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Monolithes sculptés akwanshi/atal de la Cross River (Nigéria-Cameroun)

Akwanshi carved monoliths from the Cross River (Nigeria-Cameroon)
Narcisse Santores Tchandeu et Hassimi Sambo
p. 55-76

Résumés

La tradition des monolithes akwanshi/atal semble s’être développée sur les traces d’un fond régional commun de civilisation mégalithique de l’âge du fer ancien, auquel répond une assimilation des normes de la sculpture en bois et des arts du corps ; ceci en lien avec la mise en place vers le xvie siècle des institutions initiatiques et des rites agraires du groupe ikom. Aussi exceptionnels en Afrique que les monolithes phalliques sculptés d’Éthiopie et du Mali, ces monuments, plus ou moins difficiles à déplacer, n’ont pourtant cessé d’être prisés sur le marché international de l’art et d’alimenter les musées. Collectés dans des conditions souvent illégales, en relation avec les crises sécuritaires comme celles du Biafra, les akwanshi/atal posent différents problèmes de recherche comme ceux des contextes et conditions archéologiques de production, du sens des représentations dans la mémoire collective des groupes ethniques in situ, et des attributions et classifications stylistiques. Parallèlement à une synthèse des connaissances sur le sujet, cette étude propose une analyse diachronique des styles, à partir de trois séquences chrono-morphologiques, et un examen de la patrimonialisation locale et des collections internationales.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 (Après que la guerre du Biafra [1967-1970] ait bouleversé la vie des peuples, les mascarades, détru (...)

1Produits d’une civilisation mégalithique remarquable en Afrique par son ancienneté et sa longévité, les monolithes akwanshi se révèlent être à l’origine de nombreuses hypothèses, notamment celles d’être les signes d’un culte phallique, d’être des stèles funéraires, des effigies commémoratives de chefs, de héros, voire des monuments emblématiques de sociétés secrètes. Dans cette perspective, certaines tentatives de datations de spécimens situent leur essor au moins au xvie siècle sur la base relative d’effigies dites « généalogiques » en pays Nta (ouest de la moyenne Cross River) selon P. Allison (1968 : 32-34), date repoussée au iie siècle av. J.-C. (cf. infra) suite aux fouilles effectuées en pays Nnam (nord) par Ekpo Eyo (1986 : 101-104). Le recours à la généalogie met cependant en évidence l’importance des traditions orales lorsque les premiers chercheurs découvrent les monolithes akwanshi, l’une des dernières érections de pierres commémorant un chef Nta remontant au début du xxe siècle (Allison 1968). Cette période qui correspond donc à un abandon des traditions d’érection, suite aux contacts avec les puissances occidentales, n’a cependant pas totalement altéré la portée symbolique des représentations dans les mémoires collectives actuelles. A.B. Carlson (2019 : 50) évoque même un renouvellement d’intérêt des communautés locales et fédérales pour les cultures traditionnelles autour des années soixante-dix : « After the Biafran War (1967-1970) had turned peoples’lives upside down, masquerades, which had been destroyed or forgotten during the war, need to be rebuilt or reinvented »1. C’est dans cette dynamique que certains festivals annuels, se réappropriant des pratiques rituelles à travers des célébrations populaires, donnent lieu au rafraîchissement des décors des akwanshi mais avec des couleurs de plus en plus manufacturées.

  • 2 Dossier d’inscription intitulé Alok Ikom Stone Monoliths, référé 5173, soumis le 08-10-2007 par la (...)

2Si ce phénomène de patrimonialisation ou d’appropriation identitaire des représentations est surtout entretenu par la survivance de certains monuments, plus ou moins bien conservés dans leur contexte, il reste que d’autres ont été déplacés ou en partie mutilés dans des conditions parfois si illégales que ce collectionnisme a détruit toute la documentation les concernant. L’inscription des akwanshi sur la liste indicative du patrimoine mondial de l’UNESCO en 20082 a sans doute galvanisé le marché de l’art, favorisant de fait un commerce illicite déjà galvanisé par les crises sécuritaires répétitives de cette partie du golfe de Guinée, ainsi qu’une systématisation des « copies » ; ces dernières trouvent un foyer fécond chez les artisans de Foumban de l’ouest Cameroun. Le recoupement des collections muséographiques et des corpus ethnographiques in situ, l’exploitation transversale des données disponibles en archéologie, ethnologie et histoire de l’art, ont permis de proposer une classification diachronique des styles, rompant avec l’approche synchronique longtemps privilégiée par la plupart des auteurs. Dans ce sens, trois périodes stylistiques ont été identifiées : une période pré-ikom liée au style des monolithes bruts ou sommairement dégrossis ; une période inscrite dans les généalogies ikom liée au style des monolithes phalliques à ombilic ; une période de la traite liée au style des monolithes anthropomorphes à scarifications identitaires.

Cadre et ressources locales de la production des akwanshi

Cadre spatio-temporel et humain

3Complexe géographique qui tire son nom du fleuve éponyme, la Cross River prend sa source dans les monts Bakossi au sud-ouest du Cameroun et s’ouvre en un delta entre la rive du fleuve Calabar au Nigéria et celle du Ndian au Cameroun. Le fleuve Cross sépare des groupes humains, communément désignés comme Ikoï par leurs voisins (Efik, Ibo, Ibibio), mais plus connus sous les noms d’Ejagham sur la rive nigériane et de Keaka sur celle du Cameroun. Fédérée aujourd’hui autour de l’appellation générique Ikom, et ayant en commun la langue bakor, cette population se répartit en une trentaine de clans réunis autour de certains grands groupes au Nigéria (Abanyom, Akaju, Akpanobong, Nde, Nnam, Nselle et Nta) et d’autres au Cameroun (Anyang, Banyang, Keaka, Boki). L’ensemble forme un complexe géoculturel qui est à la croisée des cultures du Grassland (Bamenda, Bamiléké, Bamoum) à l’est, des Jukun de la Bénoué au nord, et des Efik, Oron, Ibo et Ibibio à l’ouest.

  • 3 (Les masques recouverts de peau, dans leur représentation en détail des différents types de marques (...)

4Par ailleurs, à la faveur du commerce transatlantique, la proximité de la Cross River avec la côte guinéenne l’a particulièrement exposée dès le xve siècle aux premiers contacts et échanges avec des navigateurs portugais, mais aussi à la traite négrière surtout présente vers le xviiie siècle – la zone d’étude étant comprise entre les comptoirs portuaires de Bimbia au sud-ouest du Cameroun et de Calabar au Nigéria. Ce trafic a eu un impact sur la prospérité économique des chefferies intermédiaires (Delpech 1978 ; Warnier 1989) mais aussi sur la mise en place d’un climat de défiance entre les groupes, justifiant une certaine systématisation des marques identitaires comme les scarifications corporelles. Rappelons, avec C. Lefebvre (2015 : 40), que « plusieurs chercheurs travaillant sur la traite atlantique ont proposé d’utiliser les traces des scarifications ». Et, sur ce sujet, la critériologie de L. Frobenius cité par L. Pales (1946 : 3-4) permet de distinguer – au-delà des infra-codes ethniques et en fonction du rayon d’influence des grandes puissances soudanaises – deux principaux types de scarifications : en creux, répandu dans les sociétés conquérantes ou de razzieurs (haussa, bornouan, peul, etc.,) et en relief saillant, plus partagé par les sociétés dites autochtones des côtes guinéennes, dont la Cross River et ses périphéries (du pays yoruba à l’ouest à celui bamiléké à l’est). S’intéressant proprement à l’influence de la traite sur la production artistique de la Cross River, L. Perrois et J.-P. Notué (1997 : 232) notent que : « Divers groupes ont organisé le trafic ; des esclaves ont été immolés, leur peau a servi dans le revêtement des masques ». Et K. Nicklin (1979 : 11) de préciser une certaine filiation entre les détails décoratifs des masques à peau et ceux des akwanshi : « Skin-covered masks, in their detailed portrayal of the various types of tribal marks, may be compared with Ekoï monoliths »3.

5Il faut attendre le début du xxe siècle pour que C. Partridge établisse, en 1905, la carte géographique de la Cross River. Enclavé un peu en retrait de la côte, le pays Ikom était jusqu’alors considéré comme hostile par les occidentaux eu égard aux présupposés d’anthropophagie rapportés sur les côtes par les voisins Efik – ces préjugés devant aussi être mis au compte de l’étrangeté de leurs masques recouverts de peaux, de cheveux et dont la charpente est parfois faite d’ossements humains. Après les indépendances, la Cross River est devenue, en 1967, un État du sud-est du Nigéria, tandis qu’au Cameroun son territoire correspond au département de Manyu. Remarquons que sa position au sud-est de la boucle du Niger, zone pétrolière la plus riche au sud du Sahara, explique les situations constantes d’insécurité (les crises les plus connues étant la guerre du Biafra entre 1967 et 1970), les excursions permanentes des pirates de mer, et depuis plus de quatre ans le conflit sécessionniste dit du « NOSO » au Cameroun. Dans l’ombre de ces crises sécuritaires, en particulier de la guerre du Biafra, s’est développé le pillage systématique et le trafic illicite des akwanshi en direction surtout des collections occidentales (Ekpo Eyo 1986).

6Sur le plan linguistique, les monolithes sont parfois indifféremment désignés en langue bakor soit par le terme atal (littéralement pierre) – en référence au matériau –, ou plus couramment par l’expression akwanshi (personne morte sous terre), appellation qui a très souvent justifié que ces monolithes soient considérés comme des stèles funéraires, en l’absence pourtant de toute preuve de dépouille humaine.

