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Enquêtes, anciennes et nouvelles

Les prêtres constitutionnels victimes de la Terreur

Philippe Boutry

Texte intégral

  • 1 Cf. l’enquête entreprise par Stéphane Baciocchi et l’auteur de cet article au Centre d’anthropologi (...)
  • 2 Augustin Gazier, « Henri Grégoire, évêque constitutionnel du Loir-et-Cher », Revue historique, IV, (...)
  • 3 Charles Jarrin, « Bourg et Belley pendant la Révolution. Royer évêque de l’Ain », Annales de la Soc (...)

1Parmi les prêtres victimes de la Révolution française1, les constitutionnels demeurent les oubliés de l’histoire religieuse. Lorsqu’il publie en 1879, dans la très républicaine Revue historique du protestant Gabriel Monod, son apologie de l’épiscopat de l’abbé Grégoire à Blois, Augustin Gazier, universitaire et gardien de la mémoire de Port-Royal, est bien seul à soutenir encore que les prêtres assermentés « ont prêché l’alliance intime du patriotisme et de la foi religieuse » et qu’il « est donc juste de rendre de rendre à ces constitutionnels, dont pas un n’a émigré, un hommage mérité »2. À l’inverse, un historien local, républicain et anticlérical, tel que Charles Jarrin dans le département de l’Ain constate en 1880 que, si « l’Église constitutionnelle a encore quelques rarissimes partisans, elle a pour adversaires les catholiques et les libres penseurs »3. Aussi, avant toute autre considération, convient-il d’interroger ce déficit historiographique.

Le silence des sources et de l’histoire

  • 4 L’intelligence de la condamnation de la constitution civile par le Saint-Siège a été renouvelée, à (...)

2Le motif fondamental de l’occultation des prêtres constitutionnels frappés par les violences révolutionnaires réside dans leur exclusion des martyrologes catholiques, dont l’objectif est une sacralisation des victimes. Or, aux yeux de Rome comme de l’ensemble du clergé réfractaire puis concordataire, les évêques et les prêtres constitutionnels, même s’ils sont morts victimes de la Révolution, ne sauraient être considérés comme « martyrs de la foi ». Pour l’autorité canonique, pour l’ensemble de l’historiographie et de l’hagiographie catholiques, ils ont gravement fauté contre l’Église en prêtant serment à la constitution civile du clergé condamnée à deux reprises par le pape Pie VI. Placés en état de « schisme »4, hors de la communion de l’Église universelle, ils ne sauraient donc, aux yeux des autorités ecclésiastiques, témoigner ni pour l’Église ni même pour la foi.

  • 5 Nicolas Baudeau, Analyse de l’ouvrage du pape Benoît XIV sur les béatifications et canonisations, P (...)
  • 6 Mémoire de la S. Congrégation des Rites sur la cause de béatification de Louis XVI (septembre 1820) (...)

3Selon l’adage augustinien Martyrem non facit poena, sed causa (« ce n’est pas la peine qui fait le martyre, mais la cause »), la reconnaissance d’un martyr par l’Église est en effet déterminée par le motif de sa mort : le « persécuteur » doit avoir agi, et le « martyr » doit avoir souffert, in odium fidei, « en haine de la foi ». C’est le principe que soutient toujours, au milieu du xviiie siècle, le pape Benoît XIV Lambertini en excluant la reine Marie Stuart du nombre des martyrs : « le motif de la condamnation », résume le canoniste Nicolas Baudeau, « est le principal objet à discuter dans une cause de martyr. Il faut que le tyran soit véritablement excité par la haine de la religion, et que le chrétien ne meure que pour elle »5. C’est encore la doctrine que rappelle en 1820 le prélat et futur cardinal romain Giuseppe Antonio Sala dans sa réponse à la consultation de Madame Royale, fille de Louis XVI, duchesse d’Angoulême, qui souhaite ouvrir la cause de béatification du « roi martyr », son père : « Il convient d’observer en premier lieu la règle établie par saint Augustin et reçue par l’Église, à savoir que ce n’est point le supplice, mais la cause du supplice qui constitue le véritable martyre, martyrem non facit poena sed causa ; de là découle la nécessité de prouver l’existence de la cause tant du point de vue du persécuteur que du point de vue du martyr »6.

  • 7 Dès 1793, l’abbé Barruel insère une liste des victimes ecclésiastiques des massacres de septembre e (...)
  • 8 Philippe Boutry, « Hagiographie, histoire et Révolution française. Pie XI et la béatification des m (...)

4Aussi les premières listes de victimes contemporaines de la Révolution, comme celles de l’abbé Barruel ou de l’abbé d’Hesmivy d’Auribeau7, excluent-elles délibérément les prêtres assermentés ou jureurs. Cette règle est accentuée (car les connaissances sont plus sûres et les choix du clergé mieux connus) par les érudits catholiques chargés par leurs évêques de constituer des listes de « martyrs » diocésains, promis à une éventuelle béatification par Rome. Relevons enfin que, lors de la béatification des « martyrs de septembre » par le pape Pie XI le 17 octobre 1926, 191 victimes sont inscrites au martyrologe romain alors que 22 autres sont écartées, soit parce qu’il a été avéré au cours du procès que ces prêtres ou ces religieux ont prêté le serment, soit par manque de renseignements sur ce point crucial aux yeux de la congrégation romaine des Rites8.

  • 9 Guy-Toussaint-Julien Caron, Les Confesseurs de la foi dans l’Église gallicane à la fin du XVIIIe si (...)
  • 10 L’Ami de la Religion et du Roi du samedi 3 février 1821, n° 677, p. 370 ; je remercie vivement Stép (...)

5Les constitutionnels sont ainsi les principaux absents des recensements de victimes ecclésiastiques de la Révolution française. Leur damnatio memoriae est explicite dans les deux premiers « martyrologes » de la Restauration, Les Confesseurs de la foi dans l’Église gallicane à la fin du xviiie siècle (1820) de l’abbé Caron et Les Martyrs de la foi pendant la Révolution française de l’abbé Guillon (1821). Il en ira de même dans les « Histoires de la persécution » publiées au cours du xixe et du xxe siècle9. Lorsqu’il arrive à l’abbé Guillon, du fait des lacunes de son information, d’inclure un prêtre assermenté dans ses listes, l’organe officieux de l’Église gallicane, L’Ami de la Religion et du Roi, le lui reproche amèrement : « Faut-il donc placer toutes ces victimes dans la même catégorie ? Le prêtre qui a confessé hautement la foi devant ses juges, celui qui a refusé de se souiller d’un serment condamné, celui que l’on voit, par quelque indice, avoir été immolé en haine de la religion, n’ont-ils pas plus de droit au titre de martyrs que tant d’autres sur lesquels leur procès ne nous apprend rien à cet égard ? Or, M. Guillon ne fait point de distinction, ou du moins n’en fait pas assez »10.

  • 11 Louis-Marie Prudhomme, Histoire générale des crimes commis durant la Révolution française, sous les (...)
  • 12 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, avec le journal de ses actes(...)
  • 13 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs de la Révolution en Lyonnais, Forez et (...)
  • 14 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs, op. cit., p. 337
  • 15 Pierre Bliard, Jureurs et insermentés (1790-1794), d’après les dossiers du Tribunal révolutionnaire(...)

6La perspective « thermidorienne » de l’Histoire générale des crimes commis durant la Révolution française (1797) du journaliste et publiciste Louis-Marie Prudhomme, autre source pour l’histoire des victimes de la Révolution, se distingue au contraire de la perspective « martyrielle » des abbés Caron et Guillon : occupé à dénoncer la Terreur, Prudhomme considère les victimes ecclésiastiques sans distinction11. Rares sont après lui les historiens qui incluent dans un travail d’érudition les assermentés. Henri-Alexandre Wallon leur accorde une place dans sa monumentale histoire du Tribunal révolutionnaire12. À sa suite, quelques historiens font exception : ainsi d’Antonin Portallier dans son Tableau général des victimes et martyrs de la Révolution en Lyonnais, Forez et Beaujolais (1911) ; il s’en excuse auprès de ses souscripteurs : « le nom de l’abbé Grumet », écrit-il – il s’agit du grand-vicaire du cardinal de Loménie de Brienne à Toulouse, guillotiné à Lyon pour « fédéralisme » le 26 pluviôse an II (14 février 1794) – « est naturellement omis dans les ouvrages ecclésiastiques puisqu’il avait trempé dans le schisme. Quelque peine que nous avons à citer un exemple malheureux entre tous, mais heureusement très rare dans le clergé, nous ne sommes pas tenus à la même réserve puisque nous nous occupons de toutes les victimes, n’importe leurs conditions ou leurs qualités »13 ; ou encore à propos d’Aimé Pascal, vicaire jureur de Thurins (Rhône) : « M. Pascal prêta tous les serments », note-t-il ; « et, par conséquent, il a été négligé par les auteurs ecclésiastiques »14. C’est aussi l’option choisie par Pierre Bliard qui confronte en 1910 le destin de Jureurs et insermentés devant le Tribunal révolutionnaire de Paris15.

  • 16 En dernier lieu, Rita Hermon-Belot, L’Abbé Grégoire, la politique et la vérité, Paris, Le Seuil, 20 (...)

7L’abbé Grégoire, dès l’an III, s’était inquiété de ce silence16. Dans l’année qui suit la fin de la Terreur, il publie dans le second numéro des Annales de la Religion en date du 20 floréal an III (9 mai 1795) un bref appel pour que soient recueillies « les pièces authentiques qui auront rapport aux derniers martyrs » ; il entend consacrer à la mémoire des victimes de l’Église née de la constitution civile du clergé une nouvelle collection des Acta martyrum. L’initiative de l’abbé Grégoire s’inscrit dans la tradition historique de la « primitive Église » dont se réclame l’Église constitutionnelle ; elle se veut une réplique aux premiers « martyrologes » de l’Église réfractaire et un rappel des souffrances et des persécutions subies par sa propre Église. Elle ne sera cependant guère suivie d’effet dans les colonnes de la revue.

  • 17 Henri Grégoire, Annales de la Religion, tome I, n° 2, 9 mai 1795 (20 floréal an III), p. 34-35. Je (...)

Les premiers chrétiens s’empressèrent de lever dans les archives des administrations, et dans les greffes des tribunaux, les Actes et interrogatoires des martyrs, dont ils recueillaient les précieux restes avec un respect attendrissant. […] Ils ont cru même devoir en imposer, soit à la lâcheté de leurs successeurs, soit à la férocité de leurs persécuteurs, en nous transmettant le récit de la défection de plusieurs d’entre eux, et la mort de leurs bourreaux. Nous invitons chacune des Eglises de France à recueillir les faits qui se sont passés dans son sein, pendant la dernière persécution. Car pourquoi, en tout, ne marcherions-nous pas sur les traces des premiers siècles ? Ne serait-il pas même à craindre qu’un plus long délai ne fît disparaître des souvenirs et des pièces qui intéressent l’histoire de la religion ? Déjà notre correspondance nous a mis à même de recueillir un grand nombre de faits que nous publierons, et qui serviront de suite aux Acta sincera Martyrum. Nous recevrons donc avec reconnaissance les pièces authentiques qui auront rapport aux derniers martyrs. Il est inutile de préciser que la critique la plus sévère doit présider à ce travail. L’un de nous, qui était député à l’Assemblée constituante, et est membre de la Convention, lequel a fait une collection immense de toutes les pièces qui ont rapport à l’histoire de l’Eglise pendant la Révolution de France, prie qu’on envoie, franc de port, à l’adresse du journal, les pièces imprimées par les autorités constituées, et autres de ce genre, qui peuvent servir à l’histoire du catholicisme pendant les six dernières années.17

  • 18 Jean-René Suratteau, « Le Directoire avait-il une politique religieuse ? » dans Annales historiques (...)
  • 19 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église. De la Raison à l’Être suprême, op. cit., « L’a (...)
  • 20 Claude Langlois, Timothy Tackett, Michel Vovelle ; Serge Bonin, Madeleine Bonin, Atlas de la Révolu (...)
  • 21 Toutefois : Philippe Bourdin, Le Noir et le Rouge. Itinéraire social, culturel et politique d’un pr (...)

8L’historiographie universitaire de la Révolution n’a enfin nullement pris en charge la mémoire de l’Église constitutionnelle, comme si elle épousait rétrospectivement toutes les logiques de la déchristianisation révolutionnaire. Les lois du Directoire, écrit, laconique, Jean-René Suratteau, « abandonnaient à leur sort les prêtres constitutionnels, les jureurs dont la plupart n’avaient plus guère de paroissiens. Beaucoup de ces prêtres qui avaient pu subsister jusque-là durent trouver d’autres emplois, instituteurs, fonctionnaires, employés dans diverses administrations »18. En général, la question des prêtres victimes de la déchristianisation révolutionnaire est rarement traitée par l’historiographie « classique » de la Révolution, comme si elle avait été définitivement abandonnée à l’historiographie catholique ; et ni Michel Vovelle, qui rédige en 1988 sur les prêtres abdicataires et les prêtres mariés deux importantes synthèses19, ni les auteurs du fascicule Religion de L’Atlas de la Révolution française20, qui reprennent en 1996 l’ensemble des chiffres, ne lui consacrent d’étude détaillée, faute de données cartographiables et quantifiables. Enfin, l’histoire de l’Église constitutionnelle ne paraît plus susciter, depuis deux décennies, qu’un intérêt limité dans le champ des études révolutionnaires : un territoire entré en déshérence, en quelque sorte21

9Une enquête sur les prêtres constitutionnels victimes de la Révolution française répond ainsi à un triple enjeu. Elle entend sortir de la logique purement hagiographique des martyrologes afin de prendre en compte l’ensemble des victimes ecclésiastiques et de construire une analyse proprement historique et sociologique du phénomène, c’est-à-dire, autant que faire se peut, dégagée de la gangue épaisse des interprétations antagonistes et des schèmes historiographiques, en usant de catégories recevables par l’ensemble des praticiens des sciences sociales. Elle s’efforce de réparer un certain désintérêt actuel de l’historiographie révolutionnaire. Elle voudrait enfin s’inscrire dans une interrogation plus vaste à partir du destin dramatique du clergé rallié à la Révolution et abandonné par elle trois ans plus tard.

La tragédie du clergé rallié à la Révolution

  • 22 Claude Langlois, « La déchirure », postface à Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. (...)

10Car on ne le répétera jamais assez : la Révolution a abandonné, trahi, renié les prêtres qui s’étaient ralliés à elle ; et ceux-ci ont été frappés directement et collectivement par la déchristianisation révolutionnaire de l’an II : ils en sont les victimes immédiates. Comme l’a écrit Claude Langlois, « la constitution civile a conduit à un partage dramatique, à un affrontement aussi, devenu meurtrier pour l’une des parties. En 1791, une faible majorité des cadres paroissiaux (curés et vicaires) est prête à accepter la constitution civile, par soumission envers le pouvoir établi, par patriotisme, par désir d’un renouveau conjoint de l’Église et de la nation, par assentiment à une certaine sécularisation de la société impliquant un moindre poids du catholicisme. En face, le refus s’appuie avant tout sur la volonté de maintenir le modèle traditionnel d’une Église hiérarchique et sur la primauté donnée aux autorités religieuses pour opérer un changement essentiel pour l’Église. La suite des événements fait des premiers un parti de dupes, collaborateurs, traitres, soumis à d’incessantes épurations […] alors que les réfractaires ont leurs martyrs et leurs résistants et que – ironie de l’histoire – l’expulsion massive d’août 1792 a contribué à le protéger globalement des épreuves de l’an II dans lesquelles l’Église rivale a presque entièrement sombré. ». Et l’on connaît la formule finale de l’historien, qui résume le paradoxe amer de cette histoire violente : 1792, malgré les massacres de septembre, a mis à l’abri le clergé honni, l’an II a détruit le clergé soumis22.

  • 23 Sur les déchirements internes au clergé paroissial, Jean Boutier, « Le clergé face aux serments rév (...)
  • 24 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 85-90.

11Ce destin tragique n’était pas tracé par avance. Dans l’été 1790, c’est la perspective d’une Église nationale, régénérée par la Révolution à l’instar de la société, détachée de Rome, centrée sur la vie paroissiale, où évêques et prêtres, salariés par la nation, sont élus par les fidèles sur la base de diocèses et de paroisses coïncidant avec les départements et les communes, qui est ouverte par le vote de la constitution civile du clergé (12 juillet 1790), sanctionnée par le roi Louis XVI dix jours plus tard. Pourquoi un prêtre séculier se rallie-t-il en 1791 à la constitution civile du clergé ?23 Par-delà les raisons matérielles (conservation des cures, traitement de l’État), on peut, avec Timothy Tackett, avancer quelques considérations de principe : « le devoir d’obéissance à la loi et au pouvoir civil placé au-dessus de l’obéissance due aux supérieurs ecclésiastiques » ; la conviction que « les nouvelles lois ne menaçaient pas le clergé, ne violaient ni les dogmes, ni les sacrements, ni la morale évangélique » ; un retour à l’organisation de l’Église primitive par l’élection des clercs et des évêques ; une nouvelle conception du prêtre et de son rôle dans la société comme prêtre-citoyen ; une priorité donnée « à la morale et à l’éthique du christianisme sur la théologie et les dogmes », en fonction des catégories du bonheur et de l’utilité ; l’hostilité à un épiscopat qui a, en majorité, refusé la Révolution et la constitution civile ; enfin et surtout sans doute, le souci de partager l’enthousiasme révolutionnaire des populations au cours de « cérémonies qui se déroulaient souvent dans une atmosphère fraternelle et symbolisaient l’acceptation et l’intégration du prêtre dans la société laïque »24.

12Trois facteurs, pour faire bref, vont conduire l’Église constitutionnelle à l’effondrement. En premier lieu, la fracture violente opérée entre partisans et adversaires de la constitution civile. L’enquête de Timothy Tackett l’a montré : lorsque l’obligation du serment est imposée aux curés et aux vicaires par le décret du 27 novembre 1790, 52 à 55 % du clergé paroissial s’engage publiquement dans l’Église constitutionnelle ; courte victoire qui ne doit dissimuler ni le trouble des consciences ni la fréquence des restrictions exprimées ni la répartition très inégale du serment à l’échelle de la France. Le conflit est à la fois d’ordre doctrinal, ecclésiologique et pratique, pour la prise de possession des églises et des cures, d’autant que les catholiques demeurés fidèles à l’ancienne Église se voient refuser, dans le cours du second semestre 1791, la possibilité, un instant esquissée (loi du 7 mai 1791), de célébrer leur culte dans des églises particulières, en contradiction flagrante avec l’article 10 de la déclaration des droits de l’homme – nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leurs manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi – formulé en faveur des minorités protestantes et juives et dont désormais les réfractaires se réclament. La nouvelle Église s’apparente, dans l’esprit de la majorité des députés, à un « service public », à un rouage de l’État, auquel nul catholique ne saurait se soustraire. Dès lors, l’État révolutionnaire assimile les insermentés à des adversaires politiques : l’Assemblée législative prend deux décrets contre les réfractaires (29 novembre 1791 et 27 mai 1792), bloqués par deux vetos suspensifs du roi (19 décembre 1791 et 11 juin 1792). La chute de la monarchie règle la question : le 26 août 1792, tous les réfractaires sont expulsés de France dans un délai de quinze jours, sous peine de mort. Il ne reste plus en principe en France qu’un clergé constitutionnel : il est placé sous la protection de l’État.

  • 25 Gérard Pelletier, Rome et la Révolution française, op. cit.

13Un second facteur d’échec de la constitution civile relève de sa condamnation solennelle par le pape Pie VI à travers à travers les deux brefs Quod aliquantum (10 mars 1791) et Charitas (13 avril 1791), qui entraîne la rupture des relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège en mai 179125. Le rejet a des effets limités sur le choix des ecclésiastiques (4 à 5 % des assermentés changent de camp), mais accentue le déficit de légitimité ecclésiologique et sacrale dont souffre l’Église constitutionnelle : elle a rompu avec Rome comme centre de l’unité et de l’universalité catholiques ; désavouée par le successeur de Pierre, elle n’est plus cette Église « une, sainte, catholique et apostolique » (unam, sanctam, catholicam et apostolicam Ecclesiam) que célèbre le Credo : l’accusation de schisme s’en trouve renforcée.

  • 26 Jeanne-Marie Tuffery-Andrieu, « Le mariage selon la conception de l’Église constitutionnelle frança (...)

14Le facteur d’échec décisif réside enfin dans le revirement de l’État révolutionnaire qui, après quelques tensions – dont la question du divorce, ouverte en septembre 1792, et celle des prêtres mariés26 –, modifie radicalement son attitude envers l’Église constitutionnelle à l’automne 1793. Ce tournant rapide et brutal interroge le caractère violemment antichrétien (écrasez l’infâme !) des Lumières dans l’espace français (il est beaucoup moins accentué dans le reste de l’Europe) et la réalité des convictions religieuses et philosophiques des acteurs de la Révolution. Si le décret du 21 avril 1793 excepte encore les constitutionnels de la déportation en Guyane et si, le 27 juin, la Convention rappelle que le traitement des ecclésiastiques fait partie de la dette publique, la rupture intervient avec l’établissement de la dictature montagnarde et s’accentue avec la mise en place d’une économie de guerre : le 1er juillet, le Comité des Finances (animé par Cambon) propose de supprimer les deux tiers des vicaires épiscopaux ; le 18 septembre, le traitement des évêques est réduit à 6000 livres par an (ils allaient entre 12 et 20.000 – 50.000 pour le métropolitain de Paris) et celui des vicaires épiscopaux à 1200 livres (contre 2000 à 6000) ; le 13 brumaire an II (3 novembre 1793), les biens des fabriques sont nationalisés et les objets précieux, envoyés à la fonte.

