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Dossier thématique : Entre inclusion et exclusion. La double face de la citoyenneté
IV- Une tension dépassable au prix d'une reconceptualisation de la citoyenneté ?

La réforme du Conseil économique, social et environnemental : une citoyenneté en question

Julien Padovani

Résumés

La réforme du Conseil économique, social et environnemental, démarrée en 2008 et achevée en 2021, a été conçue, par les pouvoirs publics, comme un remède à la crise de la démocratie représentative. Proposant de faire du CESE le forum de la République, elle prônait une mutation de la place du citoyen au sein des institutions et ambitionnait de revaloriser la citoyenneté en la reconfigurant. Une telle orientation pose la question de la nature de cette citoyenneté, de sa circonscription, de son rapport à l’exclu, etc. L’étude descriptive du discours et des mécanismes institués révèle pourtant une ambition chimérique : le CESE demeure enserré dans son étau originel renforcé par une citoyenneté artificielle, incapable de donner au citoyen un pouvoir effectif.

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Texte intégral

« Quelle que soit la conception qu’on se forme de la vie sociale, on ne peut méconnaître qu’une société ne se compose pas seulement d’individus isolés et, placés seuls en face de l’État, mais encore de groupements, d’unions organiques, ayant leur vie propre distincte de la vie individuelle, et notamment de groupes ouvriers, industriels, agricoles, scientifiques, administratifs […]. Il n’est pas permis à l’homme politique, au législateur, d’y rester indifférent ; et pour reprendre une formule célèbre, nous serions tentés de dire : un pays, où la double représentation des individus et des groupes n’est pas assurée, n’a point de constitution ».

  • 1 « L’élection des Sénateurs », Revue politique et parlementaire (RPP), 1895, t. 5, p. 463.

(Léon Duguit1)

  • 2 Si l’institution (dans ses différentes versions sous la Ve République) fait régulièrement l’objet d (...)
  • 3 Voir le constat dressé par Dominique-Jean Chertier, Pour une réforme du CESE, Rapport au Président (...)
  • 4 Voir infra.

1La reconceptualisation de la citoyenneté prend pour terrain de jeu inédit une institution assez méconnue : le Conseil économique, social et environnemental (ci-après CESE2). Objet politique et juridique mal identifié, il n’a jamais véritablement trouvé sa place, ni au sein des institutions de la République, ni auprès des citoyens, ni au sein de la doctrine universitaire3. La réforme récente de l’institution, qui avait pour but d’en faire l’un des principaux remèdes à la « crise de la démocratie4 », a donné l’occasion de poser à nouveau la question de sa place et donc de sa légitimité.

  • 5 Danièle Lochak, « Nationalité et citoyenneté », Raison présente, 1992, n° 103, p. 24.

2Il n’est pas question de revenir ici sur la pertinence du recours au vocabulaire de crise pour désigner l’état de la démocratie française, mais de comprendre qu’elle est un objet de traitement politique : les gouvernants ont en effet, semble-t-il, dressé le même constat que celui formulé par le professeur Danièle Lochak il y a déjà trente ans : « On a fini par s’apercevoir que la citoyenneté réduite au droit de vote était une citoyenneté pauvre, étriquée, incapable d’assurer à chacun une emprise réelle sur les décisions collectives qui affectent son existence dans son travail ou dans sa vie quotidienne5 ». Actant ce qui est, en grande partie, la manifestation d’une distension du lien entre représentants et représentés, les pouvoirs politiques ont choisi d’y répondre, depuis 2008, par un ensemble de réformes.

  • 6 En détail, il s’agit donc des modifications apportées par les lois suivantes : loi constitutionnell (...)
  • 7 Exposé des motifs de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.
  • 8 Olivier Beaud, « Ouverture », Jus Politicum, n° 27 (Formes de la citoyenneté), 2022, [Ebook], p. 5.

3À titre liminaire, il convient de préciser ce que l’on entend par « réforme » dans cette étude. Plutôt que de s’en tenir à une seule réforme du point de vue du droit positif, il a été choisi d’élargir le champ d’étude et de considérer comme une la réforme initiée par la révision constitutionnelle de 2008 et achevée par la révision de l’ordonnance organique prévue par la loi organique de 20216. L’unité de cette réforme peut être identifiée dans la volonté des pouvoirs publics de faire en sorte que « les citoyens soient davantage écoutés » et que « leurs aspirations soient mieux prises en compte7 ». Ces modifications contribuent, du point de vue de leur finalité, à faire du CESE le remède de la crise de la démocratie représentative. Elles laissent apercevoir une volonté de modifier le rapport de l’individu-citoyen à l’État et une reconfiguration de la citoyenneté – entendue comme le » statut juridique du citoyen8 ».

  • 9 Et ici se situe sans doute l’une des raisons de la marginalisation dudit conseil à travers les époq (...)
  • 10 Alain Chatriot, La démocratie sociale à la française, op. cit., p. 2.
  • 11 Madeleine Rebérioux, in Pierre Rosanvallon, « Citoyenneté politique et citoyenneté sociale au XIXe (...)

4Un détour historique s’avère alors pertinent en prélude, afin de situer le lien originel qu’entretient le citoyen avec l’institution qui plonge ses racines dans la période de la IIIe République. L’évocation du Conseil national économique (ci-après CNE), ancêtre du CESE, permet de comprendre la manière dont cette institution a été insérée au sein d’un système politique aux instances représentatives particulièrement légitimes s’il en est9. Si, a priori, il est difficile de comparer les contextes politiques du début du XXe siècle et d’aujourd’hui, celui dans lequel fut créé le CNE comporte de grandes similitudes avec celui qui a abouti à la réforme étudiée : celui d’une réponse à la crise de la démocratie. Se replonger dans cette histoire, c’est comprendre à quel point les questions posées aujourd’hui furent débattues hier. L’historien M. Alain Chatriot rappelle à ce titre que les » questions concernant les formes de l’État, son rôle dans l’économie et la société, ainsi que les formes de la démocratie, y compris lorsqu’elle était déclarée en crise, avaient été au cœur des réflexions politiques des années vingt et trente10 ». Madeleine Rebérioux racontait d’ailleurs comment, dès la fin de l’affaire Dreyfus, on avait procédé à la réintroduction de « pratiques citoyennes11 », à travers les pétitions locales, ce qui n’est pas sans rappeler, là aussi, la réforme étudiée.

  • 12 Léon Duguit, « La représentation syndicale au Parlement », RPP, 205, LXIX, 1911, p. 40.
  • 13 Stéphane Pinon, « La représentation parlementaire des groupes sociaux et des intérêts professionnel (...)
  • 14 Voir Jean-Pierre Le Crom, « Le Conseil national économique », in M.-O. Baruch et V. Duclert (dir.), (...)
  • 15 Ernest Billiet, Débats parlementaires, Sénat, séance du 20 avril 1926, JO, p. 936 (Gallica) : « Je (...)
  • 16 Gustave Perreau, Débats parlementaires, séance du 6 mars 1936, JO, p. 223 (Gallica).
  • 17 Loin d’autres instances que l’on retrouve dans d’autres États aux pouvoirs plus étendus en matière (...)
  • 18 Voir, pour le Conseil économique de la IVe République, Maurice Aubry, Le Conseil économique françai (...)