Conditions techniques de production

7En l’absence d’informations sur les traditions orales des sculpteurs et sur leurs procédés (bien que certains chefs se faisaient encore commémorer par des monolithes jusqu’en 1900), les premiers chercheurs se sont plutôt limités à des hypothèses concernant leur fabrication. Au préalable, comme le suggèrent C. Partridge (1905 : 208) et P. Allison (1968 : 24), les producteurs récupéraient dans le lit des rivières leur matière première, notamment des pierres elliptiques que les eaux de lessivage et la marée avaient déjà naturellement polies. Après observation d’un modèle inachevé, P. Allison (ibid. : 28) déduit que le sculpteur taille des dépressions pour créer les reliefs du corps. Si les auteurs n’accordent malheureusement aucun intérêt à l’outillage utilisé, ils mentionnent très souvent un matériau en basalte et plus rarement en latérite. Mais au regard de la granulométrie finement grenue et semi-vitrifiée de la plupart des monolithes, il paraît plus plausible, comme le pense R. Asombang (2004), que la dolérite soit la principale pierre dure utilisée. L’artisan semble avoir utilisé, d’une part, un percuteur en quartz arrondi pour une harmonisation de la silhouette (procédé assez courant pour les monolithes d’aspect cylindrique ou ogival) et, d’autre part, une massue percutant un burin qui incise les surfaces de la partie frontale la plus bombée (procédé éventuellement relayé par un brunissoir métallique pour préciser les détails) ; ces techniques sont comparables à celles de la taille directe des sculpteurs sur bois encore en activité bien après les indépendances. Pour une figure anthropomorphe, par exemple, remarquons que l’approche frontale de la ronde-bosse permet un jeu de reliefs bien contrastés (inférieur à 25 mm de profondeur), entre les motifs les plus déprimés – comme le cou ou la bouche – et les plus en saillie – à l’image du nombril – et d’autres incisions aux motifs de scarifications participant davantage à des sortes de méplat.

8À ces différents procédés de façonnage, il faut ajouter ceux propres aux techniques d’érection des mégalithes. En observant à Ikrigon un cercle de quinze monolithes, dont huit hauts de 100 à 130 cm, P.A. Talbot (1926) a relevé que l’un des spécimens renversés, long de 170 cm, portait en son extrémité inférieure les traces d’un enfouissement de 30 cm, soit un peu plus du cinquième de la taille générale. Ce niveau d’enfouissement, relativement peu profond, justifie sans doute une mauvaise capacité à résister face aux menaces tels que les terrassements des champs et les activités pastorales, ainsi qu’aux aléas climatiques. En général disposés de manière isolée, en cercle complet ou non ou en alignement, certains de ces monuments sont associés à une poterie, une meule mobile, un arbre ou un bosquet. Dans ces différents cas, il reste difficile de déterminer si ces associations sont contemporaines ou si l’un des éléments a précédé les autres. En considérant le cas le plus fréquent du monolithe à proximité d’un arbre, le comparatisme régional – avec des associations similaires dans le Grassland – révèle deux cas possibles : le premier, que la fondation d’une chefferie soit marquée par l’érection d’un ou de plusieurs monolithes au pied d’un arbre géant ou aux racines contreforts (comme le baobab et le fromager), ou alors au sein d’un bosquet choisi pour son caractère particulier dans le paysage ; le second, que le geste d’élévation de la pierre soit concomitant avec celui de la plantation d’un arbuste à feuillage persistant et fort symbolique dans le patrimoine botanique local (Notué 2007/2009 ; Tchandeu & Mezop Temgoua-Noumissing 2017 ; Tchandeu et al. 2019). La première hypothèse paraît plus plausible dans le cas des akwanshi puisqu’ils sont d’ordinaire dressés au pied ou autour d’un arbre géant.

Extension des monolithes sculptés en Afrique

Variabilité régionale et prédominance de monolithes phalloïdes

9Si les structures de pierres dressées constituent la forme mégalithique la plus répandue en Afrique (Laporte et al. 2017a : 41) – à la différence par exemple des hypogées, coffres et tumulus plus concentrés au Maghreb, au Sahara, dans la vallée du Rift et à Madagascar –, les monolithes sculptés ne sont répartis en revanche que dans quelques régions (fig. 1). Il en existe principalement dans les contreforts de la vallée du Rift en Éthiopie (Gallay 2016 ; Joussaume 2007 ; Joussaume & Cros 2017 ; Goujon 2018), dans la boucle du Niger autour de Tondidarou au Mali (Person et al. 1991), dans l’aire sénégambienne (Laporte et al. 2017a, b) et dans celle du Grassland camerounais aux confins nigérians de la Cross River et des monts Mandara (Notué 2007/2009 ; Tchandeu 2007/2009). Plus ou moins éloignés les uns des autres sur le plan géographique, la majorité de ces monuments partage pourtant la tendance aux profils phalliques ou phallo-anthropomorphes, exceptés pour certains en Sénégambie dont l’aspect bifide ou de « pierre en lyre » n’aurait aucun semblable en Afrique (Laporte et al. 2017b : 96)

Figure 1 – Cartographie des principaux foyers de monolithes sculptés en Afrique.

Figure 1 – Cartographie des principaux foyers de monolithes sculptés en Afrique.

© N.S. Tchandeu

10C’est dans la vallée du Rift que se situe le foyer le plus important de production des monolithes d’aspect phallique, en témoigne à dessein le travail d’A.-L. Goujon (2018) : « Des pierres phalloïdes par milliers en Éthiopie méridionale ». Il s’agit de stèles ou sodo : « Cent vingt-sept sites à stèles phalliques ont été enregistrés à ce jour sur un territoire long de 140 km du nord au sud et large de 50 km » (ibid : 88). Selon R. Joussaume & Cros (2017 : 237), les structures pourraient être antérieures aux XIIe-XIIIe siècles, ayant par la suite été réutilisées pour le marquage des tombes en puits, ainsi que pour le façonnage de la plupart des stèles anthropomorphes, symboliquement attachées à la mémoire du mort (Joussaume 2007 ; Gallay 2016). Elles sont disposées soit en file ou alignement, soit en champ, mais avec la possibilité d’un mixage de ces arrangements entre eux. En majorité en ignimbrite, les monolithes ont une section massive, dépassant rarement 4 m de haut, ou un profil élancé, et pouvent atteindre alors 8 m de haut. À ces profils répond un marquage de l’extrémité supérieure, soit en incision horizontale, soit en nervure (incisions horizontales juxtaposées) soit en calotte, détail qui donne au monolithe son caractère phallique.

11En Afrique de l’Ouest, à proximité de la localité de Tondidarou au Mali, au nord du Delta intérieur du Niger, ont été identifié trois ensembles inégaux de plus de 180 pierres dressées, pour la plupart d’aspect phallique (Person et al. 1991). Dégrossi dans un grès fin sous une forme ellipsoïdale pour une hauteur variable de 0,60 m à 2 m, la plupart de ces monolithes est annelée d’une ou deux incisions vers l’extrémité supérieure ; leur surface présente « des gravures, dans l’ensemble non figuratives (chevrons, résilles, triangles, losanges, écussons, cannelures, lignes serpentiformes), profondément incisées dans la pierre et parfois associées à des motifs en relief (ombilic) qui anthropisent l’objet » (Person 1998 : 41). Dans leur ensemble, ces monolithes ne sont associés à aucune sépulture mais en relation avec des buttes anthropiques datées de 600/790 A.D.

12Au contact de l’aire sénégambienne se trouve sans doute la tradition mégalithique la plus dense de l’Afrique de l’Ouest : plus de 20 000 pierres dressées réparties sur près de 2000 sites sur une superficie de 38 000 km2. Associés à des cercles de pierres dressées, des cercles pierriers, des tumulus pierriers et des sépultures, les monolithes sont ici moins impressionnants par leur hauteur (moins de 3 m) que par leur volume (pouvant atteindre une quinzaine de tonnes). Ceux érigés à l’est des monuments funéraires du Sénégal et de la Gambie sont tous en latérite et en majorité à profil cylindrique. Si certains sont marqués à l’extrémité supérieure par une protubérance sphérique ou au contraire par une cupule, une cinquantaine d’autres présente « deux branches montantes qui leur donnent une forme bifide… Elles ont reçu le nom de « pierre en lyre » lorsque ces deux branches montantes sont reliées par un tenon, à peu près aux deux tiers de leur hauteur » (Laporte et al. 2017 b : 96). En périphérie de cette aire, d’autres monolithes sculptés sont signalés en Guinée, notamment plusieurs monolithes en forme de « tam-tam » à Sareya en Guinée centrale (Mauny 1961), ainsi qu’une pierre dressée en forme de phallus à Benty et une autre à Tapa sur la côte de Guinée (Huysecom 1987).

13À la limite septentrionale du Cameroun et du Nigéria, les monts Mandara comptent parmi les foyers prospères de production des mégalithes encore bien en activité en Afrique centrale. Les formes les plus caractéristiques sont entre autres des tumulus funéraires cylindriques, parfois surmontés de pierres dressées, ainsi qu’un plus grand nombre de monolithes isolés ou alignés. Si ces derniers montrent bien souvent une silhouette ogivale ou à sommet cintré, certains sont tout à fait remarquables par leur aspect phallique. C’est le cas de deux monolithes, dits mutta en pays Podoko, dont les nervures ramifiées pour l’un et la forme en calotte biseautée pour l’autre renvoient, d’une part, à une verge d’incirconcis et, d’autre part, de circoncis (Tchandeu & Mezop Temgoua-Noumissing 2017 : 89). Chez les voisins mafa de Dinglia, il existe aussi quelques pierres dressées phalliques dont l’une, d’aspect phallo-anthropomorphe, est associée à un monolithe à motif vulvaire dit « pierre de la femme » (Tchandeu 2007/2009 : 68). Plus au sud-ouest du Cameroun, le mégalithisme du Grassland a fait l’objet d’une étude synthétique de J.-P. Notué (2007/2009). Parmi la diversité morphologique des structures, l’auteur (ibid : 55) souligne la présence d’une trentaine de monolithes sculptés du pays bamiléké au plateau de Bamenda. Certains spécimens Bangwa et « pierre à grade » Mundani aux confins de la haute Cross River rappelleraient, par leur type de décoration, les monolithes akwanshi, surtout concentrés dans la moyenne Cross River (Idem : 38). C’est dans ce dernier territoire, en particulier en pays ikom, qu’a prospéré une tradition riche de plus de 350 monolithes sculptés, de loin la plus importante de ce genre dans la sous-région.

