1L’objet du mémoire est l’étude et la comparaison, du point de vue technologique et expérimental, d’un corpus constitué des industries sur quartz de deux sites, Dungo IV et Dungo V. Ces sites se trouvent au sud de Baia-Farta, à environ 30 km de Benguela, au sud de l’Angola. Ils sont étudiés par une équipe franco-angolaise depuis le début des années 1990. L’étude technologique, appuyée par une approche expérimentale a pour but d’obtenir un maximum d’informations des pièces lithiques, pour tenter de mieux cerner ces sites et leurs occupants. Ces travaux s’intègrent dans une perspective plus générale de compréhension et de meilleure connaissance des périodes anciennes en Angola.

2L’étude technologique va tenter de cerner les actions de l’homme sur la matière première, que ce soit d’acquisition, de transformation et d’utilisation, afin d’appréhender son rapport à l’environnement, ses besoins et les connaissances qu’il développe pour y répondre.

3L’approche expérimentale intervient en complément de ces considérations techniques, pour les étayer mais aussi pour les approfondir.

4On a donc dans un premier temps organisé les pièces en 6 catégories : les galets bruts, travaillés ou percutés, les pièces nucléiformes, les éclats et les outils, afin d’en relever tous les critères intrinsèques, qui permettront de bien cerner la matière première, et les gestes techniques. L’expérimen-tation a joué un rôle prépondérant dans la vérification des hypothèses. Elle a permis également de juger de la qualité des matériaux travaillés, et de mettre en évidence les stigmates des différentes techniques de taille.

5La matière première taillée a également été prélevée sur place et divisée en deux corpus, un premier de quartz de nature diverse, et le second de quartz blanc de meilleure qualité.

6On a pu mettre en évidence trois techniques de taille :

• la percussion dure lancée,

• la percussion dure lancée sur enclume,

• la percussion dure projetée sur enclume.

7Chaque technique laisse des stigmates particuliers au niveau des éclats (fractures en Siret, en étoile, longitudinales, en «V»...) et des supports fracturés (réfléchissement, éclatement), ce qui confirme un peu plus l’interprétation des témoins lithiques.

8Pour ce qui est des matières premières, on a pu noter, pour Dungo V, une meilleure qualité générale du quartz utilisé (assez homogène et peu fissuré), qui n’est pas comme à Dungo IV d’origine «locale» (plage de galets) mais rapporté, pour servir les besoins de dépeçage d’une baleine.

9Ainsi, on note que l’industrie de Dungo IV est plus «lourde» au niveau de l’aspect général des pièces (pièces plus volumineuse, matière de moindre qualité et taille plus grossière) qu’à Dungo V, où l’on a retrouvé des pièces plus petites, plus fines et plus variées.

10Pour Dungo IV, on a une majorité de galets travaillés (24%) et de nucléus (16%), mais pas d’éclats, alors qu’à Dungo V on a une très nette majorité d’éclats bruts (36%), dont très peu remontent sur les galets travaillés ou les outils (aussi, peu de pièces s’apparentent à des nucléus), ce qui ne va pas sans poser certains problèmes dans l’interprétation.

11La proportion d’outils sur les deux sites est proche (14 et 12% du matériel lithique global), dans les deux cas les supports sont des galets de quartz de bonne qualité qui ont servi à confectionner en majorité des choppers et un nombre plus réduit de chopping-tools. Il est très probable que les éclats de Dungo V aient aussi servi d’outils, utilisés bruts.

12Les types de transformations opérés sur les galets relèvent d’«ouverture», de décorticage, ou de création de tranchant, avec en plus, à Dungo V une phase de test de la matière première, mise en évidence sur quelques pièces de qualité médiocre. On remarque une bonne maîtrise des paramètres de taille, et plusieurs techniques de percussion directe dure, produisant des résultats différents, avec des schémas opératoires relativement rigides (non aléatoires). Il y a également un choix dans les matériaux utilisés, avec un souci d’efficacité lors de la taille et de l’utilisation.

13Celle-ci reste très polyvalente et difficilement appréhendable sans étude tracéologique sur ces seuls témoins lithiques. Cependant sur le site de Dungo V, qui représente en quelque sorte un ensemble clos, on peut se rapprocher d’avantage de cet aspect, et affirmer que l’outillage lithique répond aux besoins de «charognage» de ce cétacé échoué.

14Ainsi, on constate que sur ce type de site, fouillé avec des méthodes modernes, une approche techno-expérimentale est envisageable et apporte des données nouvelles sur la vie des préhistoriques. Constat important pour les périodes anciennes car les données sont rares, en particulier en Angola où les sites semblent nombreux mais demeurent peu étudiés.