5Comment le CNE est-il alors introduit dans le système politique de l’époque ? Il s’agit d’un organe représentatif – lui-même forme aboutie du Conseil économique du travail mis en place par la CGT en 1919 –, qui vise à refonder la représentation des corps professionnels et, en particulier, des syndicats, dans la lignée des préconisations d’intellectuels de l’époque, au premier rang desquels Léon Duguit. Selon ce dernier, « on n’aura rien fait pour l’organisation de la représentation politique tant qu’on n’aura pas assuré au Parlement la représentation des groupes corporatifs ou syndicaux12 ». L’ancien doyen proposait de fonder la composition d’une chambre parlementaire sur le principe de la représentation syndicale, au sein d’un système bicaméral proche de celui mis au vote par le général de Gaulle en 1969. Il s’agissait, pour reprendre la formule de M. Stéphane Pinon, de « saisir les citoyens dans leurs différents modes de sociabilité13 ». La création du CNE, mais aussi de ses successeurs (le Conseil économique en 1946, le Conseil économique et social en 1958, puis le CESE en 2008), s’inscrit dans cette perspective, même si le légicentrisme parlementaire veillera, sous la IIIe République et par la suite, à maintenir l’institution à l’écart du véritable pouvoir14. Des inquiétudes avaient, en effet, été largement exprimées. On retrouve, par exemple, dès l’exposé des motifs du décret portant création du CNE, la mise en garde suivante concernant l’institution : elle « ne sera, en aucune façon, un parlement ou même une chambre professionnelle, comme cela a été tenté dans certains pays voisins. Elle laisse entières la souveraineté du Parlement et l’autorité gouvernementale ». L’expression de craintes lors des débats sur la pérennisation du CNE par la loi en 1936 fut également vive, certains parlementaires s’offusquant de ce Parlement « au petit pied15 » constituant, au fond, une « négation pure et simple du Parlement16 ». Pourtant, on est loin d’un Parlement bis, le CNE s’apparentant bien plus à une instance de démocratie consultative17. Supprimé par le gouvernement de Vichy, le CNE reverra le jour en 1946, sous une autre forme mais construit sur les mêmes fondements et accédant à la consécration constitutionnelle à travers le Conseil économique, lequel deviendra également social en 1958 et environnemental en 200818.

  • 19 Stéphane Pinon, « La représentation parlementaire… », art. cité, p. 118.
  • 20 Marcel Prélot, Intervention lors de l’assemblée constituante, 9 avril 1946, cité par S. Pinon, « La (...)

6À l’origine et par la suite, le lien entre citoyenneté et CESE apparaît donc ténu, l’instance étant voulue comme représentative des groupes ou corps intermédiaires, et non des individus. Dans cette perspective, le citoyen n’est, en apparence, pas très présent, si ce n’est suivant une dimension à la fois collective et indirecte : les groupes économiques et sociaux jouent, en quelque sorte, le rôle occupé par la nation ou les collectivités territoriales dans l’une et l’autre chambre du Parlement français de la Ve République. Il reste que, ce faisant, il apparaît toujours en bout de chaîne et la réflexion portant sur la représentation de ces groupes n’est finalement pas autre chose qu’une réflexion sur la meilleure manière de « saisir les citoyens dans leurs différents modes de sociabilité19 ». Cela ressort des écrits des principaux penseurs de la première moitié du XXe siècle ayant prôné la représentation des groupes économiques et sociaux, lato sensu. Marcel Prélot estimait, par exemple, qu’il fallait instaurer une « démocratie de groupes qui ne se contente pas de saisir le citoyen en tant que tel, mais qui cherche aussi à saisir le peuple organisé […]. Si l’on veut une démocratie pluraliste, si l’on désire incarner le citoyen dans les différents groupes sociaux, il faut bien qu’à côté de la première chambre, il y en ait une seconde qui sera précisément chargée de cette représentation des groupes20 ».

  • 21 Voir, sur les questions de légitimité, Alain Chatriot, « Les apories de la représentation de la soc (...)
  • 22 Dominique-Jean Chertier, Pour une réforme du CESE, op. cit., p. 46.
  • 23 Emmanuel Macron, Discours du Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès, Versa (...)
  • 24 Ibid.
  • 25 Xavier Darcos, Dictionnaire amoureux de la Rome antique, Plon, 2011, p. 257.
  • 26 Emmanuel Macron, Discours du Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès, préc.
  • 27 Voir la contribution de l’auteur dans ce numéro.
  • 28 Il ambitionnait alors de faire du CESE « un lieu de rencontre entre la société civile organisée et (...)

7Cette version de l’institution n’a toutefois jamais été prise au sérieux, pour des raisons relevant à la fois de questions relatives à sa légitimité (usurpation de sa place, déficit de représentation) et à son efficacité (dispersion du pouvoir)21. Prenant acte de ces carences, les pouvoirs publics ont opté, dès 2008, pour une réforme d’ampleur afin d’en améliorer le rôle : « la situation impose, sinon une thérapie de choc, au moins un traitement de fond », relevait M. Dominique‑Jean Chertier en conclusion de son rapport au Président de la République plaidant pour une réforme du CES22. Initiée par la révision constitutionnelle de 2008 qui en a notamment modifié le nom, cette réforme a pris d’autres atours sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, ce dernier projetant de faire de l’institution la « chambre du futur, où circuleront toutes les forces vives de la Nation23 ». Le Président nouvellement élu affirmait qu’il devait constituer le « forum de la République24 », en référence au forum romain où, à l’apogée de la Rome antique, « chaque événement militaire ou politique y fut débattu politiquement25 » : « il en va de la représentativité de notre démocratie. Une représentativité qui ne vivrait pas seulement une fois tous les cinq ans, mais au quotidien dans l’action du législateur26 ». Suivant cette nouvelle version, le CESE deviendrait cette instance de la « démocratie continue » chère au professeur Dominique Rousseau27. Originellement fondé comme le conseil des organisations représentatives, il ambitionnait désormais de devenir le « carrefour des consultations publiques », voire le « conseil de la participation citoyenne », ainsi que le projet de loi constitutionnelle déposé en 2019 le prévoyait28. Ici se situe un bouleversement structurel dans la conception de l’institution, qui passe d’une instance représentative des intérêts corporatifs à une instance mixte lui associant la représentation des citoyens, de manière bien plus directe. Si le rapport du Conseil à la citoyenneté fut empreint d’une grande discrétion jusqu’alors, il est désormais plus apparent et assumé, suivant une perspective d’une autre nature.

8On s’interrogera alors sur la manière dont la réforme du Conseil économique et social a pu transformer cette conception et ce qu’elle révèle des usages de la citoyenneté. En filigrane, la question qui apparaît, au service de la réflexion générale proposée par le colloque, est bien de savoir si (et dans l’affirmative, de quelle manière) la réforme du CESE participe à transformer le rapport de cette institution au citoyen. De quel citoyen parle-t-on ? Si l’usage de la notion de citoyenneté diffère, n’est-ce pas la forme de démocratie qui évolue, à travers elle, ou inversement, n’est-ce pas finalement la restructuration de l’expression démocratique qui modifie la nature de la citoyenneté ? Peut-on considérer qu’elle traduit une nouvelle forme de rapport de l’individu au politique, ou bien qu’elle le nourrît voire l’initie ? Enfin, comment se situe la fameuse tension structurant la citoyenneté à travers elle, entre d’une part, la citoyenneté-communauté politique et, d’autre part, la citoyenneté-droits des citoyens ?