Historique de la recherche sur les sculptures akwanshi de la Cross River

14C. Partridge (1905 : 269) est le premier à avoir publié des pierres anthropomorphes attribuées aux Ikoï, ce qui fait immédiatement écho en Angleterre, où la découverte est comparée à la brillante civilisation du royaume d’Ifé. L’unique témoin parvenu en Europe, acquis en 1909 par le Museum für Völkerkunde de Berlin, est remarqué par C. Einstein (1915) qui le publie en décrivant sa sobriété morphologique. Dans son approche ethnographique, C. Partridge (1905) présente un ensemble circulaire de monolithes autour d’un arbre et signale leur place centrale dans les assemblées communautaires (cfinfra ; fig. 2). Toutefois, l’auteur fait déjà remarquer une certaine exposition de la structure à l’incurie, prenant l’exemple des enfants qui s’amusaient en peignant les monuments en rouge, acte qui peut aussi être considéré comme geste rituel au regard de la symbolique du rouge dans ce contexte socioculturel (cfinfra). À sa suite, P.A. Talbot (1926) mentionnera plusieurs autres cercles de pierres, toujours associés à des arbres ou des bosquets, au sein de villages ou sur des sites abandonnés. Les relevés de l’auteur attirent également l’attention sur l’état de conservation de certains ensembles comme celui d’Ikrigon où le cercle est constitué de quinze monolithes dont huit seulement sont restés debout. Plus intéressé par les rituels auxquels sont liés les monuments, R. Harris (1959 : 113) évoque un cas de pierres superposées dont une petite, au sommet, porte des traces de sacrifices de sang et de plumes de coq.

Figure 2 – Trois monolithes intégrant un cercle incomplet à proximité d’un bosquet à Agba (Partridge 1905 : fig. 71)

Figure 2 – Trois monolithes intégrant un cercle incomplet à proximité d’un bosquet à Agba (Partridge 1905 : fig. 71)
  • 4 Selon Babatunde Lawal (2017 : 57), ce matériel est comparable et contemporain à celui exhumé par le (...)
  • 5 Calibration OxCal 4.4.4. Courbe IntCal20. Références laboratoire non fournies par O. Ekpo Eyo (1986 (...)

15En termes d’inventaire, les plus exhaustifs à ce jour nous viennent des travaux de P. Allison. En 1964, il fait état de 258 monolithes donc 16 non sculptés, puis dans son ouvrage, paru en 1968, d’un corpus agrandi à 295 spécimens. L’auteur détermine les conditions technologiques de production, procède à des attributions stylistiques et met aussi en évidence les fonctions et les systèmes sémiologiques prenant en compte les arts corporaux et les généalogies claniques afin d’interpréter les akwanshi. Dans l’optique d’étendre le champ analogique à la dispersion des célèbres masques recouverts de peau de l’ensemble de la Cross River, K. Nicklin (1979 : 57) suggère que ces derniers se seraient diffusés de la haute à la moyenne et à la basse Cross River, même si la zone intermédiaire concentre l’essentiel des productions. Les travaux plus récents de J.-P. Notué (2007/2009) relancent l’intérêt de l’approche sémiologique, établissant un lien entre l’art décoratif des monolithes et le système d’écriture à grade nsidibi de la puissante secte régional des « hommes léopard » Ngbe. Avant lui, d’autres chercheurs (MacGregor 1909 ; Dayrell 1910, 1911 ; Talbot 1912 ; Isichei 1997 ; Slogar 2007 ; Carlson 2007 ; Battestini 2006) ont essayé de retracer cette écriture à travers des supports bien variés (poterie ancienne, textile, sculpture, décoration corporelle et architecturale). Sur le plan ethnoarchéologique, les fouilles effectuées à la base d’un monolithe à Nnam par O. Ekpo Eyo (1986) ont mis au jour un matériel céramique4 daté au radiocarbone (1750 ± 50 BP [215-414 cal.AD]5). Ces sondages ont aussi permis de constater que les monuments ne renferment pas de sépulture, d’où différentes hypothèses de l’auteur rapprochant les akwanshi des effigies symboliques à la mémoire des ancêtres, des figures légendaires ou historiques ou même des emblèmes des sociétés secrètes. Plus récemment – entre 2016 et 2018 –, des chercheurs des universités nigérianes (The University of Calabar [UNICAR], Ahmadu Bello University of Zaria [ABU]) avec l’appui de partenaires internationaux, ont actualisé les inventaires de terrain à partir d’une technologie mieux adaptée (drone, appareil photo de haute résolution, photogrammétrie), ce qui a permis notamment de prendre la mesure de l’état de conservation des sites anciennement signalés.

Inventaire et conservation in situ, muséographie et marché

Inventaire et état de conservation in situ

16Depuis la découverte des monolithes au début du xxe siècle (Partridge 1905), il faut attendre les années soixante pour que P. Allison (entre 1962 et 1964) réalise les inventaires les plus exhaustifs. À partir de cette dernière décennie l’on assiste à une véritable actualisation des recherches (surtout sur le plan technologique) sous l’impulsion des chercheurs des universités nigérianes (cf. supra), en partenariat avec des instituts internationaux (Prince Clauss Fund of Amsterdam, Trust For African Rock Art, Factum Foundation). À considérer l’ensemble de ces travaux, on constate une régression des corpus, passant de plus 350 spécimens jadis signalés sur une trentaine de sites à moins de 200 de nos jours (fig. 3). C’est dire à quel point le siècle dernier a suffi à lui seul à réduire de près de la moitié le corpus sous l’action principale de l’homme. Les causes en sont nombreuses : le début de la colonisation – qui correspond à une période de désacralisation progressive des akwanshi –, pendant laquelle les traditions d’érection et certains cultes associés sont progressivement abandonnés sous l’influence des conversions massives au christianisme ; l’essor de l’urbanisme, les pressions démographiques et surtout les activités agraires et pastorales impactant les sites de manière très souvent irréversible, ce qui ressort bien des travaux d’I. Miller et A. Eded (2019) ; les périodes d’instabilité liées à la guerre du Biafra et aux incursions incessantes des pirates de mer qui ont considérablement contribué au dépouillement des sites au profit du marché de l’art.

Figure 3 – Répartition des akwanshi et figures apparentées dans la Cross River et  ses  environs.

Figure 3 – Répartition des akwanshi et figures apparentées dans la Cross River et  ses  environs.

Sites recensés en 2018  (ronds rouges) : 1. Agba ; 2. Ekajuk ; 3. Edamkono ; 4. Emangabe ; 5. Ntitogo ; 6. Alok ; 7. Ntol ; 8. Nkul Nnam ; 9. Nkrigon ; 10. Obomima ; 11. Njemetep ; 12. Naborakpa ; 13. Ekpatala ; sites plus ou moins détruits mais déjà signalés par plusieurs auteurs (ronds bleus) : 14. Edor ; 15. Eding Nta ; 16. Odo Nta ; 17. Egonokor ; 18. Nsak ; 19. Nde 3 ; 20. Eganga ; 21. Nsak ; 22. Anagha ; 23. Abayongo ; 24. Okuni ; 25. Abijang ; sites de style apparenté aux akwanshi (ronds verts).

© N.S. Tchandeu

17La synthèse des différents inventaires disponibles révèle une concentration des structures sculptées, et relativement bien conservées en cercle complet ou non, du centre-ouest au nord-est du pays ikom d’une part, et une relative dispersion des structures d’aspect brut, isolées, en alignement peu nombreux et en état de ruine, vers le sud-est d’autre part. Mais à l’épreuve des phénomènes courants de migrations internes exposant des structures abandonnées et parfois réappropriées ici et là, les bipolarisations nord sud et ouest/est ont bien sûr été perméables à une cohabitation des structures circulaires et alignées, décorées ou non, comme l’attestent certains cas d’Agba, anciennement occupé par les Nnam (vers le nord-est). Même si les monolithes ont été inventoriés par différents auteurs dans une trentaine de clans, ils semblent s’agréger autour de trois principaux : les Nnam au nord-est, les Nta au centre-ouest, et les Ndé au sud-est (tabl. 1).

Tableau 1 – État des inventaires des akwanshi en pays ikom. N.S. Tchandeu

Quantité

Secteurs

Localités du nord-est autour du clan Nnam

Localités du centre-ouest autour du clan Nta

Localités du sud-est autour du clan Ndé

≥ 30 akwanshi

Krigon (31)

≥ 20 akwanshi

Allok (25)

≥ 10 akwanshi

Manden (19)

Agba (19)

Emangabe (14)

Nkarasie (14)

Era (11)

Ekulogon (10)

Etinta (18)

Okurambang (14)

Old Edor (14) Mfum (11)

< 10 akwanshi

Ntoloshi (9 + 5)

Nebrokpa (8)

Nyerekpong (8)

Ekajuk (7)

Nkum Akpambe (4)

Ntetakor (4)

Nto (3)

Nsadup (2)

Djemitop-Nselle (9)

Ekpatala (5)

Oyengi (5)

Akumabal (4)

Eganga (4)

Odo Nta (2)

Eja (2)

Egononkor (8)

groupe indéterminé

Ndoroakpe

Etinta

Mandak

Agbokim

Okuni

akwanshi isolé

Awakande

Odo

Ofunmana

Okumuru

Abijan

Nsak

Netanebem Abayongo Awakande

Anagha

Imedum

Ekok

Boki

  • 6 (Sur le site de Ntitogo Nnam, décrit par P. Allison [1964] comme Ntetakor, la partie inférieure enf (...)