  • 27 Michel Vovelle, Religion et Révolution. La déchristianisation de l’an II dans le Sud-Est, Paris, Ha (...)

15Ce sont les signes avant-coureurs de l’offensive antichrétienne de l’automne 1793, qui établit l’armature législative de la déchristianisation révolutionnaire avec, le 30 vendémiaire an II (21 octobre 1793), le décret sur la déportation des prêtres « inciviques » ou « suspects », dont ne sont pas exclus les constitutionnels ; et le 16 brumaire an II (6 novembre 1793), le décret où les communes sont reconnues en droit de renoncer au culte27. C’est alors que s’accomplissent l’abdication de Gobel, évêque métropolitain de Paris, à la barre de la Convention le 7 novembre 1793 (17 brumaire an II), la célébration de la fête de la Raison à la cathédrale Notre-Dame de Paris le 10 novembre 1793 (20 brumaire an II) et la mascarade anticléricale accueillie par l’Assemblée le 20 novembre 1793 (30 brumaire an II).

  • 28 Edme Champion, La Séparation de l’Église et de l’État en 1794. Introduction à l’histoire religieuse (...)

16Désormais, le clergé constitutionnel est destitué de ses fonctions. Le décret du 6 décembre 1793 (3 frimaire an II), par lequel la Convention nationale réaffirme le principe de la liberté de culte, apparaît dans ce contexte comme une déclaration purement formelle, en contradiction totale avec la politique conduite par les Comités de la Convention nationale, les représentants en mission et les autorités locales qui procèdent sur toute l’étendue du territoire, entre l’automne 1793 et le printemps 1795, à la fermeture de tous les lieux de culte et à l’interdiction de toute célébration religieuse. La vague déchristianisatrice débouche un an plus tard sur le décret du 2ème jour complémentaire an II (18 septembre 1794) qui liquide l’ensemble de la politique religieuse de l’Assemblée constituante en proclamant, par l’organe de Cambon, l’homme des Finances, que « la République ne paie ni ne salarie aucun culte » : ce sera, un siècle plus tard, la formule même de la loi de Séparation de 190528.

  • 29 Michel Biard, Missionnaires de la République. Les représentants du peuple en mission, 1793-1795, Pa (...)

17La fermeture des églises paroissiales s’opère, avec une rapidité et une fermeté variable selon les situations locales, entre l’automne 1793 et le printemps 1794. Dans le même temps, la Convention, sur le rapport de Bézard, député de l’Oise, vote le décret du 29 brumaire an II qui excepte de la déportation les prêtres mariés, même s’ils n’ont pas prêté le serment, afin de favoriser les déprêtrisations. Celles-ci sont accélérées par le zèle politique ou le fanatisme antireligieux de représentants en mission29 : Fouché dans la Nièvre et dans l’Allier, Laplanche dans le Cher, Dumont dans l’Aisne et dans la Somme, Lebon dans le Nord, Lequinio en Charente Inférieure, Dartigoeyte dans le Gers, Cavaignac dans le Lot-et-Garonne, Couthon dans le Cantal, Albitte enfin dans l’Ain, dont la célèbre « formule », imposée au clergé patriote du département sous menace de mort, résume à elle seule la politique de déchristianisation de l’an II dans sa version la plus radicale :

  • 30 Louis Alloing, Le diocèse de Belley. Histoire religieuse des pays de l’Ain, Belley, Chaduc, 1938, p (...)

Je, soussigné…, âgé de…, né à…, commune de…, district de…, faisant le métier de prêtre depuis l’an… sous le titre de…, convaincu des erreurs par moi trop longtemps professées, déclare en présence de la municipalité de … y renoncer à jamais ; déclare également renoncer, abdiquer et reconnaître comme fausseté, illusion et imposture, tout prétendu caractère et fonction de prêtrise, dont j’atteste déposer sur le bureau de la dite municipalité tous brevets, titres et lettres ; je jure en conséquence en face des magistrats du peuple, duquel je reconnais la toute-puissance et la souveraineté, de ne jamais me prévaloir des abus du métier sacerdotal auquel je renonce, de maintenir la liberté, l’égalité de toutes mes forces, de vivre et de mourir pour l’affermissement de la République, une, indivisible et démocratique, sous peine d’être déclaré infâme, parjure et ennemi du peuple et traité comme tel.30

  • 31 Outre les travaux déjà cités, Henri Grégoire, Histoire du mariage des prêtres, particulièrement dep (...)
  • 32 361 prêtres constitutionnels de l’Ain signent ce formulaire (Jérôme Croyet, La Mission du représent (...)
  • 33 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église, op. cit., p. 120.
  • 34 Annales de la Religion, n° 1, 2 mai 1795 (13 floréal an II), p. 22.

18Une abstention prudente de tout ministère sacerdotal doublée d’une retraite discrète dans le cercle familial, dans le meilleur des cas ; une abdication publique, souvent humiliante, suivie d’un emprisonnement préventif au chef-lieu de district, en règle générale ; ou encore un mariage, volontaire ou imposé, pour environ 6.000 d’entre eux31 : tel est le sort réservé aux constitutionnels en l’an II. Certains représentants en mission s’affirment comme des déchristianisateurs forcenés : c’est la quasi-totalité des constitutionnels qui remettent leurs lettres de prêtrise, sous l’impulsion d’Albitte, dans l’Ain en pluviôse an II32 ; ce sont encore 84 % des prêtres des Landes, 96 % de ceux de Haute-Garonne et la presque totalité de ceux du Lot qui doivent abdiquer sous la pression de Dartigoeyte ; et encore 98 % en Charente Inférieure, placée sous l’autorité des représentants Lequinio et Laignelot33. Tout en omettant la persécution infiniment plus meurtrière qui s’est abattue sur le clergé réfractaire demeuré en France, les Annales de la Religion s’indignent dès leur première livraison de cette injustice flagrante : « Pendant la persécution atroce dirigée contre le clergé constitutionnel, on n’a point arraché les lettres de prêtrise aux insermentés, absents, emprisonnés au cachés ; ils se prévalent aujourd’hui d’avoir gardé ce que personne ne leur avait demandé »34.

  • 35 François-Yves Besnard, Souvenirs d’un nonagénaire, publié sur le manuscrit autographe par Célestin (...)
  • 36 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église, op. cit., p. 119.

19Dans le même temps, l’application de la loi des suspects sous l’impulsion des comités révolutionnaires de surveillance, puis l’accélération des procédures par la loi du 22 prairial an II tendent à classer plus ou moins systématiquement les prêtres ou religieux, même assermentés, parmi les ennemis potentiels de la République. Lorsqu’il rédige ses Souvenirs d’un nonagénaire, l’ancien curé patriote angevin François-Yves Besnard, un intime de Volney et de La Revellière-Lépeaux, qui abandonne à l’automne 1793 l’état sacerdotal, remet ses lettres de prêtrise et se fait manufacturier, est encore très lucide sur le risque que lui fait courir, jusque sous le Directoire, « (sa) seule qualité d’ecclésiastique. […] Dès l’ouverture de la Convention », écrit-il, « le soumis et l’insoumis aux lois étaient également regardés comme suspects, et il n’en fallait pas davantage pour être dénoncé, arrêté, mis en jugement et condamné »35. Et Michel Vovelle souligne, dans un bref commentaire, « le drame de conscience des prêtres, leurs stratégies d’esquive et leurs tentatives pour préserver l’essentiel » ainsi que leurs « pauvres ruses : lettres de prêtrise égarées, brûlées, confiées à un ami, formules contournées pour introduire des réserves »36. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre les exécutions légales de prêtres constitutionnels opérées durant la Terreur.

Un épiscopat décimé

  • 37 Paul Pisani, Répertoire biographique de l’épiscopat constitutionnel, Paris, Picard, 1907.
  • 38 Archives parlementaires de 1787 à 1860. Première série (1787-1799), Paris, Imprimerie Nationale, to (...)

20Il faut d’abord faire la part des évêques37. La mise en place d’un épiscopat constitutionnel sur la base de l’élection par les citoyens actifs de chaque département avait été une opération difficile : seuls quatre évêques titulaires d’Ancien Régime (sur 133 en fonctions au 1er janvier 1791) s’étaient ralliés à la constitution civile (Loménie de Brienne, Talleyrand, Jarente et La Font de Savine), ainsi que trois évêques in partibus infidelium (Gobel, Martial de Loménie de Brienne et Miroudot). Il fallait donc renouveler presque entièrement l’épiscopat français à l’intérieur des nouvelles circonscriptions calquées sur les départements. Les deux premiers évêques, Louis-Alexandre Expilly, élu dans le Finistère, et Claude Marolles, élu dans l’Aisne, sont consacrés le 24 février 1791 dans l’église de l’Oratoire de Paris par Talleyrand, assisté de Gobel et Miroudot ; acclamés par les députés38, ils procèdent à leur tour, avec le concours des précédents, aux consécrations à venir. Or, sur les 86 premiers évêques, huit meurent victimes de la Révolution : sept (Expilly, Fauchet, Gobel, Gouttes, Lamourette, Martial de Loménie de Brienne et Roux) sont guillotinés ; un autre (Huguet) est fusillé. Un neuvième évêque (Audrein), élu en 1798, est assassiné par les Chouans. L’épiscopat rallié à la Révolution a été, au sens propre, en moins de dix ans, décimé.

  • 39 Sur Étienne-Charles de Loménie de Brienne (1727-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. ci (...)
  • 40 Sur Martial de Loménie de Brienne (1763-1794), cf. encore l’opuscule de Jean Montier, Martial de Br (...)

21Deux des victimes appartiennent à l’épiscopat d’Ancien Régime rallié à la constitution civile. Martial de Loménie de Brienne, neveu de l’archevêque de Toulouse puis de Sens Étienne-Charles de Loménie de Brienne, principal ministre du roi Louis XVI de mai 1787 à août 1788 et seul cardinal et archevêque assermenté39, est abbé commendataire de Jumièges, évêque in partibus de Trajanopolis et coadjuteur de son oncle à Sens40. À la mort de ce dernier, détenu comme suspect par le comité de surveillance de Sens et décédé (soit d’apoplexie soit par suicide) dans la nuit du 1er au 2 ventôse an II (19 au 20 février 1794), il est emprisonné à la Conciergerie puis jugé, condamné et guillotiné le 21 floréal an II (10 mai 1794), aux côtés de Madame Élisabeth, sœur du roi, sans motif très avéré : son appartenance à l’aristocratie et à la Cour semble avoir constitué le principal motif de son exécution.

  • 41 Sur Jean-Baptiste Gobel (1727-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 53-59 ; Gus (...)
  • 42 Serge Bianchi, La Déchristianisation dans le district de Corbeil, 1793-1797, Corbeil-Essonnes, Mémo (...)

22L’exécution du second prélat d’Ancien Régime rallié à la constitution civile, Jean-Baptiste Gobel, revêt un sens religieux et politique plus explicite. Formé au Germanicum à Rome, évêque de Lydda in partibus, il administre depuis 1771 la partie française du vaste diocèse du prince-évêque de Bâle41. Élu député aux États-Généraux par le clergé de Belfort, il participe activement au débat sur la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et, très directement, à la rédaction de son article 10 sur la liberté de culte. Membre actif du club des Jacobins de Paris, il est le premier évêque à prêter serment, le 3 janvier 1791. Élu le 13 mars évêque métropolitain de Paris, il est sacré à Notre-Dame le 27 mars 1791. Député de Paris à la Convention nationale, il est directement visé par la campagne déchristianisatrice qui se déploie depuis Corbeil jusqu’à l’Assemblée42 : le 17 brumaire an II (7 novembre 1793), entouré de onze de ses vicaires épiscopaux, il se présente aux côtés de Chaumette à la barre de la Convention, renonce à ses fonctions et en dépose les insignes :

  • 43 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution. Paris, Picard, 1908-1911, quatre volumes, tome II, (...)

Aujourd’hui que la révolution marche à grands pas vers une fin heureuse, aujourd’hui qu’il ne doit pas y avoir d’autre culte que celui de la Liberté et de la sainte Égalité, parce que le Souverain le veut ainsi, conséquent avec mes principes, je me soumets à sa volonté et je viens vous déclarer ici hautement que je renonce à exercer mes fonctions de ministre du culte catholique. Ces citoyens, mes vicaires, se joignent à moi. En conséquence, nous vous remettons nos titres. Puisse cet exemple servir à consolider le règne de la Liberté et de l’Égalité ! Vive la République !43

  • 44 Henri-Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome III, p. 196-2 (...)

23Cet acte public de renonciation à « exercer » le culte afin de se conformer à la volonté du « souverain » – car Gobel se défend d’avoir apostasié (Dieu seul sonde les reins et les cœurs) – le précipite dans une fuite en avant du côté des Hébertistes : décrété avec eux d’arrestation, il est englobé par Fouquier-Tinville dans une obscure « conspiration des prisons » ; condamné à mort le 21 germinal an II (13 avril 1794), il est exécuté le jour même dans une « charrette » qui emporte également Chaumette, procureur de la Commune de Paris et fougueux déchristianisateur, le général Arthur Dillon et les deux veuves des adversaires de Robespierre, Lucile Desmoulins et Marie-Marguerite Hébert44. La mort sur l’échafaud du métropolitain de Paris en perd une partie de sa signification.

  • 45 Henri-Alexandre Wallon, La Révolution du 31 mai et le fédéralisme en 1793, ou La France vaincue par (...)
  • 46 Anne de Mathan, « Le fédéralisme girondin », Annales historiques de la Révolution française, n° 393 (...)

24Quatre évêques sont exécutés sur l’accusation de « fédéralisme »45. La fréquence du motif du « fédéralisme » dans les condamnations de constitutionnels à partir de l’été 1793 interroge. De quoi le « fédéralisme » est-il le nom ? De la dénonciation de l’intervention de la Commune de Paris sur la Convention nationale ? Du refus des « partis » au sein de la Convention ? Du soutien de la Gironde face à la Montagne lors des journées révolutionnaires des 31 mai et 2 juin 1793 ? De l’état d’insurrection d’une partie des autorités constituées à Caen, Bordeaux, Lyon, Marseille ou ailleurs contre la mise en place de la dictature montagnarde dans l’été 1793 ? D’une ligne politique réformiste face au programme révolutionnaire radical élaboré et mis en œuvre par les Comités de la Convention nationale ? De ce concept instrumental, élaboré dans la « lutte des factions » au nom de l’unité et de l’indivisibilité de la République, le Comité de salut public et le Comité de sûreté générale, les représentants du peuple en mission, les tribunaux criminels et les commissions militaires, les sociétés populaires et les comités de surveillance sauront faire un usage efficace pour assurer leur pouvoir et éliminer leurs adversaires46. Parce qu’il est désormais « suspect », le clergé constitutionnel, souvent lié aux autorités locales, en sera parmi les victimes désignées.

  • 47 Claude Fauchet, De la Religion Nationale, Paris, Bailly, Desenne, Lottin et Cussac, 1789. Sur ce co (...)
  • 48 Gary Kates, The Cercle social, the Girondins and the French Revolution, Princeton University Press, (...)
  • 49 Sur Claude Fauchet (1744-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 169-172 ; Jean C (...)

25Le plus illustre des évêques constitutionnels accusés de « fédéralisme », exécuté dès l’automne 1793, est Claude Fauchet. Ardent propagateur d’une religion nationale47, il a participé à la prise de la Bastille et prononcé l’éloge funèbre des Parisiens victimes du Quatorze Juillet. Membre de la Commune de Paris, fondateur du Cercle social et collaborateur du journal La Bouche de fer48, il est élu évêque du département du Calvados, puis représentant du département à l’Assemblée législative et à la Convention nationale. Hostile à la mort du roi comme au mariage des prêtres, il est accusé de « fédéralisme » au lendemain de l’attentat de Charlotte Corday contre Marat, puis inclus dans le procès des Girondins ; il est exécuté avec eux le 10 brumaire an II (31 octobre 1793)49. La proximité politique de Fauchet avec la Gironde a pour l’essentiel motivé sa condamnation ; mais c’est aussi le projet de faire du christianisme la « religion nationale » qui disparaît avec lui.

  • 50 Sur Adrien Lamourette (1742-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 276-282 ; Léo (...)
  • 51 Sébastien Charléty, « La journée du 29 mai 1793 à Lyon », La Révolution française, XXXIX, 1900, p.  (...)

26Non moins célèbre en son temps, Adrien Lamourette est un ancien lazariste ; il a été à Toul l’un des maîtres de l’abbé Grégoire. Membre de l’entourage de Mirabeau, il est l’un des représentants les plus éloquents d’un christianisme « éclairé », des Délices de la religion au Pasteur patriote, ainsi qu’un partisan déclaré de la constitution civile du Clergé50. Il est élu en mars 1791 métropolitain du département de Rhône-et-Loire puis député à l’Assemblée législative (où il prône le « baiser Lamourette » et la réconciliation des partis) et ensuite à la Convention nationale. Proche des Girondins, il se rallie à la révolte de Lyon contre la Convention51. Au lendemain de la capitulation de la ville, il est emprisonné, transféré à Paris, condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire et guillotiné le 23 pluviôse an II (11 février 1794). L’implication de Lamourette dans l’insurrection lyonnaise est indubitable ; mais c’est avec sa mort une seconde figure de « prêtre citoyen » qui s’efface.

  • 52 Monique Cubells, « Charles-Benoît Roux, évêque constitutionnel des Bouches-du-Rhône, métropolitain (...)
  • 53 Monique Cubells, « Charles-Benoît Roux », art. cit., p. 115.
  • 54 Ibid, p. 115. Cf. Georges Guibal, Le Mouvement fédéraliste en Provence en 1793, Paris, Plon-Nourrit (...)

27Les deux autres évêques constitutionnels condamnés et exécutés pour « fédéralisme » l’ont été sur les lieux mêmes de leur ministère. Charles-Benoît Roux, ancien curé d’Eyragues en Provence, a été élu évêque du département des Bouches-du-Rhône et métropolitain des Côtes de la Méditerranée en février 1791 à Aix-en-Provence. Sa prestation de serment exprime ce mixte de conscience religieuse et d’exigence civique qui est la marque du premier clergé constitutionnel : « Comme prêtre du Dieu vivant et comme citoyen », déclare-t-il à ses paroissiens d’Eyragues, « je regarde comme un honneur et une gloire pour moi de professer en ce jour le serment que les décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par le Roi, exigent des fonctionnaires publics de la religion »52. Son enseignement épiscopal oscille, comme l’a montré Monique Cubells, entre un discours sur le Rédempteur, principalement destiné aux fidèles, et des leçons de morale évangélique et civique, notamment vis-à-vis des autorités constituées, sans jamais distinguer nettement entre ce qui revient à l’Église et ce qui revient à l’État, dans la célébration d’un « ordre nouveau, fondé sur la liberté, le patriotisme, la citoyenneté, le respect de la Constitution et de la Loi, la sûreté des personnes et des propriétés »53. Mais, bientôt écartelé entre réfractaires demeurés fidèles aux anciens titulaires des sièges et révolutionnaires radicaux, il se rallie au mouvement fédéraliste de Marseille, bénit les drapeaux de la ville et célèbre la messe du 14 juillet 1793. « Il n’y a rien d’étonnant à voir le métropolitain se ranger sous la bannière fédéraliste », note encore Monique Cubells, « pour défendre la liberté individuelle, la tranquillité publique et les respect des propriétés, contre les jacobins, accusés d’être des sanguinaires, des anarchistes et des violateurs des fortunes privées »54. Roux n’est toutefois pas immédiatement inquiété et abdique ses fonctions d’évêque le 21 pluviôse an II (9 février 1794) devant le comité de surveillance d’Aix-en-Provence. C’est alors seulement qu’il est arrêté, transféré à Marseille, jugé pour « fédéralisme », condamné à mort et guillotiné le 16 germinal an II (5 avril 1794).

  • 55 Sur Louis-Alexandre Expilly (1742-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 132-134 (...)

28Quant à Louis-Alexandre Expilly, recteur de Saint-Martin de Morlaix à la veille de la Révolution, député aux États-Généraux du clergé du diocèse de Saint-Pol de Léon, il est membre du Comité ecclésiastique de l’Assemblée et l’un des concepteurs de la constitution civile du clergé. Premier évêque élu en France au titre du département du Finistère (31 octobre 1790), assermenté devant l’Assemblée (27 décembre 1790), premier évêque constitutionnel sacré (par Talleyrand) le 24 février 1791, il devient président du Directoire départemental du Finistère. Destitué et déféré en jugement pour « fédéralisme » avec l’ensemble des administrateurs, il est condamné à mort et guillotiné à Brest, le 3 prairial an II (22 mai 1794) : « C’est beaucoup de paraître dans la même journée devant le tribunal des hommes et devant celui de Dieu », se serait-il écrié55. Le caractère très tardif de cette inculpation pour « fédéralisme » laisse assez entendre la plasticité de l’argument.

  • 56 Sur Jean-Louis Gouttes (1739-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 317-320 ; An (...)
  • 57 Louis-Marie Quicherat, Recueil de lettres de P.-A Victor de Lanneau, précédé d’une notice biographi (...)
  • 58 Henri Wallon, Histoire du tribunal tévolutionnaire, op. cit., tome III, p. 74.