  • 29 Xavier Darcos, Dictionnaire amoureux de la Rome antique, op. cit.
  • 30 Ibid.
  • 31 Lewis Mumford, La cité à travers l’histoire, Agone, coll. Mémoires sociales, 2011, p. 170.
  • 32 Voir Michel Humm, La République romaine et son empire, Armand colin, 2018, p. 51-70 ; Jean-Vincent (...)
  • 33 Sur la notion de modèle, voir Véronique Champeil-Desplats, Méthodologies du droit et des sciences d (...)

9Pour y répondre, il a été choisi de prendre au sérieux la métaphore du forum mobilisée par le président de la République, en procédant, en quelque sorte, à un « calcul de défauts ». M. Xavier Darcos rappelle qu’étymologiquement, le forum c’est le « dehors » et que « venir au forum, c’est sortir, quitter le chez soi, aller à la rencontre de la vie commune, rejoindre la collectivité29 ». Cette perspective est intéressante pour la question de la citoyenneté car elle exprime l’idée que la fonction originelle du forum romain est de créer un lieu où les citoyens « viennent, parlent politique, négocient, font des courses, demandent justice, débattent de tout et de rien30 ». On retrouve ici la citoyenneté à la fois dans sa dimension sociale mais aussi politique. Le forum est donc, dans l’histoire et l’imaginaire collectif, ce vieux « cœur civique » à Rome31. Cette étude ne sera évidemment pas le lieu d’interroger la nature démocratique de la République romaine, controverse très présente chez les historiens32, mais bien de prendre le forum comme modèle/idéal-type descriptif à la manière dont y font référence les pouvoirs publics33. On s’interrogera alors sur la question de savoir si la réforme conduit véritablement à faire du CESE ce cœur civique et donc si la modification du rapport du CESE au citoyen se fait bien dans la perspective voulue.

  • 34 Il convient de préciser que l’idée de valorisation est ici appréhendée à travers un jugement dit sc (...)

10L’étude de la réforme du CESE révèle deux faces bien distinctes : la première, versant optimiste de la réflexion, suggère l’idée qu’en apparence, la réforme est au service de ce qu’on appellera une revalorisation de la citoyenneté (I). La seconde, versant pessimiste, mais probablement plus lucide, révèle que tout cela n’est sans doute qu’une chimère34 (II).

I - Une reconfiguration au service d’une valorisation de la citoyenneté

11De prime abord, il convient de prendre la réforme du CESE au sérieux et d’admettre qu’elle suggère, en apparence, une reconfiguration de son rapport au citoyen (A), placée au service d’une valorisation de ce rapport (B).

A - Une reconfiguration annoncée du rapport à la citoyenneté

  • 35 Vidéo de présentation du CESE, site internet du CESE.
  • 36 Ibid.
  • 37 Exposé des motifs de la loi organique de 2021.
  • 38 Ibid.
  • 39 Site internet du CESE.

12La réforme du CESE est mue par la volonté de reconfigurer la place du citoyen. Le parallèle avec le forum l'atteste, l’institution devant constituer ce lieu de débat, à la manière de la convention citoyenne pour le climat. « Trait d’union entre les pouvoirs publics et la société civile35 », « lieu où s’organise le débat avec les représentants de la société civile organisée et avec les citoyens36 », « forum de la société civile37 », « carrefour des consultations publiques38 », « institution de référence en matière de participation citoyenne39 », le citoyen est largement mobilisé dans le discours politique et institutionnel et cela se concrétise, au‑delà, par les actes.

13En premier lieu, tout en en relativisant l’importance comparativement aux autres évolutions, l’élargissement aux thématiques environnementales, en 2008, de la compétence matérielle du CESE, a renforcé sa qualité de conseiller et contribue au raffermissement de son lien avec la société civile. En second lieu, l’on peut identifier la mutation la plus importante du rapport du CESE à la citoyenneté dans sa nouvelle fonction de chambre de la participation citoyenne et ce, à deux égards au moins.

  • 40 Art. 4-1 de l’ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil é (...)
  • 41 Voir Yann-Arzel Durelle-Marc, La naissance du droit de pétition. Contribution à l’histoire de la dé (...)
  • 42 Présentation sur le site du CESE.
  • 43 Ibid.

14D’abord, la mue se produit par l’instauration du droit de pétition devant le CESE. Introduit en 2008 par la révision constitutionnelle et renforcé en 2021, il permet à 150 000 citoyens (500 000 avant 2021) de saisir le Conseil d’une demande d’avis en assemblée plénière, dans les six mois, lequel avis est transmis au Premier ministre ainsi qu’aux présidents des assemblées parlementaires, avec publication au Journal officiel40. Le lien à la citoyenneté est alors exprimé dans ce mode de saisine, le droit de pétition41. Le lien entre le CESE et le statut du citoyen est reconfiguré à la lumière de la circonscription des pétitionnaires-citoyens : là où la citoyenneté est généralement associée au droit de vote, la loi organique de 2021 a abaissé l’âge des pétitionnaires à 16 ans (contre 18 ans auparavant), tandis que ce ne sont plus seulement les nationaux qui en sont titulaires mais également les étrangers résidant régulièrement en France. Ici apparaît un élément de reconfiguration du statut juridique et politique du citoyen car figurent, parmi les pétitionnaires, les habituels exclus de la citoyenneté. La réforme du CESE s’inscrit donc dans une perspective d’élargissement de ce statut juridique. L’institution a également été conduite à assumer, dès 2017, une mission de « veilleur des pétitions », visant à « observer les attentes de la société », procédant également à une labellisation des plateformes de pétition pour « permettre une relation toujours plus directe avec les citoyens42 ». Les représentants de l’institution considèrent que c’est parce qu’il doit prendre en compte « la parole citoyenne individuelle construite en dehors de toute institution ou organisation » que le CESE en assume cette mission (qui est, d’ailleurs, autoproclamée43). C’est là un des éléments de transfiguration évident de son rapport à la citoyenneté.

  • 44 Art. 4-3 ordonnance n° 58-1360 préc.
  • 45 Curiosité d’une procédure qui s’inscrivait pourtant dans le même temps que celui de la valorisation (...)
  • 46 Rapport du 9 mars 2022 (sur lettre de saisine du 27 septembre 2021 (https://www.lecese.fr/sites/def (...)

15Ensuite, le CESE peut désormais associer le public à l’exercice de ses missions. Cela se traduit par la possibilité d’organiser des consultations publiques (soit à son initiative, soit à la demande du Premier ministre ou des présidents des assemblées), conventions citoyennes, plateformes numériques, etc. Dans cet exercice, le CESE peut décider de recourir au tirage au sort « pour déterminer les participants de la consultation44 ». En pratique, le CESE a déjà mis en œuvre ces dispositions. Outre la convention citoyenne qu’il a abritée, mais qui ne relevait pas d’une mission officielle du CESE45, il a associé, plus récemment, douze « citoyens » tirés au sort dans le cadre des travaux relatifs à l’engagement et à la participation démocratique des jeunes46.

