloppés dans un drap de lin, puis dans une pièce de soie, avec une bandelette croisée protégeant la calotte (fig. 12)77. L’abbaye de Herkenrode (Belgique) conserve une collection particulièrement riche : quarante-huit crânes-reliques, datant des xve au xviiie siècle. Les têtes sont presque entièrement revêtues de tissus ; certaines portent des couronnes de fleurs formées de fils métalliques, de passementerie78. L’ornementation des crânes-reliques continue et se développe à l’époque de la Contre-Réforme ; les crânes sont abrités dans des boîtes rondes décorées de tissus (Madrid, monastère Descalzas Reales, 1557) ; au xviie siècle, plusieurs crânes-reliques sont surmontés d’une auréole à rayons (Hall in Tirol, Autriche). Enfin, la présentation sérielle des chefs- et bustes-reliquaires se répandit dès le xive siècle et surtout à l’époque moderne.

Fig. 12 : Crânes-reliques des Onze mille vierges (Saint-Trond).

  • 79 Magister Theodoricus. Court Painter to Emperor Charles IV.
  • 80 Guy Lazure, « Posséder le sacré. Monarchie et identité dans la collection de reliques de Philippe I (...)
  • 81 Cf. Anton Legner, Reliquien in Kunst und Kult zwischen Antike und Aufklärung, p. 173-198, 199-219 ( (...)

33Une accumulation de reliques est exposée aussi dans des retables. Non seulement les reliques – souvent seulement de petites parcelles, mais parfois des crânes – étaient placées dans des logettes bien visibles des retables, mais les saints étaient aussi présents par leurs images peintes ou sculptées (Marienstatt, église du couvent cistercien, 1360 ; Cologne, couvent franciscain St. Klara, 1360). Les murs de la chapelle Sainte-Croix du château de Karlstein (Bohême), fondé en 1348 par Charles IV, sont recouverts de 129 tableaux du Maître Theodoricus, représentant des saints en buste ; chaque image renfermait une parcelle de relique. Cette armée céleste entoure le maître-autel abritant une relique de la Vraie Croix79. Les collections de chefs- et bustes-reliquaires sont présentées dans des armoires-reliquaires ; au-dessus des autels (Escorial, bâti par Philippe II [1563-1584], chapelle San Lorenzo80 ; Braga, église Bom Jesus do Monte) ; dans des salles de trésor (Cologne, église Sainte-Ursule, Goldene Kammer [Chambre d’Or], xviie siècle)81.

34Dans le cadre de cet article, je n’ai pas abordé d’autres aspects essentiels du thème de la tête coupée au Moyen Âge, comme par exemple les modalités de la vénération des reliques de tête, les analyses archéologiques des restes, ou encore les différentes solutions de rendre visible les ossements dans les reliquaires. De façon générale, le culte chrétien des têtes-reliques des saints devrait aussi mise en perspective et comparée aux traditions d’autres religions et systèmes de croyances. L’importance accordée à la tête, attestée dès le néolithique, révèle certains traits communs à l’humanité, tandis que les modes de conservation, de sublimation et de vénération des têtes-reliques sont déterminés par le facteur social des différentes civilisations.

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[Alia] Vita Agrippani, AASS Febr. I, p. 205.

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Notes

1 Baudouin de Gaiffier, « La mort par le glaive dans les Passions des martyrs », p. 75.

2 Alan Thacker, « Membra Disjecta : The Division of the Body and the Diffusion of the Cult »,.

3 Abbon de Fleury, Vita S. Eadmundi regis Anglorum et martyris, PL 139, col. 507-520.

4 Vita prior S. Adalberti, § 30 ; cf. Geneviève Bührer-Thierry, « Autour du martyre de saint Adalbert ».

5 Grégoire le Grand, Dialogues, III, 13.

6 Ivanka Petrovic, « L’hagiographie latine et vernaculaire de l’espace croate des origines à 1350 », p. 206-211.

7 Acta martyrii S. Basilei episcopi Amaseae auctore Joanne presbytero Nicomediensi, AASS Apr. III, § 15-19, p. 424-425.

8 Abbon de Fleury, Vita S. Eadmundi regis.

9 Grégoire de Tours, Liber S. Iuliani, § 3, MGH SRM I/II, p. 565-566.

10 Il s'agit de l'actuel Saint-Julien en Corrèze.

11 Grégoire de Tours, Liber S. Iuliani, § 41, p. 581 : Haec sunt certae reliquiae, quas martyr paradisiacis virtutibus inlustravit.