29L’exécution de Jean-Louis Gouttes relève d’un tout autre profil56. Ce natif de Tulle, prêtre à Saint-Pierre du Gros-Caillou à Paris, puis curé d’Argeliers, près de Narbonne, est élu député du clergé de Béziers. Il s’impose à l’Assemblée comme spécialiste des questions financières. Il prête serment devant l’Assemblée le 17 décembre 1790, est élu évêque de Saône-et-Loire, sacré par Lamourette et entre à Autun le 3 avril 1791. Il se heurte bien vite à l’hostilité du maire jacobin d’Autun, Victor de Lanneau, ancien théatin, directeur du collège de Tulle, son vicaire épiscopal, abdicataire et marié, qui sera plus tard directeur du Prytanée français puis du collège Sainte-Barbe57. Après avoir protesté contre la fermeture des églises, Gouttes doit s’enfuir de son diocèse ; arrêté, il est emprisonné à la Conciergerie, déféré devant le Tribunal révolutionnaire, condamné et exécuté le 6 germinal an II (26 mars 1794). Son ultime protestation porte sur la légitimité de son élection par les citoyens : « Je dois dire au tribunal que la cause de mon arrestation prend sa source dans mon refus de donner ma démission d’évêque. Je ne l’ai pas donnée, cette démission, parce que j’aurais cru insulter le peuple en prévenant son vœu, parce que lui seul m’ayant nommé, lui seul pouvait me renvoyer »58. Mais le rappel de l’élection des évêques par le peuple selon les usages de « l’Église primitive » ne pèse plus rien en l’an II.

  • 59 Sur Marc-Antoine Huguet (1757-1796), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 99-100 ; Re (...)

30Au contraire de ses confrères, Marc-Antoine Huguet appartient au groupe des constitutionnels entraînés dans la radicalisation révolutionnaire59. Curé de Bourganeuf, il est élu évêque de la Creuse et sacré à Guéret en mai 1791. Représentant du département à l’Assemblée législative puis à la Convention nationale, il siège sur la Montagne et vote la mort de Louis XVI ; il abandonne ses fonctions épiscopales à la barre de l’Assemblée le 20 frimaire an II (10 décembre 1793). Au lendemain de thermidor, il soutient l’invasion de la Convention par le peuple de Paris lors de la journée du 12 germinal an III (1er avril 1795) : « Peuple », s’écrie-t-il, « n’abandonne pas tes droits ! » Amnistié, il est compromis dans le « complot » jacobin du camp de Grenelle contre le Directoire, condamné à mort par une Commission militaire et fusillé le 15 vendémiaire an V (5 octobre 1796). Son itinéraire le rapproche des prêtres constitutionnels engagés dans la Révolution jusqu’à la mort.

  • 60 Sur Yves Audrein (1741-1800), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 134-136 (citation (...)

31Le dernier évêque constitutionnel victime des violences de la Révolution est aussi l’un des derniers élus. Yves Audrein, natif de Gouarec, près de Rostrenen, ancien principal du collège parisien des Grassins, où il prête serment, est choisi pour vicaire épiscopal par l’évêque constitutionnel du Morbihan. Représentant du département du Morbihan à l’Assemblée législative puis à la Convention nationale, il vote la mort de Roi mais ne paraît pas avoir remis ses lettres de prêtrise. Il est élu au printemps 1798 évêque du Finistère et sacré à Quimper le 22 juillet 1798. Ce prêtre lettré déploie une intense activité de publiciste. Il peine toutefois à s’imposer dans un département en proie à la guerre civile et est assassiné dans une embuscade par des Chouans dans la nuit du 29 au 30 brumaire an IX (19 au 20 novembre 1800), « moins comme intrus que comme régicide », estime Paul Pisani60. Sa mort constitue un écho des multiples assassinats de constitutionnels dans les guerres de l’Ouest.

  • 61 Paul Chopelin, « L’évêque et ses vicaires. Le gouvernement collégial dans la première Église consti (...)

32Ces neuf destins victimaires d’évêques constitutionnels – mais il faudrait pouvoir étendre l’analyse au devenir, également très divers et parfois tragique, de leurs vicaires épiscopaux61 – éclairent ainsi la destinée du clergé constitutionnel : il y a les rétractés ; il y a les condamnés ; il y a les assassinés.

Rétractés et condamnés

33Il n’y a certes aucune mesure entre le nombre des prêtres réfractaires et celui des prêtres assermentés victimes de la Révolution française : on compte sans doute, toutes catégories confondus (prêtres jugés et condamnés légalement ; prêtres morts en déportation, en prison ou sur les pontons ; prêtres massacrés ou assassinés), près de 3000 prêtres, religieux et religieuses morts pour leur foi entre 1792 et 1800, parmi lesquels on ne relève que 200 à 250 prêtres constitutionnels avérés, morts en dépit ou en raison du serment qu’ils avaient prêté en 1791 sans l’avoir rétracté ; mais sans doute plusieurs centaines (400 ? 600 ?) d’anciens constitutionnels rétractés, assimilés par les autorités révolutionnaires à des réfractaires. La mort de ces prêtres ralliés à la Révolution participe toutefois de l’intelligibilité historique globale de la déchristianisation révolutionnaire.

  • 62 Donald Greer, The Incidence of the Terror during the French Revolution. A Statistical Interpretatio (...)
  • 63 Louis-Marie Prudhomme, Histoire générale, op. cit., tome VI, p. 522 (« Tableau général ») ; Stéphan (...)

34La grande majorité des prêtres constitutionnels victimes de la Révolution française appartient à la catégorie des « rétractés ». Soit ils avaient prononcé leur serment en 1791 avec des restrictions (généralement d’ordre spirituel) telles qu’elles n’ont pas été acceptées par les autorités ; soit ils avaient, dans les années suivantes, selon des modalités très diverses, rétracté publiquement ou discrètement leur serment : dans les deux cas, ils sont confondus dans la documentation avec les réfractaires et se voient appliquer la même peine : la déportation ou la mort. Ils sont ainsi plusieurs centaines, qui échappent aux « martyrologes » officiels des diocèses, mais tiennent toute leur place dans les listes des victimes, sans qu’il soit toujours aisé à l’historien de distinguer la singularité de leur parcours. Ainsi, sur 1135 noms de prêtres et de religieux victimes de la Terreur légale62 retenus en 1797 par Louis-Marie Prudhomme dans son Histoire générale des crimes, 716 seulement sont repris en 1821 par l’abbé Guillon de Montléon dans ses Martyrs de la foi63. Quelles que soient les inexactitudes dont fourmillent les listes établies par Prudhomme (l’abbé Guillon n’est pas non plus exempt), la confrontation de ces deux chiffres donne un ordre de grandeur : pour l’abbé Guillon, qui ne retient en principe dans son Martyrologe que les réfractaires, ce sont plus de 400 victimes de la Terreur légale qui ont prêté le serment, dont la grande majorité sont des « rétractés ».

  • 64 Pierre Bliard, Jureurs et insermentés, op. cit., p. 11, p. 300, p. 182.
  • 65 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 121.
  • 66 Pour un inventaire systématique : Tribunal révolutionnaire (1793 - an III). Répertoire numérique de (...)

35Cette présence de victimes constitutionnelles est confirmée par les recherches de Pierre Bliard sur le Tribunal révolutionnaire de Paris64. Sur 484 dossiers d’ecclésiastiques déférés, 319 concernent des assermentés (66 %) ; sur les 225 prêtres et religieux exécutés, on compte 147 assermentés (65 %), dont 33 abdicataires et cinq prêtres mariés. C’est dire que la remise des lettres de prêtrise, le mariage même n’emportent pas toujours l’acquittement, au contraire de ce qu’affirment les historiens catholiques. La répartition géographique des dossiers est également éclairante : sur les 209 ecclésiastiques exécutés à Paris dont le dernier domicile a pu être établi, 38 % proviennent des trois départements de Seine, Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, et 62 % du reste de la France. « La très grande majorité des prêtres condamnés par le Tribunal révolutionnaire venaient de province », remarque Paul Pisani65. Il semble qu’on ait eu recours au Tribunal révolutionnaire pour juger des ecclésiastiques assermentés alors que la condamnation des réfractaires pouvait s’opérer localement en conformité avec les lois en vigueur ; ces délocalisations sur Paris coïncident aussi avec la concentration de la justice révolutionnaire dans la capitale66. Ils manifestent surtout un changement d’attitude radical envers l’ancien clergé patriote.

  • 67 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome II, p. 254.
  • 68 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 82, p. 87, p. 121.
  • 69 Pierre Cayla, « Terroriste ou modéré ? Augustin Crassous », in Nouveaux pouvoirs et citoyenneté, 89 (...)
  • 70 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 123.

36Parmi les prêtres condamnés, on compte en effet des constitutionnels avérés et nullement rétractés, dénoncés comme suspects par des révolutionnaires en mal de répression. Henri-Alexandre Wallon puis Paul Pisani ont attiré l’attention sur la persécution du clergé patriote d’Île de France. « Les curés constitutionnels eux-mêmes étaient suspects, depuis qu’on avait proclamé à Paris le culte de la Raison », relève Wallon67. Pisani compte à Paris 267 abdications de prêtres et 122 emprisonnements, 116 prêtres mariés ainsi que 26 religieux ; il relève trente exécutions, parmi lesquels 21 constitutionnels et neuf réfractaires68. Augustin Crassous de Médeuil, député de la Martinique à la Convention, membre du club des Jacobins de Paris et représentant en mission en Seine-et-Oise69, assisté du commissaire Rousseville, se distingue par son zèle : « Dans les petites paroisses rurales de la banlieue, les habitants, gens pacifiques et traditionnels, avaient suivi mollement les exemples de la capitale », note Pisani. « Les églises s’étaient rouvertes, le curé, même rétracté, avait été rappelé, et les choses s’étaient remises à marcher comme avant. Crassous et Rousseville, en venant surveiller les nobles qui s’étaient retirés aux environs de Paris, ne tardèrent pas à s’en rendre compte et entreprirent d’y mettre bon ordre »70.

  • 71 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome II, p. 252-26 (...)

37Parmi les constitutionnels non rétractés qu’on voit ainsi monter sur l’échafaud de la guillotine, il y a d’abord, le 28 frimaire an II (18 décembre 1793), Jean-Baptiste Peyre, curé de Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise), dans le district de Gonesse, qui semble être la première victime de sa catégorie. « J.-B. Peyre était un prêtre constitutionnel », signale Wallon ; « non pas seulement curé, mais membre du conseil de la commune, officier municipal, et ayant repris, à ce titre, la charge de tenir les registres des baptêmes, mariages et sépultures, qu’il n’exerçait plus comme prêtre ; enfin, président du conseil de surveillance. […] Peyre était un prêtre attaché aux devoirs de son état et à ses croyances ». Et de citer l’accusateur public : « Depuis qu’il est curé, il a été impossible de l’empêcher de faire donner de l’encens à lui et à ses chantres, quoique ce soit toujours défendu par la loi ; il a toujours recommandé au prône le pape. […] Il a encore fait au 15 août dernier la procession en mémoire d’un prétendu vœu d’un des anciens tyrans de France ; il n’a point annoncé à son prône la fête nationale du 10 août dernier ». On a saisi à son domicile « des prônes et des sermons qui ne respirent que le fanatisme », sur l’indissolubilité du mariage, sur la bénédiction des drapeaux de la Garde nationale, sur un Christ dans le local de réunion du comité révolutionnaire71. Un prêtre fidèle aux enseignements de son Église en un mot : donc désormais suspect…

  • 72 Wallon, tome III, p. 70-72 ; Répertoire numérique, W 339, dossier 615.
  • 73 Wallon, tome III, p. 450 ; Répertoire numérique, W 366, dossier 816.
  • 74 Wallon, tome IV, p. 278 ; Répertoire numérique, W 397, dossier 920.
  • 75 Wallon, tome IV, p. 394 ; Répertoire numérique, W 407, dossier 938.
  • 76 Wallon, tome V, p. 20-28 ; Répertoire numérique, W 414, dossier 949.
  • 77 Wallon, tome V, p. 96 ; Répertoire numérique, W 429, dossier 965.
  • 78 Wallon, tome V, p. 109 ; Répertoire numérique, W 431, dossiers 968 et 969.
  • 79 Répertoire numérique, W 433, dossier 972.
  • 80 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 414, p. 416-4 (...)

38Suivent le 3 germinal an II (23 mars 1794) Antoine-François Poitou, curé de Vaux-sur-Seine dans le district de Montagne-du-Bon-Air (Saint-Germain-en-Laye) – « Dans son interrogatoire devant le conseil de surveillance du district, il avait dit qu’il avait prêté le serment. – Pourquoi ? – Pour être tranquille et rester dans sa paroisse. […] – Pourquoi il priait toujours pour le pape qui était un ennemi déclaré de la France ? – Qu’il a prié pour le pape comme chef de l’église catholique, apostolique et romaine, et non comme prince séculier »72. Puis, le 27 floréal an II (16 mai 1794), Antoine-Louis Lartigue, curé de Fontenay-aux-Roses (Seine), et Pierre-Louis Rousselet, ancien bénédictin, curé de Dannemarie-les-Fontaines (Dannemarie-les-Lys, Seine-et-Marne), qui « a fait faire la première communion »73 ; Louis-Michel Trouvé, curé de Moissy (Seine-et-Marne), le 8 messidor an II (26 juin 1794)74 ; Jean-Jacques Sérard, curé de Champdeuil (Seine-et-Marne), le 18 messidor an II (6 juillet 1794)75 ; Joseph Benaut, curé de Saint-Cyr (Seine-et-Oise), Claude-Henri Boismaigre, curé de Chatou (Seine-et-Oise), Louis-Joseph Bricogne, curé de Port-Marly (Seine-et-Oise), Melchior Grandjean, curé de Goussonville (Seine-et-Oise), Jean-Noël Lacrose (ou Deluche-Lacrose), curé puis maire d’Éragny (Seine-et-Oise), Louis-Antoine-Benoît Suzanne, curé puis officier public de Boissy-Sans-Avoir (Seine-et-Oise), tous les six le 25 messidor an II (13 juillet 1794)76 ; Jean-Baptiste Guillebert, curé de Montfermeil (Seine-et-Oise), le 5 thermidor an II (23 juillet 1794)77 ; François Bucquet, curé de Gagny (Seine-et-Oise), Pierre-Laurent Champigny, curé de Villepinte (Seine-et-Oise), Pierre Hébert, curé de Courbevoie (Seine), Jean-Baptiste Maldagnes, curé de Louvres (Seine-et-Oise) et Jean-Nicolas Voyot, curé de Bonneval (Seine-et-Oise), tous les cinq le 7 thermidor an II (25 juillet 1794)78 ; Jacques Guillemeteau, vicaire de Vincennes (Seine), le 8 thermidor an II (26 juillet 1794)79. Cette hécatombe de prêtres « patriotes » dans une Île-de-France gagnée à la constitution civile – on compte 84 % de jureurs dans le département de la Seine extra muros, 82 % en Seine-et-Oise et 74 % en Seine-et-Marne80  – n’invite pas seulement à nuancer le discours convenu sur la déchristianisation précoce de la périphérie de la capitale ; elle jette une lueur sinistre sur l’extension aux prêtres patriotes de la persécution religieuse autour de Paris en l’an II.

  • 81 Paul Chopelin, Ville patriote et ville martyre. Une histoire religieuse de Lyon pendant la Révoluti (...)

39Pour ce qui concerne les commissions militaires et révolutionnaires de Lyon et de Feurs (autre hécatombe, avec 1940 victimes nominales recensées), les listes constituées en 1911 par Antonin Portallier ont servi de base au recensement opéré pour la seule ville de Lyon par Paul Chopelin : parmi les 187 prêtres jugés par les trois Commissions révolutionnaires de Lyon, on compte 78 prêtres constitutionnels avérés et 35 prêtres aux positions mal définies, contre seulement 53 prêtres réfractaires ; mais il faut immédiatement constater que, sur les 74 exécutions effectives, on compte 51 prêtres réfractaires, soit 69 % de l’ensemble et 96 % des prévenus81. On mesure là l’un des angles morts des martyrologes : en ne considérant, par définition, que les condamnés, ils omettent d’examiner l’ensemble des prévenus ainsi que la part du clergé assermenté parmi eux.

  • 82 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs, op. cit., p. 427-428.
  • 83 Ibid., p. 340.
  • 84 Ibid., p. 154-155.

40La répression lyonnaise obéit à un schéma politique, celui du « fédéralisme » : Benoît-Nizier Servier, curé de la paroisse Saint-Georges de Lyon, vicaire épiscopal de l’évêque Lamourette, qui célèbre la messe de la Fédération le 30 mai 1790, est ainsi condamné et fusillé aux Brotteaux le 29 octobre 1793 pour avoir servi en qualité de quartier-maître durant le siège82. Mais un examen attentif des condamnations de constitutionnels décèle des motifs d’ordre religieux. François Pavy, vicaire de la paroisse Saint-Polycarpe de Lyon, condamné pour avoir travaillé aux redoutes et guillotiné sur la place des Terreaux le 25 nivôse an II (14 janvier 1794), refuse au tribunal ses lettres de prêtrise : « J’en ai perdu l’original ; mais il en existe un double dans le ciel ; fais-moi monter sur l’échafaud, et j’irai te le chercher », aurait-il répliqué83. Philibert Duval, ancien prémontré, curé d’Amplepuis (Rhône), bourg textile du Haut-Beaujolais, président de la société populaire, hostile à l’insurrection, est arrêté comme suspect, incarcéré à Villefranche-sur-Saône puis à Lyon et guillotiné le 9 pluviôse an II (28 janvier 1794). « Interrogé s’il ferait volontiers l’abandon de ses lettres de prêtrise, et s’il en cesserait les fonctions, en imitant en cela une grande partie de ses confrères, répond qu’il donnerait plutôt sa tête que d’abandonner un titre aussi honorable : ajoute qu’il regarde le sacerdoce comme la plus grande grâce que Dieu lui ait pu faire, et le plus grand honneur où l’Église l’ait pu élever, qu’il croirait se déshonorer aux yeux de la République s’il pensait autrement et qu’il désire vivre et mourir dans ces sentiments, et a signé Duval, Prémontré »84.

  • 85 Ibid., p. 204-205.
  • 86 Ibid., p. 3. Colin Lucas, The Structure of the Terror. The Example of Javogues and the Loire, Londo (...)

41Claude Leclerc, ancien supérieur des lazaristes de Mornant (Rhône) devenu curé du bourg, est dénoncé comme suspect par la municipalité et guillotiné le 26 pluviôse an II (14 février 1794) : « Nous avons cru devoir arrêter un nommé Leclerc […] qui, semblable au caméléon, se revêtissait de toutes les formes convenables, et vivait encore dans le sein d’une commune patriote avec un ancien frère de leur ci-devant communauté, et tous les jours en habits de religieux, c’est pourquoi nous l’avons arrêté et fait traduire à la Commission temporaire pour y être jugé d’après leur sagesse et leurs lumières : leur observant que Leclerc avait prêté son serment. Nous lui avons demandé s’il voulait faire abjuration de son métier de prêtre. Il a répondu fermement que non »85. Jean-Marie Aguiraud, curé de Saint-Genest-Lerpt (Loire), près de Saint-Étienne, est guillotiné le 24 ventôse an II (14 mars 1794) après avoir été dénoncé en ces termes par le conventionnel en mission Claude Javogues : « a fait lecture de tous les arrêtés de l’infâme Congrès ou commission populaire de Lyon à ses prônes. Il engageait la municipalité et les citoyens de la commune à faire afficher ces arrêtés liberticides et à les faire exécuter : en un mot, c’est un prêtre »86. Tout est dit.

  • 87 Pierre-Joseph Thénard, Quelques souvenirs du règne de la Terreur à Cambrai, Cambrai, Carion, 1860, (...)
  • 88 Auguste-Joseph Paris, La Terreur dans le Pas-de-Calais et dans le Nord, op. cit., p. VI-VII et 644- (...)
  • 89 Les onze Ursulines de Valenciennes et les quatre Filles de la Charité d’Arras exécutées à Cambrai o (...)
  • 90 Ibid., p. 230.
  • 91 Ibid., p. 264-265 et 327.

42La persécution du clergé conduite dans les deux départements du Pas-de-Calais et du Nord par le conventionnel Joseph Lebon, représentant en mission de novembre 1793 à juillet 1794, n’épargne pas davantage le clergé constitutionnel. Ancien oratorien, professeur au collège de Beaune, ordonné prêtre par Talleyrand en décembre 1789, Lebon a pourtant lui-même exercé les fonctions de curé assermenté de Neuville-Vitasse (Pas-de-Calais) avant d’être élu maire d’Arras, procureur syndic du département du Pas-de-Calais et député suppléant à la Convention nationale ; il renonce au sacerdoce, se marie en novembre 1792 et est admis le 1er juillet 1793 à la Convention où il siège près de Robespierre, dans les rangs de la Montagne87. Auguste-Joseph Paris, lorsqu’il dresse la liste des 392 condamnations à mort prononcées à Arras et des 149 prononcées à Cambrai, relève les noms de 48 prêtres et religieux, presque tous réfractaires88, et de quinze religieuses89. Parmi les quatre seuls constitutionnels exécutés, Adrien-Vincent Cary, curé de Collines (aujourd’hui Colline-Beaumont, Pas-de-Calais), près de Montreuil-sur-Mer, est reconnu coupable « d’attentat contre la sûreté intérieure de l’État » pour avoir écrit en décembre 1792 que « profiter de la loi du divorce, c’était s’expulser du sein de l’Église » ; il est guillotiné à Arras le 2 germinal an II (22 mars 1794)90. Le suivent, le 23 germinal an II (13 avril 1794), Jean Diot, curé de Ligny-sur-Canche (Pas-de-Calais), dans le Ternois, pour avoir critiqué les acheteurs de biens nationaux ; puis, le 28 germinal an II (17 avril 1794), Charles-François Michaud, ancien député du clergé à l’Assemblée constituante, curé de la paroisse Saint-Bertin de Morin-la-Montagne (Saint-Omer), pour avoir protesté contre l’enlèvement des cloches91. Ce sont des réactions de prêtres de l’ancienne Église gallicane qui ont été punies de mort.