  • 47 Voir supra.

16La réforme du CESE propose donc une forme de reconfiguration de la citoyenneté, par la concentration de prérogatives civiques autour d’une même institution, permettant la canalisation de la pensée civique vers ce nouveau forum de la République. Cette « forumisation » accompagne le mouvement de réponse à la crise démocratique, suivant les modalités d’une « démocratie continue47 » qui aboutit à modifier le contenu de la citoyenneté, c’est-à-dire ce rapport de l’individu à la participation aux prises de décision lato sensu. C’est ce qui conduit l’institution à prôner une revalorisation de la citoyenneté.

B - Une revalorisation espérée de la citoyenneté

  • 48 Rapport commission des lois constitutionnelles.
  • 49 Danièle Lochak, « Nationalité et citoyenneté », art. cité, p. 21.
  • 50 Voir sur la définition du citoyen, les entrées « citoyen actif-passif » et « démocratie », in Miche (...)

17La reconfiguration du rapport du CESE à la citoyenneté s’est réalisée, dès 2008, dans la perspective d’une revalorisation des processus démocratiques et, partant, de la citoyenneté. C’est ainsi que dans son rapport sur le projet de loi constitutionnelle, M. Jean‑Luc Warsmann estimait que la rénovation de l’institution participait à « renforcer la place du citoyen » dans les institutions françaises48. En effet, en apparence, on peut considérer que la réforme se situe bien dans le cadre de ce que le professeur Danièle Lochak nomme les « nouvelles citoyennetés49 ». Il s’agit alors de prendre acte de ce que le citoyen ne peut pas seulement être le destinataire de normes, l’auteur d’un vote ponctuel, etc. Par définition, le citoyen est celui qui participe, de manière concrète et continue, à la vie de la cité, ce que consacre l’idée de forum50. À travers l’ambition qu’elle formule, la réforme du CESE propose un renforcement du lien originel entre le citoyen et la cité, tout en nouant un lien entre citoyenneté continue et discontinue.

  • 51 Voir les exemples cités par Dimitri Courant et Yves Sintomer, « Le tirage au sort au XXIe siècle. A (...)
  • 52 Voir l’art. 4 de l’ordonnance organique sur le CESE.

18En premier lieu, la valorisation de la citoyenneté passe par le renforcement de la position originelle du citoyen en démocratie : sa participation au gouvernement de la cité. Elle s’y attelle à deux égards : d’abord, indirectement, via la représentation accrue des corps intermédiaires, dont on a pu rappeler qu’ils produisaient une forme de représentation des citoyens ; ensuite et plus directement, au moyen du renforcement de l’activité de conseil, du droit de pétition et du tirage au sort. Le tirage au sort est alors souvent présenté comme un remède à la crise de la démocratie représentative, dans la lignée des expériences proposées par un certain nombre de démocraties occidentales51. Il permettrait un rapatriement des citoyens dans l’action politique et, par la détermination préalable de paramètres, rendue possible par les textes relatifs au CESE, il comblerait les lacunes de la représentativité52. Ensuite, la valorisation du lien citoyen-cité passe par un élargissement du cercle des citoyens. La réforme crée les conditions pour qu’un maximum d’individus puisse participer à la prise de décision, en relayant la figure de l’exclu le plus loin possible : le non-national et le mineur ne sont plus exclus de cette expression civique et la citoyenneté est donc abordée suivant une perspective plus inclusive.

19En second lieu, ce renforcement du lien citoyen-cité est doublé d’une valorisation du lien entre démocratie continue et discontinue. En effet, la réforme met en lumière au moins deux types de citoyenneté, du point de vue de ses modalités d’expression dans le temps : d’une part, la citoyenneté de la démocratie discontinue – celle du vote aux élections et référendums –, perçue à travers une conception classique du citoyen comme membre d’un corps politique ; d’autre part, la citoyenneté de la démocratie continue, laquelle révèle une dimension plus individuelle, associée au deuxième pôle de la tension évoquée dans la présentation du colloque, légitimée par les droits et libertés fondamentaux. La citoyenneté se trouve alors revalorisée par le lien tissé entre la démocratie continue et la démocratie discontinue : en associant un panel plus large de citoyens à la prise de décisions quotidienne, on redonne goût à l’expression démocratique discontinue. Les citoyens de la première sont les citoyens de la seconde et quand la première permet la prise de contact avec la démocratie, la seconde redonne goût à la première. La citoyenneté discontinue est alors placée au service de la démocratie continue et la réforme du CESE est de ce point de vue cohérente.

20Cette double valorisation de la citoyenneté est conçue, en outre, comme palliatif d’une crise de la démocratie et, à travers elle, de la représentativité. Les objectifs poursuivis produisent alors en cascade une valorisation de la valorisation, ayant potentiellement des effets bénéfiques sur la démocratie. Que l’on songe par exemple au droit de pétition, suivant la lecture de M. Yann-Arzel Durelle-Marc :

  • 53 Yann-Arzel Durelle-Marc, « Le droit de pétition. Le paradoxe d’une prérogative du citoyen en régime (...)

« Le droit de pétition – dans son acception politique – considéré comme prérogative du citoyen (individuellement ou collectivement) accordant à ce dernier un droit de participation (délimité) dans le cadre du gouvernement représentatif, offre à celui-ci un instrument permanent de continuité politique, c’est-à-dire de maintien du dialogue entre gouvernants et gouvernés, entre les échéances électorales […]. L’état du droit de pétition exprime par conséquent celui de la confiance et de la considération réciproque des citoyens et de leurs représentants53 ».

  • 54 Madeleine Rebérioux, in Pierre Rosanvallon, « Citoyenneté politique et citoyenneté sociale au XIXe (...)

21Il serait sans doute présomptueux de considérer que la reconfiguration de la citoyenneté proposée par la réforme est en elle-même nouvelle, et l’introduction de mécanismes de participation des individus aux affaires publiques n’est, le plus souvent, qu’une « réintroduction de pratiques de citoyenneté54 ». Il reste que le CESE fait office de nouveau « terrain de jeu » pour la citoyenneté et que les pouvoirs publics ont fait le pari d’une reconfiguration-revalorisation. L’analyse de cette restructuration ne peut faire l’impasse d’une interrogation relative à son efficacité, à sa légitimité et à sa pertinence. L’étude de ses moyens et de ses finalités révèle alors une conception de la citoyenneté en trompe-l’œil.

II - Une revalorisation chimérique de la citoyenneté

22Il a été choisi jusque-là de prendre les pouvoirs publics au sérieux et de proposer de déceler dans le discours politique et institutionnel une forme d’unité dans la revalorisation de la citoyenneté. Dans une perspective plus critique et pour en mesurer la portée, il faut toutefois se demander si les pouvoirs des citoyens sont effectivement renforcés par la reconfiguration proposée par la réforme. En d’autres termes, il faut qu’au civis corresponde une potestas, au demos un kratos. Ce lien ne paraît pas pouvoir être établi, et ce pour au moins deux raisons : d’abord, l’objet de la réforme, le citoyen, n’est pas clairement identifié, un flou régnant autour du concept de citoyenneté en général ; ensuite, à ce citoyen mystérieux ne correspond pas de pouvoir effectif. Le recours à l’image de la chimère permet alors de restituer l’analyse : figurativement, la réforme crée, en effet, d’une part, un animal fabuleux ou plutôt, une bête étrange, insusceptible de permettre de saisir le concept de citoyenneté mobilisé : c’est l’inconsistance du civis (A) ; elle produit, d’autre part, une illusion, parce que le projet, ambitieux, est irréalisable en l’état : c’est la faiblesse de la potestas (B).

