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Enquêtes, anciennes et nouvelles

Une enquête en cours : Le Dictionnaire historique des académies en Toscane, XVIe-XVIIIe siècles

Jean Boutier

Texte intégral

  • 1 Jean Boutier, Maria Pia Paoli, Claudia Tarallo (eds), Dizionario storico delle accademie toscane, P (...)

1Depuis que l’histoire est devenue une discipline de savoir assise sur des pratiques érudites, elle s’est dotée d’instruments qui, au fil des années, ont envahi les rayonnages des salles de travail des bibliothèques. À côté de ceux qui permettent d’accéder aux sources (inventaires d’archives et de fonds manuscrits, catalogues d’ouvrages imprimés, d’estampes ou de cartes géographiques…), les plus nombreux sont certainement les dictionnaires qui servent à mettre en ordre et à rendre accessibles des pans entiers du savoir : ils sont construits selon des critères multiples, géographiques – des villes aux nations –, professionnels, religieux ou disciplinaires. L’insertion de plus en plus forte de l’histoire dans l’univers des sciences sociales n’a pas ralenti leur production. L’essor récent de nouveaux modes d’accès aux sources, notamment par la numérisation d’énormes corpus documentaires, a probablement facilité leur réalisation et accru leur ampleur et leur fiabilité. La réalisation d’un dictionnaire du mouvement académique dans la péninsule italienne, à l’échelle régionale1, dont le premier volume vient de paraître, est ici l’occasion d’esquisser le bilan d’une pratique érudite, saisie à la fois dans sa longue durée et dans ses modalités actuelles, avant de proposer quelques-uns de ses apports immédiats.

Inventorier les académies : une préoccupation ancienne

  • 2 Scipione Bargagli, Delle Lodi dell'academie, oratione […] recitata nell'Academia degli Accesi in Si (...)
  • 3 Sur cette nouvelle forme de savoir, cf. Jean-Claude Perrot, « Les dictionnaires de commerce au xvii (...)

2L’émergence des académies dans les premières années du xvie siècle en Italie a rapidement donné lieu à des réflexions sur la nature d’une forme d’organisation qui permet l’échange et la discussion entre lettrés en évitant la violence des désaccords et des conflits qui pourraient les accompagner2. Appuyées sur les expériences, de nature très diverse, des confréries religieuses et des cénacles humanistes, ces académies connaissent une expansion sans précédent qui suscite, au xviie siècle, des interrogations et des enquêtes sur l’ampleur du phénomène à l’échelle de la péninsule italienne. Si, dans un premier temps, ces publications se satisfont d’un savoir d’ancien type par listes de noms, elles s’orientent, dès la fin du xviie siècle, vers la forme, plus ou moins aboutie, du dictionnaire3.

  • 4 Anton Francesco Doni, La Libraria di Doni fiorentino, Venise, G. Giolito de Ferrari, 1550, f. 63a.
  • 5 Giovanni Ferro, Teatro d'imprese, Venise, G. Sarzina, 1623 ; les divers index figurent au début de (...)
  • 6 G. B. Alberti, Discorso…, op. cit.
  • 7 Gregorio Leti, L’Italia regnante, Genève, G. et P. de La Pietra, 1676, p. 72-73.

3Dans sa fameuse Libraria, publiée en 1550, Doni reconnaissait déjà que « tante e tante accademie fossero create in Italia4 ». De façon précoce, Giovanni Ferro (1582-1630) propose, à la fin de la seconde partie de son Teatro d’Imprese, deux tables permettant de trouver les académies citées dans son ouvrage consacré précisément aux emblèmes académiques : la première énumère les « compagnie, o academie » citées dans le livre – soit 132 associations –, la seconde le « città, le cui academie sono mentovate nell’opera, overo da altri autori » – soit 36 villes5. La liste dépasse largement les 41 académies « privées » que mobilise, quelques années plus tard, Giovan Battista Alberti, clerc régulier somasque de Savone6. Un demi-siècle plus tard, l’historien et publiciste Gregorio Leti (1630-1701) prête, dans son Italia regnante, une attention toute particulière à l’ampleur du mouvement académique7 :

« Le Accademie che chiamiamo di bell’ingegni sono molte in Italia, e sempre si vanno augumentando, e ancorche d’alcune si va diminuendo il preggio. Veramente queste nobilissime raunanze letterarie servono molto ad assotigliare, e esercitare gli spiriti sopra tutto in ciò che riguarda le belle lettere. […] Queste tali accademie si vanno giornalmente crescendo in Italia, anzi se n’estinguono in un luogo, e se ne sollevano in un’altro. »

Leti propose alors une liste de celles où il a eu la fortune de se trouver et d’y écouter leur « curiosi discorsi ». Elle est toutefois beaucoup plus limitée que celle de Ferro, ne concernant que 29 villes de la péninsule, pour un total de 47 académies.

  • 8 Cf. Lucinda Spera, « Malatesta Garuffi, Giuseppe », in Dizionario biografico degli Italiani [désorm (...)
  • 9 L’Italia accademica, o sia le accademie aperte a pompa e decoro delle lettere più amene nelle città(...)
  • 10 Rimini, Biblioteca civica Gambalunga, SC, ms 500.

4Le premier véritable essai d’inventaire du mouvement académique italien est réalisé peu après, dans les années 1680, par un ecclésiastique de Rimini, l’abbé Giuseppe Malatesta Garuffi, bibliothécaire de sa ville et professeur dans son collège8. Son projet vise à décrire, ville par ville, l’ensemble des académies de la Péninsule, avec une publication prévue en quatre volumes. Le premier, qui décrit, de façon plus ou moins détaillées, 42 académies dans dix-neuf villes du centre et du nord, paraît en 16889 ; demeuré inédit, le second volume, qui ajoute vingt nouvelles villes et descend plus au sud jusqu’à Naples et Capoue, adopte pour la première fois la disposition d’un dictionnaire10 ; il ne reste en revanche aucune trace des deux derniers volumes, dont l’auteur avait pourtant annoncé la préparation. Une extrapolation possible à partir des données du premier volume permet d’estimer que l’ensemble achevé aurait pu concerner quelque 80 villes, pour un total de 160 à 170 académies, soit une couverture plus importante que celle des ouvrages déjà cités.

5L’entreprise mériterait une étude plus approfondie : elle repose sur la mobilisation d’un vaste ensemble de correspondants – le « telaio dell’altrui relazioni » (§ X de l’Introduction) –, que Malatesta Garuffi sollicite pour obtenir une brève description des principales académies en activité dans la ville où ils résident. Un des correspondants les mieux connus, le bibliothécaire florentin Antonio Magliabechi, avec qui il est en relation dans les années 1683-1693, reçoit ainsi en avril 1683 la demande suivante :

  • 11 Florence, Biblioteca nazionale centrale, ms. Magl. VIII, 1173, f. 97r, 3 avril 1683.

« Si desidera una distinta notizia dell’accademia di belle lettere di questa città, cioè in qual anno e da chi sia stata instituita e se oltre a questa ve ne siano state altre. Che cosa porti per corpo d’impresa. Qual sia il suo motto e da qual poeta sia stato levato. Come ella si chiami e chi fossero i fondatori di essa quanto alla qualità del casato, dignità etc. e con qual motivo la intraprendessero. Come si mantenga al presente. Quali siano le sue leggi offiziali etc. Quante volte all’anno si celebri e chi siano i suoi protettori spirituali e temporali, quali uomini insigni abbiano in essa fiorito etc. Che il tutto verrà descritto in un libro che sta per darsi alle stampe intitolato l’Italia vivente11. »

  • 12 L’opération lancée par Garuffi Malatesta mériterait une enquête spécifique dans les collections de (...)

6Cette lettre circulaire, que Malatesta Garuffi a dû envoyer à plusieurs dizaines d’exemplaires12, se présente comme un véritable questionnaire élaboré à partir des éléments formels, communs à toutes les académies, qui constituent leur spécificité et les distinguent d’autres types de sociabilité organisée. Elle a pour but l’élaboration d’une notice détaillée sur chaque académie, indiquant leur moment de fondation, leur devise et leur emblème, les questions qu’elles ont débattues, éventuellement les personnages illustres qui en ont fait partie.

