1Dans le cadre du nouveau programme de la mission conjointe Iran-France à Pasargades, un des objectifs est l’étude de la gestion des ressources en eau à l’époque achéménide et post-achéménide dans le territoire de la plaine de Morghab. Cet article s’attache aux structures hydrauliques à l’est du site archéologique, en particulier le canal Ju-i Dokhtar, les constructions appelées Miyan Jadeh jusqu’au barrage de Sa’adatshahr en aval, 300m avant l’entrée de la gorge. Les méthodes sont la prospection au sol, la lecture à haute résolution de la topographie et l’analyse des photos aériennes et satellitaires (CORONA des années 1960). Ces méthodes sont complétées par une campagne de prélèvements géologiques pour analyses et d’autres pour datation par la méthode OSL (Optical Stimulated Luminescence). La datation de ces aménagements est en effet une question majeure.

2La démonstration des méthodes mises en œuvre et des résultats est servie par une série de cartes interprétées qui rend la démonstration très claire. Le canal Ju-i Dokhtar naît dans les gorges en un point difficile à localiser précisément du fait des travaux agricoles récents et de l’exploitation de carrières, mais il pourrait être marqué par des alignements de pierres perpendiculaires au canal naguère repérés par W. Kleiss. Le canal court du nord au sud selon un tracé très sinueux adapté à la topographie. Sur certains segments, l’aménagement oblique en pierres des berges a pu être mis en évidence. Malgré l’important comblement par des dépôts alluviaux et colluviaux, le gradient a pu être établi à partir de quelques segments conservés et il est établi en moyenne à 0,8% ce qui est dans les normes des canaux néo-assyriens par exemple et d’autres aqueducs antiques. Certaines datations par OSL indiquent le comblement, donc l’abandon du canal, dans le dernier quart du 1^er millénaire avant notre ère.

3Des segments parallèles au canal marquent soit des remords de construction, soit un ou plusieurs canaux de distribution, en particulier vers le site de Miyan Jadeh, où ont été repérés d’autres canaux secondaires (sur l’exploration du site et son interprétation comme centre économique et administratif au vu des structures de stockage, voir F. Zareh-Kordshouli, A. Mohammadi, “Questions around a new Achaemenid site at Pasargadae named “Miyan Jade” as evidence of Persian town or camp” in Pasargadae World Heritage Site, 2, 2017, p. 41-57 [en persan]).

4Au sud, les vestiges du barrage de Sa’adatshahr, que W. Kleiss avait daté de l’époque achéménide, ont pu être étudiés, malgré la destruction par la rivière Sarpaniran et à l’époque moderne par une tranchée creusée par un bulldozer. Long de 450m, il comporte une porte au centre encore visible, et à l’est un déversoir. Des parties encore visibles sont en pierres taillées.

5La fonction de ces barrages questionnée : régulation du flux en période de crue ou retenue d’eau pour l’irrigation, ou pourquoi pas les deux, proposent les auteurs, à une époque où les galeries drainantes souterraines ne sont pas en usage. Une autre suggestion intéressante pour le canal Ju-i Dokhtar, celle d’un entretien au-delà de la période achéménide pendant quelques siècles, lorsque le site de Pasargades reste occupé comme l’ont démontré les travaux récents de l’équipe archéologique.