12 Flodoard, Historia Remensis Ecclesiae, I, 8, MGH SS 13, p. 420 ; trad. M. Lejeune, p. 51-52.

13 Alia Vita Agrippani, AASS Febr. I, p. 205.

14 Nova legenda Anglie as collected by John of Tynemouth, John Capgrave, and others, 1901, t. II, p. 93-95.

15 Cf. Louis Servières, Histoire de saint Hilarian, 1895.

16 Bernard Flusin, Saint Anastase le Perse et l’histoire de la Palestine au début du VIIIe siècle, p. 165-186.

17 « Histoire de la translation miraculeuse du chef de saint Sever depuis l’Espagne », dans Chartes et documents hagiographiques de l’abbaye de Saint-Sever (Landes) (988-1359).

18 Chronique minorite anonyme, insérée dans Chronicon Dubnicense, Historiae Hungaricae Fontes Domestici, t. III, p. 152.

19 Flodoard, Historia Remensis Ecclesiae, I, 6, MGH SS 13, p. 419 ; trad. M. Lejeune, p. 41.

20 Gautier Map, De nugis curialium, I, 19, 1993, p. 99.

21 Pierre Saintyves, « De la première idée de la céphalophorie : rite ? image ? ou métaphore ? » ; A. Simonetti, « Santi cefalofori altomedievali ».

22 Jean Chrysostome, Homilia in SS.martyres Juventium et Maximinum, PG 50, I, col. 576 ; avec trad. fr. Id., Panégyrique de martyrs, t. I.

23 Michael Lapidge, Hilduin of Saint-Denis, The Passio S. Dionysii in Prose and Verse.

24 M. Coens, « Nouvelles recherches sur un thème hagiographique : la céphalophorie » ; Id., « Un fragment retrouvé d’une ancienne Passion de saint Just, martyr de Beauvais ».

25 Acta S. Carauni martyris, AASS Maii VI, p. 741-745. Voir sur son dossier hagiographique J.-F. Honet, Les saints du pays de Chartres. Légendes et culte liturgique du viiie au xve siècle, p. 25-26, 47-61 ; P. Gabet, « Iconographie, légendes et récits relatifs à Chéron de Chartres, Nicaise de Reims, Livier de Metz, Ausone d’Angoulême, Aphrodise de Béziers ».

26 Passio S. Eliphi, AASS Oct. VII, p. 799-816.

27 Ibid., § 11, p. 814.

28 Le souvenir des Carolingiens à Metz au Moyen Âge. Le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul, § 12, p. 24-27. Cf. Edina Bozoky, « Martyrs ‘inventés’, victimes des barbares. L’exemple de saint Livier ».

29 Notice historique sur Saint Aventin d’Aquitaine, martyr, par un prêtre du diocèse.

30 Albert Le Grand, La Vie des saints de Bretagne armoricaine, p. 157-164.

31 Sur ce thème, il existe deux ouvrages anciens : Charles du Cange, Traité historique du chef de S. Jean Baptiste, et D. Papebroch, De inventionibus et translationibus sacri capitis [Ioannis Baptistae] in Oriente factis, AASS Iun. IV, p. 711-739. Voir aussi J. Wortley, « Relics of ‘the Friends of Jesus’ at Constantinople », p. 145-150.

