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AccueilVolumes32Murzuk [Mourzouk]

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Texte intégral

1Au sud-ouest de la Libye, le Fezzan (Trousset, Gautier, Despois, 1997) occupe un vaste territoire, bordé au sud par l’édeyen (erg) de Mourzuk (Murzuk). Ce massif dunaire (EB XVIII, 1997, carte p. 2781) est l’un des plus vastes du Sahara central, son climat actuel est hyperaride. Ses limites géographiques sont, à l’ouest, l’Erg Uan Kasa et au nord-ouest, le plateau du Messak Settafet. Le paysage général est caractérisé par la présence de dunes et de dépôts lacustres de l’Holocène ancien. Les lacs, formés par la remontée des nappes aquifères locales, alimentés par les pluies saisonnières, sont sous la dépendance des oscillations des moussons africaines (Cremaschi, Zerboni, 2007). Durant l’Holocène ancien et moyen l’alternance de périodes humides et arides a fortement marqué le climat. Rappelons que plusieurs missions scientifiques avaient déjà examiné le territoire et fait état de nombreuses découvertes paléolithiques et néolithiques. Celle conduite par M. Dalloni et Th. Monod (1948) concernait la Géologie et la Préhistoire d’une zone fezzanaise méridionale, celles de N. Petit-Maire traitait du Shati (1982), lac pleistocène de l’édeyen d’Ubari au nord. D’autres encore ont contribué à découvrir et étudier l’Art rupestre, après les travaux pionniers de P. Grazioisi (1942) puis de Jelinek (1984) (EB 1997, ibid, p. 2777-2817).

  • 1 Désigner cette évolution culturelle en utilisant le terme de Néolithisation, comme C. Roubet le pro (...)

2L’édeyen de Mourzouk est retenu ici en raison des récentes précisions apportées par l’étude approfondie (par des analyses spécialisées) des conditions d’installation de nouveaux sites de plein air, témoins d’une présence humaine qui s’est développée au cours de l’Holocène ancien et moyen (géologie, géomorphologie, datations, approvisionnement des matières premières, paléobotanique, palynologie, paléoclimatologie, archéozoologie, genres de vie, etc.). Plusieurs phases climatiques et culturelles d’occupations humaines variables, ont été identifiées1.

  • La phase dite « Acacus (Akakous) Ancien (9800-8900 BP (Di Lernia Garcea, 1997) est bien attestée dans l’édeyen de Mourzouk et dans l’Erg Uan Kasa. Les sites s’y rattachant sont liés à la présence d’étendues lacustres importantes occupant des zones considérées comme des couloirs inter-dunaires. Ces sites de dimensions réduites (diamètre inférieur à 50 m), sont caractérisés par la présence de nombreuses pièces lithiques façonnées en quartz et en silcrète (deux types distincts). La typologie lithique révèle la présence de pièces à dos, de pointes, de lames, de segments aux retouches obtenues sur enclume, qui suggèrent la pratique d’activités spécialisées. La diversité botanique est réduite, aucune céréale sauvage n’a été identifiée (Castelletti et al., 1998). Parmi les espèces animales le mouflon (Ammotragus lervia) est présent, il fit l’objet de chasses sélectives (Corridi, 1998). La présence d’éléments microlithiques suggère aussi la pratique de la pêche (Cremaschi, Di Lernia, 1999). Ce rapide descriptif montre que le genre de vie prédateur caractérise cette période.

  • Après une phase d’aridité attribuée à l’« Acacus Récent » (8900-7400 BP) marquée par une occupation humaine très réduite, de nouvelles conditions s’installent. L’édeyen de Mourzouk se trouve alors occupé par une population de pasteurs (dont on ne peut préciser la provenance).

  • Le « Pastoral Ancien » (7400-6400 BP) s’installe et se développe grâce à une augmentation importante de l’humidité ; les zones d’installation humaine se situent surtout en montagne, au nord-ouest de l’édeyen. On peut penser que ces populations pratiquaient une économie pastorale de production, complémentaire de chasses sélectives, de collectes et de cueillettes de céréales sauvages (Cremaschi, Di Lernia, 1999). La documentation détaillée est mentionnée dans cet ouvrage.

  • Le passage au « Pastoral Moyen » (6100-5000 BP) n’est pas marqué par d’évidents changements climatiques, mais il se déduit d’une très forte diminution du nombre et de l’importance spatiale des établissements. L’occupation humaine est désormais attestée par la présence de tessons céramiques décorés par une impression pivotante du type « Alternatively Pivoting Stamp » découverts à proximité de la zone des grands lacs de l’édeyen de Mourzouk. La diversité des matières premières lithiques, mise en évidence dans les sites étudiés, témoigne d’une relative circulation des roches, en relation – vraisemblablement tantôt avec la fréquentation de sites péri-lacustres et tantôt avec celle de sites localisés en montagne. On pourrait en déduire qu’il s’agit des mêmes groupes humains, fonctionnant selon une organisation saisonnière, exploitant ces deux biotopes majeurs selon une stratégie semi-sédentaire, utilisant alternativement les zones dunaires péri-lacustres et les piémonts et pentes des montagnes.