  • 13 Daniel Georg Morhof, Polyhistor literarius, philosophicus, et practicus [1688], 4e éd., Lubeck, P. (...)

7À peu près au même moment, dans ce qui est la première histoire européenne de la littérature, Daniel Georg Morhof (1631-1691), professeur d’histoire à l’Université de Kiel, accorde une place aux académies, et plus particulièrement aux académies italiennes. Son Polyhistor literarius, philosophicus, et practicus, qui paraît à Lübeck en 1688, propose une histoire des « eruditorum societates », depuis les Hébreux jusqu’aux temps contemporains13. Il détaille principalement les académies qui, en Italie, furent établies en « magnus […] numerus, inque praecibus Italiae urbibus ». L’information provient essentiellement du livre de G. Leti, ainsi que du Teatro d’imprese de G. Ferro. Il se concentre sur les villes les plus « académiques », Rome, Venise, Padoue, Florence et Naples (qui totalisent à elles seules quatre 64 académies), passe plus rapidement sur Sienne, Vérone, Ravenne, Bologne et Ferrare (21 académies), auxquelles il ajoute 61 académies non localisés, soit un ensemble de 147 « societates ».

  • 14 Carlo Bartolomeo Piazza, Euseuologio romano, overo delle opere pie di Roma, accresciuto, & ampliato (...)

8D’autres initiatives, plus ou moins contemporaines, restent très limitées et schématiques par rapport à l’ambitieux projet de Malatesta Garuffi : elles se contentent le plus souvent d’une liste des principales académies existant dans les villes de la péninsule : Carlo Bartolomeo Piazza (1632-1713), un ecclésiastique de la Congrégation des Oblats de Milan, recense ainsi en 1695 120 académies actives dans 65 villes à travers toute la péninsule, Sicile comprise14.

  • 15 Giacinto Gimma, Idea della storia dell’Italia letterata esposta coll’ordine cronologico dal suo pri (...)
  • 16 G. Gimma, Idea…, op. cit., II, p. 422 ; la proposition est développée aux p. 459-470.

9Quelque trente ans plus tard, l’abbé Giacinto Gima (1668-1735), originaire de Bari et membre très actif de nombreuses académies italiennes, insère dans son essai d’histoire de l’Italie « savante » (letterata) une brève histoire des académies italiennes, accompagnée d’un « catalogo di alcune accademie italiane »15. Si Gimma s’intéresse à la langue italienne et à l’origine de la « volgar poesia », son approche aux académies est encyclopédique ; ce sont elles qui, selon lui, ont permis l’essor des sciences à partir du xve siècle : « Le Accademie dell’Italia, dalle quali furono le scienze tutte in gran parte restaurate ed accresciute, cominciarono a fiorire in questo secolo16 ». Son inventaire inclut ainsi celles qui se consacrent explicitement à la philosophie naturelle, à savoir les sciences de la nature. Il concerne désormais 89 villes, et un ensemble de 287 académies.

  • 17 Johannes Jarkius (pseudonyme de Johann Gottlieb Krause), Specimen historiae academiarum eruditarum (...)
  • 18 Johann Albertus Fabricius, Conspectus thesauri litterarii Italiae, praemissam habens, praeter alia, (...)

10Ces entreprises italiennes trouvent un prolongement direct dans le monde germanique. Tout en mobilisant les publications italiennes, qu’elles connaissent et citent, les publications allemandes s’appuient sur des enquêtes érudites qui exploitent une large bibliothèque savante. En 1725, Johann Gottlieb Krause (1684-1736), qui avait fondé en 1715 à Leipzig avec Johann Burckardt Mencke le premier périodique d’information scientifique en langue allemande, la Neue Zeitungen von Gelehrten Sachen, et venait d’être recruté comme professeur de rhétorique à l’université de la ville (1723), propose, sous le pseudonyme de Johannes Jarkius, une ambitieuse « Liste de toutes les académies d’Italie » (Index academiarum Italiae omnium) où il énumère alphabétiquement, selon leur propre dénomination, quelque 516 académies, soit 230 de plus que dans l’ouvrage de Gimma paru à peine deux ans plus tôt17. Peu après, en 1730, un professeur allemand de l’université de Hambourg, le théologien et historien Johann Albert Fabricius (1668-1736), republie la liste de Krause-Jarkius qu’il précise en de nombreux points – essentiellement les datations – tout en la complétant à la marge (elle comporte désormais 532 académies)18. Reprenant les principaux ouvrages italiens sur les académies (Bargagli, Alberti, Garuffi Malatesta, Gimma,…), il élargit l’investigation, multiplie les références en bas de page à des gazettes et des périodiques savants (Giornale d’Italia, Giornale di Roma, Giornale dei Letterati d’Italia, Galleria di Minerva, Journal des Savants, Journal de Trévoux, Acta Eruditorum, Bibliothèque italique…) et explore une vaste bibliographie érudite associant répertoires biobibliographiques et publications académiques. Citons, dans le désordre et sans souci d’exhaustivité, les Mondi celesti, terrestri et infernali degli accademici Pellegrini d’Anton Francesco Doni (Venise, éd. de 1575), les Glorie degli Incogniti de Girolamo Brusoni (Venise, 1647), la Bibliotheca romana de Prospero Mandosio (Rome, 1682-1692), la Bibliotheca sicula d’Antonio Mongitore (Palerme, 1704-1714), la Cremona literata de Francesco Arisi (Parme, 1702-1706), les Vite degli Arcadi illustri de Giovanni Mario Crescimbeni (Rome, 1708-1727), l’Istoria degli scrittori fiorentini de Giulio Negri (Florence, 1722) ou le Saggio di Letterati esercizi de gli accademici Filergiti di Forlì (Forlì, 1699-1714). Ces deux publications confèrent à l’inventaire des académies italiennes une nouvelle dimension, explicitement érudite, que seules reprendront les publications italiennes du xixe siècle.

  • 19 Francesco Saverio Quadrio, Della storia, e della ragione di ogni poesia, Bologne, Pisarri, 1739, p. (...)

11Le recensement suivant, publié en Italie à la fin des années 1730, ne semble pas avoir tenu compte des publications allemandes. Plus fourni que ce que proposaient celles-ci – il concerne, avec son supplément, 141 villes, pour un total de 636 académies, soit plus du double de celles énumérées par Gimma –, il reprend le dispositif choisi initialement par Malatesta Garuffi, soit un ensemble de notices, plus ou moins détaillées, regroupées par ville. L’intérêt de Francesco Saviero Quadrio (1695-1756), un jésuite natif de Ponte di Valtellina qui a été admis à l’Arcadie dans les années 1740 sous le nom de Ornisco Ippocreneo, porte plus spécifiquement sur la poésie – son ouvrage, publié à partir de 1739, s’intitule Sulla storia, e della ragione di ogni poesia –, en liaison avec l’intérêt de l’Arcadie pour la « volgar poesia » et ses efforts pour réformer sa production19. Pour Quadrio, le développement des académies a permis l’essor de la poésie italienne : « L’introduzione di queste accademie maravigliosamente si andò propagando per ogni luogo la poesia, spezialmente l’italiana. » (I, p. 51). Il inscrit ainsi dans son inventaire celle qu’il considère comme la « prima Accademia di Poesia Italiana », qui aurait été créée par le roi de Sicile Frédéric II dans son palais de Palerme au début du xive siècle ; il cite la grande académie siennoise des Intronati, créée selon lui au milieu du xve siècle « a gloria della Volgare Poesia » (I, p. 87, 102). Et il souhaite que les académies contemporaines se réforment afin que « gli esercizi letterari delle medesime non andassero a terminare in una Canzonette, o in un Sonettino » (I, p. 50). Son catalogue des académies italiennes embrasse toutefois un spectre beaucoup plus large, tant il est difficile d’isoler l’activité poétique des autres intérêts académiques.