18Cette dernière décennie, des projets ambitieux d’inventaire et de documentation menés en collaboration par des chercheurs nigérians et des homologues internationaux (Edet& Takahashi 2003 ; Esu & Ukata 2012 ; Edet et al. 2016 ; Miller & Edet 2019), ont permis d’actualiser la recherche, de renouveler les techniques de relevés et d’évaluer l’état de conservation et de patrimonialisation des sites. Parmi les grandes avancées, l’usage de la haute technologie a contribué non seulement à reconstituer certains objets partiellement endommagés en 3D, mais aussi de cartographier à l’aide d’un drone, relocaliser les anciens sites et en identifier de nouveaux, enfin, prendre la mesure des interconnexions régionales afin d’anticiper des parcours touristiques. À titre d’exemple : « At Ntitogo Nnam site, described by P. Allison (1964) as Ntetakor, the lower buried section of a monolith was also identified in-situ. And a 3D forensic documentation was taken to assist in the assessment of the missing top which has been found at American Metropolitan Museum NY »6 (Edet et al. 2016).

Muséographie et marché de l’art

19Le domaine muséographique reflète toute la confusion qu’ont longtemps entretenu les ethnologues en désignant sous le seul label Ikoï ou Ejagham la plupart des populations de la Cross River, ce qui, en plus de l’indétermination du pays de provenance « Nigéria/Cameroun » de certains spécimens collectés, complique davantage les attributions et classifications stylistiques. Les traces des premières collections muséales viennent sans doute de la cession en 1909 par le collectionneur Staschewki d’une statue akwanshi au Museum für Völkerkunde (Einstein 1915). Dans les cas assez fréquents de collectes suite à une mutilation du monolithe, un bon exemple est livré par le spécimen de Ntitogo, dont la base du bloc est restée in situ et la partie haute – où figure un visage sectionné au niveau de la barbe (fig. 4) – est conservée au Metropolitan Museum de New York ; ces collectes à mutilation ayant parfois été si illégales et rapides qu’elles s’apparentent dans bien des cas à des actes délibérés de pillage.

Figure 4 – Partie supérieure d’un monolithe en basalte originaire de Ntitogo (Nigéria), actuellement au Metropolitan Museum of Art de New York (USA) : « 16th-19th century; culture nnam », 63,5 x 38,1 x 43,2 cm.

Figure 4 – Partie supérieure d’un monolithe en basalte originaire de Ntitogo (Nigéria), actuellement au Metropolitan Museum of Art de New York (USA) : « 16th-19th century; culture nnam », 63,5 x 38,1 x 43,2 cm.

Collection Nina et Gordon Bunshaft, Legs de N. Bunshaft, 1994. N° d’inventaire : 1995.64.18.

© The Metropolitan Museum of Art

20Cela vaut également pour un spécimen partiel d’Eding Nta, catalogué par P. Allison (1968), provenant d’Abuja et récemment vendu par les commissaires-priseurs de la maison de vente Binoche et Giquello (Paris). Mais l’un des records de vente connu dans cette catégorie reste actuellement détenu par un atal de Bakor (149 cm de haut), cédé en 1978 à la collection privée Alain Javelaud en France. Parmi d’autres monolithes répertoriés par P. Allison (ibid) et acquis dans des grandes collections figurent, d’une part, le spécimen du musée du quai Branly-Jacques Chirac à Paris, en provenance d’Eting Nta et jouissant d’un bon état de conservation, et, d’autre part, deux spécimens de la galerie Pierre Dartevelle de Bruxelles – l’un décoré d’Eting Nta, l’autre phalloïde et non décoré d’Oyengi. En résumé, malgré leur volume massif, les akwanshi sont relativement bien représentés dans les collections internationales – publiques, privées et universitaires (tabl. 2). Ce collectionnisme, dont les trajectoires restent parfois si difficiles à retracer, est à l’origine d’une documentation associée parfois bien pauvre et douteuse. Néanmoins, l’on observe le développement local d’une forme intéressante de muséalisation, mettant en relation objets, traditions orales et rituelles encore vivantes, notamment dans les musées de plein air d’Alok et d’Emangabe.

Tableau 2 – État non exhaustif de la représentativité des akwanshi dans les collections internationales.

Pays

Ville(s)

Type de collection

(P. : public ; pr. : privé)

Nombre et références

Origine

États-Unis

New York

P. : Metropolitan Museum

1 akwanshi Ikoï Ntitigo, Nigeria, 1960/70

certaine

pr. : Carlo Monzino Collection

1 figure en pierre Ekoï, Ekom, 75,5 cm H. 1986

certaine

Chicago

pr. : Primitive Living + Collection

14 akwanshi/neuba, Grassland Cameroun, 8 cm à 75 cm H. A0700-214

copies / variations

Beverly Hills

pr. : The Barakat Collection

1 monolithe Bakor, Ejagham, 45,7 cm H

incertaine

Washington

P : Museum-Saint-Louis

1 monolithe akwanshi, Nigeria

incertaine

Los Angeles

pr. : Design Mix Gallery

6 monolithes, Ikom

incertaine

France

Paris

P. : musée du quai Branly-Jacques Chirac

1 monolithe, Etinta, Ikom, Nigéria

certaine

pr. : Collection Alain Javelaud

1 atal, Bjagham, Bakor, Nigéria, 149 cm H., 1978

certaine

pr. : Binoche & Giquello

1 monolithe, Ikom atal, Nta, 142 cm H, autori-sation officielle de sortie 1969.

certaine

pr. : Hôtel des ventes Drouot Richelieu

1 akwanshi, Etinta, basalte, 152 cm H., 1969

incertaine

pr. : collection d’art africain de Liliane & Michel Durant-Dessert

1 tête atal/akwanshi, Bakor Ejagham, 65 cm H. NYK-120685

certaine

pr. : Thierry Des-benoît & Associés

6 atal/akwanshi Ekoi/Ejagham Cross River, entre 30 et 50 cm H.

incertaine

pr. : Ève enchère SVV, Lot 87, 109382

4 atal/akwanshi, Ekoi Ejagham, Cross River, ≤ 100 cm H.

incertaine

Nielles-lès-Ardres

pr. : galerie SARL SCEPI DEMORY

2 akwanshi/atal Ekoï/Ejagham, Came-roun, 7,5 cm H. 150519/AG

copies / variations

Allemagne

Berlin

P.: ex-Museum für Völkerkunde

1 monolithe de la rivière Cross, III C23943

ancienne coll.

Stuttgart

P. : Linden Museum

3 monolithes, Ikoï, Cross River, Nigeria

certaine, ancienne coll.

Leipzig

P. : Leipzig Museum

1 monolithe, Bam-bulewe (actuel Ewing), Cameroun

certaine, ancienne coll.

Zürich

pr. : Galerie Walu, Rudolf und Leonore Blum, Zumikon

1 monolithe, Ife-Kutur, Nigeria

incertaine

Belgique

Bruxelles

pr. : galerie Pierre Dartevelle

2 monolithes en phallus d’Oyengi et Etinta

certaine

pr. : Pierre Bergé & associés

1 monolithe akwanshi, Nigéria, 35 cm H. 116 395

incertaine

pr. : Essentiel Galerie SPRL

3 monolithes, Ekoï, Nigéria/Cameroun

incertaine

Angleterre

Londres

P. : British Museum, Lot Sotheby’s

1 monolithe Ekoï, Nigeria, 1974, 57 cm H. Af1974,18.1

incertaine

pr. : Christie’s, no 141

1 tête Ekoï en basalte, 1983. HAW. 014957

certaine

pr. : collection Tom Phillips

1 monolithe, Ejagham, Nigéria, 84 cm H., 1985

certaine

Cameroun

Foumban

pr. : Rifum Hotel

20 monolithes sculptés (style akwanshi), Bamoum, Cameroun

copies / variations

pr. : Manden Résidence

1 dizaine de monolithes sculptés (style akwanshi), Bamoum

copies / variations

Yaoundé

pr. : collection Protocole d’État Happi

7 monolithes sculptés (style akwanshi), Widekum

certaine

Nigéria

Lagos

P. : National Museum of Lagos

8 monolithes, Ekoï, de Nta, Nsella, Alok, Nnam.

certaine

Cross River State

pr. : Alok Open Air Museum

Nombre indéterminé d’akwanshi

site rituel

pr. : Emangabe Open Air Museum

Nombre indéterminé d’akwanshi

site rituel

Israël

Tel Aviv

P. : Musée d’Israël

1 akwanshi, Bakor, calcaire, 165 cm H.

certaine

Suisse

Genève

pr. : collection Barbier Müller

2 monolithes Ikoi- Nigéria- 54 et 62 cm H.

certaine

© N.S. Tchandeu

21Censée protéger l’intégrité des sites, l’inscription tardive des monolithes d’Ikom sur la liste indicative du patrimoine mondial de l’Unesco en octobre 2007 n’a pourtant pas freiné le marché de l’art, transmuté en trafic illicite et en une circulation très prolifique de copies. L’une des dernières actualités de ce trafic, relayée par le journal français Le Figaro, est l’annonce en octobre 2020 par le Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis (CBP), d’avoir « saisi à l’aéroport de Miami d’anciennes pierres sculptées en provenance du Cameroun, connues sous le nom de monolithes d’Ikom. Elles sont arrivées aux États-Unis en utilisant de faux documents »7. Par ailleurs, pour être reconnus comme authentiques, la plupart des objets (souvent des fragments d’akwanshi) s’appuient sur les catalogues d’auteurs reconnus, depuis C. Partridge (1905) jusqu’à K. Nicklin et J. Salmons (1984) en passant surtout par P. Allison (1968). C’est paradoxalement sur la base de ce catalogage que sont reproduites les copies plus ou moins fidèles des modèles anciens, en témoigne en particulier le foyer de Foumban à l’ouest Cameroun, comme le note J.-P. Notué (2007/2009 : 39) :

« Le pays bamoun abrite des ateliers (plus ou moins clandestins) spécialisés dans la fabrication de faux monolithes également recherchés, faits à partir de la reproduction plus ou moins fidèle des originaux de tous les styles trouvés dans les catalogues ou ailleurs. Tout laisse supposer qu’en plus des spécimens étrangers, des pièces originales locales ont été ainsi reproduites, avec souvent quelques modifications, d’après des informations que j’ai obtenues chez les antiquaires et les artisans. De tels objets sont aussi utilisés localement dans le décor des jardins d’hôtel… et interviennent même dans des rites coutumiers après avoir été consacrés. »

  • 8 Cette appellation se rapporterait précisément chez les Bafut, selon L. Perrois & J.-P. Notué (1997  (...)
  • 9 Selon une communication personnelle de R. Oslisly en décembre 2019, la véritable origine de ces obj (...)
  • 10 Il s’agit des collègues Idrissou Njoya et Guy Kédé, enseignants-chercheurs à l’Institut des Beaux-a (...)
  • 11 Dans ce dernier cas, il existe une véritable ruée des touristes amateurs d’art vers le pays Tikar o (...)