  • Durant le « Pastoral Récent » (5000-3500 BP) l’aridité est très marquée, l’occupation humaine se replie alors en montagne et autour des points d’eau, guelta (Cremaschi, Di Lernia, 1999). Il s’agit d’établissements dépendants d’un nomadisme pastoral, situés à l’intérieur des limites septentrionales de l’édeyen de Mourzouk. Ces sites sont caractérisés par la présence de foyers et l’absence presque totale de bovidés consommés (ce sont en effet les ossements qui manquent dans les contextes résiduels, mais peut être pas les animaux vivants, en quête de pâturage) (Di Lernia et al., 2002).

3Ce schéma chronologique et culturel est actuellement assez ouvert, à l’avenir il devrait permettre l’insertion de nuances culturelles, locales et régionales, liées aux travaux ultérieurs.

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Bibliographie

On consultera aussi EB, XVIII, 1997, p. 2814-2817.

Castelletti L., Cottini M., Rottoli M., 1998 – « Early Holocene plant remains from Uan Afuda cave (Libyan Sahara)”. In Di Lernia, S., Manzi G., (eds.), Before food production in North Africa. Questions and tools dealing with resources exploitation andpopulation dynamics at 12000-7000 b. p. Workshop of the XIII Congress ABACO, Forlì, p. 91-102.

Corridi C., 1998 – “Faunal Remains from Holocene archaeological sites of the Tadrart Acacus and Surroundings (Libyan Sahara)”. In Cremaschi M., Di Lernia, S. (eds.), Wadi Teshuinat. Palaeoenvironment and Prehistory in South Western Fezzan (Libyan Sahara). Quaderni di Geodinamica alpina e del Quaternario, 7, Milano, p. 89-94.

Cremaschi M., Di Lernia S., 1999 – « Holocene climatic changes and cultural dynamics in the Libyan Sahara”. African Archaeological Review, Vol. 16, No. 4, p. 211-238.

Cremaschi M., Zerboni A., 2007 – “Holocene lacustrine sedimentation in the édeyen of Murzuq (SW Libya)”. Geophysical Research Abstracts, Vol. 9, 08873, European Geosciences Union. (www.cosis.net/abstracts/EGU2007/08873/EGU2007-J-088731.pdf).

Dalloni M. et Monod Th. (1948) – Géologie et Préhistoire (Fezzân méridional, Kaouar et Tibesti Mission scientifique du Fezzân). Instit. de Recherche Saharienne, t. VI, Alger.

Di Lernia S., Garcea E.A.A. (1997) – « Some remarks on Saharan terminology. Pre-pastoral archaeology from the Libyan Sahara and the Middle Nile Valley”. Libya Antiqua, new series 3, p. 11-23.

Di Lernia S., Manzi G., Merighi F., 2002 – « Cultural Variability and human trajectories in later Prehistory of the Wadi Tanezruft”. In Sand, stones, and bones. The archaeology of death in the Wadi Tanezzuft Valley (5000-2000 B.P.), p. 281-302. Graziosi P., 1942 – L’Arte rupestre della Libya. Ed. Mostra d’Oltremare, 2 vol., Napoli, 326 p.

Jelinek J., 1984 – “Mathendush”, In “Galgien, 2 important fezzanese rock art sites”. Anthropologie, t. XXII, 2, p. 117-165, et XXII, 3, p. 237-268.

Petit-Maire N., 1982 – Le Shati. Lacpleistocène au Fezzan. CNRS, 118 p.

Trousset P., Gautier Y et C, Despois, J. 1997 – « Fezzan ». EB XVIII, Edisud, p. 2777-2817.

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Notes

1 Désigner cette évolution culturelle en utilisant le terme de Néolithisation, comme C. Roubet le proposait à l’auteur (in litt. du 30 décembre 2008), reste pour le moment prématuré et peut être inadéquat (« terme un peu trop eurocentrique » pour E. Garcea, G. Mutri, in litt. du 3 janvier 2009) aussi est-ce à dessein qu’il n’a pas été employé.

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Pour citer cet article

Référence papier

G. Mutri, « Murzuk [Mourzouk] »Encyclopédie berbère, 32 | 2010, 5109-5112.

Référence électronique

G. Mutri, « Murzuk [Mourzouk] »Encyclopédie berbère [En ligne], 32 | 2010, document M143, mis en ligne le 11 novembre 2020, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/encyclopedieberbere/657 ; DOI : https://doi.org/10.4000/encyclopedieberbere.657

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