  • 20 Antonio Zanon, Della utilità morale, economica, e politica dell’accademie di agricoltura, arti e co (...)

12La dernière grande entreprise du siècle, celle du vénitien Antonio Zanon (1696-1770), est portée par les transformations des Lumières et l’émergence d’académies créées pour développer les savoirs utiles non seulement aux princes mais plus encore à la société. Zanon, né à Udine dans une famille de petits entrepreneurs du textile, hérite en 1729 d’une filature « alla bolognese » ; à partir d’une réflexion sur l’industrie de la soie associant dimensions techniques et économiques, il embrasse progressivement les grandes questions économiques et politiques du temps, nourries des débats européens. Membre de diverses académies, dont celles d’agriculture d’Udine et de Florence, il laisse à la fin de sa vie un essai, intitulé Della utilità morale, economica e politica delle accademie di agricoltura, arti, e commercio, où il présente les académies comme des associations indispensables à la société civile pour « gli argomenti più utili alla società e che soli possono formare la potenza e la ricchezza degli stati e l’umana felicità»20. En appendice à cet ouvrage figure un nouveau recensement, qui reprend l’ordre alphabétique des académies selon leur nom, disposition qu’avaient adoptée les publications allemandes. Avec 880 académies identifiées – dont 76 pour la seule ville de Venise –, il dépasse par son ampleur tous ceux qui l’ont précédé.

13Cet intérêt pour les académies dans leur ensemble, c’est-à-dire pour le mouvement académique, connaît, dans la seconde moitié du xviiie siècle, deux élargissements : d’une part, par l’intérêt porté à l’ensemble des académies européennes et à leur recensement ; de l’autre, par l’insertion des académies dans les premières histoires littéraires de l’Italie.

  • 21 Eric W. Cochrane, Tradition and Enlightenment in the Tuscan Academies, 1690-1800, Rome, Edizioni di (...)
  • 22 Comte Paolino Mastai Ferretti, Notizie storiche delle accademie d'Europa con una relazione piu diff (...)

14En 1753, un libraire parisien, Augustin-Martin Lottin (1726-1793), qui vient de s’établir comme imprimeur-libraire en 1752 et manifeste un goût prononcé pour les travaux historiques, demande aux Intronati de Sienne des informations sur l’histoire de l’académie afin de publier un dictionnaire des académies européennes.21. Il n’existe alors rien d’équivalent, au niveau du continent, des travaux et des publications conduits sur l’Italie. L’entreprise, prometteuse et novatrice, ne fut malheureusement pas conduite à son terme, sans que nous en connaissions les raisons. Les Notizie storiche delle accademie d’Europa, que publie en 1792 le comte Paolino Mastai Ferretti22, oncle du futur Pie IX, et dont le titre laisse espérer un large panorama du mouvement académique européen, ne comblent pas cette lacune car elles ne sont qu’une compilation hétéroclite, ordonnée par états, de données confuses, réunissant sous le terme d’ « accademia » sociétés de savants et universités et dépourvue de données originales concernant l’Italie.

  • 23 Giammaria Mazzuchelli, Gli scrittori d'Italia, cioè, Notizie storiche e critiche intorno alle vite (...)
  • 24 Girolamo Tiraboschi, Storia della letteratura italiana di Girolamo Tiraboschi, della Compagnia di G (...)

15Le xviiie siècle voit la publication des premières histoires de grande ampleur de la littérature italienne. Dans la préface de ses Scrittori d’Italia (1753), le comte Giammaria Mazzuchelli annonce que, à côté des auteurs, il a inséré dans son dictionnaire des notices concernant, une par une, l’ensemble des académies italiennes : « L’occasione […] di scrivere degli Autori Italiani m’è paruta assai propria per recar notizia anche delle accademie d’Italia, che a suoi luoghi per ordine d’alfabeto sono poste23. » La reconnaissance est d’importance : pour la seule lettre A, soit le premier volume, Mazzuchelli décrit 97 académies, soit légèrement plus que dans les recensements précédents. Deux décennies plus tard, l’apport de Girolamo Tiraboschi est plus important : dans ce qui est la première véritable histoire littéraire de l’Italie, il propose désormais une histoire des académies au xvie et au xviie siècle, qu’il expose en suivant un cadre géopolitique, selon les diverses « provincie » de la Péninsule, en partant de Rome et en couvrant une grande partie de la Péninsule, de Naples à la plaine du Pô. Son but est d’ « esaminare ciò che in esse [les académies] vi ha più degno d'osservazione, e […] ricercarne lo spirito e l'indole, anzi che la semplice Storia24 ». Les dynamiques du mouvement académique l’emportent désormais sur le travail d’inventaire.

16Deux entreprises du siècle suivant combinent les deux approches, tout en mettant à distance l’intérêt pour la seule littérature. Elles se proposent d’écrire une histoire des académies sous la forme d’un dictionnaire qui juxtaposerait des notices monographiques. Toutes deux sont difficilement séparables des préoccupations que nourrissent le Risorgimento et la création d’un état unitaire, en suggérant l’existence d’un vaste espace culturel italien que les académies auraient contribué à construire et permettraient de définir.

  • 25 Comte Giambattista Roberti, Dizionario delle Accademie d’Italia Dimostrate con Documenti, ms., Bibl (...)

17La première, restée manuscrite et comprenant treize forts registres, est l’œuvre d’un noble de Bassano del Grappa, le comte Giambattista Roberti (1788-1867), qui consacra près de vingt années de sa vie, de 1849 à 1867, à réunir la documentation nécessaire à la rédaction de notices détaillées concernant, à son décès, 402 académies ayant existé dans 85 villes de la péninsule25. Si l’inventaire est plus limité qu’au siècle précédent, les notices constituent des descriptions beaucoup plus approfondies, avec l’indication des sources qui ont été mobilisées, qu’il s’agisse de documents d’archives, d’ouvrages imprimés ou de correspondances savantes échangées avec d’autres érudits de la péninsule.

  • 26 Michele Maylender, Storia delle accademie d’Italia, Bologne, Cappelli, 5 vol., 1926-1939. Un index (...)

18La dernière enquête, qui a servi par la suite de base documentaire à tous les travaux conduits depuis cinq décennies sur les académies italiennes, est le dictionnaire de Michele Maylender (1863-1911), avocat, journaliste et homme politique de Fiume, alors ville du royaume de Hongrie, dont il fut élu podestat à six reprises26. La recherche, commencée au début des années 1890, n’était pas achevée au décès de Maylender et ne fut publiée qu’à la fin des années 1920. L’ambition était forte : étudier l’influence d’une institution « rivolta al culto delle scienze, lettere ed arti » sur les « vicende letterarie d’una nazione ». L’ouvrage, publié posthume, examine ainsi, dans des notices inégales, de quelques lignes à plusieurs dizaines de pages, l’histoire de quelque 2050 associations qui se sont le plus souvent qualifiées d’académies et pour lesquelles il précise scrupuleusement les sources qu’il a pu consulter.

  • 27 Voir en particulier Amedeo Quondam, « L’Accademia », in A. Asor Rosa (éd.), Letteratura italiana, I (...)

19Aucun travail analogue n’a depuis été entrepris. Et c’est à partir des cinq volumes de Maylender que, au début des années 1980, un historien de la culture et des institutions littéraires comme Amedeo Quondam a pu proposer la première étude du mouvement académique italien, saisi dans son ensemble entre la Renaissance et l’Unité italienne27.