22Si cette citation est bien édifiante sur l’industrie des copies, l’auteur ne manque pourtant pas de relever que ces dernières ont été perméables à des innovations ou plutôt des variations, allant dans le sens d’un syncrétisme entre le modèle des akwanshi et celui de la statuaire en bois locale. Surtout connus des collectionneurs sous l’appellation neuba ou neba8, certains de ces monolithes ont été recensés par J.-P. Notué (ibid.) en Foumban, d’autres, une vingtaine, sont alignés devant l’hôtel Rifum9, et nos informateurs10 en signalent une dizaine alignés devant la résidence Manden (fig. 5). Il est aussi intéressant de remarquer le phénomène d’appropriation rituelle des pièces, certaines étant consacrées comme « gardiennes de tombes » (ibid.) ou plus couramment comme esprit tutélaire des lieux (selon nos informateurs), jouant par exemple un rôle à la fois décoratif et de protection devant les hôtels et résidences susmentionnés. Et même dans ces cas d’appropriation, les enjeux commerciaux de spéculation ne sont jamais éloignés, la mise en scène rituelle participant parfois à dessein d’une surenchère sur l’authenticité des objets. Plus efficace encore, la stratégie du « time bless art » consiste en un vieillissement factice du monolithe (technique de patine à l’huile de palme et au goudronnage du tronçon censé émerger du sol). La dernière curiosité vient du récit11 des spécimens rares qui auraient été enterrés dans des fosses aménagées en pays tikar, lieu d’origine des ancêtres Bamoun.

Figure 5 – Différents monolithes sculptés et alignés devant la résidence Manden.

Figure 5 – Différents monolithes sculptés et alignés devant la résidence Manden.

© Guy Kédé

23L’autre portail sur internet, très visité pour la commercialisation en ligne des akwanshi, est sans doute la « Porte dogon ». Y figurent des copies d’akwanshi dont la signature du faux est souvent discernable à leur aspect miniaturisé (de la taille d’un poing), la présence d’un trou d’enfilage évoquant celui d’un collier-amulette, voire parfois l’attribution délibérée aux Dogons, marque de fabrique censée être plus attractive aux amateurs d’art que celle à peine connue des akwanshi. Proposés à la vente sur des sites en ligne d’art africain, d’authenticité douteuse, les objets sont estimés de quelques centaines d’euros – parfois moins pour des figurines-amulettes – à plusieurs milliers voire dizaines de milliers d’euros dans le cas des grands monolithes (plus d’un mètre) dits « gardiens de champs ».

24Remarquons toutefois que la plupart des inventaires se sont concentrés sur la rive nigériane de la Cross River, au détriment des spécimens sans doute moins nombreux mais tout aussi intéressants du Cameroun (Anyang, Banyang, Keaka, Boki). En effet, les monolithes des localités Widekum, Mundani et Bangwa occidental au sud-ouest du Cameroun sont d’autant plus édifiants qu’ils participent – selon plusieurs auteurs (Nicklin 1979 ; Nicklin & Salmons 1984 ; Harter 1986 ; Notué 2007/2009 ; Tchandeu et al. 2019) – d’un style intermédiaire entre celui classique des akwanshi (anthropomorphe d’aspect phallique, à tête piriforme et / ou à ombilic) et celui aux aspects plus sculpturaux du Grassland (tendance à la figuration des jambes, à l’asymétrie de la posture, à l’expressivité des textures [pierres grenues de préférence], à l’exagération relative des organes de sens [yeux exhorbités, nez et lèvres charnus] et à la codification des coiffes des dignitaires). Les spécimens les plus curieux mettent en évidence des figures bifaciales, mais aussi des décorations de motifs zoomorphes ou vulvaires qui échappent au registre iconographique classique des akwanshi. Au nord-ouest Cameroun en particulier, où les styles sculpturaux les plus riches ont parfois été mentionnés, « d’autres monolithes sculptés et décorés ont été décrits à Nso (Harter 1986 : 106-179), à Guzang, Awing, Baba, Baboungo, Chomba et en pays Meta (Notué 2007/2009 : 40, 42, 55, 56). C’est le cas des grandes pierres sculptées de lézards ou de serpents lovés qui participaient selon P. Harter (1986 : 106) du faste de la maison d’apparat du palais royal de Nso » (Tchandeu et al. 2019 : 70 ; fig. 6).

Figure 6 – Cartographie des monolithes sculptés du Grassland et de la River Manyu (haute Cross River).

Figure 6 – Cartographie des monolithes sculptés du Grassland et de la River Manyu (haute Cross River).

© 1 (R. Oslisly) ; 2-7 (N.S. Tchandeu) ; 8 (G. Kédé)

Analyse et classification morpho-stylistique des akwanshi

25Aux côtés des akwanshi anthropomorphes, surtout promus par le marché de l’art, il en existe d’autres, moins connus, qui se limitent à de simples monolithes totalement dépourvus d’ornements, sinon stylisés en un profil phalloïde. Les dimensions sont aussi très variées, associant parfois un monolithe émergeant de quelques dizaines de centimètres du sol à un autre pouvant atteindre 180 cm (fig. 7). Loin d’être fortuite, cette variabilité morpho-iconologique semble être le reflet de trois périodes d’évolution stylistique, lesquelles sont tributaires autant de l’apparition du phénomène mégalithique pré-ikom dans toute la région, que du peuplement Ikom, et du rapport des monolithes avec d’autres éléments culturels comme la sculpture en bois et les arts du corps (cf. supra).

Figure 7 – Différence de tailles dans un arrangement concentrique d’akwanshi encore en place à Emangabe.

Figure 7 – Différence de tailles dans un arrangement concentrique d’akwanshi encore en place à Emangabe.

Dessin N.S. Tchandeu d’après Edet et al. 2016

Style des monolithes bruts ou sommairement dégrossis pré-ikom (du iie siècle avant notre ère au xve siècle de notre ère)

  • 12 Déjà évoqué dans le cas du prélèvement des akwanshi dans le lit des cours d’eau, un procédé compara (...)
  • 13 P. Lavachery et al. (1996) évoquent l’exceptionnelle ancienneté d’un peuplement continu dans la rég (...)

26Au profil brut de certaines structures, à l’aspect naturel ou sommairement dégrossies, correspondent les traces d’un mégalithisme plus ancien et répandu dans toute la sous-région, notamment des confins de la Cross River au Grassland du Cameroun, jusqu’au Bouar en République centrafricaine12. Si dans ce dernier cas l’apparition du phénomène remonte à plus de 1000 ans av. J.-C. (Zangato 1996), rien n’exclut une telle périodisation pour les structures du Grassland (de Maret 1992 : 247-261 ; Oslisly 2007 : 10) et pour celles de la Cross River, du moins si l’on s’en tient à la date obtenue à Nnam (Ekpo Eyo 1986 : 101-104 ; cf. supra). Tenant compte du rapport entre la densité du peuplement historique du Grassland – au sein des plus anciens et élevés de la sous-région13 et l’ampleur du phénomène mégalithique – parmi les plus importants et colossaux en Afrique centrale –, il faut croire que c’est à partir de ce plateau que la tradition des marqueurs territoriaux en pierre se serait probablement répandue vers les zones périphériques, notamment la Cross River. Il en est de même pour les flux migratoires, les échanges de produits et la traite des esclaves qui ont toujours été constants et privilégiés. En outre, c’est au contact des sociétés hiérarchisées du Grassland que celles de la haute Cross River ont vite développé une prise de conscience de la valeur foncière de la terre (Delpech 1978 : 131), ainsi qu’une organisation de type centralisée (exemple des Moghamo, Meta et Ngemba) – système social, en déphasage avec celui des sociétés segmentaires de la moyenne et basse Cross River, ayant conservé le système des sociétés segmentaires. Mais l’attraction de la zone côtière « palm belt », de la traite et des sociétés de négociants (Efik, Ibo, et Ibibio), ajoutées à une longue histoire des pratiques agraires itinérantes (tubercules surtout ; ibid.), peuvent globalement expliquer le constat fait par certains auteurs (Talbot 1926 ; Harris 1959) à propos de l’état d’abandon des monolithes, plus important quand on tend du nord-est au sud-ouest de la Cross River. Dans la direction contraire en revanche, les monolithes sculptés sont les plus nombreux. La fréquence de structures mixtes (décorées et brutes) en pays Nnam vers le nord-est, semble révélatrice du rôle transitoire de cette zone où l’un des sites à l’abandon a été fouillé et daté (Ekpo Eyo 1986 : 101-104). Cette datation a remis en cause l’hypothèse de P. Allison (1968 : 32-34) sur l’antériorité des monolithes richement décorés de Nta (vers l’ouest), postulat s’appuyant surtout sur la généalogie des chefs Ntoon représentés. Tout au moins, la possibilité d’un continuum culturel ancien, sous l’influence des traditions mégalithiques du Grassland-Cameroun, se traduit par une association systématique des pierres dressées à d’autres éléments rituels comme les arbres, les poteries, les meules ou des bancs d’assemblées rituelles. À ceci, il faut ajouter le rituel commun d’offrandes (poule, huile et vin de palme, sel, etc.), dont certains produits comme l’huile de palme en particulier, ont durablement participé des échanges commerciaux dans l’ensemble de la région.

