Roger Matthews, Hassan Fazeli Nashli. The Archaeology of Iran from the Palaeolithic to the Achaemenid Empire
Roger Matthews, Hassan Fazeli Nashli. The Archaeology of Iran from the Palaeolithic to the Achaemenid Empire. London-New York: Routledge, 619 p. env. 600 ill., index.
Texte intégral
1Ce livre important comble une véritable lacune, le traitement global de l’archéologie de l’Iran depuis les origines jusqu’à la fin de l’empire achéménide. C’était une gageure puisque l’explosion des découvertes archéologiques dans les décennies 1960-1980, puis l’intensification des recherches, principalement par les archéologues iraniens depuis le début du 21e siècle, qui nourrissent largement les données récentes présentées dans l’ouvrage, rendaient les tentatives de synthèse très difficiles. Les auteurs, R. Matthews de l’université de Reading, et H. Fazeli Nashli, de l’université de Téhéran, tous deux spécialistes avant tout des périodes néolithique et chalcolithique (8e– 3e millénaires) ont relevé le défi que nul n’avait tenté depuis des dizaines d’années, lorsqu’il était encore envisageable d’écrire une histoire de l’archéologie iranienne (préislamique) comme L’Iran des origines à l’Islam de R. Ghirshman 1954, ou le très illustré Archéologie de l’Iran ancien de L. Vanden Berghe,1959. Ces ouvrages, qui font maintenant partie de l’histoire de la recherche, sont heureusement très largement dépassés grâce aux immenses progrès des connaissances.
2Le résultat de l’entreprise de R. Mathews et H. Fazeli Nashli est un ouvrage de plus de 600 pages dont 100 pages de bibliographie, qui intègrent des références jusqu’en 2021, y compris les publications en persan. Les chapitres sont accompagnés d’une profusion d’images, photos et plans récents des sites, monuments et objets découverts récemment par les équipes iraniennes, mais qui ne sont guère connus du lectorat hors d’Iran, faute de diffusion des livres et revues édités en Iran.
3La limite chronologique basse choisie, 330 av. J.-C., est trop traditionnelle puisque la conquête d’Alexandre et l’empire séleucide qui lui succède ne marquent pas une rupture complète dans l’histoire socio-politique de l’Iran. Il est vrai que les auteurs n’adhèrent pas au concept de la « longue durée », préférant (p. 4 de leur introduction) celui de la « courte durée » marquée par “events and periods of destabilization followed by readjustments and reconstruction seem more apposite for thinking about the long-term archaeology and history of Elam”, en reprenant les termes de D.T. Potts, The Archaeology of Elam, 2016 (p. 430-432).
4C’est principalement le chap. 11. « Iran imperial: villages, cities, states and empires of the Iron Age, 1250–330 BC » (p. 393- 498) qui entre dans le cadre chronologique de la revue. Plusieurs pages sont consacrées à la question toujours débattue de l’installation des populations iraniennes sur le territoire de l’Iran actuel, soulignant la diversité ethnique et linguistique que rencontrent celles-ci, à l’âge du Fer à partir de la fin du 2e millénaire (voir le cas un peu mieux documenté de l’Elam). Par ailleurs, et c’est assez nouveau pour le traitement de ces périodes, les auteurs insistent sur les variations climatiques, vers l’aridité et le froid entre 1200 et 900 av. JC, de nouveau entre 725 et 600, périodes après lesquelles respectivement se développe l’empire néo-assyrien, puis naît l’empire achéménide.
5Cette dernière période occupe les trente dernières pages du dernier chapitre, qui sont bien informées et intègrent les découvertes et études récentes. Ainsi, les déplacements du grand Roi entre ses résidences ne sont pas seulement opérés en fonction de saison comme l’affirme Hérodote, mais d’abord pour la bonne administration de « l’État itinérant ». Sur les principaux sites royaux, l’iconographie est abondante, assez classique mais elle intègre des découvertes très récentes. Un détail cependant : la plateforme à degrés de Takht-i Rustam près de Naqsh-i Rustam, rappelant le soubassement de la tombe de Cyrus à Pasargades, est présentée comme la tombe de Cambyse, une hypothèse qui est maintenant discutée — peut-être la tombe Hystaspe, père de Darius ?
6Sur l’apport à la connaissance de l’administration régionale et au-delà et de la gestion des productions agricoles, des milliers de tablettes inscrites de Persépolis, d’autres études fondamentales de M. Stolper et de W. Henkelman auraient pu être citées, au-delà de quelques articles de ce dernier. De même pour la Bactriane, la publication des documents écrits en araméen trouvés (malheureusement hors fouilles régulières) en Afghanistan, aurait méritée d’être mentionnée (J. Naveh & Sh. Shaked, Aramaic Documents from Ancient Bactria, London, 2012). Ils vrai que, par choix et comme l’indique le titre du livre, les auteurs s’attachent essentiellement aux données archéologiques et très peu aux données épigraphiques.
7En conclusion, les A rappellent que l’archéologie de l’empire achéménide est encore mal connue en dehors de quelques résidences et villes royales ou de l’élite, on le sait, et suggèrent, après d’autres, que les habitats et objets des sites ordinaires n’ont probablement guère changé depuis la période précédente jusqu’à la fin de l’époque achéménide, ce qui les rend difficilement datables. De plus, parce que la diversité des données archéologiques entre les grandes entités environnementales et culturelles de l’Iran, où les traces de ce qui relèverait par exemple de l’art achéménide (= art royal) sont rares, la période est encore presque invisible pour nous. Pour ce chapitre comme pour les précédents, ce livre rend compte des avancées de la recherche, fournit des textes lisibles par tous. Il sera utile aux spécialistes comme aux non spécialistes et aux étudiants.
Pour citer cet article
Référence électronique
Rémy Boucharlat, « Roger Matthews, Hassan Fazeli Nashli. The Archaeology of Iran from the Palaeolithic to the Achaemenid Empire », Abstracta Iranica [En ligne], Volume 45 | 2023, document 1, mis en ligne le 30 mai 2023, consulté le 21 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/abstractairanica/56045 ; DOI : https://doi.org/10.4000/abstractairanica.56045
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