Reprendre l’inventaire

20L’exigence d’un inventaire à nouveaux frais des académies italiennes s’inscrit ainsi dans une longue histoire des pratiques savantes italiennes, et plus largement européennes. Elle associe le recours au dénombrement systématique à la forme dictionnaire mise en œuvre par Roberti et Maylender mais, pour plus d’efficacité, s’appuie sur un changement d’échelle. Le travail en cours n’est plus en effet conduit à l’échelle de la péninsule, mais à celle, régionale, d’anciens états – le duché de Florence, associé à l’état de Sienne pour former le grand-duché de Toscane, la république de Lucques, les principautés de Piombino et de Massa-Carrare et les présides toscanes. Il mobilise une double perspective : reprendre le travail d’inventaire pour tenter de le pousser jusqu’à ses limites afin d’approcher l’exhaustivité ; analyser la diversité des usages que permet la forme « académie », afin de cerner ce qu’une société a pu en faire durant trois siècles et d’envisager la façon dont le recours à la forme « académie » a également façonné les sociétés en question. L’espace étudié est suffisamment vaste pour évaluer à la fois le caractère massif de la présence académique dans la ville dominante ainsi que dans les principales villes toscanes, l’extrême capillarité de leur diffusion à travers le territoire, bien au-delà des sociétés citadines, ainsi que la grande diversité des pratiques que permet la forme académie.

  • 28 Vincenzo de Caprio, « I cenacoli umanisti », in A. Asor Rosa (éd.), op. cit., p. 799-822.
  • 29 Selon Hankins, la première mention d’une « accademia platonica » à Florence auprès des Médicis remo (...)

21L’enquête ne prend pas en considération les premiers cénacles humanistes28 ; réels ou inventés, tels ceux de Poggio Bracciolini ou de Marsile Ficin, ils appartiennent pourtant à une généalogie produite à partir de la fin du xvie siècle, qui a fortement marqué l’historiographie29. Elle débute avec la formalisation de la sociabilité académique durant les premières décennies du xvie siècle, désormais réglée par des statuts rédigés et approuvés par l’académie elle-même, tels ceux de la « sacra accademia fiorentina », adoptés en 1515 ou de la « Congrega de’ Rozzi » à Sienne en 1531.

  • 30 Marie-Madeleine Compère, Dominique Julia, Les Collèges français : 16e-18e siècles, Paris, INRP-CNRS (...)

22Les divers recensements précédemment évoqués, et les publications qui les ont accompagnés, ont bien évidemment servi de point de départ à notre enquête. Mais ils sont rapidement apparus insuffisants, malgré les efforts considérables qu’ils avaient mobilisés en leur temps. Le dictionnaire des collèges français, que Marie-Madeleine Compère et Dominique Julia avaient entrepris dans les années 1970, et que Dominique Julia est en train d’achever30, a fourni un modèle essentiel pour reprendre le travail sur des bases solides. Il nous a invité à produire pour chaque académie une notice construite sur un schéma d’ensemble uniforme (même si toutes les rubriques ne peuvent pas toujours être documentées), à asseoir ces notices sur les sources primaires qu’avaient produites ces académies, à recenser leurs éventuelles productions, à prendre en compte l’ensemble des travaux qui leur ont été consacrés, production certes très inégale, parfois inexistante mais pour certaines d’une très grande richesse.

23Si le travail conduit ces dernières années, et qui devrait se poursuivre dans les années à venir pour couvrir l’ensemble de la Toscane, a permis, dans un premier temps, de compléter l’inventaire au point de pouvoir le considérer désormais comme proche de l’exhaustivité, il a surtout permis de décrire chaque académie, de préciser le moment de sa création et la durée de son activité, d’identifier, voire de recenser ses membres, d’analyser ses activités, les productions qui ont pu sortir de ses travaux et les liens qui éventuellement peuvent les rattacher les unes aux autres, et, finalement, de mieux définir ce qu’ont été réellement les académies italiennes de la première modernité.

24Ces conditions étant posées, surgit une première difficulté. À la différence des collèges français dont les archives, saisies par les autorités révolutionnaires lors de leur fermeture au début des années 1790, sont désormais massivement, quoique inégalement, conservées dans les archives départementales françaises, les archives des académies italiennes ont été très rarement préservées dans leur entièreté. Ces académies, qui en général s’étaient dotées d’un secrétaire chargé entre autres de tenir le journal des séances (Diario), et d’un provéditeur chargé de tenir les comptes, avaient certes organisé leurs archives, conservées sur les lieux mêmes de leurs réunions, ou parfois chez celui qui remplissait la fonction de secrétaire. Mais, institutions privées, ces académies, lorsqu’elles ont cessé leurs activités, ont le plus souvent laissé perdre ou disperser les archives qu’elles avaient constituées.

  • 31 Elle est dotée d’un inventaire publié : L'Archivio dell'Accademia. Accademia dei Rozzi. Inventario (...)
  • 32 Deux exemples d’archives inventoriées : Accademia economico-agraria dei Georgofili, Archivio storic (...)
  • 33 Elios Maffei, « L’archivio dell’Istituto o Casino dei Nobili di Firenze », Archivio storico italian (...)
  • 34 Guido Pampaloni, « Inventario dell'archivio dell'Accademia degli Infecondi poi Società dei Misoduli(...)
  • 35 Seuls quatre volumes sont conservés, pour les années 1788-1802, dans le fond « Accademie degli Intr (...)
  • 36 Guerriera Guerrieri, Nicola Fruscoloni, Vittore Cocchi, La Pubblica biblioteca del comune e dell’ac (...)
  • 37 Archivio dell’Istituto degli Innocenti, Florence, « Accademie, corporazioni ed enti diversi », 1184 (...)
  • 38 Sur ces types de fonds, cf. les travaux coordonnés par Emmanuelle Chapron et Fabienne Henryot (dir. (...)
  • 39 Bibliothèque Mediceo-Lorenziana, Ms. Ashburnham 558-562. Une description complète in Deborah Blocke (...)
  • 40 Bibliothèque Marucelliana, Florence, Ms. B III 52-54.

25Seules quelques académies encore existantes (comme celles de la Crusca, du Disegno, des Georgofili ou des Immobili à Florence, du Circolo degli Uniti et de l’Académie des Rozzi31 à Sienne, ou des Risorti à Borgo San Lorenzo) conservent aujourd’hui, en partie ou en totalité, leurs archives anciennes32. Les académies qui ont cessé leurs activités alors qu’existaient déjà des archives publiques ont pu déposer leurs archives, complètes et structurées, dans ces institutions : c’est le cas des archives de l’ « Accademia e Casino dei Nobili33 », des Intrepidi ou des Solleciti, déposées à l’Archivio di Stato de Florence, de celles des Infuocati (conservées dans le fond Teatro Niccolini) ou des Risoluti (dans le fond Teatro Alfieri), aux archives historiques de la ville de Florence (Archivio storico comunale), de celle des Infecondi de Prato, à l’Archivio di Stato de Prato34, ou celles de l’Académie des Affiliati de Pescia, déposées à la section de Pescia de l’Archivio di Stato de Pistoia. Le cas de l’académie siennoise des Intronati est particulier : ses archives sont conservées, de sa création jusqu’aux années 1780, à la Bibliothèque communale des Intronati, qui tire son origine de l’académie elle-même35. De même, la bibliothèque communale de Cortone, qui se crée à la fin des années 1770 à partir des collections de l’académie étrusque fondée en 1726-1727 et occupe aujourd’hui ses anciens locaux, conserve les archives de l’académie36. Certaines archives, passées dans des archives privées, ont également pu être données à des dépôts publics, telles celles de l’Accademia del Casino dei nobili de Volterra, conservées dans le Fonds Sensi Contugi de la bibliothèque Guarnacci de la ville, ou certains livres de compte de l’académie florentine des Affinati, conservés dans l’Archivio Bartolomei de l’Archivio di Stato de Florence. Certains fonds sont arrivés, par voie de donation, dans les archives d’institutions hospitalières ou charitables, comme les archives de l’académie florentine des Aquilotti, actuellement conservées dans les archives de l’hôpital des Innocents de Florence37. Plusieurs bibliothèques conservent également dans leurs fonds manuscrits des ensembles plus ou moins considérables issus d’archives d’académies38. C’est le cas, par exemple, de l’Académie des Alterati, dont le journal pour les années 1569-1605 et un certain nombre de textes réunis en volumes (discours, lezzioni, œuvres poétiques, censures) sont conservés par la bibliothèque Laurentienne de Florence39, ou de l’Académie des Umidi, devenue académie Florentine, dont les Annali pour les années 1540-1582 appartiennent aux collections à la bibliothèque Marucelliana de Florence40.