  • 92 Pierre-Grégoire Labiche de Reignefort, Relation de ce qu’ont souffert pour la religion les prêtres (...)
  • 93 Site PRÊTRES DÉPORTÉS sur les PONTONS (rabany.eu) consulté le 1er avril 2023. Louis-Marie Dubois, R (...)
  • 94 Isidore Manseau, « Liste des prêtres déportés en vertu de la loi du 26 août 1792, détenus à Rochefo (...)

43Les prêtres âgés ou malades, déportés en l’an II sur les pontons de Rochefort et ses deux navires-prisons, le Washington et Les Deux-Associés, en attendant un embarquement pour la Guyane qui n’est jamais venu, représentent l’effectif imposant de 829 prêtres et religieux, dont 547 (66 %) sont morts de mauvais traitements, de malnutrition et de maladies contagieuses contractées durant leur emprisonnement dans des conditions particulièrement éprouvantes, pour ne pas dire criminelles92 : ils constituent l’ensemble le plus considérable de victimes ecclésiastiques de la Révolution et échappent aux dénombrements de la « Terreur légale »93. Isidore Manseau mentionne parmi les morts 19 curés constitutionnels, tous rétractés (le plus souvent sur place), dont certains ont occupé des postes importants : Jean Gilbert des Héris aîné à Angoulême ; Nicolas Giraud à Vichy ; Pierre-Jean Pigeot à Boulay (Moselle) ; seul un jureur ne s’est pas rétracté : Claude-Alexandre Brigeat, curé de Ligny-en-Barrois (Meuse), qui repart des pontons, vivant et ferme dans ses convictions, vers sa patrie94. L’application à l’encontre de ces prêtres des lois sur la déportation, est significative.

44Plusieurs centaines de constitutionnels rétractés ont ainsi payé de leur vie leur fidélité à leur foi et à leur sacerdoce ; et sans doute plus d’une centaine de constitutionnels non rétractés : leur présence minoritaire ne doit pas dissimuler que leur incarcération puis leur condamnation éventuelle révèlent une forme d’intégration, d’absorption ou de confusion, comme on voudra, des assermentés parmi les insermentés : dans l’esprit des autorités révolutionnaires de l’an II, tout prêtre est désormais suspect, quel qu’ait été son choix en 1791. Reste enfin à évoquer les morts violentes.

Morts au combat, massacrés, assassinés

45Le volet le plus inexploré de cette histoire – et le plus difficile d’accès, en raison de la pauvreté de la documentation – est en effet celui des morts, des massacres ou des meurtres (au sens d’exécutions extra-juridiques, dépourvues de toute légalité) de prêtres constitutionnels dans les régions insurgées. Leur recensement est malaisé et a rarement fait l’objet d’enquêtes systématiques. On peut estimer le nombre des victimes à une centaine. Ce sont – de même que les massacres et les meurtres, beaucoup plus nombreux, de prêtres réfractaires perpétrés entre l’été 1792 et l’an VIII – des assassinats commis dans un contexte de guerre civile, où la violence – et parfois la barbarie – des individus et des foules se donnent libre cours.

  • 95 François-Joseph Grille, « Déclaration de Boullemer sur les massacres de Machecoul, du 11 mars au 22 (...)
  • 96 Alfred Lallié, Le District de Machecoul, 1788-1793. Études sur les origines et les débuts de l’insu (...)

46L’assimilation des constitutionnels à la cause de la Révolution en constitue le mobile essentiel. Aux yeux des populations en révolte, ils sont les mauvais prêtres, les intrus, venus bouleverser la vie religieuse des campagnes, chasser les bons prêtres, proclamer et défendre les lois et les institutions nouvelles ; ce sont aussi des Bleus, ralliés à la République et liés à l’État, à son administration, à sa fiscalité et à son armée. Dès le premier massacre, ils sont désignés à la vindicte des masses paysannes : à Machecoul (Loire-Inférieure), la petite capitale du pays de Retz investie le 11 mars 1793, s’il faut en croire le témoignage contemporain du juge Boullemer (un rescapé du massacre), largement diffusé par les autorités révolutionnaires, « le curé constitutionnel Letort fut assommé à coups de fourche et de baïonnette dans la tête et, pour comble d’horreur, une femme lui ôta sa qualité d’homme »95. « Son supplice dura environ dix minutes ; encore un de ces monstres disait-il, quand il fut mort : Ce bougre de prêtre n’a cependant pas vécu longtemps », ajoute le même témoin96. Ce premier meurtre donne la tonalité tragique des suivants.

  • 97 Émile Gabory, La Révolution et la Vendée, Paris, Perrin, 1925-1928, trois volumes ; Charles Tilly, (...)
  • 98 Charles Le Goffic, La Chouannerie. Blancs contre Bleus, 1790-1800, Paris, Hachette, 1930 ; Gabriel (...)
  • 99 Louis Delhommeau, Le Clergé vendéen face à la Révolution, La Roche-sur-Yon, Siloë, 1992, p. 115-120

47Les massacres de prêtres ponctuent les guerres civiles de l’Ouest dans leurs deux phases successives : d’abord ce qu’il est convenu d’appeler la « Vendée militaire », qui se déroule pour l’essentiel aux confins des trois départements de la Vendée, du Maine-et-Loire et de la Loire Inférieure97 ; ensuite ce qui relève de la Chouannerie, c’est-à-dire de la guerre civile qui se poursuit dans les Pays de Loire, en Bretagne et en Normandie jusqu’à la « pacification » de l’an VIII (1800)98. Dans la première période, les meurtres de prêtres (réfractaires ou constitutionnels) participent de massacres perpétrés au milieu des populations par des groupes armés en mouvement, rassemblements d’insurgés, d’origine surtout paysanne, ou troupes régulières, étrangères au pays, en charge d’une répression impitoyable. Dans un second temps, du côté chouan, les meurtres de prêtres patriotes s’apparentent à des assassinats ponctuels, ciblés et délibérés ; mais il est d’autres jureurs qui, emportés par leur engagement républicain, meurent les armes à la main. Rappelons enfin (sans évoquer ici la Terreur légale, les noyades de prêtres de Nantes et le « Champ des Martyrs » d’Angers) que les massacres de prêtres réfractaires demeurent beaucoup plus nombreux que ceux des prêtres assermentés : pour le seul département de la Vendée, selon les données de l’enquête ordonnée en 1899 par Mgr Catteau, évêque de Luçon, on compte ainsi, parmi le clergé réfractaire, 38 prêtres massacrés, 17 prêtres fusillés, neuf prêtres guillotinés et deux prêtres noyés ; douze sont morts en prison et 51 décèdent durant leur exil99.

  • 100 Jean-Clément Martin, La Vendée de la mémoire : 1800-1980, Paris, Le Seuil, 1989. Sur les formes de (...)
  • 101 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 390, p. 422 e (...)

48Au cœur de la « Vendée militaire », ce n’est pas chose aisée que de dénombrer les victimes constitutionnelles, tant les mémoires sont affrontées100 et les historiographies sont antagonistes et sélectives : les historiens catholiques ont privilégié leurs martyrs tandis que l’historiographie républicaine s’est presque complètement désintéressée du sort du clergé constitutionnel. Ces morts procèdent, de part et d’autre, d’une détermination à exterminer l’adversaire : en l’occurrence, pour les Blancs, les soldats de la République, les représentants de l’administration républicaine, les acheteurs de biens nationaux et les curés constitutionnels. Faute de recensements précis – mais l’on est ici dans une France qui a massivement refusé le serment : 45 % de jureurs en Maine-et-Loire, 33 % en Vendée et 22 % en Loire Inférieure ainsi que de nombreuses et précoces rétractations101 – et compte tenu du fait que les prêtes patriotes se sont réfugiés rapidement dans les villes afin d’échapper à la mort, on ne possède que quelques indications sommaires, très inférieures sans nul doute à la réalité.

  • 102 Charles-Louis Chassin, La Préparation de la guerre de Vendée, op. cit., tome III, p. 320.
  • 103 Ibid., tome III, p. 352 (Marchesse, Méchin), p. 351 (Resneau), p. 378 (curé de Savenay).
  • 104 Edgar Bourloton, Le Clergé de la Vendée pendant la Révolution, Vannes, Lafolye, 1908, p. 370-374. L (...)

49Dans la Vendée insurgée du printemps 1793, l’historien républicain Charles-Louis Chassin mentionne encore l’assassinat du curé constitutionnel de Bouaine (aujourd’hui Saint-Philbert de Bouaine, Vendée), au sud de Nantes, François Noeau, « mis en avant et tué dans une attaque, sinon frappé par derrière [car] ils mettaient ceux qui leur étaient suspects en avant, sans armes, pour les faire tuer par les nationaux ; mais, pour l’ordinaire, ils les tuaient eux-mêmes par derrière »102. En Loire Inférieure, il relève la mort de trois prêtres du pays de Retz : le vieux M. Marchesse, curé de Bourgneuf-en-Retz, « traîné à la queue d’un cheval, [qui] a la tête écrasée entre la porte et le mur de la prison » ; Antoine-Alexandre Méchin, curé de Brains, ancien député à l’Assemblée constituante, massacré à Machecoul le 11 mars 1793 ; et Henri Resneau, curé de Port-Saint-Père, également massacré à Machecoul le 28 mars 1793 ; ainsi que le meurtre du curé jureur de Savenay, entre Nantes et Saint-Nazaire, qui est égorgé103. Edgar Bourloton ajoute à cette liste l’assassinat, en février 1796, de Pierre-Marie Guesdon-Poupardière, curé de La Rabatelière, près de Saint-Fulgent, au cœur de la Vendée militaire ; négociateur improvisé entre Charette et le général Gratien, il est suspect aux Vendéens pour avoir été réinstallé dans sa paroisse « sous la sauvegarde des autorités républicaines », et assassiné avec ses deux domestiques, après le rejet des négociations ; l’armée républicaine lui rend des honneurs funèbres104.

  • 105 Simon Gruget, Mémoires et Journal de l’abbé Gruget, curé de la Trinité d’Angers, publiés par E.L. e (...)

50En Maine-et-Loire, l’abbé Gruget, curé de la Trinité d’Angers, signale l’assassinat d’Antoine Panay de Champotier, curé depuis 1784 de Saint-Augustin des Bois, près de Segré, qui a abandonné ses fonctions sacerdotales pour se marier ; il est tué par les Chouans le 26 mai 1794105 ; le juge de paix de Louroux-Béconnais ajoute des détails, puisés sur place :

  • 106 Hippolyte Sauvage, Un Canton de l’Anjou sous la Terreur et durant la guerre de la chouannerie, Ange (...)

Il prêta tous les serments possibles exigés par les législateurs, et resta curé jureur de Saint-Augustin, dont il tint les registres jusqu’au 27 novembre 1792. élu membre du conseil général de la commune et officier public, il continua encore leur rédaction après cette date, à partir du 25 décembre suivant et jusqu’à la date de sa mort. Enfin il donna le scandale d’un mariage public à Saint-Augustin même. Lui, qui était âgé de 53 ans, il épousa une jeune ouvrière de 18 ans, Marie-Perrine Brechet. Cet acte est du 26 novembre 1793. Mais, six mois après, jour pour jour, le 26 mai 1794, il périt assassiné, dit-on, par les chouans indignés de cette conduite, sur les sept heures du soir, à l’entrée de la forêt Noire, dans le champ Noir, près du chemin qui conduit dans les bois. Panay avait été atteint de plusieurs coups de fusil et frappé de divers coups de sabre sur la tête.106

  • 107 Mémoires et Journal de l’abbé Gruget, op. cit., p. 147. Autre date possible : le 17 octobre 1794.

51Le même abbé Gruget mentionne encore, le 29 vendémiaire an III (20 octobre 1794), le meurtre du curé de La Meignanne, au nord d’Angers, Jean-Baptiste Baril, en poste depuis 1758 et âgé de 77 ans : « Vendredi dans la nuit, les chouans […] ont tué le curé M. Baril qui était dans sa cure et qui n’en voulait pas sortir. Il avait malheureusement fait tous les serments et rendu ses lettres. Croyant même que sa municipalité ne voulait pas les recevoir, il les avoit envoyées au district d’Angers »107. Deux noms épars sur une liste certainement plus fournie…

  • 108 Frédéric Le Coq, Documents authentiques pour servir à l’histoire de la constitution civile du clerg (...)
  • 109 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 394.
  • 110 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 223-226 (p.225) ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., La (...)

52Les constitutionnels victimes des Chouans ont laissé plus de traces. Le département de la Mayenne, qui fait l’objet à la fin du xixe siècle de recherches érudites de grande qualité et d’une relative impartialité108, compte ainsi vingt morts violentes dans les rangs clairsemés (29 % de jureurs109) de l’Église constitutionnelle – dont une seule condamnation légale, celle de Léonor-Auguste Auvray de Coquerel, curé patriote de La Bazouge-de-Cheméré, à l’est de Laval : après avoir refusé de livrer ses lettres de prêtrise, il est déféré devant la Commission révolutionnaire le 18 germinal an II (7 avril 1794), « prévenu d’avoir tenu des propos contre-révolutionnaires tendant à provoquer au rétablissement de la royauté, à favoriser les progrès de la Vendée et d’avoir dans ses discours fanatiques retardé la marché de l’esprit public » et « d’avoir profité de la qualité de prêtre pour propager des principes tendant à replonger dans le sommeil de l’esclavage les habitants de sa commune » ; condamné à mort et guillotiné le jour même, il vient grossir la liste déjà longue des constitutionnels exécutés en tant que tels110.

  • 111 Un treizième cas demeure douteux, celui du vicaire épiscopal Séguéla, ancien doctrinaire de La Flèc (...)
  • 112 Jules Barbey d’Aurevilly, L’Ensorcelée [1854], Paris, Gallimard, « Folio », 1977, chapitre IX, p. 1 (...)
  • 113 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Château-Gontier, p. 9-10 (Cordier), p. 66 (Ragot).
  • 114 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Ernée, p. 13-14.

53On relève onze membres du clergé constitutionnel morts au combat – ce qui manifeste assez leur engagement dans les affrontements… et leur oubli des règles ecclésiastiques111 –dans un cas inverse (car la présence de réfractaires est attestée auprès des Vendéens et des Chouans), Barbey d’Aurevilly rappelle dans L’Ensorcelée la pénitence de trois années sans pouvoir dire la messe ni confesser que l’Église impose à l’abbé de La Croix-Jugan pour avoir chouanné et « manqué aux saints Canons et à l’esprit de son état en guerroyant »112. Ainsi Dominique Rabard, vicaire épiscopal du premier évêque de Mayenne (Gabriel Villar) et, comme lui, ancien doctrinaire du collège de La Flèche, devenu principal du collège de Château-Gontier, « Rabard le sans-culotte, comme il aimait à s’appeler », rappelle l’abbé Boullier qui le considère comme « l’un des chefs du parti montagnard », est tué dans la Garde nationale lors du combat du Pont-Barré, à Beaulieu (Maine-et-Loire) le 19 septembre 1793 ; à ses côtés périssent le même jour un second prêtre professeur au collège de Château-Gontier, Charles Cordier, ainsi que le curé de Châtelain, à l’est de Château-Gontier, Henri Ragot, ancien moine de Fontevraud113. La mort la plus retentissante est celle de René-Jean Mesnage, né en 1729 dans une famille de bourgeois bleus d’Ernée : clerc tonsuré titulaire de la chapelle Saint-Pierre-du-Pont sur la paroisse Saint-Pierre-des-Landes, procureur de la commune d’Ernée, il prend part en octobre 1793 à une expédition pour délivrer Laval ; fait prisonnier, il se refuse à crier Vive Louis XVII ! et meurt au cri de Vive la République ! tel un autre Bara quinquagénaire. « La municipalité d’Ernée, les clubs de cette ville et du voisinage firent les éloges les plus pompeux de Mesnage, martyr de la liberté ; on le fêta dans les temples décadaires avec Marat et Lepelletier-Saint-Fargeau »114.

  • 115 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 509 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Laval, p. 55.
  • 116 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 495 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Évron, p. 119.
  • 117 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p. 9-10.
  • 118 Ibid., Villaines, p. 68.
  • 119 Ibid., Évron, p. 23.
  • 120 Ibid., Mayenne, p. 90.
  • 121 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 329, p. 449 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Laval, (...)

54La liste des curés patriotes morts le fusil à la main ne s’arrête pas là. Tombent encore au combat Charles-Louis Le Tenneur, alias Brutus, ancien cordelier, curé de Parné-sur-Roc, au sud de Laval, entré dans la Garde nationale et tué près d’Angers115 ; René Martin, curé de Torcé près de Sainte-Suzanne, puis vicaire épiscopal, mort près de Laval dans la Garde nationale116 ; et Pierre-François Pottier, professeur au collège de Mayenne, membre de la Société des amis de la Constitution, agent national de la commune, tué à la tête d’une troupe armée117. En 1795 périssent au combat René Cadeau, curé de Javron (district de Villaines-la-Juhel)118, et Charles-François Moreau, curé de Châtres-la-Forêt, au sud d’Évron119. En 1799, lors d’une ultime reprise des hostilités, meurent sous les armes Jean-Michel Lair de la Motte, curé de Bais puis commissaire du Directoire exécutif du district de Mayenne, au cours d’une expédition120 ; et Jean-Julien Roche, curé de Soulgé-le-Bruand, à l’est de Laval, puis chantre de la « cathédrale » Saint-Vénérand de Laval où l’évêque Dorlodot a regroupé ses partisans, tué au combat de Louverné, au nord de Laval, le 9 vendémiaire an VIII (1er octobre 1799)121.

  • 122 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 155-157 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p (...)
  • 123 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Ernée, p. 155.

55On compte enfin huit assassinats de prêtres jureurs. Joseph Dry, curé de La Brûlatte, sur la route de Laval à Vitré, s’était réfugié à Laval ; mais la ville est investie entre le 23 octobre au 2 novembre 1793, et « les Vendéens n’avaient rien tant à cœur que d’arrêter des prêtres assermentés ; ils trouvèrent moyen d’en saisir trois pendant leur séjour à Laval » ; l’un se rétracte ; l’autre s’enfuit ; Dry est fusillé et son corps, jeté dans la Mayenne122. Lorsque les insurgés se dirigent sur Granville à la Toussaint 1793, M. Mellier, curé de Saint-Denis de Gastine, près d’Ernée, « fut arraché au presbytère par un détachement royaliste et fusillé au milieu du bourg ; son cadavre demeura exposé pendant plusieurs jours sur la place de l’église, les Vendéens ayant menacé de mort quiconque lui donnerait une sépulture »123. En 1794, François Giffard, le truculent curé patriote de Gesnes, près de Montsûrs, subit le même sort :

  • 124 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 501 (citation) ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., May (...)

C’était un homme de haute taille et d’une force prodigieuse ; il faisait le commerce des bestiaux et fréquentait les foires où il avait la réputation d’un franc buveur. Un parti de Chouans étant allé à Gesnes en 94, Giffard ne voulut point fuir à leur approche ; il les brava au contraire et fut tué par eux dans le corridor de sa maison, dont il voulait leur défendre l’entrée.124

  • 125 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 409, p. 501 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenn (...)
  • 126 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Évron, p. 83.
  • 127 Ibid., Ernée, p. 104.
  • 128 Ibid., Château-Gontier, p. 36 (citation) ; Émile Quéruau-Lamerie, L’Église constitutionnelle, op. c (...)
  • 129 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Château-Gontier, p. 57-58.

56Joseph Monsallier, ancien dominicain de Laval devenu curé de Ruillé-Froidfond, au nord de Château-Gontier, périt assassiné125, tout comme Jean-Mathurin Bouessière, vicaire de Saint-Germain de Coulamer, près d’Évron : « il se joignit aux expéditions contre les chouans et ceux-ci, qui l’accusaient de les avoir dénoncés, s’emparèrent de lui et le fusillèrent le 27 avril 1795 »126. Jean Lemarchant, curé des Bois sur la route d’Ernée à Domfront, est « assassiné de la manière la plus cruelle », rapporte une lettre du clergé patriote de Laval en date du 21 juin 1795127. En 1799, deux meurtres encore : Pierre Chollière (ou Choltière), curé de Ballée, bourg « constamment patriote » au sud-est de Laval, puis maire et commissaire exécutif, « homme impie et immoral », qui allait, « déclamant contre la religion et apprenant à lire aux enfants dans le roman de la Nouvelle Héloïse », le 12 pluviôse an VII (31 janvier 1799)128 ; et Jean-François Hayer, vicaire-sacriste et maire de Saint-Fort, au sud de Château-Gontier, dont il a acquis le presbytère comme bien national : « le 29 floréal an VII [18 mai 1799], il fut enlevé de son domicile par un parti de douze à quinze chouans et égorgé par ceux-ci dans un pré voisin »129. Le prix payé par le clergé patriote en Mayenne apparaît élevé.

  • 130 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 377.
  • 131 Michel Lagrée, « La Révolution sous le boisseau : l’expiation des constitutionnels », in Mentalité, (...)
  • 132 Th. Lemas, Un District breton pendant les guerres de l’Ouest et la Chouannerie, 1793-1800 [Fougères (...)
  • 133 Sur la Chouannerie en Ille-et-Vilaine, Joseph Le Louët, La Chouannerie et le clergé constitutionnel (...)
  • 134 Th. Lemas, Un District breton pendant les guerres de l’Ouest, op. cit., p. 109.