Style des monolithes phalliques à ombilic en lien avec les généalogies ikom (à partir du xvie siècle au moins)

27Le profil frontal brut initial met à présent en évidence un collet et une calotte en forme de poire (fig. 8a). Cette mise en relief de la calotte correspond en général à une ligne de dépression antérieure à laquelle répond parfois un réseau de sillons qui convergent vers le nombril, lequel est en général protubérant. La fréquence de ce type de monolithe phalloïde sans décoration en bordure des champs – notamment à Oyengi (vers l’ouest) où les plus beaux spécimens sont connus – correspond sans doute à l’émergence d’une société agraire. Cette dernière se caractérise par la culture de l’igname sous l’influence des traditions agraires des voisins occidentaux (Efik, Oron, Ibo et Ibibio). Étant donné la survivance de ces rites, il faut croire que l’apparition de ces monuments est contemporaine à la mise en place autour du xve siècle des institutions sociopolitiques et religieuses des sociétés actuelles. Au cœur de celles-ci, et des rites de fertilité (des terres et des êtres vivants), se trouvent, d’une part, la puissante confrérie sécrète des hommes-léopard, respectivement nommée ngbe, egbe, ekpo chez les Ikoï, les Efik et les Ibibio – gardienne des traditions et du respect des institutions –, et, d’autre part, la gent féminine, aussi influente par ses propres confréries masquées et principalement en charge des cultures séculaires de subsistance, en particulier les tubercules. Dans ce dernier cas, A.B. Carlson (2019 : 48) nous rappelle qu’à l’occasion des rites agraires, les femmes ménopausées interviennent directement dans le rafraîchissement des décorations picturales des akwanshi, ce qui peut également être attesté par d’anciens clichés de l’ouvrage de P. Allison (1968) illustrant des monolithes revêtus de feuilles et de fibres, lesquelles sont parfois ceinturées au-dessus de la zone ombilicale en évoquant des jupes de femme. Par ailleurs, c’est en s’appuyant sur la stabilisation des institutions politico-religieuses que cet auteur (ibid. : 32-34) fait remonter l’origine des akwanshi (indifféremment de leur aspect phalloïde ou anthropomorphe) au moins au xvie siècle, en les mettant en relation avec la généalogie de vingt-deux chefs Ntoon de Nta, dont le dernier serait mort au début du xxe siècle.

Figure 8 – Monolithes : a) phalloïde encore en place à Oyengi ; b) anthropomorphe d’Etinta conservé au musée du quai Branly-Jacques Chirac, Paris ; c) anthropomorphe, sans bras mais richement décoré, encore en place à Agba.

Figure 8 – Monolithes : a) phalloïde encore en place à Oyengi ; b) anthropomorphe d’Etinta conservé au musée du quai Branly-Jacques Chirac, Paris ; c) anthropomorphe, sans bras mais richement décoré, encore en place à Agba.

a) dessin N.S. Tchandeu d’après cliché de Factum Foundation ; b) dessin N.S. Tchandeu ; c) © D. Coulson

Style des monolithes phallo-anthropomorphes à scarifications identitaires en lien avec la traite (à partir du xviiie siècle)

28L’aspect phalloïde se voit enrichi par la figuration anthropomorphe de la tête, voire des bras, mais surtout d’une profusion de motifs de scarifications faciales et/ou abdominales (fig. 8b, c). L’importance que ce style de tendance phallo-anthropomorphe accorde aux motifs de scarifications en stries ou en chéloïdes se reflète par l’adoption systématique des marques corporelles identitaires. Ces dernières se sont d’autant plus vite répandues sur l’ensemble des côtes guinéennes que ses populations ont particulièrement été exposées au commerce de la traite, lequel fut surtout actif dans la Cross River à partir du xviiie siècle. Imprimés en saillie ou en creux, les motifs des scarifications évoquent ceux des populations de la péninsule jusqu’en pays yorouba. Le répertoire le plus fréquent associe un tracé qui s’étend de l’arête nasale au sommet du front (se prolongeant parfois au niveau du menton) à deux ou trois tracés subverticaux parallèles sur les joues, trois tracés subhorizontaux parallèles sur les tempes, ainsi qu’à des spirales, signes en revanche assez singuliers aux groupes de la Cross River et aux voisins de l’ouest.

29Par ailleurs, en considérant la morphologie générale des spécimens, les caractéristiques stylistiques d’un groupe (où s’improvise parfois la fantaisie personnelle de l’artiste) sont décelables dans le rapport invariants/variants d’éléments tels que : la forme de la tête (conique, sub-sphérique, piriforme), les décors du visage (yeux et bouche ovoïdes ou rectangulaires, aspect des chéloïdes, des stries, de la coiffure), la dépression plus ou moins prononcée du cou, la présence ou non de bras accolés, des seins circulaires, spiralés ou triangulaires, le réseau simplifié ou complexe de motifs abdominaux autour d’un nombril plus ou moins proéminent. En guise d’exemple, les styles anthropomorphes dépourvus de bras chez les Nnaborapka, Ting Nta et Bornina se distinguent par la pauvreté des décorations abdominales compensée par une expressivité des entailles profondes, particulièrement marquées au niveau du cou (Nnaborapka, Ting Nta) et ressortant très souvent la langue dans une bouche ovoïde. Bien que la tendance des bras posés en direction du nombril (Alok, Ntitogo, Nkrigon, Eting Nta) évoque des attitudes classiques de la statuaire sous-régionale en bois, l’influence de cette dernière, notamment pour les styles Oron et Keaka, devient assez particulière dans la diffusion de la barbe large (Agba, Alok, Emangabe) ou filiforme (Ntol ou Ntolshi, Nnaborapka, Nkrigon). L’absence de bras est largement compensée en pays Nta par une exagération des motifs de décoration abdominaux, où la prédominance de la spirale évoque la forme de certaines coiffures et scarifications de femmes voire des masques Oron, Efik et Ibibio à l’ouest, Banyang, Anyang et Boki à l’est.

30Pour résumer les influences stylistiques riveraines sur les expressions sculpturales de la Cross River, K. Nicklin et J. Salmons (1984 : 30) notent que :

  • 14 (La sculpture d’Ibibio, y compris celle d’Oron, se trouvent dans la limite régionale des palmiers, (...)

« Ibibio sculpture, including that of Oron, is in the palm Belt, while skin-covered masks, massive wooden sculptures, and monoliths and bronzes occur mainly in the Cross River Basin. Although certain traits are distinctive of each area, there is much evidence of the interchange of influences between the two zones. »14

31Par ailleurs, par rapport aux styles anthropomorphes de la zone ikom, ceux identifiés sur la rive camerounaise de la Cross River (Anyang, Banyang, Keaka, Boki) se caractérisent, comme nous l’avons déjà évoqué, par leur facture intermédiaire avec celle du Grassland, notamment à travers les monolithes des Widekum, des Mundani et des Bangwa occidentaux. Il en ressort un style assez remarquable par sa synthèse de la facture phallo-anthropomorphe des akwanshi et les proportions expressives et asymétriques de l’art du Grassland (fig. 9).

Figure 9 – Monolithes apparentés akwanshi de style phallo-anthropomorphe (52 et 64 cm), collectés dans la région intermédiaire Widekum et intégrant un ensemble de sept pièces de la « Collection Protocole d’État Happi » à Yaoundé.

Figure 9 – Monolithes apparentés akwanshi de style phallo-anthropomorphe (52 et 64 cm), collectés dans la région intermédiaire Widekum et intégrant un ensemble de sept pièces de la « Collection Protocole d’État Happi » à Yaoundé.

© N.S. Tchandeu

Significations, fonctions et matrimonialisation locale

Que représentent les akwanshi et quel est leur rôle ?

32Plusieurs hypothèses ont déjà été formulées à ce sujet, les plus reprises étant liées à un symbolisme phallique, à des stèles funéraires, à la généalogie d’ancêtres, de héros ou à des emblèmes des confréries secrètes. C’est en s’appuyant par exemple sur l’aspect phalloïde prononcé de certains de ces monuments que P. Allison (1968 : 25) considère que ces derniers ont un caractère essentiellement masculin. Ce postulat tient aussi à la constance des figures anthropomorphes caractérisées par le profil piriforme de la tête. En contrepartie à ces attributs apparents de l’homme correspond une codification aussi abstraite qu’essentielle des traits symboliques féminins :

  • les scarifications, dont celles autour du nombril adipeux, participent des critères de beauté et de fécondité en vigueur chez les femmes de la Cross River et des zones périphériques ;

  • la codification du sein, sous forme de spirales, de cercles ou de triangles concentriques, évoque l’idée de la croissance ;

  • plus rarement, l’incision d’un motif vulvaire, alors que les attributs péniens sont quasi inexistants.

  • 15 A.B. Carlson (2019) signale, entre autres cas : la confrérie agot dont les membres répondent à diff (...)
  • 16 (Les femmes ménopausées peignent des lignes incisées sur le « corps » des monolithes en pierre de B (...)

33En outre, la mise en exergue d’une adiposité ombilicale est là pour rappeler les principes fondamentaux d’une société matriarcale où l’essentiel se transmet par le ventre de la femme, y compris les alliances « mystico-totémiques », mais aussi les titres nominaux. Au sein d’une société « dans laquelle les femmes, en tant que groupe conscient de soi, s’exprimaient librement » (Perrois & Notué 1997 : 206), leur influence se faisait autant ressentir dans la production des cultures séculaires de subsistance comme les tubercules, que par leurs propres confréries masquées, intervenant dans diverses activités rituelles15. C’est dans ce cadre, et concernant une catégorie précise de femmes, qu’A.B. Carlson (2019 : 47) signale que : “postmenopausal women paint over incised lines on the “body” of the Bakor stone monoliths (circa seventeenth century or earlier) before the stones are ritually fed with pounded yam and palm oil at the New Yam Festival16.