26Pour d’autres, dans le meilleur des cas, des éléments dérivant de leur activité (registres de délibération, catalogues des membres, registres de comptabilité) se retrouvent actuellement dispersés dans les collections de manuscrits des archives ou des bibliothèques.

  • 41 Pour cerner l’ampleur des sources à mobiliser pour construire l’approche, à l’échelle monographique (...)

27Ce qu’a clairement mis en évidence un récent ouvrage consacré à l’Académie des Alterati (1569-vers 1630) est la nécessité, même lorsque les pièces essentielles des archives de l’académie ont été conservées, de mobiliser un ensemble documentaire beaucoup plus vaste, notamment pour constituer le corpus des productions textuelles des membres de l’académie, restées très souvent manuscrites et dispersées entre de nombreuses bibliothèques. L’étude des membres de l’académie, notamment leurs positions sociale et politique, celle des activités de l’académie inscrites dans une société et un système politique, nécessitent aussi de sortir des seules sources produites par l’académie pour étudier le contexte dans lequel elles ont fonctionné41.

28Reste l’immense majorité des académies désormais dépourvues d’archives propres, qu’elles soient complètes ou résiduelles. La numérisation massive de la production imprimée jusqu’au milieu du xixe siècle réalisée dans les deux dernières décennies auprès de quelques grandes bibliothèques a profondément modifié les pratiques de la recherche documentaire. Ce qui pouvait se comparer naguères à une sorte de pêche à la ligne qui permettait au chercheur, lors de dépouillements divers, de venir à connaissance, de façon plus ou moins aléatoire, de l’existence d’académies ou de « conversazioni », a laissé la place à des recherches systématiques conduites en interrogeant de larges corpus numérisés, accessibles sur des sites autorisant des recherches plein texte comme google.books, archive.org ou Hati Trust Digital Library. Si ces interrogations ont permis d’identifier plusieurs dizaines d’associations, elles doivent nécessairement être ensuite reprises et poursuivies avec des méthodes plus classiques pour informer les diverses rubriques des notices du dictionnaire.

  • 42 Jean Boutier, Philippe Boutry, Serge Bonin (dir.), Les sociétés politiques, vol. 6, Atlas de la Rév (...)

29Si, en effet, l’établissement d’un dictionnaire des académies nécessite d’abord une phase d’inventaire, elle se poursuit par la rédaction d’une notice qui exige un cadre défini à l’avance, afin de proposer un ensemble organisé et cohérent d’informations. L’entreprise a bénéficié d’expériences précédentes comme le dictionnaire des collèges français de Marie-Madeleine Compère et Dominique Julia, déjà cité, ou l’enquête sur les sociétés politiques de la Révolution française, que j’ai dirigée dans les années 1980 avec Philippe Boutry42. La grille finalement retenue a privilégié la simplicité : elle donne les principales caractéristiques formelles (type d’académie, dates d’existence, membres, gouvernance, devise et emblème) ; propose une description de son histoire et de ses activités ; décrit ses sources (archives, sources manuscrites et imprimées ; productions propres) ; se conclut par une bibliographie la plus précise possible. Les lacunes documentaires sont ainsi immédiatement visibles, tout comme les limites qu’elles imposent à la connaissance de l’académie en question.

Premiers résultats

30Examinons, pour conclure, quelques-uns des résultats, encore provisoires, de ce long travail d’inventaire et d’analyse à l’échelle d’une grande région de l’Italie du Centre-Nord, la Toscane.

31Les premiers concernent l’ampleur du phénomène académique, considéré au sens large. Ils confirment et renforcent les données qui, depuis la fin du xviie siècle, montraient à la fois la précocité et l’extension du mouvement académique dans la péninsule italienne. L’inventaire dépasse largement les résultats proposés par le dictionnaire de Maylender, qui a constitué le travail de référence tout au long du xxe siècle. Pour la seule ville de Florence, résultat désormais stabilisé, le nombre d’académies passe de 69 chez Maylender à 168 (+ 143 %) ; pour Sienne, de 61 à 95 (+ 56 %) ; pour l’ensemble de la Toscane, les 319 associations identifiées par Maylender deviennent 527 (+ 65 %), résultats encore provisoires. La sociabilité littéraire et savante constitue bien dans la péninsule un phénomène massif.

32Les villes, et particulièrement les plus importantes d’entre elles, concentrent la majorité des académies. Avec 168 académies à Florence, 95 à Sienne, 28 à Lucques, 27 à Pise et Livourne, 23 à Pistoia, 15 à Cortone et 13 à Arezzo, les principales villes de la région réunissent 75 % des formes de sociabilité intellectuelle ayant existé en Toscane entre xvie et xviiie siècle. La ville « dominante », Florence, abrite à elle seule 32% des académies créées durant la période.

  • 43 Daniel Roche, Le Siècle des Lumières en Province. Académies et académiciens provinciaux, 1680-1789, (...)
  • 44 Daniel Roche, « Académies et académisme : le modèle français au xviiie siècle », Mélanges de l'Écol (...)

33Le phénomène est toutefois bien loin de concerner uniquement les capitales économiques et administratives, les seules qui avaient vu en France la création d’académies privilégiées hors de Paris à partir des années 166043. En Toscane, les académies, présentes dans 53 agglomérations selon Maylender, dans 74 selon notre inventaire provisoire, se déploient bien au-delà des seules « città » – qu’il s’agisse, au sens classique, des agglomérations siège d’évêché ou des villes ayant un statut nobiliaire reconnu par l’ordre de Malte ou par la loi toscane sur la noblesse d’octobre 1750 (14 cités nobles) – pour essaimer dans de petites villes voire des bourgs ruraux, paesi, terre, borghi, pour reprendre la terminologie locale. Nées d’initiatives locales, sans encadrement pas le pouvoir politique, elles diffèrent très fortement du modèle français où intervient très directement le pouvoir de la monarchie administrative44. Elles révèlent une étonnante vitalité d’élites locales qui retrouvent ainsi une capacité collective d’agir qui s’était souvent politiquement affaiblie depuis l'installation du principat des Médicis, à l’exception de la république de Lucques.

Académies et conversazioni en Toscane, xvie -xviiie siècle

34Certes, la cartographie efface ici les différences, car toutes ces créations sont loin d’être équivalentes : elles se distinguent par leur date de création, la durée de leur existence, les types d’activités qu’elles mettent en œuvre, les membres qu’elles réunissent.

  • 45 Curzio Mazzi, La Congrega dei Rozzi di Siena nel secolo xvi, Florence, Le Monnier, 1882, vol. 1, p. (...)
  • 46 Lettre de Tommaso Porcacci à Lodovico Domenichi, 12 mai 1556, in Lettere volgari di Monsignor Paolo (...)
  • 47 Castiglion Fiorentino, Biblioteca comunale, ms. 508 (O-V-26), f. 1vo.
  • 48 Ces évaluations sont basées sur un échantillon partiel d’environ 80 académies (sur les 140 identifi (...)

35Rappelons rapidement quelques caractéristiques essentielles. Les académies dotées de statuts propres apparaissent en Toscane durant les premières décennies du xvie siècle, à peu près au même moment à Florence (Sacra Accademia fiorentina, 1515) et à Sienne (Accademia degi Intronati, 1525 ; Congrega dei Rozzi, 153145) ; leur expansion concerne d’abord les principales villes. Rares sont en effet celles qui sont créées dès le xvie siècle dans des « terre » ou « paesi », comme celles créées à Castiglion Fiorentino, la première, sans doute éphémère, dans les années 1550, par un groupe de huit ou dix « nobilissimi intelletti » à l’initiative du lettré Tommaso Porcacci (1530-1576) dans laquelle « molte sottilissime propositioni, & molti argutissimi quesiti sopra diverse facoltà si son disputati & risoluti »46, la seconde dénommée des Consumati et formée en 159347. Les créations y restent toujours peu nombreuses au siècle suivant, autour d’une quinzaine, en quasi-totalité dans la seconde moitié du siècle48. Elles connaissent en revanche un essor décisif au xviiie siècle : une vingtaine pour les années 1701-1750, une quarantaine pour la seconde moitié du siècle. À noter que nombre d’entre elles – probablement une trentaine – se sont constituées pour construire et faire fonctionner un théâtre.