A - À la recherche du concept de citoyenneté ou l’inconsistance du civis

  • 55 Voir Joëlle Zask, « Le public chez Dewey : une union sociale plurielle », Tracés. Revue de Sciences (...)
  • 56 Exposé des motifs du projet de loi organique par le Garde des Sceaux, mais aussi sur le site du CES (...)
  • 57 Exposé des motifs.
  • 58 Voir sur ce concept, John Dewey, Le public et ses problèmes, Folio, coll. Essais, 2010.
  • 59 Site internet du CESE.

23En premier lieu, pour qu’il y ait démocratie, il faut identifier un demos, ou plutôt, ici, un civis. C’est toute la difficulté en l’espèce car la réforme proposée du CESE engendre une chimère, en ce qu’elle cible une citoyenneté conceptuellement insaisissable. D’abord, et ce n’est pas le moindre des défauts, l’usage qui est fait par le CESE de la notion même de citoyenneté interpelle sur le plan conceptuel. Mobilisée à tous égards, l’on peine à en tracer les contours. Un exemple l’atteste, celui de l’assimilation, dans le discours, de la citoyenneté à la notion de public. Tandis que l’ordonnance organique n’utilise à aucun moment la notion de citoyen ou de citoyenneté (pas plus que la Constitution d’ailleurs, s’agissant du CESE), elle mobilise la notion de public (art. 4-2 et 4-3) dont on sait qu’elle recèle une connotation particulière55. Pourtant, le discours entourant la réforme est largement porté sur le champ lexical du citoyen : « pétition citoyenne56 », « forum de la société civile57 », « chambre de la participation citoyenne58 », « ouverture de l’institution » aux « citoyennes et citoyens », par des « conventions citoyennes » et des « groupes de citoyens » tirés au sort59. À l’évidence, le discours institutionnel est marqué par la communication politique, la notion de public ne satisfaisant pas les pouvoirs publics et le CESE. La confusion public/citoyen atteint alors la substance même de la notion de citoyenneté, qui en ressort affaiblie.

  • 60 Phénomène évoqué par le professeur Bruno Daugeron lors des débats du colloque.
  • 61 Académie française, « Dire, ne pas dire : Citoyens » (https://www.academie-francaise.fr/citoyen). S (...)
  • 62 Le CESE n’est d’ailleurs pas le seul à procéder ainsi : voir la critique proposée par Olivier Beaud(...)
  • 63 Ibid.

24Les marques de la communication politiques sont également visibles à l’aune de la mutation du vocabulaire, en particulier à travers le passage du substantif à l’adjectif (là où la langue française disposait déjà des adjectifs « civique » et « civil »)60. L’Académie française avait d’ailleurs regretté le « curieux usage du nom Citoyen, qui devient un adjectif », estimant qu’au « fil des extensions, Citoyen entraîne dans sa dérive le mot de Citoyenneté, dont le sens s’affaiblit de la même manière61 ». Sans précision suffisante, un concept ou une notion perd de sa force. Ici c’est la citoyenneté qui en ressort galvaudée62 : « il n’y a de bonne manière de penser que si l’on sait de quoi l’on parle et si l’on sait bien délimiter l’objet de sa réflexion63 ».

25Enfin, la bizarrerie conceptuelle se manifeste avec le plus de force dans la détermination de la qualité de citoyen. Alors qu’elle semblait être vertueuse à l’égard de la démocratie, la dualité envisagée entre la citoyenneté continue et discontinue tend également à brouiller le contenu de celle-ci. Elle implique de distinguer deux types de citoyennetés en fonction de la nature des prérogatives exercées par les citoyens : une citoyenneté élargie dans le premier cas et une citoyenneté restrictive (et plus classique) dans le deuxième, renvoyant à la question de l’exclu de la citoyenneté, les concernés étant différents selon la conception retenue. Il y a donc ici une citoyenneté variable qui n’est pas sans poser une difficulté logique : celle de l’identification des membres du corps politique, cibles de la réforme et par conséquent, des nouveaux modes de participation au pouvoir.

26Il est intéressant de constater que ces carences notionnelles se produisent concomitamment au basculement identifié par Mme Camille Aynès dans la présentation du colloque : de la citoyenneté en tant que rattachement à un corps politique, relativement simple à circonscrire, à la citoyenneté en tant qu’expression d’un droit, plus complexe à mobiliser, le discours évolue au gré de la subjectivisation et de la relativisation du phénomène : la citoyenneté constitue désormais un outil de communication à la malléabilité proportionnelle au nombre de destinataires envisagés.

27Par-delà ce flou, ce sont également les modalités pratiques de la réforme et donc son efficacité qui prennent les atours d’une chimère, sans doute en grande partie à cause de la dissociation qu’elle révèle entre le civis et la potestas.

B - À la recherche du pouvoir des citoyens ou l’impasse d’un civis sans potestas

28En second lieu, pour produire ses effets et valoriser effectivement la citoyenneté et, au-delà, la démocratie, la réforme aurait dû permettre au citoyen de disposer d’un véritable pouvoir : celui de participer à la prise de décision publique. Alors que le citoyen apparaît mal identifié, il est en outre affublé de prérogatives ne lui permettant pas de disposer d’un pouvoir, marquant la réforme du sceau de l’impuissance.

  • 64 Art. 1er de l’ordonnance organique préc. Élément rappelé d’ailleurs par Denis Baranger, « Démocrati (...)
  • 65 Ibid.
  • 66 Ibid.

29D’abord, la réforme formule une ambition qu’elle n’arrive pas à garantir : la mise en place d’un forum au service d’un accroissement du pouvoir entre les mains du peuple. Or, difficile de ne pas constater que le pouvoir dont dispose le CESE – et, à travers lui, les citoyens – est particulièrement réduit en comparaison de l’ambition formulée. Précisons, d’abord, qu’en dépit de ces évolutions, l’institution reste « auprès des pouvoirs publics une assemblée consultative64 ». Ainsi que le rappelle le professeur Denis Baranger, « malgré sa reconnaissance constitutionnelle, le CESE n’est ni une assemblée parlementaire ni un pouvoir public65 ». Par ailleurs, et c’est là que le bât blesse, « il n’exprime pas la Volonté Générale et n’a aucun pouvoir normatif66 ». L’instauration de nouvelles formes de consultation, voire l’introduction d’une dose de participation civique ne changent rien à cet état des choses et à supposer même que ces mécanismes soient, à l’avenir, largement sollicités (ce qu’ils ne sont pas à l’heure actuelle), ils ne permettent pas l’expression d’un pouvoir, au sens classique du terme.