57La Chouannerie bretonne n’est pas plus clémente. Michel Lagrée a consacré une étude aux constitutionnels de l’Ille-et-Vilaine, un département qui ne compte que 17 % de prêtres jureurs130. Il recense six prêtres patriotes assassinés : M. Porée à Billé (district de Fougères) le 8 décembre 1793 ; M. Hubaudière à Pacé, aux portes de Rennes, le 13 mars 1794 ; Gilles Larcher à Mellé (Fougères) le 28 mars 1794 ; Mathurin Delaune au Theil-de-Bretagne (La Guerche) le 25 avril 1794 ; François-Marie Leroux, à Boistrudan (La Guerche) le 8 avril 1796 ; et Victor de Lesquen, à La Bazouge-du-Désert (Fougères), le 16 novembre 1799. À ce « martyrologe délibérément ignoré par l’historiographie ecclésiastique traditionnelle »131, on peut encore ajouter M. Macé, curé de Rimou (Fougères), « un prêtre assermenté, accablé d’infirmités, âgé de quatre-vingts ans »132. La distribution des meurtres se concentre à l’est du département, dans des zones d’intense chouannerie133. Une violence extrême y préside – il est vrai qu’au même moment les Bleus, après avoir exécuté dix-sept puis dix-neuf chouans à Fougères, placent leurs têtes sur des piques sur les clochers de leurs villages…134 Gilles Larcher, peut-on lire sur le registre des décès de la commune, « est décédé dans la nuit d’entre le 7 et le 8 germinal [27 au 28 mars 1794], à environ minuit, par l’effet des coups de sabres et fusils qu’il reçut dans la même nuit environ les onze heures et demie et le feu qui lui fut allumé aux fesses et parties par une troupe ou horde de brigands au nombre de trente-cinq à quarante ». Quant à Victor de Lesquen, dont le neveu, Claude-Louis de Lesquen, évêque de Rennes de 1825 à 1840, honorera la mémoire et dont un pèlerinage populaire perpétuera le souvenir, un témoignage recueilli à la fin du xixe siècle conserve les détails de sa fin :

  • 135 Ibid., p. 321, témoignage du fermier de La Melleraye, 67 ans, d’après les souvenirs de sa mère.

Il était à peu près six heures du matin lorsque les chouans arrivèrent à la Melleraye, au nombre d’environ cinq à six cents hommes, ayant à leur tête un prêtre qu’ils traînaient plutôt qu’il ne marchait. Ils étaient tous ivres, tout couverts de boue et leurs vêtements presque en lambeaux. Ils criaient : Nous le tenons, le citoyen ! le prêtre jureur !... Cinq hommes le font entrer dans la maison de mes parents et le jettent par terre. Mon grand-père, D…, le relève et l’assoit sur une chaise. M. de Lesquen, tout mutilé, l’œil droit crevé, le bras gauche brisé, la face couverte de sang et de boue, le pied droit déchaussé, la tête nue, demande de l’eau fraîche pour se désaltérer et supplie ma grand’mère de lui laver ses plaies et de lui appliquer des compresses. Il ajouta : Je crois que M. de Boisguy va me faire grâce. Tout à coup un nouveau détachement arrive à la Basse-Melleraye, au nombre d’environ sept à huit cents hommes, ayant à leur tête M. de Boisguy. Une demi-heure après, M. de Boisguy pénètre chez mon grand-père et s’adresse à M. de Lesquen en ces termes : Citoyen, debout !... Le pauvre prêtre, qui avait montré jusque-là un courage héroïque, tombe en défaillance. Deux brigands le traînent dans le champ du Rocher. On entendit un feu de peloton : c’était fini. M. de Boisguy chargea le père Jouault, de la Melleraye, de lui creuser une tombe auprès d’un coudrier.135

  • 136 Claude Langlois, « Le clergé constitutionnel », in Un diocèse breton au début du xixe siècle. Le Di (...)
  • 137 Émile Sageret, Le Morbihan et la Chouannerie morbihannaise sous le Consulat, Paris, Picard, 1910-19 (...)
  • 138 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 397.

58Claude Langlois a dressé le tragique bilan du clergé constitutionnel du Morbihan136. Dans ce département – l’un des épicentres de la Chouannerie bretonne137, qui compte 11 % de jureurs138 –, quinze prêtres (soit 24 % des 66 curés et vicaires assermentés) sont assassinés. Jules Le Falher en donne la liste à regret dans ses Acta Martyrum du diocèse de Vannes (24 prêtres guillotinés, 21 assassinés et 18 déportés parmi le clergé réfractaire) : « Je ne parle pas des constitutionnels assassinés », écrit-il ; « je ne m’occupe que des catholiques. Les autres se sont mis volontairement hors la hiérarchie, c’est-à-dire hors l’Église, ils ne sont plus des nôtres ». Il a eu, malgré tout, la probité et le rare mérite, en ce temps de violentes polémiques, de conserver leurs noms, leurs lieux de naissance et leurs paroisses :

  • 139 Jules Le Falher, Acta Martyrum. Les Prêtres du Morbihan victimes de la Révolution (1792-1802), Vann (...)

Pas un constitutionnel ne périt sur l’échafaud ou en déportation. 15 furent assassinés : Talbouët, André, de Saint-Patern, curé de Camors, Le Guillou, Jean-Marie, de Guidel, curé de Caudan ; Cohéléach, Guillaume, d’Auray, curé de Kervignac ; Le Lan, Jean, de Landévant, curé de Landévant ; Allanic, Jean, de Bubry, curé de Lignol ; Jolivet, François, de Larré, carme de Vannes, vicaire de Lignol ; Polotec, Jean, curé de Ploërdut ; Le Goff, François, de Silfiac, curé de Saint-Tugdual ; Deloynes Charles, génovéfain de Saint-Jean-des-Prés, curé de Brignac ; Jamet, Étienne, capucin, curé de Guiscriff ; Le Corre, Pierre, vicaire de Langonnet ; Lévêque, Jean-Guillaume, de Missillac (Loire-Inférieure), recteur de Férel ; Chedaleux, Thomas, de Saint-Martin, curé de Peillac ; Van der Gracht, génovéfain de Saint-Jean-des-Prés, curé de Mohon ; Cassac, Jean, de Lominé, curé de Moustoir-Remungol.139

  • 140 Claude Langlois, Un diocèse breton au début du xixe siècle, op. cit., p. 48 et carte, p. 49.
  • 141 Jules Le Falher, Le Royaume de Bignan, 1789-1805, Hennebont, Normand, 1913 ; Jean Guillot, Pierre G (...)
  • 142 Claude Langlois, Un diocèse breton au début du xixe siècle, op. cit., p. 50.

59En esquissant la sociologie du clergé patriote du Morbihan, Claude Langlois note que « celui-ci donne l’impression d’être formé pour une bonne part du bas-clergé, recteurs de petites paroisses » principalement issus du pays bretonnant140. La liste établie par Jules Le Falher confirme amplement son analyse : lieux d’origine et patronymes des victimes privilégient la partie bretonnante (occidentale) du département ; quant aux paroisses desservies par les prêtres assassinés, cinq (Guiscriff, Langonnet, Lignol, Ploërdut, Saint-Tugdual) appartiennent au district du Faouët et quatre (Camors, Caudan, Kervignac, Landévant) au district d’Hennebont ; Férel jouxte la limite de la Loire Inférieure et Peillac n’en n’est pas éloigné ; quant à Brignac, Mohon et Moustoir-Remungol (aujourd’hui Evellys), dans le district de Ploërmel, ils relèvent peu ou prou du royaume de Bignan du chef chouan Pierre Guillemot141. La Chouannerie, remarque Claude Langlois, arrache par la terreur les campagnes au clergé jureur qui doit se réfugier dans les villes, où il est bientôt abandonné par l’État. Une violence extrême se déchaîne contre les mauvais prêtres : « « S’ils parviennent à s’échapper, l’exaspération se porte sur leurs proches : Le Gallic, curé constitutionnel de Languidic, a sa famille massacrée. Jouan, prêtre marié, voit assassiner sa femme enceinte »142.

  • 143 Léon de La Sicotière, Louis de Frotté et les insurrections normandes, 1793-1832, Paris, Plon-Nourri (...)
  • 144 Pierre Flament, « Deux mille prêtres dans la tourmente », Annales de Normandie, XXXIX, 1989/2, p. 1 (...)

60En ce qui concerne la Normandie, le probe et rigoureux travail de recherche conduit par Léon de La Sicotière143, fondé principalement sur les archives du ministère de la Guerre, mentionne 27 meurtres de prêtres constitutionnels dans les pays insurgés (Orne, Manche et Calvados, pour l’essentiel) – dont 25 massacrés par les Chouans et deux par les Bleus, pour s’être rétractés : chiffre très inférieur au nombre des victimes parmi le clergé réfractaire – pour le seul département de l’Orne, Pierre Flament relève 53 victimes parmi les prêtres insermentés, 12 seulement parmi les prêtres assermentés144 –, mais nullement insignifiant.

  • 145 Léon de La Sicotière, Les insurrections normandes, op. cit., tome I, p. 385.
  • 146 Ibid.., tome I, p. 437.

61Certains prêtres patriotes périssent sous les armes. Ainsi de M. Delaville, curé de Courménil (Orne) au sud du pays d’Auge, fusillé le 11 janvier 1796 : « Une bande d’une cinquantaine d’individus battait les cantons de Gacé, Chambois, Trun, Vimoutiers, Exmes. Elle rencontre, armé, Delaville, curé constitutionnel de Courménil, qui s’occupait de l’armement des gardes nationales. Il est emmené dans un bois, déshabillé, attaché à deux arbres et criblé à bout portant de coups de feu qui mettent son corps en lambeaux »145. Au combat de Bellefontaine (17 mars 1796) à Bernières-le-Patry (Calvados) près de Vire, l’un des premiers tués est « le curé constitutionnel Cuiret, qui commandait les Bleus »146.

  • 147 Mémoires de Michelot Moulin sur la Chouannerie normande, introduction de L. Rioult de Neuville, pub (...)
  • 148 Ibid., p. 97 et note.
  • 149 Léon de La Sicotière, Les insurrections normandes, op. cit., tome I, p. 507-508.

62Dans ses Mémoires, l’ancien chef chouan Michelot Moulin, qui relate également l’événement147, va même jusqu’à supposer l’existence d’une armée noire, composée de prêtres constitutionnels : « on lui avait donné le nom d’armée noire par la raison que les deux tiers étaient composés de prêtres apostats et intrus, chassés de leurs paroisses à cause de leur mauvaise conduite et leurs excès de toute espèce. Ces intrus étaient pour la plupart au nombre des déclassés et aventuriers de la pire espèce dont Claude Fauchet, évêque constitutionnel du Calvados, avait rempli les rangs de son clergé. Ils formaient une bande de 250 hommes. L’impunité l’avait enhardie au point qu’elle faisait tous les jours des incursions dans les paroisses de Vire, et qu’elle marquait son passage par des pillages, des viols et des assassinats »148. La Sicotière a fait justice de cette légende, figure fantasmée de la violence des affrontements religieux : « Son existence nous a toujours paru plus que douteuse », écrit-il. « C’est une de ces crédulités dont se nourrit l’esprit de parti. […] S’il y a un point absolument certain, c’est que très peu de prêtres dans la Vendée ou la chouannerie portèrent les armes. Quelques-uns parmi les prêtres constitutionnels purent se mêler aux colonnes mobiles ; mais leur nombre fut aussi très restreint, et jamais ils ne s’organisèrent en corps militaires spéciaux ; ils n’avaient ni le nombre ni l’énergie nécessaire »149.

  • 150 Ibid., tome I, p. 442-443.
  • 151 Ibid., tome I, p. 498-499.

63D’autres prêtres sont assassinés sur le soupçon d’être des informateurs au service des Bleus, ou Patauds. M. Hébert, ancien curé d’Acqueville (Manche), près de Falaise, est ainsi saisi par les Chouans le 28 avril 1796 dans l’église du Tronquay (Calvados), dans le Bessin : « ils [le] trouvèrent dans l’église, encore revêtu de ses habits sacerdotaux, dit-on, et venant de dire la messe. […] L’opinion publique lui reprochait, à tort ou à raison, d’avoir dénoncé naguère un émigré rentré clandestinement qui, sur cette déclaration, avait été mis à mort. Ce malheureux fut entraîné dans le cimetière et odieusement fusillé »150. Denis Fauvel, curé de La Sauvagère (Orne) dans le district de Domfront, est enlevé, « tête et pieds nus », dans la nuit du 24 au 25 avril 1796 et fusillé au carrefour des Cerisiers, sur le chemin de la Ferté-Macé à Domfront : « Bavard et craintif, il était suspect aux deux partis, et c’est comme espion beaucoup plus que comme prêtre assermenté qu’il fut enlevé et fusillé par les chouans. […] Sa mémoire y est restée en une certaine vénération, et la croix qui s’élève sur sa tombe est encore festonnée de guirlandes, de chapelets, et entourée de petites croix en coudrier »151. Au lendemain du débarquement de Frotté à Mauvaines, près de Bayeux, le 23 septembre 1799, tel est encore le sort de deux curés patriotes du district de Coutances : celui de Cérences, « signalé comme un dangereux dénonciateur, enlevé par les royalistes, périt, à quelques jours de là, dans une de leurs rencontres avec les républicains » ; celui de Montpinchon, enlevé, libéré, est à nouveau compromis dans cette culture de la clandestinité et du secret propre aux guerres civiles :

  • 152 Ibid., tome II, p. 322 et note 2.

Le curé constitutionnel de Montpinchon [eut] une triste fin. Avant d’être relâché, il avait entendu les instructions données aux chouans pour leur couchée. Pendant la nuit, Saint-Paul, qui s’était égaré avec quelques hommes de sa division, vint frapper à sa porte pout se renseigner sur la marche de son général. Le curé le prend pour un faux chouan faisant partie de l’avant-garde républicaine, lui raconte complaisamment ses griefs contre les chouans et lui offre de le conduire dans leurs quartiers pour les surprendre. Saint-Paul le suit sans se faire connaître. Arrivé aux avant-postes, le curé veut s’esquiver ; mais on l’arrête. Il périt le lendemain, avec son confrère de Cérences, à l’affaire du Lorei.152

  • 153 Ibid., tome I, p. 335 (Chasles, Langlois), 423 (Morand), 470 (Desdouits, Philippe), 497-498 (Maine, (...)

64Il faut enfin faire droit à la longue et monotone litanie des assassinats ciblés et prémédités. Durant la première guerre de chouannerie (1795-1796), le bilan est lourd : en septembre 1795, dans le district de Domfront (Orne), M. Chasles et M. Langlois, égorgés ; le 24 février 1796, M. Morand, curé de Saint-Germain de Livet (district de Lisieux), « homme tout à fait inoffensif », assassiné pendant la nuit ; dans la nuit du 10 au 11 mai 1796 à Lougé-sur-Maire (Orne), dans le district d’Argentan, M. Desdouits, curé « presque aveugle », « tué d’un coup de hache qui lui fendit la tête », ainsi que son vicaire, M. Philippe, « d’un coup de revers de hache aussi sur la tête » ; le 15 mai 1796, aux portes d’Alençon, M. Maine, curé de La Ferrière-Bochard, et son confrère M. Duval, curé de l’Île-sur-Sarthe (Saint-Cénéri-le-Girei), tous deux fusillés après la messe de la Pentecôte, célébrée par le second153.

  • 154 Ibid., tome II, p. 286. Ce meurtre est également évoqué, par Charles-Louis Chassin, Études document (...)
  • 155 Léon de La Sicotière, « Le Clergé », in Les Insurrections normandes, op. cit., tome II, p. 600-604  (...)

65Lors de la reprise des hostilités (1799-1800), M. Bazin, curé de Condeau (Orne), dans le district de Bellême, âgé de 77 ans, acquéreur de biens nationaux et président de l’administration cantonale, voit son village est investi par un groupe de 52 chouans qui « lui font prendre sa ceinture et son chapeau d’uniforme et l’emmènent avec Roussel, fabricant de rubans, réfugié de la Vendée. […] Bazin tombe blessé en criant : « Vive la République ! » Une nouvelle décharge l’achève. Les corps des deux victimes restèrent longtemps sur la voie publique, sans qu’on osât leur donner la sépulture.154 » À ces cas solidement documentés, La Sicotière ajoute encore treize noms de victimes constitutionnelles, glanés au fil des archives militaires155. La Chouannerie est le tombeau de la constitution civile du clergé.

  • 156 René-Pierre Nepveu de la Manouillère, Mémoires, publiés et annotés par Gustave Esnault, Le Mans, Pe (...)
  • 157 Michel Comtet, « Le meurtre au hameau de Pérouses, commune de Foissiat, de Jean-Louis Maistre, prêt (...)
  • 158 Ernest Cuaz, Notice historique sur les vrais compagnons de Jéhu (Bourg, thermidor an VIII), Bourg, (...)

66On relève encore, aux marges de l’Ouest insurgé, le meurtre, au soir du 21 brumaire an VI (11 novembre 1797) dans la ville du Mans, d’Antoine Mauguin, ancien curé patriote de Notre-Dame de la Couture, devenu commissaire du pouvoir exécutif du département de la Sarthe156 ; et dans la Bresse déchirée entre insermentés et assermentés et parcourue par les Compagnies de Jéhu, l’assassinat de Jean-Louis Maistre, curé constitutionnel de Cuiseaux (Saône-et-Loire), le 27 germinal an VII (16 avril 1799) par un journalier de Foissiat (Ain) : altercation entre deux individus ou meurtre de jureur ? L’affaire manque de clarté. Toujours est-il que le meurtrier est condamné par le tribunal criminel de l’Ain à dix ans de gêne et à l’exposition publique157. Mais il n’apparaît guère que le brigandage plus ou moins royaliste en région lyonnaise sous le Directoire ait eu la moindre dimension religieuse158. Ici ou là, sans doute, dans les petites Vendées, d’autres cas peuvent se révéler aux chercheurs attentifs.

  • 159 Siméon Bonnel, Les trois cent trente-deux victimes de la commission populaire à Orange en 1794, Ora (...)
  • 160 Pierre Pourcher, L’Épiscopat français et constitutionnel et le clergé de la Lozère durant la Révolu (...)
  • 161 François-Xavier Redon, Les 32 Religieuses guillotinées à Orange au mois de juillet 1794, Avignon, A (...)
  • 162 Renée Fuoc, La Réaction thermidorienne à Lyon, 1795, Lyon, IAC, 1957 ; Bruno Benoît, « Chasser le m (...)
  • 163 Paul Gaffarel, « Les Massacres royalistes dans le département des Bouches-du-Rhône aux premiers moi (...)
  • 164 Valérie Sottocasa, Les Brigands et la Révolution. Violences politiques et criminalité dans le Midi, (...)
  • 165 Joseph-Marie Maurel, Le Brigandage dans les Basses-Alpes, particulièrement depuis l’an VI jusqu’à l (...)
  • 166 Jean-Michel Bacquer, « Le "brigandage" dans les Alpes-Maritimes en l’an IX et en l’an X (d’après le (...)

67Qu’en est-il enfin du Midi, qui constitue à partir de l’an III une terre d’élection de la Contre-Révolution ? La Provence et le Languedoc, de part et d’autre du Rhône, ne sont en rien assimilables, sur le plan religieux, à la France de l’Ouest. Si la Terreur s’y est déployée avec violence, particulièrement au lendemain de la crise « fédéraliste »159, et si les victimes ecclésiastiques y sont nombreuses parmi les prêtres insermentés et assermentés160 comme parmi les religieuses161, la sanglante réaction « thermidorienne » qui se produit en l’an III n’atteint jamais les proportions de la guerre civile de l’Ouest de la France. Tout comme à Lyon162, elle se traduit essentiellement par des massacres dans les prisons, à Aix-en-Provence, à Tarascon, au Fort-Saint-Jean de Marseille163. Quant au brigandage endémique qui se développe sur l’ensemble du Midi164, en Provence165 et dans l’ancien comté de Nice166, il ne revêt à aucun moment l’extension géographique ni l’organisation de la Chouannerie.

  • 167 Marc Bonnefoy, Les Suites du Neuf Thermidor. Terreurs blanches, 1795-1815, Paris, Fischbacher, 1892 (...)
  • 168 Mémoire historique sur la réaction royale et sur les massacres du Midi, par le citoyen Fréron, Pari (...)

68Surtout, ni les massacres de l’an III, ni le banditisme ne visent spécifiquement le clergé patriote. En dépit de quelques rappels insistants, mais peu documentés – l’épisode du curé constitutionnel de Barbentane (Bouches-du-Rhône) jeté, pieds et poing liés, dans les flots de la Durance167 –, rares sont les références à des meurtres de prêtres jureurs. Le célèbre rapport du représentant en mission Stanislas Fréron, qui dénonce « une Saint-Barthélemy générale, dirigée contre les républicains en masse, tous indistinctement voués aux poignards, sous le nom de terroristes », n’en fait nullement état168. Ils n’apparaissent pas non plus dans les assassinats perpétrés dans les villes et les villages ou lors des massacres des prisons : ce sont les anciens « terroristes » de l’an II, les représentants des autorités républicaines, les soldats de la République ou les simples sans-culottes qui en sont, par centaines, les victimes.