36L’ample diffusion de la « forme académie » est étroitement liée à la diversité des usages qu’elle peut remplir. Si, bien évidemment, les académies sont avant tout des associations de « letterati » – c’est d’ailleurs la définition qu’en propose, dans les années 1570, un des premiers traités qui leur est consacré –, la forme académie doit son succès à sa plasticité ; elle permet notamment d’associer les plaisirs du divertissement comme le théâtre, l’organisation de concerts et de bals, ou les jeux de cartes pour lesquels elles doivent solliciter un privilège grand-ducal, à des assemblées dédiées aux discussions littéraires, philosophiques, religieuses voire scientifiques. Une adaptation en italien du célèbre guide d’Italie de l’abbé Jérôme Richard propose ainsi une catégorisation des académies florentines dans les années 1770 qui intègre cette double dimension :

  • 49 Descrizione istorica e critica dell'Italia, o Nuove memorie sullo stato attuale del suo governo, de (...)

« Le accademie sono in Firenze in gran numero. […]. Oltre che queste Accademie Letterarie [Crusca, Fiorentina, Apatisti] ve ne sono molte altre che servono in tempo di Quaresima a dare qualche divertimento alla Nobiltà, e Cittadinanza dell’uno e dell’altro sesso. »49

Et de conclure que ce sont ces académies de divertissement qui jouissent désormais d’un plus grand crédit auprès des Florentins. En cela, les petites villes du grand-duché suivent exactement ce que font les principales villes, et la « dominante ».

37La création d’académies à Florence – 168 académies, dont seulement 2 non datées – suit un schéma très différent : pas une courbe ascendante, comme nous venons de le voir, mais une répartition relativement stable au fil des décennies. Les débuts sont certes modestes, avec 13 créations dans les années 1500-1550 ; mais de 1550 à 1750, les créations suivent un rythme régulier, avec 23 à 29 créations par demi-siècle, marqué par un pic exceptionnel dans la seconde moitié du xviie siècle qui connaît 44 créations – résultat, en grande partie, de la dynamique des académies théâtrales – ; la fin de la période (1750-1800) marque un nouvel essor mais, avec 35 créations, elle ne retrouve pas le maximum atteint un siècle auparavant.

38Le nombre élevé d’académies ne doit toutefois pas faire illusion. Il traduit avant tout une démographie académique très particulière. Sur les 168 académies créées entre xvie et xviiie siècle, seules 19 (16%) existent encore durant les deux dernières décennies du xviiie siècle. À l’opposée, sur les 114 dont nous connaissons la durée, parfois avec un peu d’incertitude, 48 (42%) n’ont pas dépassé une décennie d’existence, dont 24 (21%) n’ont pas vécu plus de 2 années. Les académies à Florence sont donc en grande partie des institutions fragiles, voire éphémères. L’une d’entre elle, créée en 1692-1693 pour mettre en scène un spectacle théâtral à l’occasion d’un événement non identifié, a même pris le nom d’Académie des Éphémères (Effimeri). Celles qui s’inscrivent dans la durée se sont dotées de statuts ou de structures matérielles qui assurent en partie leur pérennité. Les plus anciennes sont des académies que l’on peut qualifier de littéraires, même si, au fil du temps, leurs discussions et productions couvrent des domaines beaucoup plus larges : la Florentine (crée en 1541), la Crusca (1583), les Apatistes (1635) ; les plus nombreuses sont celles qui ont créé et assurent la gestion des principaux théâtres florentins – Immobili (1651), Infuocati (1664), Risoluti (1746), Arrischiati (1759), Ingegnosi (1767), Intrepidi (1776) – ainsi que les académies de concerts, apparues beaucoup plus tard – Armonici (1766), Coreofili (1775), Filarmonici Risorti (1799) ; la majorité d’entre elles ont obtenu la protection du grand-duc de Toscane, ce qui contribue à leur stabilité. Les principales académies scientifiques, solidement implantées, sont, à l’exception de celle du Cimento (1657-1667), des créations du xviiie siècle : Botanica (1716), Colombaria (1735), Georgofili (1753). Montrent également une forte capacité à durer les académies plus officielles, comme celle du Disegno (1561), devenue des Beaux-Arts en 1784 ou l’Institut des nobles (1761), ou celles, à but religieux, qui trouvent un appui dans une institution religieuse comme celles des Industriosi (1730) ou de Théologie dogmatique (1753).

39Notons enfin que nombre de celles dont nous ignorons la durée d’existence ne se sont jamais dotées de statuts : apparues pour l’essentiel à partir de la seconde moitié du xviie siècle, ces « conversazioni » – terme qui revient le plus souvent pour les désigner – se réunissent à horaires fixes dans le palais d’une famille de l’aristocratie de la ville (Feroni, Giraldi, Malaspina, Niccolini, Pandolfini, Riccardi, Rinuccini, …) ou dans la bibliothèque d’un savant (letterato) comme le philosophe Orazio Ricasoli Rucellai (1604-1673), le diplomate et homme de lettres Lorenzo Magalotti (1637-1712) ou le médecin Cipriano Targioni (1672-1648), pour des discussions plus libres, selon des fonctionnements qui les distinguent toutefois des salons parisiens de la même époque. Une étude plus approfondie reste toutefois difficile car les sources sont rares, et peu précises à leur sujet.

40Héritier des recensements des académies des xviie et xviiie siècles, le Dizionario storico dell’accademie toscane constitue à la fois le point d’arrivée d’une longue tradition érudite et un nouveau point de départ pour une histoire comparée, à l’échelle italienne, européenne, voire mondiale, des associations savantes. À côté des universités, les académies appartiennent de plain-pied à ces « lieux de savoir » qui ont modelé à leur façon l’espace culturel et intellectuel européen. Leur étude à partir d’un corpus quasi-exhaustif a nécessité à la fois l’enquête collective et le recours à la mise en forme intellectuelle du dictionnaire. Ces deux « bonnes vieilles méthodes », qui ont pu un temps apparaître désuètes et inutilement dispendieuses, Dominique Julia nous a de longue date appris, par l’exemple, qu’elles restaient non seulement indispensables aux historiens mais toujours actuelles. Sans son exemple, indissociable de celui de Marie-Madeleine Compère, nous ne nous serions jamais engagés sur cette voie.

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Notes

1 Jean Boutier, Maria Pia Paoli, Claudia Tarallo (eds), Dizionario storico delle accademie toscane, Pise, Pacini, t. 1, Firenze, 2024. Cet article doit beaucoup au travail en commun, ces dernières années, avec Maria Pia Paoli et Claudia Tarallo, complices exigeantes et passionnées de cette entreprise, qui est encore loin de son achèvement. À elles deux va mon amicale gratitude.

2 Scipione Bargagli, Delle Lodi dell'academie, oratione […] recitata nell'Academia degli Accesi in Siena, Florence, L. Bonetti, 1569 ; Gio. Battista Alberti, Discorso dell'origine delle accademie publiche, e private, e sopra l'impresa de gli Affidati di Pavia…, Gênes, Farroni, Pesagni, & Barbieri, 1633 ; sur le texte d’Alberti, Marc Fumaroli « Academia, Arcadia, Parnassus: trois lieux allégoriques de l’éloge du loisir lettré », in David S. Chambers et François Quiviger (éd.), Italian Academies of the Sixteenth Century, Londres, The Warburg Institute, 1995, p. 15-35.

3 Sur cette nouvelle forme de savoir, cf. Jean-Claude Perrot, « Les dictionnaires de commerce au xviiie siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, XXVIII, 1981, p. 36-67.

4 Anton Francesco Doni, La Libraria di Doni fiorentino, Venise, G. Giolito de Ferrari, 1550, f. 63a.

5 Giovanni Ferro, Teatro d'imprese, Venise, G. Sarzina, 1623 ; les divers index figurent au début de la deuxième partie. Cf. Dorigen Sophie Caldwell, The Sixteenth-Century Italian Impresa in Theory and Practice, Brooklyn, AMS Press, 2004, p. 196.