34En somme, cette ambivalence de motifs masculins et féminins au sein du même objet semble plutôt plaider pour identifier des représentations d’êtres androgynes. Dans ce sens, il faut croire que ces monuments ne représentent pas littéralement le portrait ou l’effigie en soi d’une personne, mais un processus d’ancestralité au cours duquel les imperfections de l’individu laissent place à l’unité de l’être, unité cristallisant les aspects virils de l’homme (barbe) et féconds de la femme (seins et nombril), mais aussi les traits caractéristiques du lignage (scarifications identitaires). À cet égard, on peut convenir avec P. Allison (1968 : 32-34) que le monument figurant Efa Mba, le vingt-deuxième chef Ntoon, Asiene, mort vers 1900, pourrait en effet le représenter sans qu’il en soit forcément contemporain à l’exécution.

35Le rapport entre les monuments et la mort trouve d’ailleurs tout son sens dans la connotation même du terme akwanshi signifiant « personne morte sous terre » en langue Bakor. Si cette sémantique laisse croire à des stèles funéraires, il s’agit plutôt de monuments symboliques à la mémoire du mort, donc dépourvus de sépultures. Cette conception du monumentalisme semble proche de celle du Grassland où la pratique de l’exhumation du crâne (un an environ après l’enterrement) est accompagnée de sa sanctuarisation dans une case cultuelle, tandis qu’à l’entrée du hameau familial se trouvent la ou les pierre(s) associée(s) à l’arbre commémoratif de l’ancêtre fondateur du lignage. Tenant compte du fait que les sociétés de la Cross River (surtout de la moyenne et basse Cross River) ont une structure sociale de type segmentaire, il paraît plus vraisemblable que ces monuments symbolisent non pas des chefs politiques, mais plutôt des cadres institutionnels initiatiques, au cœur du fonctionnement de ce modèle social. Une considération particulière doit être accordée aux membres de la plus puissante confrérie secrète ngbe. Ces derniers seraient à l’origine d’un système d’écriture à grade nsidibi (variant de 9 à 33 grades selon les secteurs) dont les codes évoquent certaines décorations de monolithes akwanshi (Notué 2007/2009 : 39). Aussi l’association systématique d’un monolithe décoré et d’un pilier cultuel, au centre de chaque loge où se réunit encore de nos jours la secte dans la haute Cross River (ibid.), peut ouvrir une perspective de réflexion intéressante sur le rôle de certains cercles d’akwanshi laissés à l’abandon autour d’un arbre ou d’un autre support cultuel. En outre, le rapport de cette confrérie dite des « hommes-léopard » avec les rites agraires – en particulier la célèbre fête de l’igname – positionne le ngbe comme principal garant de la prospérité du groupe, et gardien de ses emblèmes, notamment des akwanshi ; ces derniers sont considérés comme les réceptacles des plus anciens esprits tutélaires des terres (nommés fijióku en langue igbo). Le lien de causalité entre le monolithe et la germination de l’igname paraît si intime qu’une considération métaphorique peut être envisagée entre leur forme relativement elliptique, et la rétroprojection des actes de déterrement du tubercule et le processus d’enterrement partiel du mégalithe.

Comment les akwanshi participent-ils de la mémoire collective actuelle ?

36Le symbolisme des akwanshi, en lien étroit avec les pratiques agraires, trouve encore toute sa pertinence de nos jours dans le déroulement annuel de la fête de l’igname ou New Yam annual Festival dans la Cross River, évènement répandu aussi chez les voisins occidentaux notamment sous l’appellation plus connue de leboku en pays ibo. Pendant trois semaines, durant le mois d’août (calendrier lunaire yakurr), la cérémonie est successivement marquée par les rites du début des récoltes, ceux propitiatoires des divinités de la terre et les journées alternées d’initiations des jeunes filles et des garçons. Afin d’inaugurer symboliquement le début des récoltes, les principaux opérateurs rituels déterrent l’igname et donnent ainsi le signal à toute la communauté de le récolter sans aucune impunité partout où bon lui semble, mais à des fins exclusives de consommation. Cuit dans sa coque sur la braise, le tubercule est exclusivement consommé avec de l’huile de palme, assaisonné de sel et accompagné de vin de palme, ingrédients rituels également essentiels pour les offrandes adressées aux akwanshi. Par ailleurs, la journée d’initiation féminine est marquée par la procession des femmes portant le tubercule, ainsi que par la cérémonie de passage de classe d’âge des jeunes filles. Ces dernières sont amenées à décorer les murs de la case de réclusion des motifs évoquant les étapes de l’initiation (Talbot 1912 : 107), mais aussi à se livrer à certaines épreuves de combat qui déterminent leur grade le jour de la parade rituelle. À cette occasion, qui sanctionne également la préparation des jeunes filles au mariage, les prêtresses (gbenerime en langue ibo) doivent attester de la virginité des candidates Monokim en peignant leurs corps, surtout les entours ombilicaux, de motifs géométriques semblables à ceux des akwanshi.

  • 17 Cet aspect folklorique est très souvent mis en évidence par l’organisation des compétitions de fest (...)

37Si la pérennisation de ces activités rituelles « caresse » bien l’âme d’un mégalithisme aux origines protohistoriques, il faut croire que les festivals annuels participent davantage aujourd’hui de pratiques d’inculturation où certains aspects cultuels s’adaptent aux enjeux mémoriaux et folkloriques de l’évènement17, l’essentiel des populations s’étant converti au christianisme. À ce changement des fondamentaux culturels correspond un état de plus en plus déplorable de conservation des monolithes, dont de nombreux spécimens ont été délibérément vandalisés sous l’effet des pratiques agraires, des feux de brousse et des aménagements de routes, en rapport avec le processus d’urbanisation et la pression démographique. Toutefois, à la faveur de l’inscription depuis 2007 des akwanshi dans la liste indicative du patrimoine mondial de l’Unesco, se manifeste une prise de conscience de la valeur exceptionnelle de ce monumentalisme en Afrique, ce qui se traduit par un regain d’intérêt dans divers projets universitaires, essentiellement par les chercheurs de l’UNICAR et de l’ABU (cf. supra). C’est bien cet intérêt des universitaires qui est à l’origine de l’actualisation des inventaires et de l’évaluation de l’état de conservation des sites entre 2016 et 2018 au moyen d’une technologie plus adaptée, initiative soutenue par des partenaires internationaux (cf. supra). Plus concrètement, la monumentalisation en « art public » d’akwanshi en béton armé au rond-point « Muritala Mohammed » de Calabar est aussi révélatrice de la volonté de l’autorité administrative fédérale de se réapproprier ce patrimoine faisant partie des plus emblématiques de la province de la Cross River. Toutefois, à l’état actuel de cette patrimonialisation, les véritables défis selon I. Miller et A. Edet (2015) relèvent de la préservation de l’héritage ancien face aux pratiques agraires (feux de brousse entre autres), aux activités pastorales et aux pressions urbanistiques (construction des routes).

Conclusion

38Originellement fabriqués comme marqueur territoriaux fixant durablement l’espace, les monolithes akwanshi font l’objet d’un collectionnisme considérable et d’une valeur spéculative croissante sur le marché de l’art ; ceci malgré les conditions très souvent illégales des collectes souvent en relation avec les crises sécuritaires récurrentes dans la Cross River. Un inventaire des spécimens ethnographiques et muséographiques suivi d’analyses morpho-stylistiques a permis d’établir des corpus suivant trois principales périodes diachroniques (cf. supra).

39Bien que perçus en général comme ayant un caractère masculin en lien avec le culte phallique, ces monolithes semblent pourtant fédérer entre eux des traits aussi bien masculins (barbe) que féminins (seins et scarifications autour du nombril) qui en font des êtres androgynes, pourvus des marques caractéristiques du groupe (scarifications identitaires). Si certains auteurs, comme P. Allison (1968), ont pu y identifier la généalogie des chefs Ntoon à Nta, les monuments s’apparentent pourtant moins à des stèles funéraires (aucune trace de sépulture) qu’à des structures commémoratives symboliques. Elles sont alors interprétées comme réceptacles d’esprits tutélaires garants de la fécondité des sols et des hommes. En ce sens, les akwanshi semblent avoir joué, sous le contrôle de la puissante confrérie secrète des hommes-léopard Ngbe, un rôle de premier plan dans le déroulement de la fête agraire de l’igname dans la Cross River, répandue aussi chez les voisins Efik, Oron, Ibo et Ibibio. La survivance jusqu’à nos jours de cette activité sous la forme d’un festival annuel populaire participe de manière plus folklorique que sacrée de la sauvegarde patrimoniale de la mémoire des akwanshi. La désacralisation de ces monuments, amorcée dès la période coloniale anglaise, se trouve sans doute être le déclencheur de leur spoliation, de leur pillage et de leur destruction progressive face aux pressions urbanistiques, démographiques, aux feux de brousse et aux activités pastorales. Fort heureusement, l’inscription des akwanshi sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en 2007 a favorisé une prise de conscience locale sur la valeur exceptionnelle de ce monumentalisme en Afrique, ce qui ne pouvait se traduire de manière plus marquante que par des copies d’akwanshi en béton armé exposées à un rond-point de Calabar et qui s’imposent à ses visiteurs. Parallèlement à ces processus de patrimonialisation, de nouveaux défis s’offrent à la recherche en termes d’authentification des pièces face au regain d’intérêt du marché des copies. L’exemple du marché des copies en pays bamoum révèle cependant que de telles productions peuvent autant être perméables à des variations stylistiques, plus ou moins teintées d’innovations, que s’adapter à un cadre rituel propre. Une autre orientation consisterait à reconstituer, depuis le contexte local de la Cross River et le département des antiquités du Nigéria, l’histoire du trafic et de ses réseaux internationaux à partir de la période coloniale.

Remerciements

40N.S. Tchandeu remercie l’Institut national d’histoire de l’art de Paris (INHA) qui l’a accueilli comme « chercheur invité » en 2018 dans le cadre de ce sujet de recherche.

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Notes

1 (Après que la guerre du Biafra [1967-1970] ait bouleversé la vie des peuples, les mascarades, détruites ou oubliées pendant la guerre, doivent être reconstruites ou réinventées).