  • 169 Hommes de Dieu et Révolution en Provence, sous la direction de Bernard Cousin, publié par le Centre (...)
  • 170 Sur la singularité du Midi révolutionnaire, Colin Lucas, « The Problem of the Midi in the French Re (...)

69La raison fondamentale d’un comportement si différent des régions contre-révolutionnaires de l’Ouest tient peut-être – on en formule ici l’hypothèse, qui demande à être vérifiée – à ce que, dans le Midi, la majorité des prêtres constitutionnels insérés dans l’administration républicaine, qui pourraient faire l’objet de vengeances, ont été éliminés lors de la crise du « fédéralisme » dans l’été 1793 et dans les mois suivants : Bernard Cousin évoque ainsi (sans en dresser la liste, qui doit comprendre pour l’essentiel des prêtres patriotes), le chiffre de vingt-cinq prêtres condamnés pour « fédéralisme » par le Tribunal criminel des Bouches-du-Rhône169. Ils n’ont donc pas pu servir de boucs émissaires et de cibles désignées pour les violences ultérieures. Le Midi contre-révolutionnaire ne semble pas, jusqu’à plus ample informé, avoir été le cimetière de l’Église constitutionnelle170.

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  • 171 Bernard Cousin, Monique Cubells, René Moulinas, La Pique et la Croix. Histoire religieuse de la Rév (...)
  • 172 Andrea Riccardi, « Les persécutions des chrétiens en URSS après la révolution de 1917 », site du Dé (...)
  • 173 Antonio Montero, Historia de la persecución religiosa en España, 1936-1939, Madrid, Editorial catól (...)

70Au terme de ce parcours laborieux, fragmentaire, éclaté, on ne saurait proposer que des conclusions provisoires. La première est d’ordre quantitatif. On peut estimer que, toutes catégories confondues (victimes de la Terreur légale ; victimes de morts violentes, de massacres ou d’assassinats ; victimes d’emprisonnement), un peu moins de 3000 prêtres, religieux et religieuses ont péri en France en raison de leur foi entre 1792 et l’an VIII – rappelons, pour que ce chiffre fasse sens, que le clergé français compte en 1789 environ 170.000 membres, dont 60.000 curés et vicaires, 56.000 religieuses, 26.000 religieux, 10.000 chanoines et 18.000 bénéficiaires ou prêtres habitués171 ; et que, à titre de comparaison, c’est sans doute la majeure partie du clergé orthodoxe (118.000 prêtres, 73.000 moniales et 21.000 moines) demeuré en Russie qui a péri après 1917172 ; et 4200 prêtres, 2400 religieux et 300 religieuses, soit 13 % du clergé séculier, 23 % des religieux et 3 à 4 % des religieuses, qui ont été tués durant la guerre civile espagnole entre 1936 et 1939173. La Révolution a été, à l’égard du clergé français, à la fois moins sanglante (si l’on ose dire) et sélective. Or, parmi ces quelques 3000 victimes ecclésiastiques, les prêtres assermentés fournissent entre le quart et le tiers des effectifs : soient 400 à 600 prêtres rétractés ou dont les restrictions ont été refusées ; 100 à 150 prêtres non rétractés condamnés à mort en l’an II en dépit du serment qu’ils avaient prêté ; et une centaine de prêtres morts au combat, massacrés ou assassinés en raison du serment qu’ils avaient prêté, pour l’essentiel dans les guerres civiles de l’Ouest.

71Une seconde considération est d’ordre politique. Dans son entreprise de régénération de la nation, l’Assemblée constituante a fait le pari d’intégrer à son projet, en les transformant en profondeur, deux institutions plus que millénaires : la monarchie, par la constitution de 1791 ; et l’Église gallicane, par la constitution civile du clergé. La tentative de fuite du roi à Varennes a scellé le sort de la monarchie : Louis XVI s’est révélé impropre à assumer les fonctions qui lui ont été dévolues ; et la France est entrée en République. Mais tel n’est pas le cas de l’Église constitutionnelle qui a œuvré, dans la mesure de ses capacités, à la réussite du nouveau contrat social. C’est le gouvernement révolutionnaire qui, à l’automne 1793, a pris de son propre chef la décision et le risque, lourds de conséquences politiques, sociales et culturelles, de rompre le pacte conclu en 1790, d’abandonner les 30.000 prêtres qui s’y sont ralliés et de mettre en œuvre une politique de déchristianisation. Une étude attentive de l’histoire de l’Église constitutionnelle est sans nul doute l’une des voies d’accès privilégiées qui permettent de saisir les logiques de ce retournement politique capital.

  • 174 Claude Fauchet, Second discours sur la liberté française, prononcé le 31 août 1789 dans l’église pa (...)
  • 175 Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat social [1762], livre IV, chapitre VIII, « De la religion civile »

72Une ultime remarque intéresse l’histoire religieuse de la France. L’Église constitutionnelle avait formé et poursuivi le dessein de concilier le christianisme avec la Révolution, l’Évangile avec la loi civile, l’Église régénérée avec l’État révolutionné. Dans l’enthousiasme de 1789, nombreux sont les prêtres qui se sont convaincus, avec Claude Fauchet, que « vingt-quatre millions de Français sont des frères, des citoyens, des hommes sous un Roi qui sera toujours bon, et sous des lois qui sont nécessairement justes », et avec Henri Grégoire, que « la religion que nous avons le bonheur de professer embrasse dans les liens de la charité tous les membres de la grande famille humaine, […] consacre et les liens qui nous attachent à la terre hospitalière, et les devoirs que nous acquittons envers l’État, où nous vivons à l’ombre des lois tutélaires »174. Ce projet de « Révolution française catholique » (Rita Hermon-Belot), accordait beaucoup de place aux lois et à l’État dans l’ordre spirituel ; or cette illusion d’harmonie religieuse et de concorde civile a été balayée par la République à l’automne 1793 : il convient d’en prendre acte, sauf à songer, avec Robespierre et Rousseau, à « une profession de foi purement civile dont il appartient au souverain de fixer les articles »175, c’est-à-dire à la tyrannie des consciences. C’est au contraire à la pluralité des croyances religieuses et des convictions philosophiques des Français et des Françaises ainsi qu’à l’hostilité de l’État révolutionnaire que s’est heurté ce rêve aussitôt brisé ; et, parce que la République n’était pas encore capable de penser et de respecter la liberté des consciences et des cultes, le sang de 3000 hommes et femmes a coulé. L’échec de l’Église constitutionnelle conduit dès lors à saisir pourquoi et comment, dans le régime de modernité juridique, social et politique qui s’ouvre avec la Révolution française, c’est-à-dire une société de citoyens libres et égaux, c’est vers l’intransigeance que se tourne au xixe siècle le catholicisme français afin de trouver sa propre voie dans la fidélité à la foi chrétienne.

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Notes

1 Cf. l’enquête entreprise par Stéphane Baciocchi et l’auteur de cet article au Centre d’anthropologie religieuse européenne de l’EHESS : Stéphane Baciocchi, Philippe Boutry, « Les ‘victimes’ ecclésiastiques de la Terreur », in Les Politiques de la Terreur, 1793-1794. Actes du colloque international de Rouen, 11-13 janvier 2007, organisés par l’université de Rouen et la Société d’études robespierristes sous la direction de Michel Biard, Presses universitaires de Rennes, et Paris, Société des études robespierristes, 2008, p. 448-460.

2 Augustin Gazier, « Henri Grégoire, évêque constitutionnel du Loir-et-Cher », Revue historique, IV, 1879/1, p. 34-122 (citation p. 122).

3 Charles Jarrin, « Bourg et Belley pendant la Révolution. Royer évêque de l’Ain », Annales de la Société d’émulation (Agriculture, Lettres et Arts) de l’Ain, XIII, 1880, p. 350-363 (citations, p. 351, p. 359).

4 L’intelligence de la condamnation de la constitution civile par le Saint-Siège a été renouvelée, à partir des sources romaines, par Gérard Pelletier, Rome et la Révolution française. La théologie et la politique du Saint-Siège devant la Révolution française (1789-1799), Rome, Collection de l’École française de Rome, 2004.

5 Nicolas Baudeau, Analyse de l’ouvrage du pape Benoît XIV sur les béatifications et canonisations, Paris, chez Lottin le Jeune, 1761, p. 210. Le traité De servorum Dei beatificatione et beatorum canonizatione, du futur pape Benoît XIV (Prospero Lambertini) est publié à Bologne, en quatre volumes, de 1734 à 1738 ; la béatification par voie de martyre occupe les chapitres XI et XII du livre III.

6 Mémoire de la S. Congrégation des Rites sur la cause de béatification de Louis XVI (septembre 1820), in Philippe Boutry, « Le Roi martyr. La cause de Louis XVI devant la Cour de Rome (1820) », Revue d’histoire de l’Église de France, LXXVI, 1990/1, p. 68.

7 Dès 1793, l’abbé Barruel insère une liste des victimes ecclésiastiques des massacres de septembre en annexe de son Histoire du clergé pendant la Révolution française, édité à Londres et à Bruxelles (p. 365-372) ; en 1795, l’abbé d’Hesmivy d’Auribeau publie à Rome ses Mémoires pour servir à l’histoire de la persécution française, recueillis par les ordres de notre Très-Saint-Père le Pape Pie VI, Rome, Perego Salvioni, 1795, deux volumes.

8 Philippe Boutry, « Hagiographie, histoire et Révolution française. Pie XI et la béatification des martyrs de septembre 1792 (17 octobre 1926) », in Achille Ratti, pape Pie XI. Actes du colloque de Rome (15-18 mars 1989), Rome, Ecole française de Rome, 1996, p. 305-355.

9 Guy-Toussaint-Julien Caron, Les Confesseurs de la foi dans l’Église gallicane à la fin du XVIIIe siècle, ouvrage rédigé sur des mémoires authentiques, Paris, Leclère, 1820, 4 volumes ; Aimé Guillon [de Montléon], Les Martyrs de la foi pendant la Révolution française, ou Martyrologe des pontifes, prêtres, religieux, religieuses, laïcs de l’un et l’autre sexe, qui périrent alors pour leur foi, Paris, Mathiot, 1821, 4 volumes.

10 L’Ami de la Religion et du Roi du samedi 3 février 1821, n° 677, p. 370 ; je remercie vivement Stéphane Baciocchi pour m’avoir communiqué cette citation.

11 Louis-Marie Prudhomme, Histoire générale des crimes commis durant la Révolution française, sous les quatre législatures et particulièrement sous le règne de la Convention nationale, Paris, Prudhomme, an V, six volumes. Sur son itinéraire oscillant, Joseph Zizek, « Plume de fer : Louis-Marie Prudhomme writes the French Revolution », French Historical Studies, XXVI, 2003, p. 619-660.

12 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, avec le journal de ses actes, Paris, Hachette, 1880-1882, six volumes.

13 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs de la Révolution en Lyonnais, Forez et Beaujolais, spécialement sous le Régime de la Terreur (1793-1794), accompagné de nombreuses notices biographiques..., Saint-Étienne, Thomas, 1911, p. 212. Sur Jean-Marie Grumet (1743-1794), cf. Charles Monternot, L’Église de Lyon pendant la Révolution. Yves-Alexandre de Marbeuf, ministre de la Feuille des bénéfices, archevêque de Lyon (1734-1799), Lyon, Lardanchet, 1911, p. 258-264.

14 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs, op. cit., p. 337

15 Pierre Bliard, Jureurs et insermentés (1790-1794), d’après les dossiers du Tribunal révolutionnaire, Paris, Émile-Paul, 1910.

16 En dernier lieu, Rita Hermon-Belot, L’Abbé Grégoire, la politique et la vérité, Paris, Le Seuil, 2000 ; Jean Dubray, La Pensée de l’abbé Grégoire. Despotisme et liberté, Oxford, Voltaire Foundation, 2008 ; Caroline Chopelin-Blanc, Paul Chopelin, L’Obscurantisme et les Lumières. Itinéraire de l’abbé Grégoire, évêque révolutionnaire, Paris, Vendémiaire, 2013.

17 Henri Grégoire, Annales de la Religion, tome I, n° 2, 9 mai 1795 (20 floréal an III), p. 34-35. Je dois à la générosité de Dominique Julia la connaissance de ce texte ; qu’il en soit vivement remercié.

18 Jean-René Suratteau, « Le Directoire avait-il une politique religieuse ? » dans Annales historiques de la Révolution française, n° 283, 1990, p. 79-92 (citation p. 80).

19 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église. De la Raison à l’Être suprême, op. cit., « L’abdication des prêtres », p. 101-131 ; « Les prêtres mariés », p. 133-154.

20 Claude Langlois, Timothy Tackett, Michel Vovelle ; Serge Bonin, Madeleine Bonin, Atlas de la Révolution française. 9 - Religion, Paris, Éditions de l’EHESS, 1996.

21 Toutefois : Philippe Bourdin, Le Noir et le Rouge. Itinéraire social, culturel et politique d’un prêtre patriote (1736-1799), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, 2000 ; Rodney J. Dean, L’Abbé Grégoire et l’Église constitutionnelle après la Terreur, 1794-1797, Paris, Picard, 2008 ; et L’Église constitutionnelle, Napoléon et le concordat de 1801, Paris, Picard, 2004 ; Jeanne-Marie Tuffery-Andrieu, Le Concile national en 1797 et 1801 à Paris. L’abbé Grégoire et l’utopie d’une Église républicaine, Berne, Peter Lang, 2007 ; Caroline Chopelin-Blanc, De l’Apologétique à l’Église constitutionnelle : Adrien Lamourette, 1742-1794, Paris, Champion, 2009 ; Gouverner une Église en Révolution. Histoires et mémoires de l’épiscopat constitutionnel, sous la direction de Paul Chopelin, Lyon, LAHRA, 2017 ; Correspondance de l’abbé Grégoire avec son clergé du Loir-et-Cher, édition critique par Jean Dubray, Paris, Classiques Garnier, 2017-2020, quatre volumes ; Annette Chaman-Adisho, Patriot and Priest. Jean-Baptiste Volfius and the Constitutional Church in Côte-d’Or, Montréal – Kingston, McGill – Queens Press, 2019.

22 Claude Langlois, « La déchirure », postface à Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, traduction française, Paris, Le Cerf, 1986, p. 319-337 (citation p. 330).

23 Sur les déchirements internes au clergé paroissial, Jean Boutier, « Le clergé face aux serments révolutionnaires à travers quelques correspondances ecclésiastiques corréziennes (1790 – an II) », Bulletin de la Société des lettres, sciences et arts de la Corrèze, XCII, 1989, p. 61-92.

24 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 85-90.

25 Gérard Pelletier, Rome et la Révolution française, op. cit.

26 Jeanne-Marie Tuffery-Andrieu, « Le mariage selon la conception de l’Église constitutionnelle française », in Mariage, contrat, alliance, sacrement, Revue de droit canonique, LIII, 2003/1, p. 77-106 ; Ségolène de Dainville-Barbiche, « La législation religieuse de la Convention en 1793. Anticatholicisme et économie de guerre », in 1793. La patrie en danger. Actes du 2ème Colloque international, samedi 23 et dimanche 24 octobre 1993, organisé par les Archives départementales de l’Oise, Compiègne, Conseil général de l’Oise, 1996, p. 27-38 ; Ruth Graham, « Le mariage des ecclésiastiques députés à la Convention », Annales historiques de la Révolution française, LVII, 262, 1985, p. 480-499.

27 Michel Vovelle, Religion et Révolution. La déchristianisation de l’an II dans le Sud-Est, Paris, Hachette, 1976 ; et 1793. La Révolution contre l’Église. De la Raison à l’Être suprême, op. cit.; Louis Pérouas, Paul D’Hollander, La Révolution française, une rupture dans le christianisme ? Le cas du Limousin, 1775-1822, Treignac, Les Monédières, 1988 ; « La déchristianisation », in Histoire de la France religieuse, sous la direction de Jacques Le Goff et René Rémond. Tome III. Du Roi Très Chrétien à la laïcité républicaine (xviiie-xixe siècles), sous la direction de Philippe Joutard, Paris, Le Seuil, 1991, p. 179-329, avec des contributions de Dominique Julia, Claude Langlois et Michel Vovelle ; ainsi que les réflexions de Serge Bianchi, « Essai d’interprétation de la déchristianisation de l’an II », Annales historiques de la Révolution française, L, 1978, p. 405-432 ; et de Claude Langlois, « L’inqualifiable et l’inévitable : la déchristianisation révolutionnaire », Archives de sciences sociales des religions, XXXIII, 1988, p. 25-42.

28 Edme Champion, La Séparation de l’Église et de l’État en 1794. Introduction à l’histoire religieuse de la Révolution française, Paris, Armand Colin, 1903 ; Bernard Plongeron, « La première séparation de l’Église et de l’État sous la Révolution a-t-elle eu lieu ? », Revue d’histoire de l’Église de France, XCI, 2005, p. 239-263.

29 Michel Biard, Missionnaires de la République. Les représentants du peuple en mission, 1793-1795, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2002.

30 Louis Alloing, Le diocèse de Belley. Histoire religieuse des pays de l’Ain, Belley, Chaduc, 1938, p. 466-467. Le texte est retranscrit par Paul Pisani, Répertoire biographique de l’épiscopat constitutionnel, Paris, Picard, 1907, p. 282-283, note 1, et par Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église. De la Raison à l’Être suprême, op. cit., p. 118.

31 Outre les travaux déjà cités, Henri Grégoire, Histoire du mariage des prêtres, particulièrement depuis 1789, Paris, Baudouin, 1826 ; Marcel Reinhard, Les prêtres abdicataires pendant la Révolution française, Paris, Bibliothèque nationale, extrait des Actes du 89° Congrès national des sociétés savantes (Lyon, 1964), 1965 ; Claude Langlois, T.J.A. Le Goff, « Les vaincus de la Révolution. Jalons pour une sociologie des prêtres mariés », in Voies nouvelles pour l’histoire de la Révolution française. Actes du colloque Albert Mathiez – Georges Lefebvre, 30 novembre – 1er décembre 1978, Paris, Bibliothèque nationale, 1978, p. 281-312 ; Paul Chopelin, « Le débat sur le mariage des prêtres dans le diocèse de Rhône-et-Loire au début de la Révolution (1789-1792) », in Chrétiens et sociétés, n° 10, 2003, p. 69-94 ; Xavier Maréchaux, Les Prêtres mariés sous la Révolution française, thèse de doctorat d’histoire, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 1995, publiée sous le titre de Noces révolutionnaires. Le mariage des prêtres en France, 1789-1815, Paris, Vendémiaire, 2017 ; enfin, Jeannine Charon-Bordas, Inventaire des archives de la légation en France du cardinal Caprara (1801-1808), Paris, Archives nationales, 1975, et La Légation en France du cardinal Caprara, 1801-1808. Répertoire des demandes de réconciliation avec l’Église, Paris, Archives nationales, 1979.

32 361 prêtres constitutionnels de l’Ain signent ce formulaire (Jérôme Croyet, La Mission du représentant du peuple Albitte dans le département de l’Ain, mémoire de maîtrise d’histoire, Université Lyon 2, 1996, note 732).

33 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église, op. cit., p. 120.

34 Annales de la Religion, n° 1, 2 mai 1795 (13 floréal an II), p. 22.

35 François-Yves Besnard, Souvenirs d’un nonagénaire, publié sur le manuscrit autographe par Célestin Port, Paris, Champion, 1880, deux volumes, tome II, p. 101. Ce texte très riche a été récemment réédité par les soins de Martine Taroni : François-Yves Bernard. Un prêtre en révolution. Souvenirs d’un nonagénaire, Rennes, Presses universitaires de Rennes, « Mémoire commune », 2011.

36 Michel Vovelle, 1793. La Révolution contre l’Église, op. cit., p. 119.

37 Paul Pisani, Répertoire biographique de l’épiscopat constitutionnel, Paris, Picard, 1907.

38 Archives parlementaires de 1787 à 1860. Première série (1787-1799), Paris, Imprimerie Nationale, tome XXIII (1886), p. 491 (24 février 1791). « MM. Expilly, évêque du département du Finistère, et Marolles, évêque de département de l’Aisne, sacrés ce matin dans l’ancienne chapelle de l’Oratoire par MM. l’ancien évêque d’Autun et les évêques de Lydda et de Babylone, entrent dans la salle, revêtus des marques de leur dignité ecclésiastique. Ils sont accueillis par de nombreux applaudissements. »

39 Sur Étienne-Charles de Loménie de Brienne (1727-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 82-84 ; Joseph Perrin, Le Cardinal Loménie de Brienne, archevêque de Sens. Ses dernières années, épisodes de la Révolution, Sens, Duchemin, 1896 ; Gentil Cormary, Loménie de Brienne à Toulouse, 1763-1788, Albi, Ginestet, et Castres, Librairie Saint-Jean, 1935 ; Pierre Chevalier, Loménie de Brienne et l’ordre monastique, 1766-1789, Paris, Vrin, 1959-1960, deux volumes ; Jean Égret, La Pré-Révolution française (1787-1788), Paris, PUF, 1962 ; Michel Péronnet, « L’Assemblée du clergé de France tenue en 1788 », Annales historiques de la Révolution française, n° 273, 1988, p. 227-246 ; Guy Thuillier, À l’origine de l’administration sociale. Le rapport sur la mendicité de Loménie de Brienne en 1775, Paris, Association pour l’histoire de la Sécurité sociale, 2003 ; Alain Blondy, « La Commission des Réguliers (1766-1784). Un joséphisme à la française ? », in Libertas Ecclesiæ. Esquisse d’une généalogie (1650-1800), sous la direction de Stéphane-Marie Morgain, Paris et Les Plans-sur-Bex (Suisse), Parole et Silence, 2010, p. 281-295 ; Jean-Claude Jaffé, Loménie de Brienne, ministre du Culte et des Finances sous Louis XVI. Histoire, Noisy-le-Grand, Spinelle, 2022 ; et, plus généralement, la synthèse magistrale de Dominique Julia, « L’administration épiscopale au xviiie siècle : de l’inspection des âmes au service public », in Histoire de la France religieuse III – Du Roi Très Chrétien à la laïcité républicaine (xviiie-xixe siècles), sous la direction de Philippe Joutard, Paris, Le Seuil, 1991, p. 369-388.

