Éditorial
Texte intégral
1Une fois n’est pas coutume, ce numéro n’inclut pas de dossier, contrairement à certains numéros précédents qui pouvaient en inclure plusieurs. Ces aléas sont inévitables. Nous sommes néanmoins vigilants à l’équilibre entre les numéros. De ce fait, nous poursuivons notre investissement de nos communautés pour inciter la publication dans notre revue de travaux de recherche et d’intervention permettant une vitalité des débats sur les cadres théoriques et méthodologiques de l’analyse de l’activité et sur nos approches pour contribuer à améliorer les conditions de réalisation de l’activité et de prise en compte de sa soutenabilité. N’hésitez pas à contribuer à la revue, et à nous proposer, outre des articles, des dossiers, des textes permettant d’alimenter nos différentes rubriques, comme celles permettant de faire connaître des ouvrages intéressants pour la communauté (rubrique recension), de présenter succinctement votre thèse ou votre HDR (rubrique thèses et HDR), d’alimenter le débat au sein de la communauté (rubrique débats), ou encore de faire connaître des textes historiques peu disponibles au sein de la communauté (rubrique regards historiques). Enfin, nous soulignons l’intérêt d’organiser une journée d’étude valorisée ensuite dans la revue sous la forme d’un dossier, mais qui est aussi l’occasion pour la revue de mettre en avant la façon dont elle contribue aux questions vives sur le travail. La prochaine journée d’étude aura lieu le 1er octobre 2025, et s’intitule « Placer l’activité au cœur de l’attractivité du travail ». L’annonce de la journée est sur le site et le programme sera disponible avant l’été. Nous espérons qu’il intéressera de nombreuses personnes et que la journée sera un moment riche de rencontres et de débats. Un dossier fera suite à cette journée. Ainsi, au-delà des personnes présentant ce jour-là, un appel à contributions permettra d’accueillir d’autres textes que vous pourriez souhaiter nous soumettre.
2Vous trouverez dans ce numéro six articles en varia. Trois articles sont issus de la journée organisée en 2023 intitulée « Le corps dans l’activité à l’heure de la dématérialisation » à laquelle avait participé Lauriane Domette, collègue dont l’énergie et la qualité de travail nous font aujourd’hui défaut. Ces trois articles traitent de la façon dont le numérique impacte l’activité dans la façon dont le corps est investi, que ce soit dans le rapport à l’objet de l’activité, à autrui, ou dans la gestion de soi. Ainsi, un premier article proposé par Mathilde Sergent-Mirebault intitulé « Quel est le goût des archives numériques ? Corps, sens et savoirs archivistiques à l’épreuve de la dématérialisation » s’appuie sur des enquêtes menées sur le temps long auprès de différents services d’archives. L’autrice met en lumière ce qu’elle nomme « la masse informationnelle numérique » qui vient modifier les repères sensoriels et l’engagement du corps, autant que les opérations intellectuelles mobilisées dans l’activité. Un deuxième article, porté par Juliette Stéphan, Maria Ianeva, Emmanuel Poussard, Corinne Gaudart et Marc-Éric Bobillier Chaumon, intitulé « De la co-localisation à la co-présence : penser le travail dans les organisations hybrides », résulte d’une recherche-intervention réalisée à la demande d’un institut paritaire d’une entreprise de télécommunication. Cet article, en s’affranchissant de la dichotomie entre présence et absence dans un lieu donné, aborde la façon dont, dans des configurations hybrides, collectifs et individus peuvent inventer de nouvelles formes de co-présence de qualité. Enfin, le texte de Noëmie Morvan, Marc-Éric Bobillier Chaumon et Corinne Gaudart intitulé « Les dysfonctionnements informatiques sont-ils seulement “irritants” ? Comment des bugs récurrents affectent l’activité et la santé d’agents d’une administration publique » mêle approche clinique et ergonomique de l’activité. Il donne à voir ce que les acteurs qualifient d’« irritant », et que les auteurs vont traiter comme des obstacles sociotechniques à l’activité. Ce sont des révélateurs d’une construction et d’une régulation des rapports à autrui, à soi, et à la dimension pragmatique de l’activité.