2 Dossier d’inscription intitulé Alok Ikom Stone Monoliths, référé 5173, soumis le 08-10-2007 par la National Commission for Museums and Monuments de l’État fédéral du Nigéria.

3 (Les masques recouverts de peau, dans leur représentation en détail des différents types de marques tribales, peuvent être comparés aux monolithes Ekoï).

4 Selon Babatunde Lawal (2017 : 57), ce matériel est comparable et contemporain à celui exhumé par le même auteur sur des sites de Calabar caractérisé par « leurs décorations élaborées, avec des cercles concentriques, des motifs entrelacés, des spirales, des zigzags, des chevrons, des croix, des arcs, des pointes de flèches et des étoiles, entre autres ».

5 Calibration OxCal 4.4.4. Courbe IntCal20. Références laboratoire non fournies par O. Ekpo Eyo (1986).

6 (Sur le site de Ntitogo Nnam, décrit par P. Allison [1964] comme Ntetakor, la partie inférieure enfouie d’un monolithe a également été identifiée in situ. Et une documentation par photogrammétrie 3D a été prise pour aider à l’évaluation du sommet manquant trouvé à l’American Metropolitan Museum NY).

7 https://www.lefigaro.fr/flash-actu/les-douanes-americaines-saisissent-d-anciennes-pierres-gravees-en-provenance-du-cameroun-20201021

8 Cette appellation se rapporterait précisément chez les Bafut, selon L. Perrois & J.-P. Notué (1997 : 207), au « dieu de la guerre », mais s’assimile parfois aussi au premier fon fondateur de cette chefferie.

9 Selon une communication personnelle de R. Oslisly en décembre 2019, la véritable origine de ces objets reste à déterminer, même si la publication de certains indique une provenance des localités d’Oku, de Kumbo et de Jakiri (voir à ce sujet le lien : http://www.bradshawfoundation.com/central-africa).

10 Il s’agit des collègues Idrissou Njoya et Guy Kédé, enseignants-chercheurs à l’Institut des Beaux-arts de Foumban (IBAF), que nous tenons à remercier ici pour leur disponibilité. Selon Idrissou Njoya, originaire et dignitaire du royaume, le nommé Njiyoluh (aujourd’hui décédé), propriétaire de la résidence Manden, a été l’un des antiquaires les plus réputés dans le trafic des pierres sculptées, activité que l’informateur associe à une industrie des copies relativement récente (première moitié du xxe siècle) et non aux traditions culturelles séculaires.

11 Dans ce dernier cas, il existe une véritable ruée des touristes amateurs d’art vers le pays Tikar où les antiquaires leur promettent toutes sortes de vestiges archéologiques, parfois exhumés du sol de manière spectaculaire selon notre informateur Timothée Bekamba, sculpteur-forgeron tikar. Certains collègues camerounais et nous-mêmes avons déjà, à maintes reprises, été contactés par des amateurs d’art de différentes nationalités ainsi que par le musée national de Yaoundé, afin d’expertiser des pièces dites « d’origine tikar », en réalité provenant de diverses chefferies du Grassland, de la Cross River et de la vallée de la Bénoué.

12 Déjà évoqué dans le cas du prélèvement des akwanshi dans le lit des cours d’eau, un procédé comparatif est aussi signalé par J.-P. Notué (2007/2009 : 47) pour les structures extraites des carrières de Pinyi (vallée de Mentchum dans le Grassland) dont les aspects naturels « ronds, parallélépipédiques, cubiques, phalliques, coniques, etc. » auraient été conservés tels quels. Par ailleurs, dans sa classification des pierres dressées de la République centrafricaine, É. Zangato (1991 : 154) les distingue selon l’épaisseur et le niveau de dégrossissage plus ou moins sommaire (en général parallélépipédique à extrémité supérieure rectiligne, oblique ou cintrée), celles peu investies techniquement et celles qui le sont davantage.

13 P. Lavachery et al. (1996) évoquent l’exceptionnelle ancienneté d’un peuplement continu dans la région à partir de 30 000 ans av. notre ère selon les fouilles de l’abri sous roche de Shum Laka. La densité de peuplement du Nord-Ouest est forte. L. Perrois et J.-P. Notué (1997 : 187) notent qu’en atteignant jusqu’à 260 h/km2 dans certains endroits, elle « est parmi les plus fortes densités des campagnes africaines ».

14 (La sculpture d’Ibibio, y compris celle d’Oron, se trouvent dans la limite régionale des palmiers, tandis que les masques recouverts de peau, les sculptures en bois massif, les monolithes et les bronzes se trouvent principalement dans le bassin de la Cross River. Bien que certains traits soient distinctifs dans chaque zone, il existe de nombreuses preuves d’échange d’influences entre les deux zones).

15 A.B. Carlson (2019) signale, entre autres cas : la confrérie agot dont les membres répondent à différents grades et qui dansent masqués lors du New Yam Festival, des funérailles et autres célébrations culturelles importantes à Bakor, mais aussi connu sous l’appellation Ano chez les Alok ; la prestigieuse confrérie Ekpa des Etung-Ejagham, comparable à celle plus connue Aban des Efik, toutes caractérisées par le port des masques cimiers riches en symboles cultuels. À Boki, K. Nicklin (1974 :15) a aussi mentionné la confrérie masquée Egbede, au centre des rites initiatiques des jeunes filles.

16 (Les femmes ménopausées peignent des lignes incisées sur le « corps » des monolithes en pierre de Bakor [vers le xviie siècle ou avant] avant que les pierres ne soient rituellement nourries avec de l’igname pilée et de l’huile de palme au New Yam Festival).

17 Cet aspect folklorique est très souvent mis en évidence par l’organisation des compétitions de festivals régionaux comme celui de Calabar, dans le but de participer au festival international de Lagos FESTA 77 (Carlson 2019 : 50).

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Table des illustrations

URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 137k
Titre Figure 1 – Cartographie des principaux foyers de monolithes sculptés en Afrique.
Crédits © N.S. Tchandeu
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 66k
Titre Figure 2 – Trois monolithes intégrant un cercle incomplet à proximité d’un bosquet à Agba (Partridge 1905 : fig. 71)
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 163k
Titre Figure 3 – Répartition des akwanshi et figures apparentées dans la Cross River et  ses  environs.
Légende Sites recensés en 2018  (ronds rouges) : 1. Agba ; 2. Ekajuk ; 3. Edamkono ; 4. Emangabe ; 5. Ntitogo ; 6. Alok ; 7. Ntol ; 8. Nkul Nnam ; 9. Nkrigon ; 10. Obomima ; 11. Njemetep ; 12. Naborakpa ; 13. Ekpatala ; sites plus ou moins détruits mais déjà signalés par plusieurs auteurs (ronds bleus) : 14. Edor ; 15. Eding Nta ; 16. Odo Nta ; 17. Egonokor ; 18. Nsak ; 19. Nde 3 ; 20. Eganga ; 21. Nsak ; 22. Anagha ; 23. Abayongo ; 24. Okuni ; 25. Abijang ; sites de style apparenté aux akwanshi (ronds verts).
Crédits © N.S. Tchandeu
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-4.jpg
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Titre Figure 4 – Partie supérieure d’un monolithe en basalte originaire de Ntitogo (Nigéria), actuellement au Metropolitan Museum of Art de New York (USA) : « 16th-19th century; culture nnam », 63,5 x 38,1 x 43,2 cm.
Légende Collection Nina et Gordon Bunshaft, Legs de N. Bunshaft, 1994. N° d’inventaire : 1995.64.18.
Crédits © The Metropolitan Museum of Art
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 130k
Titre Figure 5 – Différents monolithes sculptés et alignés devant la résidence Manden.
Crédits © Guy Kédé
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 252k
Titre Figure 6 – Cartographie des monolithes sculptés du Grassland et de la River Manyu (haute Cross River).
Crédits © 1 (R. Oslisly) ; 2-7 (N.S. Tchandeu) ; 8 (G. Kédé)
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 130k
Titre Figure 7 – Différence de tailles dans un arrangement concentrique d’akwanshi encore en place à Emangabe.
Légende Dessin N.S. Tchandeu d’après Edet et al. 2016
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 26k
Titre Figure 8 – Monolithes : a) phalloïde encore en place à Oyengi ; b) anthropomorphe d’Etinta conservé au musée du quai Branly-Jacques Chirac, Paris ; c) anthropomorphe, sans bras mais richement décoré, encore en place à Agba.
Crédits a) dessin N.S. Tchandeu d’après cliché de Factum Foundation ; b) dessin N.S. Tchandeu ; c) © D. Coulson
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 144k
Titre Figure 9 – Monolithes apparentés akwanshi de style phallo-anthropomorphe (52 et 64 cm), collectés dans la région intermédiaire Widekum et intégrant un ensemble de sept pièces de la « Collection Protocole d’État Happi » à Yaoundé.
Crédits © N.S. Tchandeu
URL http://journals.openedition.org/aaa/docannexe/image/3273/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 166k
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Pour citer cet article

Référence papier

Narcisse Santores Tchandeu et Hassimi Sambo, « Monolithes sculptés akwanshi/atal de la Cross River (Nigéria-Cameroun) »Afrique : Archéologie & Arts, 17 | 2021, 55-76.

Référence électronique

Narcisse Santores Tchandeu et Hassimi Sambo, « Monolithes sculptés akwanshi/atal de la Cross River (Nigéria-Cameroun) »Afrique : Archéologie & Arts [En ligne], 17 | 2021, mis en ligne le 03 novembre 2021, consulté le 10 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/aaa/3273 ; DOI : https://doi.org/10.4000/aaa.3273

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Auteurs

Narcisse Santores Tchandeu

tchandeunarcisse@yahoo.fr – Université de Yaoundé I, département des arts et archéologie, Yaoundé, Cameroun

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hassimi.sambo@gmail.com – Université de Yaoundé I, département des arts et archéologie, Yaoundé, Cameroun

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