40 Sur Martial de Loménie de Brienne (1763-1794), cf. encore l’opuscule de Jean Montier, Martial de Brienne, dernier abbé de Jumièges, et son oncle Loménie de Brienne, ministre de Louis XVI, Fécamp, Durand, 1967.

41 Sur Jean-Baptiste Gobel (1727-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 53-59 ; Gustave Gautherot, Gobel, évêque métropolitain constitutionnel de Paris, Paris, Nouvelle Librairie nationale, 1911 ; Louis Kammerer, « L’origine des dettes de Gobel, évêque suffragant de Bâle », in Archives de l’Église d’Alsace, 1989, p. 56-74 ; Bernard Plongeron, « Gobel (Jean-Baptiste) », in Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastique, tome XXI (1986), col.359-362.

42 Serge Bianchi, La Déchristianisation dans le district de Corbeil, 1793-1797, Corbeil-Essonnes, Mémoires et Documents de la Société historique et archéologique de Corbeil, de l’Essonne et du Hurepoix, 1990.

43 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution. Paris, Picard, 1908-1911, quatre volumes, tome II, p. 58-63 ; Paul Chopelin, « L’évêque constitutionnel de Paris renonce aux hochets gothiques de la superstition », in L’Europe des superstitions. Une anthologie, xvie-xxe siècle, sous la direction de Boris Klein, Jean-Philippe Martin et Sébastien Roman, Paris, Éditions du Cerf, 2020, p. 341-347.

44 Henri-Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome III, p. 196-215.

45 Henri-Alexandre Wallon, La Révolution du 31 mai et le fédéralisme en 1793, ou La France vaincue par la commune de Paris, Paris, Hachette, 1886, deux volumes ; William Edmonds, « Federalism and Urban Revolt in France in 1793 », The Journal of Modern History, n° 55, 1983/1, p. 22-53 ; Antonino De Francesco, « La testa contro il corpo : movimento sezionario e federalismo nella Francia del 1793 », Critica storica, 1986, p. 412-448 ; Antonino De Francesco, « Nè Gironda, nè Montagna. La rivolta dei dipartimenti nella Francia del 1793 », Studi storici, XII, n° 45, 1989, p. 661-696 ; Les Fédéralismes. Réalités et représentations, 1789-1874. Actes du colloque de Marseille (septembre 1993), publiés sous la direction de Bernard Cousin, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 1995 ; Paul R. Hanson, The Jacobin Republic Under Fire. The Federalist Revolt in the French Revolution, University Park, The Pennsylvania State University Press, 2003. En sens inverse, Jacques Bernet, Anne-Marie Duport, Jacques Guilhaumou, François Wartelle, Marcel Dorigny, Yves Delaporte, Existe-t-il un fédéralisme jacobin ? Études sur la Révolution, Actes du 111ème Congrès national des sociétés savantes (Poitiers, 1986), Paris, Imprimerie nationale, 1986, p. 5-135.

46 Anne de Mathan, « Le fédéralisme girondin », Annales historiques de la Révolution française, n° 393, 2018/3, p. 195-206 ; et « Le fédéralisme girondin : une fausse nouvelle à la vie dure », in Faux bruits, rumeurs et fake news, sous la direction de Philippe Bourdin, Paris, Éditions du CTHS, 2021 (disponible sur Internet).

47 Claude Fauchet, De la Religion Nationale, Paris, Bailly, Desenne, Lottin et Cussac, 1789. Sur ce courant, illustré également par les abbés Lamourette, Grégoire ou Bertolio, cf. les analyses de Rita Hermon-Belot, L’Abbé Grégoire, op. cit, « Une révolution française catholique », p. 63-93, et « Une politique chrétienne », p. 183-227.

48 Gary Kates, The Cercle social, the Girondins and the French Revolution, Princeton University Press, 1985 ; Marcel Dorigny, « Le Cercle Social ou les écrivains au cirque », in La Carmagnole des Muses. L’homme de lettres et l’artiste dans la Révolution, sous la direction de Jean-Claude Bonnet, Paris, A. Colin, 1988, p. 49-66.

49 Sur Claude Fauchet (1744-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 169-172 ; Jean Cornillon, L’Abbé Claude Fauchet, prédicateur du roi, membre de la Commune de Paris, évêque constitutionnel du Calvados, député à la Législative et à la Convention nationale. Un enfant du Bourbonnais sous la Révolution française, Moulin, Grégoire, 1908 ; Jules Charrier, Claude Fauchet, évêque constitutionnel du Calvados, député à l’Assemblée législative et à la Convention (1744-1793), Paris, Champion, 1909, deux volumes ; Rita Hermon-Belot, « L’abbé Fauchet », in La Gironde et les Girondins, sous la direction de François Furet et Mona Ozouf, Paris, Payot, 1991, p. 329-349. Sur Caen et le « fédéralisme », Frédéric Vaultier, Souvenirs de l’insurrection normande dite du Fédéralisme, en 1793, publiés pour la première fois avec notes et pièces justificatives par Georges Mancel, Caen, Le Gost-Clérisse, 1858.

50 Sur Adrien Lamourette (1742-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 276-282 ; Léon Berthe, « Grégoire, élève de l’abbé Lamourette », Revue du Nord, n° 173, 1962, p. 39-46 ; Daniele Menozzi, Philosophes e chrétiens éclairés. Politica e religione nella collaborazione di G.H. Mirabeau e A.A. Lamourette, 1774-1794, Brescia, Paideia, 1976 ; Robert Darnton, The Kiss of Lamourette. Reflections in Cultural History, New York, Norton, 1990 ; Caroline Chopelin-Blanc, Adrien Lamourette, op. cit. ; Paul Chopelin, « L’élection de l’évêque constitutionnel de Rhône-et-Loire (1er mars 1791) », Revue d’histoire de l’Église de France, n° 223, 2003, p. 385-418 ; Caroline Chopelin-Blanc, « Les Prônes civiques d’Adrien Lamourette : la vision politique d’un prêtre en Révolution », Rivista di storia del Cristianesimo, 2008/2, p. 173-198 ; et « Le Baiser Lamourette (7 juillet 1792) », Annales historiques de la Révolution française, n° 355, 2009/1, p. 73-100.

51 Sébastien Charléty, « La journée du 29 mai 1793 à Lyon », La Révolution française, XXXIX, 1900, p. 340-374 et 385-426 ; René Bittard des Portes, Contre la Terreur. L’insurrection de Lyon en 1793. Le siège. L’expédition du Forez, Paris, Émile-Paul, 1906 ; Camille Riffaterre, Le Mouvement anti-jacobin et anti-parisien à Lyon et dans le Rhône-et-Loire en 1793 (29 mai - 15 août), Lyon, Rey, et Paris, Picard 1912-1928, deux volumes ; Édouard Herriot, Lyon n’est plus, Paris, Hachette, 1937-1940, quatre volumes ; Bruno Benoit, « A propos du républicanisme lyonnais en 1793 », Cahiers d’histoire, XXXVIII, 1993, p. 253-271 ; Michel Biard, 1793. Le siège de Lyon. Entre mythes et réalités, Clermont-Ferrand, Lemme Éditions, 2013.

52 Monique Cubells, « Charles-Benoît Roux, évêque constitutionnel des Bouches-du-Rhône, métropolitain des Côtes de la Méditerranée », in Religion et Révolution. Colloque de Saint-Florent-le-Vieil, 13-14-15 mai 1993, sous la direction de Jean-Clément Martin, Paris, Anthropos, 1994, p. 105-118 (citation p. 118). Sur Charles-Benoît Roux (1739-1794), cf. encore Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 323-326 ; et A.-M. de La Tour-Keirié, Documents sur Charles-Benoît Roux, évêque des Côtes-de-la-Méditerranée, élu à Aix le 23 février 1791 et exécuté à Marseille le 16 germinal an II, suivis des Souvenirs rétrospectifs sur les deux évêques Roux et Aubert, par T. Sabatier, Aix-en-Provence, Makaire, 1889.

53 Monique Cubells, « Charles-Benoît Roux », art. cit., p. 115.

54 Ibid, p. 115. Cf. Georges Guibal, Le Mouvement fédéraliste en Provence en 1793, Paris, Plon-Nourrit, 1908.

55 Sur Louis-Alexandre Expilly (1742-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 132-134 (citation, p. 134) ; J.-M. Pilven, Le Premier évêque constitutionnel : Expilly, évêque du Finistère, Quimper, Kerangal, extrait du Bulletin diocésain d’histoire et d’archéologie de Quimper et de Léon, 1912 ; Paul Pisani, « L’élection du premier évêque constitutionnel », Revue du clergé français, XCV, 1918, p. 102-106.

56 Sur Jean-Louis Gouttes (1739-1794), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 317-320 ; Anatole de Charmasse, Jean-Louis Gouttes évêque constitutionnel de département de Saône-et-Loire et le culte catholique à Autun pendant la Révolution, Autun, Dejussieu, 1898.

57 Louis-Marie Quicherat, Recueil de lettres de P.-A Victor de Lanneau, précédé d’une notice biographique, Paris, Duverger, 1851 ; Marcel Dorigny, « Victor Lanneau, prêtre jacobin et fondateur du Collège des sciences et des arts (1758-1830) », Annales historiques de la Révolution française, n° 274, 1988, p. 347-365 ; et, plus généralement, Marcel Dorigny, Autun dans la Révolution française. I – Économie et société urbaines en 1789. II – L’Événement révolutionnaire. Du bastion royaliste à la Montagne du département, 1789-1795, Le Mée sur Seine (Seine-et-Marne), Amatteis, 1988-1989, deux volumes.

58 Henri Wallon, Histoire du tribunal tévolutionnaire, op. cit., tome III, p. 74.

59 Sur Marc-Antoine Huguet (1757-1796), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 99-100 ; René Boudard, « Un ancien curé de Bourganeuf, le conventionnel Marc-Antoine Huguet », Mémoires de la Société des sciences naturelles, archéologiques et historiques de la Creuse, XXXIII, 1957, p.100-108.

60 Sur Yves Audrein (1741-1800), Paul Pisani, Répertoire biographique, op. cit., p. 134-136 (citation p. 135) ; Paul Peyron, Fin de l’Église constitutionnelle dans le Finistère. Audrein, 1798-1800, Quimper, Kerangal, 1897 ; Prosper Hémon, Audrein, Yves-Marie, député du Morbihan à l’assemblée législative et à la Convention nationale, évêque constitutionnel du Finistère, 1741-1800, Saint-Brieuc, Guyon, 1903. Cf. également Anne de Mathan, « Un rouge au pays des Blancs ? Jean-Marie Gomaire, prêtre constitutionnel, apostat et marié (1745-1805) », in Le Bon Dieu sans confession. Mélanges offerts à Yvan Tranvouez, sous la direction de Fabrice Bouthillon, Frédéric Le Moigne et Nathalie Viet-Depaule, Nancy, L’Arbre Bleu, 2017, p. 51-68.

61 Paul Chopelin, « L’évêque et ses vicaires. Le gouvernement collégial dans la première Église constitutionnelle », in Gouverner une Église en Révolution, op. cit., p. 137-158. Sur le procès et la condamnation du vicaire épiscopal de Saurine, évêque constitutionnel des Landes, cf. l’étude approfondie de Jean-Claude Meyer, « Le procès d’un prêtre constitutionnel pendant la Terreur : la condamnation du bénédictin Jean-Jacques Gros par le tribunal criminel de Toulouse (2 avril 1794) », Annales du Midi, 1992, p. 83-97.

62 Donald Greer, The Incidence of the Terror during the French Revolution. A Statistical Interpretation, New York, Harvard University Press, 1935, retient le chiffre de 920 membres du clergé (Clergy) exécutés (p. 166).

63 Louis-Marie Prudhomme, Histoire générale, op. cit., tome VI, p. 522 (« Tableau général ») ; Stéphane Baciocchi, Philippe Boutry, « Les ‘victimes’ ecclésiastiques de la Terreur », art. cit., p. 452-453.

64 Pierre Bliard, Jureurs et insermentés, op. cit., p. 11, p. 300, p. 182.

65 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 121.

66 Pour un inventaire systématique : Tribunal révolutionnaire (1793 - an III). Répertoire numérique des affaires jugées, W 268 à 499, d’après la table dressée par Émile Campardon en 1866 et suivie d’un index, par Denis Habib, révisé avec le concours de Pierre-Dominique Cheynet, Paris, Archives Nationales, 2009

67 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome II, p. 254.

68 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 82, p. 87, p. 121.

69 Pierre Cayla, « Terroriste ou modéré ? Augustin Crassous », in Nouveaux pouvoirs et citoyenneté, 89 en Essonne, n° 7, 1990/3, p. 68-71.

70 Paul Pisani, L’Église de Paris et la Révolution, op. cit., tome II, p. 123.

71 Henri Alexandre Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, op. cit., tome II, p. 252-260 ; Répertoire numérique des affaires jugées, op. cit., W 302, dossier 338.

72 Wallon, tome III, p. 70-72 ; Répertoire numérique, W 339, dossier 615.

73 Wallon, tome III, p. 450 ; Répertoire numérique, W 366, dossier 816.

74 Wallon, tome IV, p. 278 ; Répertoire numérique, W 397, dossier 920.

75 Wallon, tome IV, p. 394 ; Répertoire numérique, W 407, dossier 938.

76 Wallon, tome V, p. 20-28 ; Répertoire numérique, W 414, dossier 949.

77 Wallon, tome V, p. 96 ; Répertoire numérique, W 429, dossier 965.

78 Wallon, tome V, p. 109 ; Répertoire numérique, W 431, dossiers 968 et 969.

79 Répertoire numérique, W 433, dossier 972.

80 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 414, p. 416-417.

81 Paul Chopelin, Ville patriote et ville martyre. Une histoire religieuse de Lyon pendant la Révolution (1788-1805), thèse de doctorat de l’Université Jean Moulin Lyon 3, novembre 2006, 2 volumes, tome 1, p. 423-440. La publication de ce travail de recherche est intervenue sous une forme plus condensée sous le titre Ville patriote et ville martyre. Lyon, l’Église et la Révolution (1788-1805), Paris, Letouzey et Ané, 2010.

82 Antonin Portallier, Tableau général des victimes et martyrs, op. cit., p. 427-428.

83 Ibid., p. 340.

84 Ibid., p. 154-155.

85 Ibid., p. 204-205.

86 Ibid., p. 3. Colin Lucas, The Structure of the Terror. The Example of Javogues and the Loire, London, Oxford University Press, 1973, et « L’Église constitutionnelle dans la Loire après la Terreur », Cahiers d’histoire (Lyon), XXX, 1985, p. 480-499.

87 Pierre-Joseph Thénard, Quelques souvenirs du règne de la Terreur à Cambrai, Cambrai, Carion, 1860, Auguste-Joseph Paris, La Terreur dans le Pas-de-Calais et dans le Nord. Histoire de Joseph Le Bon et des tribunaux révolutionnaires d’Arras et de Cambrai, Arras, Rousseau-Leroy, 1864 ; Louis Jacob, Joseph Le Bon (1765-1795). La Terreur à la frontière (Nord et Pas-de-Calais), Châteauroux, Mellottée, 1934, deux volumes ; Yvan Gobry, Joseph Le Bon. La Terreur dans le Nord de la France, Paris, Mercure de France, 1991 ; Lucien Misermont, Georges Lenotre, Hector Fleischmann, Le Conventionnel Joseph Le Bon, suivi de Lettres de Joseph Le Bon à Robespierre, Le Bas et Saint-Just, Volonne, Bibliothèque du Bois-Menez, « Textes oubliés », 2018.

88 Auguste-Joseph Paris, La Terreur dans le Pas-de-Calais et dans le Nord, op. cit., p. VI-VII et 644-655.

89 Les onze Ursulines de Valenciennes et les quatre Filles de la Charité d’Arras exécutées à Cambrai ont été béatifiées par le pape Benoît XV le 13 juin 1920 : Jules Loridan, Les Ursulines de Valenciennes avant et pendant la Terreur, Paris, Desclée De Brouwer, 1901 ; Lucien Misermont, Les Filles de la Charité d’Arras, dernières victimes de Joseph Lebon à Cambrai, guillotinées le 8 messidor an II (26 juin 1794), deuxième édition, Cambrai, Deligne, et Paris, Économat des Filles de la Charité, 1901 ; Marc Theillier, Les Ursulines sous la Terreur. Un drame sanglant à Valenciennes, Valenciennes, chez l’auteur, 1986.

90 Ibid., p. 230.

91 Ibid., p. 264-265 et 327.

92 Pierre-Grégoire Labiche de Reignefort, Relation de ce qu’ont souffert pour la religion les prêtres français insermentés, déportés en 1794, dans la rade de l’isle d’Aix, près Rochefort, Paris, Le Clère, 1796 ; réédition : Relation très-détaillée de ce qu’ont souffert, pour la Religion, les prêtres et autres ecclésiastiques français détenus en 1794 et 1795 pour refus de serment à bord des vaisseaux « Les Deux-Associés » et « Le Washington » dans la rade de l’île d’Aix et aux environs, seconde édition, Paris, Le Clère, 1801 (an X).

93 Site PRÊTRES DÉPORTÉS sur les PONTONS (rabany.eu) consulté le 1er avril 2023. Louis-Marie Dubois, Rochefort et les pontons de l’île d’Aix. Première persécution contre le clergé pendant la Terreur, Nantes, Libaros, 1890 ; Isidore Manseau, Les Prêtres et religieux déportés sur les côtes et dans les îles de la Charente-Inférieure, Lille, Desclée De Brouwer, 1898, deux volumes ; Pierre Lemonnier, La Déportation ecclésiastique à Rochefort (1794-1795), La Rochelle, Texier, 1916, et Martyrologe de la déportation ecclésiastique à Rochefort-sur-Mer, 1794-1795, Rochefort-sur-Mer, Thèze, 1917 ; L. Poivert, Les Martyrs des pontons (1794-1795), Paris, Maison de la Bonne Presse, 1928, et La déportation ecclésiastique de l’an II (novembre 1793 - avril 1795) sur les pontons de Rochefort. Listes complètes soigneusement révisées, La Rochelle, Imprimerie rochelaise, 1934 ; Jacques Hérissay, Les Pontons de Rochefort. 1794, Paris, Perrin, 1925 ; Yves Blomme, Les Prêtres déportés sur les pontons de Rochefort, Saint-Jean d’Angély, Bordessoules, 1994. Le pape Jean-Paul II a béatifié 64 d’entre eux le 1er octobre 1995 ; 254 corps reposent sur l’île Madame.

94 Isidore Manseau, « Liste des prêtres déportés en vertu de la loi du 26 août 1792, détenus à Rochefort et sur les vaisseaux de la rade de l’île d’Aix », Les Prêtres et religieux déportés, op. cit., p. 335-397 (sur Brigeat, p. 345).

95 François-Joseph Grille, « Déclaration de Boullemer sur les massacres de Machecoul, du 11 mars au 22 avril 1793 », in La Vendée en 1793, Paris, Bonaventure et Ducessois, 1851-1852, trois volumes, tome III, p. 5.

96 Alfred Lallié, Le District de Machecoul, 1788-1793. Études sur les origines et les débuts de l’insurrection vendéenne dans le pays de Retz, Nantes, Forest et Grimaud, 1869, p. 302 et p. 432, note 11. Cf. encore Charles-Louis Chassin, Études documentaires sur la Vendée et la Chouannerie. I – La Préparation de la guerre de Vendée (1789-1793), Paris, Dupont, 1892, trois volumes, tome III, p. 341, p. 346.

97 Émile Gabory, La Révolution et la Vendée, Paris, Perrin, 1925-1928, trois volumes ; Charles Tilly, The Vendée, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1964, traduction française : La Vendée. Révolution et Contre-Révolution, Paris, Fayard, 1970 ; Claude Petitfrère, La Vendée et les Vendéens, Paris, Gallimard-Julliard, « Archives », 1981 ; Alain Gérard, La Vendée, 1789-1793, Seyssel, Champvallon, 1993, et « Par principe d’humanité »… La Terreur et la Vendée, Paris, Fayard, 1999 ; Jean-Clément Martin, La Guerre de Vendée, 1793-1800, Paris, Le Seuil, « Points-Histoire », 2014.

98 Charles Le Goffic, La Chouannerie. Blancs contre Bleus, 1790-1800, Paris, Hachette, 1930 ; Gabriel Du Pontavice, Les Armées catholiques et royales au nord de la Loire. Petite histoire des Chouans, Loudéac, Salmon, 1989, et La Chouannerie, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1991 ; Jean-François Chiappe, Les Chouans, Paris, Perrin, 1982 ; Roger Dupuy, Les Chouans, Paris, Hachette, « La Vie quotidienne », 1997 ; Anne Bernet, Histoire générale de la Chouannerie, Paris, Perrin, 2000 (édition réactualisée, 2016).