30À ce titre, le droit de pétition est révélateur de la dimension chimérique de la réforme : quels intérêts et quelles attentes peut avoir un citoyen à déposer une pétition devant le CESE ? Le contraindre à se saisir d’une question pour avis, rendu par des conseillers (aidés de quelques citoyens tirés au sort) potentiellement peu en phase avec la raison d’être de la pétition, sans véritable suite. La meilleure preuve de la faiblesse de cette prérogative fut donnée par le CESE lui-même, en 2013, lorsqu’il refusa d’examiner la première pétition civique qu’il reçut depuis l’instauration du système en 200867. Alors que le président du CESE de l’époque avait affirmé que son institution n’était pas « une instance de recours pour contester une décision politique, ni une instance disposant d’un pouvoir suspensif pour freiner une décision politique68 », le bureau avait conclu à l’irrecevabilité de la pétition en vertu du fait que « la saisine du CESE pour avis sur un projet de loi relève exclusivement du Premier ministre. Celle-ci ne saurait ainsi être autorisée par voie de pétition citoyenne69 ». Cette expérience a largement marqué le CESE et l’argumentation retenue atteste qu’au-delà de cette prérogative civique, le pouvoir entre les mains des citoyens demeure particulièrement faible70.

  • 71 Denis Baranger, « Démocratie participative : l’inopportune réforme du CESE », art. cité.
  • 72 Sur la critique du passage par la voie législative (même organique), voir Denis Baranger, ibid.
  • 73 Michel Chauvière et Marcel Jaeger, « Démocratie consultative ou administration consultative ? Les e (...)
  • 74 Que l’on songe, par exemple, à la victoire du « non » lors du referendum de 1969.

31Le fond du problème réside sans doute aussi, en second lieu, dans la nature de la fonction du CESE promue par la réforme et son décalage avec la réalité. Présenté comme une chambre de la participation « citoyenne », il pose la question de la signification de cette participation : doit-on considérer que le CESE est une instance de démocratie participative ? Ce faisant, à quoi participe donc le citoyen ? Si l’on considère que la démocratie participative est une « forme de discussion politique entre des citoyens et des gouvernants71 », une telle qualification ne peut être pertinente : le CESE n’est pas, constitutionnellement, une instance gouvernante. Le citoyen ne participe donc pas, à travers lui, à l’élaboration des politiques publiques. À ce titre, la critique en illégitimité qui affecte l’institution depuis sa création apparaît confortée par la réforme. En tentant de renforcer, par la voie législative, les prérogatives d’une institution au sein d’un régime représentatif dont la légitimité est principalement incarnée par les pouvoirs publics constitutionnels, l’on nourrit la critique en usurpation72. Le professeur Marcel Jaeger rappelle, à ce titre, que « la Révolution française avait condamné les pratiques qui consacraient la force des corps intermédiaires, les jugeant fondamentalement incompatibles avec le concept de représentation politique. Seul le citoyen abstrait, dépouillé de ses attaches sociales ou professionnelles, est à même de formuler la volonté générale sur laquelle est fondée la souveraineté (du peuple73) ». Certes, les promoteurs de la représentation des corps professionnels et sociaux s’inscrivaient en faux contre cette philosophie. Il reste que l’évolution politique du XXe siècle a eu tendance à conforter la vision révolutionnaire74.

  • 75 Joëlle Zask, Participer. Essai sur les formes démocratiques de la participation, Le Bord de l’eau, (...)

32Enserré dans l’étau de son illégitimité, le CESE ne parvient alors pas à se hisser au cœur de la « démocratie participative ». Il reste, au mieux, cantonné à une instance de « démocratie consultative », si ce n’est « contributive75 ».

  • 76 Raoul de la Grasserie, « De la représentation professionnelle », RPP, 1895/5, p. 277.
  • 77 Ibid.

33En définitive, l’ambition est trop grande et mal taillée pour ce qu’est véritablement le CESE, une instance consultative, conseil des pouvoirs publics, sans véritable point d’accroche avec les citoyens, insusceptible de revaloriser leur statut juridique et politique. Il n’est pas question de s’en satisfaire, ni de le déplorer, mais bien de considérer que l’impuissance du CESE résulte, principalement, de sa nature, elle-même produit de la volonté politique. Il n’est pas une chambre parlementaire. Ce n’est donc pas d’une simple révision de la loi organique mais d’une véritable révolution constitutionnelle dont il a besoin. Au moment où les projets fleurirent en la matière sous la IIIe République, Raoul de la Grasserie proposa par exemple en 1895 l’instauration d’une troisième chambre législative, la « chambre professionnelle Nationale » : « Cette chambre, qui aurait un rang égal à celui de la Chambre des députés et du Sénat, et qui remplacerait le Conseil d’État dans ses anciennes attributions législatives, aurait : 1° L’initiative des lois ; 2° la préparation de celles émanant de l’initiative parlementaire qui devraient lui être renvoyées ; 3° la défense de ces lois devant le Parlement76 ». Et l’auteur de poursuivre : « la chambre nationale n’aurait ainsi qu’un pouvoir de fait, mais ce pouvoir serait considérable, car elle représenterait d’une manière exacte tous les intérêts77 ». Ainsi aurait‑il pu advenir du CESE.

34Alors que la réforme avait souhaité en faire un gardien de la démocratie, le CESE n’est finalement qu’un cerbère sans tête, gardien d’un Palais (d’Iéna) d’une tout autre nature que ceux qui abritaient les institutions romaines, au Forum, cœur d’une des plus grandes expériences civiques de l’Antiquité. Cible privilégiée de cette réforme, le citoyen français en est, toutefois, le grand perdant, exclu lui-même de cette citoyenneté artificielle construite par le CESE et les pouvoirs publics.

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Notes

1 « L’élection des Sénateurs », Revue politique et parlementaire (RPP), 1895, t. 5, p. 463.

2 Si l’institution (dans ses différentes versions sous la Ve République) fait régulièrement l’objet d’études par la doctrine (juridique ou non), en particulier au moment de ses réformes, peu d’études d’envergure consacrées exclusivement à cet objet ont été recensées. Une recherche sur thèses.fr ne laisse apparaître qu’une seule thèse en droit (François Gaillard, Le Conseil économique et social, Université Paris XIII, 1975) et une autre en Sciences de l’information et de la communication (Frédéric Treffel, Conseil économique et social, espace public et communication, Université Paris 4, 1999). Nous avons pu recenser également quelques mémoires de recherche parmi lesquels, en droit : Salomé Partouche, Le droit de pétition citoyenne devant le Conseil économique, social et environnemental, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2013 ; ou encore, en histoire : Nicolas Gobert, Le Conseil économique et ses premiers travaux (1947-1951), Université Paris I, 1979. Par-delà ces travaux, les monographies sont rares : Jean Frayssinet, Le Conseil économique et social, La Documentation française, 1986. Un ouvrage grand public a été identifié : Agnès de La Morinerie, Raconte-moi – Le Conseil économique et social, Nouvelle arche de Noé, coll. Du citoyen, 2007 ou encore Pierre Bodineau, Les conseils économiques et sociaux, PUF, coll. Que Sais-Je, 1994. Un travail de plus grande ampleur a été réalisé sur le Conseil économique de la IVe République (Maurice Aubry, Le Conseil économique français, LGDJ, 1957), tandis que les travaux étaient plus nombreux s’agissant du Conseil national économique (1925-1940) : outre les nombreuses thèses réalisées sur ses travaux, l’on peut mentionner l’œuvre d’Alain Chatriot (en particulier l’ouvrage, issu de sa thèse de doctorat : La démocratie sociale à la française. L’expérience du Conseil National Économique, 1924-1940, La Découverte, coll. L’espace de l’histoire, 2002) ; voir aussi : Yves Tedeschi, Le Conseil National Économique et l’organisation de la production en France, Les Presses Modernes, 1927 ou encore, à l’étranger, D. A. Rogers, The Campaign for the French National Economic Council (1918-1925), Ph. D., University of Wisconsin, 1957.