32 Sozomène, Historia ecclesiastica, VII, 21, PG 67, col. 1482-1484. Voir aussi Chronicon Paschale, a. 391 ; trad. ang. p. 54 ; Patria, éd. Th. Preger, Scriptores originum Constantinopolitanarum, t. II, Leipzig, 1907, p. 260. Sur plus de détails des récits d’inventions, cf. Estelle Cronnier, Les inventions de reliques dans l’Empire romain d’Orient (ive-vie s.).

33 Selon Flavius Josèphe, Jean Baptiste aurait été emprisonné et exécuté dans le palais de Machéronte (act. Makawir, Jordanie).

34 Denys le Petit, De inventione capitis sancti Ioannis Baptistae, PL 67, col. 420-432 ; voir aussi Marcellinus Comes, Chronicon, a. 453, PL 51, col. 928-929. Le pèlerin de Plaisance (560-570) a vu la relique exposée dans un vase de verre à Emèse : cf. Récits des premiers pèlerins chrétiens au Proche-Orient (ive-viie siècle), p. 235.

35 Constantin Porphyrogénète, Liber de ceremoniis, II, 13, p. 562, 563.

36 Cedrenus, Historiarum compendium, PG 122, col. 211-212 (éd. Bonn, t. II, p. 479-480).

37 Translatio capitis Angeriacum, AASS Iun. V, p. 650-653.

38 Le Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, p. 62-63.

39 Adémar de Chabannes, Chronicon, p. 175 sq.

40 Guibert de Nogent, De pignoribus sanctorum, PL 156, col. 624 : Quid ergo magis ridiculum super tanto homine praedicetur, quam si biceps esse ab utriusque dicatur ?

41 Nicolaus Thingeyrensis, Catalogus reliquiarum C. P., dans Exuviae sacrae Constantinopolitanae, p. 213.

42 Ibid., p. 231.

43 Le trésor de la Sainte-Chapelle [catalogue] : « L’occiput de saint Jean Baptiste », p. 79-81 ; « Les reliquaires de la Grande Châsse », p. 113-122 ; représentations du reliquaire sur les enluminures et gravures : p. 128-137.

44 Richard de Gerberoy, De capta et direpta a Latinis Constantinopoli, & quomodo Walo caput S. Iohannis Baptiste invenit & ad Ambianum deportavit.

45 Georges Durand, Monographie de l’église Notre Dame cathédrale d’Amiens, p. 619-620 ; notice de Jacques Foucart dans Le Trésor de la cathédrale d’Amiens [catalogue], p. 14-17. Voir aussi Léon Pressouyre, « Reliques et cathédrales gothiques, le cas de la France », en part. p. 173-174 sur Amiens.

46 Liber pontificalis, p. 434. La tête a dû être apportée par des chrétiens fuyant la conquête musulmane : cf. Richard Krautheimer, Rome. Portrait d’une ville, 312-1308, p. 240-241.

47 Liber pontificalis, p. 57-58, 60.

48 Le reliquaire du chef de saint Sébastien a été conservé (Musée chrétien de la Bibliothèque Vaticane). Il s’agit d’un récipient d’argent, à l’origine d’usage profane du Bas-Empire, selon Paul Liebaert, « Le reliquaire du chef de saint Sébastien ».

49 Liber pontificalis, t. II, p. 116.

50 Notice de Guido Cornini dans Restituzioni 2004 : Tesori d’arte restaurati, p. 136-138.

51 Daniele Mondini, « Reliquie incarnate. Le ‘sacre teste’ di Pietro e Palo a San Giovanni in Laterano a Roma ».

52 Ugo Mioni, Il culto delle reliquie nella Chiesa Cattolica, p. 134.

53 Eva Kovacs, « Le chef de saint Maurice à la cathédrale de Vienne (France) ».

54 Par exemple, le chef-reliquaire de saint Benoît (xiiie siècle, trésor de l’église Saint-Polycarpe, Aude) ; celui de sainte Sabine (xive siècle, église Sainte-Sabine, Côte-d’Or), dans Les Trésors des églises de France, n° 609, n° 806. Cf. Barbara Drake Boehm, « Body-Part Reliquaries : The State of Research », p. 8-19 ; Gia Toussaint, « Schöne Schädel. Die Häupter der Heiligen in Ost und West ».