99 Louis Delhommeau, Le Clergé vendéen face à la Révolution, La Roche-sur-Yon, Siloë, 1992, p. 115-120.

100 Jean-Clément Martin, La Vendée de la mémoire : 1800-1980, Paris, Le Seuil, 1989. Sur les formes de la sacralisation populaire des morts des différents camps, Michel Lagrée, Jehanne Roche, Tombes de mémoire. La dévotion populaire aux victimes de la Révolution dans l’Ouest, Rennes, Apogée, 1993.

101 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 390, p. 422 et p. 384.

102 Charles-Louis Chassin, La Préparation de la guerre de Vendée, op. cit., tome III, p. 320.

103 Ibid., tome III, p. 352 (Marchesse, Méchin), p. 351 (Resneau), p. 378 (curé de Savenay).

104 Edgar Bourloton, Le Clergé de la Vendée pendant la Révolution, Vannes, Lafolye, 1908, p. 370-374. La culpabilité de Charrette dans l’assassinat demeure controversée : Lionel Dumarcet, François Athanase Charette de La Contrie. Une histoire véritable, Paris Les Trois Orangers, 1997, p. 501-504, soutient son implication ; Paul Bruzon, « Charette et l’abbé Guesdon », Revue du Bas-Poitou, LV, 1942, p. 21-32, la récuse.

105 Simon Gruget, Mémoires et Journal de l’abbé Gruget, curé de la Trinité d’Angers, publiés par E.L. et annotés par Émile Quéruau-Lamerie, Angers, Germain et Grassin, 1902, p. 120-121.

106 Hippolyte Sauvage, Un Canton de l’Anjou sous la Terreur et durant la guerre de la chouannerie, Angers, Lachèse, Delleuvre et Boileau, 1873, p. 37-40.

107 Mémoires et Journal de l’abbé Gruget, op. cit., p. 147. Autre date possible : le 17 octobre 1794.

108 Frédéric Le Coq, Documents authentiques pour servir à l’histoire de la constitution civile du clergé dans le département de la Mayenne, accompagnés de notices biographiques sommaires et de tables, avec le concours de René Gadbin, Laval, Chailland, 1890-1893, deux volumes en sept parties. I – District de Laval. II – District de Craon. III – District de Château-Gontier. IV – District d’Ernée. V – District d’Evron. VI – District de Mayenne. VII – District de Villaines. Ce travail essentiel peut être complété par le Journal d’Isidore Boullier, curé de la Trinité de Laval, Mémoires ecclésiastiques concernant la ville de Laval et ses environs, diocèse du Mans, pendant la révolution de 1789 à 1802, Laval, Godbert, 1846, ainsi que par l’article d’Émile Quéruau-Lamerie, L’Église constitutionnelle du département de la Mayenne après la Terreur, d’après la correspondance de Charles-François d’Orlodot, Angers, Germain et Grassin, 1891. Sur la Chouannerie mayennaise, Jean Morvan, Les Chouans de la Mayenne, 1792-1796, Paris, Calmann-Lévy, 1901.

109 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 394.

110 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 223-226 (p.225) ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Laval, p. 38.

111 Un treizième cas demeure douteux, celui du vicaire épiscopal Séguéla, ancien doctrinaire de La Flèche et principal du collège de Laval en 1791, rédacteur du Patriote de la Mayenne et principal soutien des Girondins : Isidore Boullier pense qu’il serait mort au combat dans les environs de Caen parmi les fédéralistes (Mémoires, op. cit., p. 492) alors qu’Émile Quéruau-Lamerie le fait décéder à Saint-Martin-le-Blanc (Seine Inférieure) le 6 mars 1794, sans plus de précision (L’Église constitutionnelle, op. cit., p. 5).

112 Jules Barbey d’Aurevilly, L’Ensorcelée [1854], Paris, Gallimard, « Folio », 1977, chapitre IX, p. 157-158.

113 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Château-Gontier, p. 9-10 (Cordier), p. 66 (Ragot).

114 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Ernée, p. 13-14.

115 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 509 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Laval, p. 55.

116 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 495 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Évron, p. 119.

117 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p. 9-10.

118 Ibid., Villaines, p. 68.

119 Ibid., Évron, p. 23.

120 Ibid., Mayenne, p. 90.

121 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 329, p. 449 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Laval, p. 80.

122 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 155-157 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p. 94-95.

123 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Ernée, p. 155.

124 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 501 (citation) ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p. 131.

125 Isidore Boullier, Mémoires, op. cit., p. 409, p. 501 ; Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Mayenne, p. 99.

126 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Évron, p. 83.

127 Ibid., Ernée, p. 104.

128 Ibid., Château-Gontier, p. 36 (citation) ; Émile Quéruau-Lamerie, L’Église constitutionnelle, op. cit., p. 18, note 6.

129 Frédéric Le Coq, Documents, op. cit., Château-Gontier, p. 57-58.

130 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 377.

131 Michel Lagrée, « La Révolution sous le boisseau : l’expiation des constitutionnels », in Mentalité, religion et histoire en Haute-Bretagne. Le diocèse de Rennes, 1815-1848, Paris, Klincksieck, 1977, p. 240-257 (p. 242).

132 Th. Lemas, Un District breton pendant les guerres de l’Ouest et la Chouannerie, 1793-1800 [Fougères], Paris, Fischbacher, 1895, p. 102-103.

133 Sur la Chouannerie en Ille-et-Vilaine, Joseph Le Louët, La Chouannerie et le clergé constitutionnel dans un coin de Bretagne, ou les guerres religieuses pendant la Révolution, Rennes, Bahon-Rault, et Fougères, Gendron-Brissier, 1909 ; Donald Sutherland, The Chouans. The Social Origins of Popular Counter-Revolution in Upper Brittany, 1770-1796, Oxford, Clarendon Press, 1982.

134 Th. Lemas, Un District breton pendant les guerres de l’Ouest, op. cit., p. 109.

135 Ibid., p. 321, témoignage du fermier de La Melleraye, 67 ans, d’après les souvenirs de sa mère.

136 Claude Langlois, « Le clergé constitutionnel », in Un diocèse breton au début du xixe siècle. Le Diocèse de Vannes au xixe siècle, 1800-1830, Paris, Klincksieck, 1974, p. 48-53.

137 Émile Sageret, Le Morbihan et la Chouannerie morbihannaise sous le Consulat, Paris, Picard, 1910-1917, quatre volumes ; Jules Le Falher, Monographies chouannes, d’après les Archives nationales et les Archives départementales du Morbihan, Paris, Champion, 1911 ; Émile Gilles, La Chouannerie dans le Morbihan. Le Mois sanglant, mars 1793, Quimper, Chavet et Bargain, 1914 ; Mathieu de Gélis, Boulainvilliers. Figure singulière de la première chouannerie morbihannaise, Muzillac, Éditions des Six Coupeaux, 2012 ; Jean Guillot, Révolution et Chouannerie en Morbihan, 1789-1804, Gourin, Éditions des Montagnes noires, 2014.

138 Timothy Tackett, La Révolution, l’Église, la France. Le serment de 1791, op. cit., p. 397.

139 Jules Le Falher, Acta Martyrum. Les Prêtres du Morbihan victimes de la Révolution (1792-1802), Vannes, Lafolye, 1921, p.VIII, note 1.

140 Claude Langlois, Un diocèse breton au début du xixe siècle, op. cit., p. 48 et carte, p. 49.

141 Jules Le Falher, Le Royaume de Bignan, 1789-1805, Hennebont, Normand, 1913 ; Jean Guillot, Pierre Guillemot, le premier chouan, Gourin, Éditions des Montagnes noires, 2016.

142 Claude Langlois, Un diocèse breton au début du xixe siècle, op. cit., p. 50.

143 Léon de La Sicotière, Louis de Frotté et les insurrections normandes, 1793-1832, Paris, Plon-Nourrit, 1889, trois volumes. Cf. Félix Jourdan, La Chouannerie dans l’Avranchin, Avranches, 1907-1908, deux volumes ; Jean Pouessel, « Chouans et chouannerie dans la Manche (1797-1801) », Annales de Normandie, 36, 1986, p. 235-252 ; Jean-Claude Martin, « Acquéreurs de biens nationaux et Chouans dans le Domfrontais pendant la Révolution », Annales de Normandie, 39, 1989, p. 265-284 ; Alfred Chandeurge, La Chouannerie normande, Paris, Lanore, 1982 ; Edmond Lemonchois, Les Derniers chouans de la Manche. Pensionnés, récompensés, retraités, secourus, 1814-1830, Saint-Lô, Société d’archéologie et d’histoire de la Manche, 2008.

144 Pierre Flament, « Deux mille prêtres dans la tourmente », Annales de Normandie, XXXIX, 1989/2, p. 177-189 (chiffres en p. 182-183 et p. 186), texte de présentation de sa synthèse, Deux mille prêtres normands face à la Révolution française, 1789-1801, Paris, Perrin, 1989.

145 Léon de La Sicotière, Les insurrections normandes, op. cit., tome I, p. 385.

146 Ibid.., tome I, p. 437.

147 Mémoires de Michelot Moulin sur la Chouannerie normande, introduction de L. Rioult de Neuville, publiés par la Société d’histoire contemporaine, Paris, Picard, 1893, p. 99 (sous le nom de « l’abbé Coirat »).

148 Ibid., p. 97 et note.

149 Léon de La Sicotière, Les insurrections normandes, op. cit., tome I, p. 507-508.

150 Ibid., tome I, p. 442-443.

151 Ibid., tome I, p. 498-499.

152 Ibid., tome II, p. 322 et note 2.

153 Ibid., tome I, p. 335 (Chasles, Langlois), 423 (Morand), 470 (Desdouits, Philippe), 497-498 (Maine, Duval).

154 Ibid., tome II, p. 286. Ce meurtre est également évoqué, par Charles-Louis Chassin, Études documentaires sur la Vendée et la Chouannerie. III – Les Pacifications de l’Ouest (1795-1815), op. cit., tome III, p. 344.

155 Léon de La Sicotière, « Le Clergé », in Les Insurrections normandes, op. cit., tome II, p. 600-604 : Charles Deshayes, curé de Saint-Jean d’Assé (Orne), en 1795 ; Jean Hairie, curé du Housseau (Mayenne), massacré à Saint-Denis de Villenette (Orne) en mai 1796 ; M. Savary, curé de Coutances, assassiné sur la commune de Landelles (Calvados) en mai 1796 ; M. Legosel, curé de Luc (Calvados), fusillé en mars 1796 ; le curé de Saint-Pierre-Tarentaise (Calvados), le 30 septembre 1795 ; la curé d’Ouistreham (Calvados), fusillé à Mathieu (Calvados) ; les deux curés de Saint-Georges d’Aunai (Calvados), M. Denis et M. Duroc, assassinés dans la nuit du 16 février 1796 ; le curé de Saint-Aubin-des-Préaux (Manche), « arraché de l’autel et tué dans le cimetière » ; le curé de Saint-Gervais-sur-Sever (Manche), en janvier 1796 ; M. Geslin, curé de Landigou (Orne) ; Nicolas Challes, de Saint-Roch-sur-Egrenne (Orne), fusillé le 4ème jour complémentaire de l’an III ; Pierre Langlois, tué à Saint-Mars d’Érenne » (Orne). Cf. Encore Nicolas Caillebotte, La Chouannerie dans l’arrondissement de Domfront, publié pour la première fois, avec une introduction et des notes, par G. Hubert, Flers, Folloppe, 1928.

156 René-Pierre Nepveu de la Manouillère, Mémoires, publiés et annotés par Gustave Esnault, Le Mans, Pellechat, 1877-1879, deux volumes, tome II, p. 331 ; François-Yves Besnard, Souvenirs d’un nonagénaire, op. cit., tome II, p. 87-88.

157 Michel Comtet, « Le meurtre au hameau de Pérouses, commune de Foissiat, de Jean-Louis Maistre, prêtre assermenté de Cuiseaux (16-17 avril 1799) », Revue d’histoire religieuse des pays de l’Ain, Bulletin de la Société nouvelle Gorini, n° 7, 2011, p. 15-24.

158 Ernest Cuaz, Notice historique sur les vrais compagnons de Jéhu (Bourg, thermidor an VIII), Bourg, Milliet-Bottier, 1869 ; Georges Lenotre, La Compagnie de Jéhu. Épisodes de la réaction lyonnaise, 1794-1800, Paris, Perrin, 1931 ; Hélène Jarre, La Contre-Révolution en Haute-Loire, 1789-1799. La Compagnie des Ganses blanches. La Terreur blanche. Le Procès des compagnons de Jésus, Polignac, Éditions du Roure, 2008.

159 Siméon Bonnel, Les trois cent trente-deux victimes de la commission populaire à Orange en 1794, Orange, l’auteur, 1888, deux volumes ; Émile Le Gallo, « L’Affaire de Bédouin », in La Révolution française, XLI, 1901, p. 289-310 ; Paul Gaffarel, La Terreur à Marseille (Proconsulat de Barras et de Fréron), Aix-en-Provence, Niel, 1913 ; William Scott, Terror and Repression in Revolutionary Marseilles, London, Macmillan, 1973 ; Martyn Lyons, Revolution in Toulouse. An Essay on Provincial Terrorism, University of Durham Publications and Bern, Peter Lang, 1978.

160 Pierre Pourcher, L’Épiscopat français et constitutionnel et le clergé de la Lozère durant la Révolution, Saint-Martin de Bourbaux, 1896-1900, deux volumes ; François Laugier, Le Schisme constitutionnel et la persécution dans le Var, Draguignan, Latil, 1897 ; Antoine Sabarthès, Histoire du clergé de l’Aude de 1789 à 1803, Carcassonne, Roudière, 1939 ; Jean-Claude Meyer, La Vie religieuse en Haute-Garonne sous la Révolution (1789-1800), Université de Toulouse-Le Mirail, 1982 ; Germain Sicard, « Les prêtres devant le tribunal révolutionnaire de la Haute-Garonne », Bulletin de littérature ecclésiastique (Toulouse), XL, 1989, p. 107-134 ; Robert Sauzet, Les Cévennes catholiques. Histoire d’une fidélité, xvie-xxe siècle, Paris, Perrin, 2002.

161 François-Xavier Redon, Les 32 Religieuses guillotinées à Orange au mois de juillet 1794, Avignon, Aubanel, 1904 ; Jules Méritan, Les trente-deux martyres d’Orange, Vaison, Éditions de la Société Bonne Presse du Midi, 1925 ; Gustave Gautherot, Le Drame d’Orange. La Terreur en Vaucluse, Avignon, Aubanel, 1926 ; Joseph Goubert, La Terreur en Provence. Les 32 bienheureuses martyres d’Orange, Paris, Éditions du Dauphin, 1952 ; Alexis Neviaski, Les Martyres d’Orange, Paris-Perpignan, Artège, 2019. Les 32 religieuses guillotinées à Bollène ont été béatifiées par le pape Pie XI le 10 mai 1925.

162 Renée Fuoc, La Réaction thermidorienne à Lyon, 1795, Lyon, IAC, 1957 ; Bruno Benoît, « Chasser le mathevon à Lyon en l’an III », in Le Tournant de l’an III : réaction et Terreur blanche dans la France révolutionnaire, sous la direction de Michel Vovelle, Paris, Éditions du CTHS, 1997, p. 497-507.

163 Paul Gaffarel, « Les Massacres royalistes dans le département des Bouches-du-Rhône aux premiers mois de 1795. Épisode de la réaction thermidorienne », Annales de la Faculté de droit et lettres d’Aix, 1909, p. 1-66 ; Michel Vovelle, « Massacreurs et massacres : aspects sociaux de la contre-révolution en Provence après Thermidor », in Les Résistances à la Révolution, Paris, Imago, 1987, p. 141-150 ; Warren Wilson, « Les journées populaires et la violence collective dans le Vaucluse rural après Thermidor », Canadian Journal of History, n° 28, 1993/1, p. 41-57 ; René Moulinas, « Le département du Vaucluse en 1795 : la Contre-Révolution en marche ? », in Le Tournant de l’an III, op. cit., p. 529-538 ; Stephen Clay, « Les Réactions du Midi : conflits, continuités et violences », Annales historiques de la Révolution française, n° 345, 2006/1, p. 55-91, et « Justice, vengeance et passé révolutionnaire : les crimes de la Terreur blanche », Annales historiques de la Révolution française, n° 350, 2007/4, p. 109-133.

164 Valérie Sottocasa, Les Brigands et la Révolution. Violences politiques et criminalité dans le Midi, 1789-1802, Ceyzérieu, Champvallon, 2016.

165 Joseph-Marie Maurel, Le Brigandage dans les Basses-Alpes, particulièrement depuis l’an VI jusqu’à l’an X, Marseille, Ruat, 1899 ; Stephen Clay, « Le brigandage en Provence sous le Directoire et le Consulat, 1795-1802 », in Du Directoire au Consulat 3 : Brumaire dans l’histoire du lien politique et de l’État-nation, sous la direction de Jean-Pierre Jessenne, Villeneuve d’Asq, CRHENO, 2001, p. 67-89.

166 Jean-Michel Bacquer, « Le "brigandage" dans les Alpes-Maritimes en l’an IX et en l’an X (d’après les procédures du Tribunal criminel spécial) », in Actes du 103e Congrès national des sociétés savantes, Nancy-Metz 1978, Section d’histoire moderne et contemporaine, Paris, Imprimerie nationale, 1979, deux volumes, tome II, p. 313-330 ; Michel Bourrier, « Sud contre Sud : volontaires nationaux et barbets du comté de Nice. Structures politiques et évolution des sociétés », in Identités méridionales. Entre conscience de soi et visions de l’autre. Actes des congrès nationaux des sociétés historiques et scientifiques, CXXVI/4, 2003, p. 259-272 ; Patricia Prenant, La Bourse ou la vie ! Le brigandage et sa répression dans le pays niçois et en Provence orientale, xviiie-xixe siècles, Nice, ASPEAM, 2011.

167 Marc Bonnefoy, Les Suites du Neuf Thermidor. Terreurs blanches, 1795-1815, Paris, Fischbacher, 1892, p. 127 ; Françoise Brunel, « Terreur blanche », in Dictionnaire historique de la Révolution française, sous la direction d’Albert Soboul, Paris, PUF, 1989, p. 1026.

168 Mémoire historique sur la réaction royale et sur les massacres du Midi, par le citoyen Fréron, Paris, Louvet, an IV (citation p. 37).

169 Hommes de Dieu et Révolution en Provence, sous la direction de Bernard Cousin, publié par le Centre méridional d’histoire de l’Université de Provence, Turnhout, Brepols, 1995, p. 95.

170 Sur la singularité du Midi révolutionnaire, Colin Lucas, « The Problem of the Midi in the French Revolution », Transactions of the Royal Historical Society, XXVIII, 1978, p. 1-25 ; Valérie Sottocasa, Mémoires affrontées. Protestants et catholiques face à la Révolution dans les montagnes du Languedoc, Presses universitaires de Rennes, 2004 ; Nicolas Soulas, Révolutionner les cultures politiques. L’exemple de la vallée du Rhône, 1750-1820, Avignon, Éditions universitaires d’Avignon, 2020.

171 Bernard Cousin, Monique Cubells, René Moulinas, La Pique et la Croix. Histoire religieuse de la Révolution française, Paris, Le Centurion, 1989, p. 16.

172 Andrea Riccardi, « Les persécutions des chrétiens en URSS après la révolution de 1917 », site du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou, « Church History » OrthodoxEurope.org, consulté le 5 avril 2023.

173 Antonio Montero, Historia de la persecución religiosa en España, 1936-1939, Madrid, Editorial católica, 1961, p. 762 ; Gabriele Ranzato, « Ambiguïté de la violence politique : la persécution religieuse durant la guerre civile espagnole (1936-1939) », Cultures & Conflits (En ligne), n° 9-10, 1993/1-2, mis en ligne le 27 janvier 2003, consulté le 5 avril 2023. URL : http://journals.openedition.org/conflits/411.

174 Claude Fauchet, Second discours sur la liberté française, prononcé le 31 août 1789 dans l’église paroissiale de Sainte-Marguerite en présence des trois districts réunis du faubourg Saint-Antoine ; Henri Grégoire, Discours prononcé le jour de la Toussaint 1789, en l’église de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, cités par Rita Hermon-Belot, L’Abbé Grégoire. La politique de la vérité, op. cit., p. 82, p. 90.

175 Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat social [1762], livre IV, chapitre VIII, « De la religion civile ».

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Pour citer cet article

Référence électronique

Philippe Boutry, « Les prêtres constitutionnels victimes de la Terreur »L’Atelier du Centre de recherches historiques [En ligne], 28 Bis | 2024, mis en ligne le 10 janvier 2024, consulté le 19 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/acrh/28867 ; DOI : https://doi.org/10.4000/acrh.28867

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Auteur

Philippe Boutry

Professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, directeur d’études émérite à l’École des hautes études en sciences sociales, Philippe Boutry a publié en collaboration avec Dominique Julia plusieurs ouvrages collectifs : Reine au Mont Auxois. Le culte et le pèlerinage de sainte Reine des origines à nos jours (1997) et Pèlerins et pèlerinages dans l’Europe moderne (2000) ; et avec Dominique Julia et Pierre-Antoine Fabre : Rendre ses vœux. Les identités pèlerines dans l’Europe moderne (2000) et Reliques modernes. Cultes et usages des corps saints des Réformes aux révolutions (2009). Sur la Révolution française, il a codirigé avec Jean Boutier et Serge Bonin le fascicule 6 de l’Atlas de la Révolution française. Les sociétés politiques (1992) et publié avec Stéphane Bacciochi « Les ‘victimes’ ecclésiastiques de la Terreur », dans Les Politiques de la Terreur, 1793-1794 (2008, avec carte)

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