La recherche documentaire a été effectuée à partir de différents moteurs de recherche scientifique (Sudoc.abes, doctrinal plus, Cairn.info) et de ceux des librairies en ligne. Par ailleurs, le site du CESE fournit lui­‑même une bibliographie indicative des travaux consacrés à l’institution lato sensu (https://www.lecese.fr/documents/bibliographie/BibliCESE.pdf).

3 Voir le constat dressé par Dominique-Jean Chertier, Pour une réforme du CESE, Rapport au Président de la République, 15 janvier 2009, p. 6 : « Le CES passe largement inaperçu, de l’opinion publique, assurément, mais aussi, ce qui est plus préoccupant, des pouvoirs Publics ».

4 Voir infra.

5 Danièle Lochak, « Nationalité et citoyenneté », Raison présente, 1992, n° 103, p. 24.

6 En détail, il s’agit donc des modifications apportées par les lois suivantes : loi constitutionnelle n° 2008-724 du 3 juillet 2008 ; loi organique n° 2010-704 du 28 juin 2010 relative au Conseil économique, social et environnemental ; loi organique n° 2021-27 du 15 janvier 2021 relative au Conseil économique, social et environnemental. Il faut y ajouter les différents textes réglementaires intervenus en complément de ces lois (notamment le Décret n° 2010-886 du 29 juillet 2010 relatif aux conditions de désignation des membres du Conseil économique, social et environnemental). Enfin, sont également à relever les modifications du règlement intérieur du CESE, la dernière en date étant celle approuvée par le décret n° 2022-356 du 14 mars 2022.

7 Exposé des motifs de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

8 Olivier Beaud, « Ouverture », Jus Politicum, n° 27 (Formes de la citoyenneté), 2022, [Ebook], p. 5.

9 Et ici se situe sans doute l’une des raisons de la marginalisation dudit conseil à travers les époques.

10 Alain Chatriot, La démocratie sociale à la française, op. cit., p. 2.

11 Madeleine Rebérioux, in Pierre Rosanvallon, « Citoyenneté politique et citoyenneté sociale au XIXe siècle » (entretien entre Pierre Rosanvallon, Madeleine Rebérioux et Patrick Fridenson), Le Mouvement social, n° 171, 1995, p. 29.

12 Léon Duguit, « La représentation syndicale au Parlement », RPP, 205, LXIX, 1911, p. 40.

13 Stéphane Pinon, « La représentation parlementaire des groupes sociaux et des intérêts professionnels : une perspective à oublier ? » in C. Miguel Herrera et S. Pinon (dir), La démocratie, entre multiplication des droits et contre-pouvoirs sociaux, Éditions Kimé, 2012, p. 115.

14 Voir Jean-Pierre Le Crom, « Le Conseil national économique », in M.-O. Baruch et V. Duclert (dir.), Serviteurs de l’État, La Découverte, coll. L’espace de l’histoire, 2000, p. 463 et s.

15 Ernest Billiet, Débats parlementaires, Sénat, séance du 20 avril 1926, JO, p. 936 (Gallica) : « Je n’admets pas du tout cette multiplication de conseils et de commissions qui se substituent à l’État. Je défends des intérêts qui, certes, doivent être consultés, mais je ne suis point partisan de cette sorte de représentation officielle des intérêts. C’est, en réalité, un petit Parlement économique que l’on crée, sans l’avouer. Je ne sais pas encore et personne ne sait quel rôle exact on fera jouer à ce Parlement économique au petit pied. Ce qui n'est pas douteux, c'est que, déjà, il semble autorisé à saisir le Parlement de propositions de loi. Si cela est exact, c'est une nouvelle organisation parlementaire qui se glisse dans la République ».

16 Gustave Perreau, Débats parlementaires, séance du 6 mars 1936, JO, p. 223 (Gallica).

17 Loin d’autres instances que l’on retrouve dans d’autres États aux pouvoirs plus étendus en matière législative (voir, à ce titre, l’exemple de la Constitution de Weimar instituant un Conseil économique du Reich : Marcel Prélot, La représentation professionnelle dans la Constitution de Weimar et le Conseil économique national, Ed. Spes, 1924).

18 Voir, pour le Conseil économique de la IVe République, Maurice Aubry, Le Conseil économique français, op. cit. et pour le Conseil économique et social de la Ve République, Jean Frayssinet, Le Conseil économique et social, op. cit.

19 Stéphane Pinon, « La représentation parlementaire… », art. cité, p. 118.

20 Marcel Prélot, Intervention lors de l’assemblée constituante, 9 avril 1946, cité par S. Pinon, « La représentation parlementaire… », art. cité, p. 123.

21 Voir, sur les questions de légitimité, Alain Chatriot, « Les apories de la représentation de la société civile. Débats et expériences autour des compositions successives des assemblées consultatives en France au XXe siècle », RFDC, 2007/3, n° 71, p. 548 et s.

22 Dominique-Jean Chertier, Pour une réforme du CESE, op. cit., p. 46.

23 Emmanuel Macron, Discours du Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès, Versailles, 3 juill. 2017. Sur le projet plus général de chambre du futur, voir Florian Savonitto, « Vers une chambre du futur ? », Revue juridique de l’environnement, n° 44, 2019/4, p. 725-750. Voir également Dominique Bourg (dir.), Inventer la démocratie au XXIe siècle, Les liens qui libèrent, 2017.

24 Ibid.

25 Xavier Darcos, Dictionnaire amoureux de la Rome antique, Plon, 2011, p. 257.

26 Emmanuel Macron, Discours du Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès, préc.

27 Voir la contribution de l’auteur dans ce numéro.

28 Il ambitionnait alors de faire du CESE « un lieu de rencontre entre la société civile organisée et les citoyens, avec des missions nouvelles » (exposé des motifs).

29 Xavier Darcos, Dictionnaire amoureux de la Rome antique, op. cit.

30 Ibid.

31 Lewis Mumford, La cité à travers l’histoire, Agone, coll. Mémoires sociales, 2011, p. 170.

32 Voir Michel Humm, La République romaine et son empire, Armand colin, 2018, p. 51-70 ; Jean-Vincent Holeindre et Benoît Richard, « La république romaine, un modèle ? Entretien avec Claudia Moatti », La Démocratie, 2010, p. 23-24 et Fergus MillarThe Crowd in Rome in the late Republic, University of Michigan Press, 1998.