6 G. B. Alberti, Discorso…, op. cit.

7 Gregorio Leti, L’Italia regnante, Genève, G. et P. de La Pietra, 1676, p. 72-73.

8 Cf. Lucinda Spera, « Malatesta Garuffi, Giuseppe », in Dizionario biografico degli Italiani [désormais DBI], Rome, Treccani, vol. 52, 1999, p. 397-399, et l’introduction de Claire Vovelle à Giuseppe Malatesta Garuffi, Il Maritaggio della virginità, éd. Cl. Vovelle, Rimini, Raffaelli editore, 2006 ; Simone Testa, Italian Academies and Their Networks, 1525-1700: From Local to Global, Londres, Palgrave Macmillan, 2015, p. 41-47, propose une intéressante analyse de l’ouvrage sans toutefois s’intéresser à la collecte de l’information.

9 L’Italia accademica, o sia le accademie aperte a pompa e decoro delle lettere più amene nelle città italiane, Rimini, G. F. Dandi, 1688.

10 Rimini, Biblioteca civica Gambalunga, SC, ms 500.

11 Florence, Biblioteca nazionale centrale, ms. Magl. VIII, 1173, f. 97r, 3 avril 1683.

12 L’opération lancée par Garuffi Malatesta mériterait une enquête spécifique dans les collections de manuscrits des bibliothèques italiennes. Cf., à titre d’exemple, Garuffi Malatesta écrit à la même époque aux académiciens de Gubbio, avec leur réponse : Gubbio, Biblioteca comunale Sperelliana, Fondo del Convento di San Pietro, ms 166, juin 1683 ; en avril 1698, Apostolo Zeno informe le comte Camillo Silvestri que Garuffi Malatesta lui a demandé des notices sur les académies de Rovigo : Apostolo Zeno, Lettere, 2e éd., Venise, Sansoni, 1785, I, p. 16.

13 Daniel Georg Morhof, Polyhistor literarius, philosophicus, et practicus [1688], 4e éd., Lubeck, P. Boeckmann, 1747, t. 1, livre 1, ch. XIV, « De aliis eruditorum societatibus », p. 139-150 ; cf. Françoise Waquet (éd.), Mapping the World of Learning : the Polyhistor of Daniel Georg Morhof, Wiesbaden, Harrassowitz, 2000.

14 Carlo Bartolomeo Piazza, Euseuologio romano, overo delle opere pie di Roma, accresciuto, & ampliato secondo lo stato presente. Con due trattati delle accademie, e biblioteche celebri di Roma, Rome, D. A. Ercole, 1698 (Trattato XII delle accademie romane del secolo passato e presente, p. II-IV); cf. Lisa Roscioni, « Piazza, Carlo Bartolomeo », DBI, vol. 83, 2017, on line.

15 Giacinto Gimma, Idea della storia dell’Italia letterata esposta coll’ordine cronologico dal suo principio fino all’ultimo secolo, Naples, F. Mosca, 1723, vol. 2, chap. XXXVII, « catalogo di alcune accademie italiane » (p. 472-475) ; le chapitre XXVI, « Delle Accademie dell’Italia » en propose une histoire. Cf. une réédition partielle, avec notes et études : G. Gimma, Idea della storia dell’Italia letterata, éd. A. Iurilli et F. Tateo, Bari, Cacucci, 2011. Sur Gimma, Cesare Preti, « Gimma, Giacinto », in DBI, vol. 54, 2000, p. 768-774 ; Antonio Iurilli, « L’abate Gimma e il ruolo delle accademie », in F. Tateo (dir.), Storia di Bari nell’Antico Regime, Bari, Laterza, t. 2, 1992, p. 223-248.

16 G. Gimma, Idea…, op. cit., II, p. 422 ; la proposition est développée aux p. 459-470.

17 Johannes Jarkius (pseudonyme de Johann Gottlieb Krause), Specimen historiae academiarum eruditarum Italiae, Leipzig, Gleditsch, 1725, p. 81-97.

18 Johann Albertus Fabricius, Conspectus thesauri litterarii Italiae, praemissam habens, praeter alia, notitiam Diariorum Italiae litterariorum, thesaurorumque ac corporum historicorum et academiarum subjuncto Peplo Italiae Jo. Matthaei Toscani, Hambourg, C. W. Brandt, 1730, p. 246-279.

19 Francesco Saverio Quadrio, Della storia, e della ragione di ogni poesia, Bologne, Pisarri, 1739, p. 51-113 ; avec un complément, t. VII, 1752, p. 5-26 ; cf. Franco Arato, « Tra nazionalismo e universalismo : Giacinto Gimma e Francesco Saverio Quadrio », in Franco Arato, La Storiografia letteraria nel Settecento italiano, Pise, Edizioni ETS, 2002, p. 139-188.

20 Antonio Zanon, Della utilità morale, economica, e politica dell’accademie di agricoltura, arti e commercio. Opera postuma, Udine, Gallici, 1771, t. VIII : « Catalogo delle accademie che in diversi tempi fiorirono nella città di Venezia, unitamente a quelle di Burano, e di Murano », p. 280-293 ; « Catalogo delle altre Academie d’Italia che fiorirono dal secolo xiii fino al presente », p. 303-328. Cf. L. Cargnelutti, « Zanon Antonio, economista e imprenditore », in Nuovo Liruti. Dizionario biografico dei Friulani, II, L’età veneta, éd. Cesare Scalon, Claudio Griggio et Ugo Rozzo, Udine, Forum, 2009, p. 2625-2634 ; Giuseppe Gullino, « Zanon, Antonio », DBI, vol. 100, 2020, https://www.treccani.it/enciclopedia/antonio-zanon_%28Dizionario-Biografico%29/ (consulté le 29.01.2024).

21 Eric W. Cochrane, Tradition and Enlightenment in the Tuscan Academies, 1690-1800, Rome, Edizioni di Storia e Letteratura, 1961, p. 45

22 Comte Paolino Mastai Ferretti, Notizie storiche delle accademie d'Europa con una relazione piu diffusa dell'accademia nobile ecclesiastica di Roma ristaurata dal sommo pontefice Pio Sesto felicemente regnante…, Rome, Lazzarini, 1792 ; sur Paolino Mastai Ferretti (1745-1820), Philippe Boutry, Souverain et pontife. Recherches prosopographiques sur la curie romaine à l’âge de la Restauration (1814-1846), Rome, École française de Rome, 2002, p. 589-590.

23 Giammaria Mazzuchelli, Gli scrittori d'Italia, cioè, Notizie storiche e critiche intorno alle vite e agli scritti dei letterati italiani, Brescia, Bossini, vol. 1, partie 1, 1753, prefazione, non paginée. 

24 Girolamo Tiraboschi, Storia della letteratura italiana di Girolamo Tiraboschi, della Compagnia di Gesù, bibliotecario del serenissimo Duca di Modena, Modène, presso la Società tipografica, 1772-1782, t. 1, 1ère partie, 1777, p. 112-161 (pour le xvie siècle) ; t. VIII, 1780, p. 33-45 (pour le xviie siècle). La seconde édition (1787-1794) propose une version fortement élargie de ces deux textes.

25 Comte Giambattista Roberti, Dizionario delle Accademie d’Italia Dimostrate con Documenti, ms., Bibliothèque communale de Bassano del Grappa, Mss. 31.c.10.1-13 ; une copie partielle est conservée à Venise, Museo civico Correr, fonds Cicogna, ms. 3010-3013. Sur Giambattista Roberti, Giuseppe Jacopo Ferrazzi, Dei Co[nti] Roberti e dei Roberti illustri, Bassano, Tipografia Baseggio, 1864, p. 24-28 ; Agostino Brotto Pastega, « La famiglia, il palazzo e gli illustri Roberti », L’Illustre Bassanese, n° spécial, Palazzo Roberti, Juin 1999, p. 28-29.

