Paris : Galerie Jean Fournier ; Clermont-Ferrand : Frac Auvergne, 2016, 357p. 21 x 15cm, (Beautés)
ISBN : 9782953042948. _ 24,00 €
Texte intégral
1Cet ouvrage regroupe des textes critiques d’Eric Suchère, organisés en fonction de points de convergence entre des pratiques artistiques. A de nombreuses reprises, l’auteur convoque le dictionnaire pour indiquer les définitions des mots qu’il emploie. Cela lui permet de justifier l’utilisation d’une notion – celle de « littéralité » à propos de la peinture de Michel Parmentier par exemple –, mais aussi de révéler l’insuffisance du langage pour rendre compte d’une œuvre et des sensations qu’elle procure. Face à la difficulté de trouver le mot juste et pour ne pas trahir les œuvres avec des termes inappropriés, le critique d’art adapte le langage à son propos : « bleu-gris domine avec ajout jaune cassé va à vert foncé, transforme en jaune opalescent, brusque rouge, [...] sans gris en moins au vert, précise : le jaune n’est pas mais beige très dégradé (jaune plus rouge plus blanc plus ?) » (p. 123). Dans ce « Commentaire 5 » sur un tableau de Marian Breedveld, c’est bien la difficulté à nommer les couleurs de la toile qui transparaît. Par ailleurs, le manque de ponctuation, l’absence de déterminants, l’énumération, traduisent l’expérience sensible de l’auteur, en rendant compte de la rapidité avec laquelle son regard est emporté par la toile. En effet, si dans plusieurs articles il tente de définir le travail de l’artiste dont il parle (la peinture de Shirley Jaffe est par exemple « une mise à distance de soi », p. 42), il partage aussi avec le lecteur son expérience visuelle. La façon dont ses yeux parcourent la toile fait alors apparaître le modus operandi de l’œuvre et des éléments qui la composent. Toujours à propos de tableaux de Shirley Jaffe, il écrit par exemple que « les formes blanches assurent les transitions » (p. 53). Grâce à ces indications, le lecteur peut à son tour circuler dans l’œuvre, s’en approcher. Contre toute attente, c’est parfois de longs détours qui produisent cette proximité. Eric Suchère enjambe les genres comme un danseur de ballet fait un pas chassé ; il cite d’autres critiques, des musiciens, des textes romanesques, nous emmène loin pour mieux nous ramener au plus près de l’œuvre qu’il partage avec nous.
Pour citer cet article
Référence électronique
Clémence Canet, « Éric Suchère, Motifs & partis pris », Critique d’art [En ligne], Toutes les notes de lecture en ligne, mis en ligne le 09 mai 2018, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/critiquedart/25701 ; DOI : https://doi.org/10.4000/critiquedart.25701
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