55 Cf. Beate Fricke, « Visages démasqués. Un nouveau type de reliquaire chez les Anjou ».

56 Candidus exempto dum sic mucrone litatur / spiritus astra petit, pro nece vita datur. Cf. Daniel Thurre, « Le buste-reliquaire de Saint Candide du trésor de l’Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune »,

57 Herbert Grundmann, Der Cappenberger Barbarossakopf ; Thomas Dale, « Convention, Vision, and Real Presence in Romanesque Portrait Sculpture ».

58 Bruxelles, Musées royaux d’Art et d’Histoire. Cf. Karl H. Usener, « Sur le chef reliquaire du Pape Saint Alexandre » ; Sophie Balace, « Chef-reliquaire du Pape saint Alexandre ».

59 Cf. le catalogue « Et ils s’émerveillèrent ». L’art médiéval en Croatie, n° 10, p. 48.

60 Ibid., n° 30, p. 77, reliquaire de saint Laurent (Dubrovnik, trésor de la cathédrale) ; fig. 22, p. 37 et n° 31, p. 77, reliquaire en forme de calotte contenant les reliques de Blaise, Achille, Etienne et Nérée (Dubrovnik, trésor de la cathédrale).

61 Légende dorée du Limousin. Les saints de la Haute-Vienne, n° 19 : reliquaire de crâne de saint Martial (Limoges, confrérie Saint Martial), n° : reliquaire de crâne de saint Austriclinien et de saint Loup (Saint-Priest-sous-Aixe, église Saint-Priest) ; n° 48 et 49 : reliquaires de crâne de saint Léonard (Saint-Léonard de Noblat, collégiale) ; n° 52 : reliquaire de saint Psalmet et de saint Léonard (Saint-Priest-sous-Aixe, église) ; reliquaires des crânes de saint Israël et de saint Théobald (Le Dorat, collégiale) ; n° 80 : reliquaire de crâne de saint Geoffroy (Le Chalard, église de l’Assomption).

62 C. M. Fandrey, Das Oswald-Reliquiar im Hildesheimer Domschatz ; M. Brandt, R. Kunz, R. Röthinger, P. Bolg, « Kopfreliquiar des Hl. Oswald ».

63 REX PIUS OSWALDUS SESE DEDIT ET SUA CHRISTO LICTORIQUE CAPUT QUOD IN AURO CONDITUR ISTO.

64 Elizabeth A. R. Brown, « Philippe le Bel and the remains of Saint Louis » ; Le Trésor de la Sainte-Chapelle, n° 43, p. 186-187. La procession de translation est représentée dans le Missel de la Sainte-Chapelle, BnF, ms lat. 8890, f. 21 et dans le Bréviaire dominicain, BnF, ms nouv. acq. lat. 3255, f. 479.

65 Aix-la-Chapelle, trésor de la cathédrale.

66 Illés Horvath, « Szent Laszlo fejereklyetartoi », p. 1-18.

67 Currente 1380 hoc insigne opus factum fuit tempore libertatis regiminis popularis et artium communis Bononiae ad ornamentum sacri capitis hujus sui santissimi protectoris : et Jacobus dictus Rosetus fecit.

68 Bologne, église Saint-Dominique. Cf. Venturino Alce, Il reliquiario del capo di s. Domenico.

69 Pierre Kerbrat, « Corps des saints et contrôle civique à Bologne du xiiie siècle au début du xvie siècle », p. 182-183.

70 Œuvre d’Arditi Andrea, v. 1331-1338 (Florence, Museo dell’Opera del Duomo). Cf. Filippo Rossi, Italian Jeweled Arts, n. 20, p. 12-14, pl. XI. Cf. aussi Alessandro Ciandella, San Zanobi. Vita, reliquie, culto, iconografia.