26 Michele Maylender, Storia delle accademie d’Italia, Bologne, Cappelli, 5 vol., 1926-1939. Un index géographique est fourni par Giuseppe Gabrieli, « Repertorio alfabetico e bibliografico delle Accademie d'Italia nell'opera di M. Maylender », Accademie e biblioteche d'Italia, X, 1936, n. 2, p. 71-99. Sur M. Maylender, Luigi Rava, « Michele Maylender e la sua opera sulle accademie d’Italia », in M. Maylender, Storia delle accademie, op. cit., vol. 1, p. VII-XXIV ; Franco Minonzio, « La Storia delle Accademie d’Italia », Biblioteche oggi, XI, 8, 1993, p.72-74 ; Federico Carlo Simonelli, « Un telaio dagli innumerevoli fili. La Storia delle accademie d’Italia di Michele Maylender tra Mitteleuropa, autonomismo e mitografia irredentista », in La Cultura italiana a Fiume. Risvolti linguistici, letterari e storici, Atti del Convegno (Università di Fiume, 24-25 marzo 2022), éd. G. Mazzieri-Sankovic et al., in Fiume. Rivista di studi adriatici, 47, 2022, p. 61-74.

27 Voir en particulier Amedeo Quondam, « L’Accademia », in A. Asor Rosa (éd.), Letteratura italiana, I. Il letterato e le istituzioni, Turin, Einaudi, 1982, p. 823-898.

28 Vincenzo de Caprio, « I cenacoli umanisti », in A. Asor Rosa (éd.), op. cit., p. 799-822.

29 Selon Hankins, la première mention d’une « accademia platonica » à Florence auprès des Médicis remonterait à 1577, dans un écrit du philosophe Francesco Verino : James Hankins, « The Platonic Academy of Florence and Renaissance Historiography », in Forme del neoplatonismo : Dalla eredità ficiniana al platonismo di Cambridge, Atti del convegno Firenze, 25-27 ottobre 2001, éd. Luisa Simonetti, Florence, Olschki, 2007, p. 83-84.

30 Marie-Madeleine Compère, Dominique Julia, Les Collèges français : 16e-18e siècles, Paris, INRP-CNRS, 1984-2002, 3 vol. ; le 4e volume est en cours de rédaction par Dominique Julia.

31 Elle est dotée d’un inventaire publié : L'Archivio dell'Accademia. Accademia dei Rozzi. Inventario a cura di Mario de Gregorio, Sienne, Protagon Editori Toscani, 1999.

32 Deux exemples d’archives inventoriées : Accademia economico-agraria dei Georgofili, Archivio storico : inventario, 1753-1911, éd. par Antonietta Morandini, Francesca Morandini, Giuseppe Pansini, Florence, Accademia economico-agraria dei Georgofili, 1970-1977, 4 vol. ; L'Accademia degli Immobili, « proprietari del teatro di via della Pergola in Firenze ». Inventario, éd. par Maria Alberti, Antonella Bartoloni, Ilaria Marcelli, Rome, Ministero per i beni e le attività culturali, Direzione generale per gli archivi, 2010.

33 Elios Maffei, « L’archivio dell’Istituto o Casino dei Nobili di Firenze », Archivio storico italiano, CXXV, 1967, p. 246-265.

34 Guido Pampaloni, « Inventario dell'archivio dell'Accademia degli Infecondi poi Società dei Misoduli », Archivio storico pratese, 35, 1959, p. 49-50.

35 Seuls quatre volumes sont conservés, pour les années 1788-1802, dans le fond « Accademie degli Intronati e dei Rinnovati » de l’Archivio di Stato de Sienne.

36 Guerriera Guerrieri, Nicola Fruscoloni, Vittore Cocchi, La Pubblica biblioteca del comune e dell’accademia etrusca di Cortona, Cortone, Calosci, 1978, p. 157 : les manuscrits 433-461 correspondent à l’activité de l’académie jusqu’au milieu du xixe siècle.

37 Archivio dell’Istituto degli Innocenti, Florence, « Accademie, corporazioni ed enti diversi », 11840-11847.

38 Sur ces types de fonds, cf. les travaux coordonnés par Emmanuelle Chapron et Fabienne Henryot (dir.), Archives en bibliothèques (xvie-xxie siècles), Lyon, ENS Éditions ; Institut d’histoire du livre, 2023.

39 Bibliothèque Mediceo-Lorenziana, Ms. Ashburnham 558-562. Une description complète in Deborah Blocker, Le Principe de plaisir. Esthétique, savoirs et politique dans la Florence des Médicis (xvie-xviie siècle), Paris, Les Belles Lettres, 2022, p. 604-607.

40 Bibliothèque Marucelliana, Florence, Ms. B III 52-54.

41 Pour cerner l’ampleur des sources à mobiliser pour construire l’approche, à l’échelle monographique, d’une académie, cf. l’inventaire critique des sources manuscrites utilisées pour étudier l’académie florentine des Alterati par D. Blocker, op. cit., p. 561-621.

42 Jean Boutier, Philippe Boutry, Serge Bonin (dir.), Les sociétés politiques, vol. 6, Atlas de la Révolution française, Paris, Éditions de l’EHESS, 1992.

43 Daniel Roche, Le Siècle des Lumières en Province. Académies et académiciens provinciaux, 1680-1789, Paris, Mouton, 1978, 2 vol. ; rééd., Paris, éd. de l’EHESS, 1989.

44 Daniel Roche, « Académies et académisme : le modèle français au xviiie siècle », Mélanges de l'École française de Rome. Italie et Méditerranée, CVIII, 1996. p. 643-658.

45 Curzio Mazzi, La Congrega dei Rozzi di Siena nel secolo xvi, Florence, Le Monnier, 1882, vol. 1, p. 342-379.

46 Lettre de Tommaso Porcacci à Lodovico Domenichi, 12 mai 1556, in Lettere volgari di Monsignor Paolo Giovio vescovo di Nocera raccolte per M. Lodovico Domenichi, Venise, G.-B. et M. Sessa, 1560, f. 116a-119a.

47 Castiglion Fiorentino, Biblioteca comunale, ms. 508 (O-V-26), f. 1vo.

48 Ces évaluations sont basées sur un échantillon partiel d’environ 80 académies (sur les 140 identifiées en dehors des villes), dont 20 ne sont pas encore datées.

49 Descrizione istorica e critica dell'Italia, o Nuove memorie sullo stato attuale del suo governo, delle scienze, delle arti, del commercio, della popolazione, e dell'istoria naturale, Londra, s.e., 1781, t. III, p. 149.

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Table des illustrations

Légende Académies et conversazioni en Toscane, xvie -xviiie siècle
URL http://journals.openedition.org/acrh/docannexe/image/30716/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 252k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Jean Boutier, « Une enquête en cours : Le Dictionnaire historique des académies en Toscane, XVIe-XVIIIe siècles »L’Atelier du Centre de recherches historiques [En ligne], 28 Bis | 2024, mis en ligne le 29 janvier 2024, consulté le 17 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/acrh/30716 ; DOI : https://doi.org/10.4000/acrh.30716

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Auteur

Jean Boutier

Directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences sociales, Jean Boutier a consacré de nombreux travaux à l’histoire sociale, politique et culturelle de l’Europe moderne ; ses domaines de travail concernent notamment l’État monarchique, les aristocraties, les milieux savants et les processus de politisation. Ses différents terrains d’enquête (France, Italie, monde britannique) l’ont conduit à développer des études comparatives concernant les formes de la sociabilité politique, les cultures aristocratiques ou les processus de la communication savante, inséparables d’une pratique réflexive mêlant épistémologie pratique et historiographie critique. Parmi ses publications récentes, il a assuré la direction, avec Sandro Landi et Jean-Claude Waquet, du Temps des Italies. xiie-xixe siècles, Paris, Passé Composés – École française de Rome, 2023 ; avec Maria Pia Paoli et Claudia Tarallo, du Dizionario storico delle accademie toscane, Pise, Pacini, vol. 1, Firenze, 2024.

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