33 Sur la notion de modèle, voir Véronique Champeil-Desplats, Méthodologies du droit et des sciences du droit, Dalloz, coll. Méthodes du droit, 2014, p. 337 et s.

34 Il convient de préciser que l’idée de valorisation est ici appréhendée à travers un jugement dit scientifique, consistant à évaluer les ambitions de la réforme au regard de ses moyens et de ses résultats. Il s’agira alors de savoir si la valorisation de la citoyenneté espérée est bien effective mais non de porter un jugement strictement moral sur la réforme.

35 Vidéo de présentation du CESE, site internet du CESE.

36 Ibid.

37 Exposé des motifs de la loi organique de 2021.

38 Ibid.

39 Site internet du CESE.

40 Art. 4-1 de l’ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental.

41 Voir Yann-Arzel Durelle-Marc, La naissance du droit de pétition. Contribution à l’histoire de la démocratie représentative, thèse, Paris I-Sorbonne, 2004.

42 Présentation sur le site du CESE.

43 Ibid.

44 Art. 4-3 ordonnance n° 58-1360 préc.

45 Curiosité d’une procédure qui s’inscrivait pourtant dans le même temps que celui de la valorisation du CESE entreprise alors.

46 Rapport du 9 mars 2022 (sur lettre de saisine du 27 septembre 2021 (https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2022/2022-03_participation_democratique_jeunes.pdf).

47 Voir supra.

48 Rapport commission des lois constitutionnelles.

49 Danièle Lochak, « Nationalité et citoyenneté », art. cité, p. 21.

50 Voir sur la définition du citoyen, les entrées « citoyen actif-passif » et « démocratie », in Michelle Miaille, Les mots-clés de la citoyenneté, Dalloz, coll. À savoir, 2019.

51 Voir les exemples cités par Dimitri Courant et Yves Sintomer, « Le tirage au sort au XXIe siècle. Actualité de l’expérimentation démocratique », Participations, 2019/1, n° 23, p. 5-32. Voir, pour un exemple plus détaillé, celui de l’Irlande : Dimitri Courant, « Les assemblées citoyennes en Irlande. Tirage au sort, référendum et Constitution », La vie des idées, 5 mars 2019, p. 5. En France, longtemps cantonné à la composition des jurys d’assise, le tirage au sort est de plus en plus utilisé, en particulier dans le cadre d’expériences d’ampleur nationale, qu’il s’agisse de la Convention citoyenne pour le climat ou encore du collectif citoyen sur la vaccination (voir https://www.gouvernement.fr/actualite/debut-des-travaux-du-collectif-citoyen-sur-la-vaccination).

52 Voir l’art. 4 de l’ordonnance organique sur le CESE.

53 Yann-Arzel Durelle-Marc, « Le droit de pétition. Le paradoxe d’une prérogative du citoyen en régime représentatif », Jus Politicum, n° 27 (Formes de la citoyenneté), 2022, [ebook], p. 142.

54 Madeleine Rebérioux, in Pierre Rosanvallon, « Citoyenneté politique et citoyenneté sociale au XIXe siècle », art. cité.

55 Voir Joëlle Zask, « Le public chez Dewey : une union sociale plurielle », Tracés. Revue de Sciences humaines, n° 15, 2008, p. 169-189 (https://doi.org/10.4000/traces.753)

56 Exposé des motifs du projet de loi organique par le Garde des Sceaux, mais aussi sur le site du CESE.

57 Exposé des motifs.

58 Voir sur ce concept, John Dewey, Le public et ses problèmes, Folio, coll. Essais, 2010.

59 Site internet du CESE.

60 Phénomène évoqué par le professeur Bruno Daugeron lors des débats du colloque.

61 Académie française, « Dire, ne pas dire : Citoyens » (https://www.academie-francaise.fr/citoyen). Si l’usage de l’adjectif citoyen a pu être identifié dans un passé lointain (voir Claude Duneton, « Citoyens, citoyennes… », Le Figaro, rééd. 21 avril 2017, https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/expressions-francaises/2017/04/21/37003-20170421ARTFIG00016-citoyens-citoyennes.php), sa généralisation dans une perspective de communication politique est, elle, plus nouvelle.

62 Le CESE n’est d’ailleurs pas le seul à procéder ainsi : voir la critique proposée par Olivier Beaud, « Le Conseil d’État et la citoyenneté : une lecture décalée et critique », Jus Politicum Blog, 26 février 2019 (https://blog.juspoliticum.com/2019/02/26/le-conseil-detat-et-la-citoyennete-une-lecture-decalee-et-critique-par-olivier-beaud/).

63 Ibid.

64 Art. 1er de l’ordonnance organique préc. Élément rappelé d’ailleurs par Denis Baranger, « Démocratie participative : l’inopportune réforme du CESE », Jus Politicum Blog, 5 septembre 2020 (https://blog.juspoliticum.com/2020/09/05/democratie-participative-linopportune-reforme-du-cese-par-denis-baranger/#_ftnref7).

65 Ibid.

66 Ibid.

67 Celle formée contre le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, en dépit du franchissement du seuil des 500 000 signatures alors requis.

68 Jean-Paul Delevoye, cité par Le Monde, 22 février 2013, https://www.lemonde.fr/societe/article/2013/02/22/cese-la-petition-contre-le-mariage-pour-tous-est-irrecevable_1836889_3224.html.

69 Délibération du bureau du 26 février 2013, https://www.lecese.fr/presse/communiques/petition-citoyenne-deliberation-du-bureau-du-26022013-0. L’argument avait été largement contesté, et il faut d’ailleurs rappeler que la décision avait donné lieu à un contentieux administratif fourni, le tribunal administratif de Paris prononçant son annulation, avant que la Cour administrative d’appel de Paris puis le Conseil d’État n’infirment son jugement. Quant à l’institution, le successeur du président Delevoye, le président Patrick Bernasconi, avait initié une forme de mea culpa à ce sujet.

70 Ce qui ressort, d’ailleurs, de l’usage qui en est fait, le droit de pétition devant le CESE (mais aussi devant les autres chambres constitutionnelles) n’étant pas très utilisé.

71 Denis Baranger, « Démocratie participative : l’inopportune réforme du CESE », art. cité.

72 Sur la critique du passage par la voie législative (même organique), voir Denis Baranger, ibid.

73 Michel Chauvière et Marcel Jaeger, « Démocratie consultative ou administration consultative ? Les enjeux des conseils », Vie sociale, 2004/2, p. 97.

74 Que l’on songe, par exemple, à la victoire du « non » lors du referendum de 1969.

75 Joëlle Zask, Participer. Essai sur les formes démocratiques de la participation, Le Bord de l’eau, 2011.

76 Raoul de la Grasserie, « De la représentation professionnelle », RPP, 1895/5, p. 277.

77 Ibid.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Julien Padovani, « La réforme du Conseil économique, social et environnemental : une citoyenneté en question »La Revue des droits de l’homme [En ligne], 22 | 2022, mis en ligne le 04 octobre 2022, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/revdh/15278 ; DOI : https://doi.org/10.4000/revdh.15278

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Auteur

Julien Padovani

Julien Padovani est Maître de conférences en droit public à l’École de Droit de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Centre Sorbonne Constitutions & Libertés, ISJPS, UMR 8103)

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