71 Scott B. Montgomery, « Mittite capud meum … ad matrem meam ut osculetur eum:”.

72 Sant’Agata. Il reliquiario a busto. Contributi interdisciplinari ; Sant’Agata. Il reliquiario a busto. Nuovi contributi interdisciplinari,.

73 Pierre Colman, René Sneyers, « Le buste-reliquaire de saint Lambert de la cathédrale de Liège et sa restauration. Étude historique et archéologique ».

74 Gustave Schlumberger, « Une relique byzantine », p. 385-387 ; Byzance. L’art byzantin dans les collections publiques françaises, p. 313.

75 Der heilige Schatz im Dom zu Halberstadt.

76 Enrica Follieri, « Un reliquiario bizantino di S. Simeone Stilita » ; Jannic Durand, « Reliques et reliquaires constantinopolitains du chef de saint Jean-Baptiste apportés en Occident après 1204 ».

77 Philippe George, « Saint-Trond, un import-export de reliques des Onze Mille Vierges dans la seconde moitié du xiiie siècle ».

78 Gold, Perlen und Edel-Gestein : Reliquienkult und Klosterarbeiten im deutschen Südwesten ; Le Jardin clos de l’âme. L’imaginaire des religieuses dans les Pays-Bas du Sud, depuis le treizième siècle.

79 Magister Theodoricus. Court Painter to Emperor Charles IV.

80 Guy Lazure, « Posséder le sacré. Monarchie et identité dans la collection de reliques de Philippe II à l’Escorial ».

81 Cf. Anton Legner, Reliquien in Kunst und Kult zwischen Antike und Aufklärung, p. 173-198, 199-219 (« Reliquienkapellen und Heiltumskammern ») et 278-315 (« Heilige Häupter und Leiber »).

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Table des illustrations

Légende Fig. 1 : l’exécution de saint Adalbert (portail de la cathédrale de Gniezno).
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Légende Fig. 2 : Martyre de saint Cgrysogone (eau-forte de Jacques Callot, Les images de tous les saincts et Saintes de l’Année, 1636).
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Légende Fig. 3 : Saint Denis céphalophore(tympan du portail nord de la basilique Saint-Denis).
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Légende Fig. 4 : Relique de la tête de saint Jean Baptiste,Amiens (gravure de Charles du Cange, 1665).
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Légende Fig. 5 : Buste-reliquaire de saint Candide (trésor de Saint-Maurice d’Agaune).
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Légende Fig. 6 : Chef-reliquaire avec les reliques des saints Laurent, Achilée, Etienne et Nérée (cathédrale de Dubrovnik).
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Légende Fig. 7 : Reliquaire de saint Oswald (trésor de Hildesheim).
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Légende Fig. 8 : Buste-reliquaire de saint Ladislas de Hongrie (cathédrale de Györ).
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Légende Fig. 9 : Buste-reliquaire de saint Lambert (trésor de Liège).
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Légende Fig. 10 : Tête de saint Jean Baptiste sur un plat(Johannes Schüssel, vers 1490, Francfort-sur-le-Main).
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Légende Fig. 11 : Crâne-relique de saint Jacques le Mineur(trésor de Halberstadt).
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Légende Fig. 12 : Crânes-reliques des Onze mille vierges (Saint-Trond).
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Pour citer cet article

Référence papier

Edina Bozoky, « Têtes coupées des saints au Moyen Âge.
Martyrs, miracles, reliques »
Babel, 42 | 2020, 133-168.

Référence électronique

Edina Bozoky, « Têtes coupées des saints au Moyen Âge.
Martyrs, miracles, reliques »
Babel [En ligne], 42 | 2020, mis en ligne le 01 janvier 2021, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/babel/11516 ; DOI : https://doi.org/10.4000/babel.11516

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Auteur

Edina Bozoky

Université de Poitiers
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