3Trois autres articles complètent ce numéro et abordent différents types d’interaction, qu’ils renvoient aux gestes interactifs, à l’attention à porter à autrui dans son accompagnement, ou au caractère didactique. Ainsi, le texte de Robin Héron, Stéphane Safin, Michael Baker, Zhuoming Zhang, Jessalyn Alvina, Éric Lecolinet et Françoise Détienne intitulé « Réélaboration des règles de sécurité en contextes interpersonnels : le cas du toucher en temps de Covid-19 » s’intéresse aux processus mis en place dans des contextes de travail et personnel pour adapter les règles officielles de santé et de sécurité. Il montre comment les personnes trouvent un équilibre entre les mesures de sécurité sanitaire prescrites et les situations d’interaction spécifiques afin de préserver leur santé et/ou la relation. Le texte de Cecilia Mornata et Marianne Zogmal intitulé « Les dimensions interactionnelles du care : entendre et comprendre une personne accompagnée dans le domaine éducatif » présente une recherche menée pour étudier les effets, dans les pratiques professionnelles associées au care, de l’analyse collective de traces filmées. Cette étude s’appuie sur une approche interactionnelle des échanges qui ont lieu lors de cette analyse. Enfin, le texte de Robin Héron, Christine Vidal-Gomel, Aurélie Lainé et Iza Marfisi, intitulé « Tablettes hors la classe : l’activité de l’enseignant pour et durant une sortie avec ou sans l’application SituLearn », met en lumière comment le nouvel outil (la tablette) transforme l’activité de l’enseignant et des élèves ainsi que leurs interactions didactiques, sans que cela ait été totalement anticipé dans la conception de l’artefact.
4Vous trouverez aussi d’autres contributions à ce numéro comme les recensions. Celle réalisée par Magali Prost concernant l’ouvrage d’Isabelle Olry-Louis et Caroline Arnoux-Nicolas intitulé « Le sens des transitions et des bifurcations professionnelles ». Celle écrite par Céline Poret à propos de l’ouvrage de Livia Scheller intitulé « La force collective de l’individu. Histoires de travail et clinique de l’activité ». Et enfin l’analyse proposée par Gaëtan Bourmaud de l’ouvrage de Marc-Éric Bobillier Chaumon « Les transformations digitales à l’épreuve de l’activité et du travail : comprendre et accompagner les mutations technologiques émergentes ».
5Vous pourrez aussi découvrir quatre thèses. Celle d’Étienne Fournier-Aubret, intitulée « Intérêt de la prise en compte des variabilités de l’activité et de l’acceptabilité dans le cadre d’une conception centrée utilisateurs des situations de travail collaboratives Humain-Robot », porte sur l’étude de la mise en œuvre de la cobotique dans une industrie à risque. Ce travail conduit l’auteur à construire, sur le plan théorique, un cadre intégrant les modèles de variabilités au travail et précise les effets de la collaboration cobotique. Il propose, sur le plan pratique, une grille pour identifier les variabilités et formule des recommandations facilitant l’implémentation réussie de cobots. Celle de Camille Julienne qui s’intitule « Étude des reconfigurations et de l’expérience vécue des ergonomes dans le cadre de l’évaluation des interventions complexes : évaluer pour comprendre et transformer l’activité des intervenants » : en mettant en œuvre deux approches, celle de l’évaluation réaliste et celle de la caractérisation de l’expérience vécue à des moments particuliers de l’intervention, le travail d’analyse réalisé permet alors à l’autrice de proposer une démarche globale et intégrée d’évaluation compréhensive des interventions ergonomiques susceptibles d’outiller la réflexivité des intervenants. La lecture de cette thèse peut aussi nous inciter à revisiter les travaux de François Guérin et la façon dont il a contribué à une culture de l’intervention rigoureuse et outillée au sein de la communauté. Celle de Sylviane Lopez, intitulée « Transformation de l’activité d’apprenants de l’enseignement agricole en situation de presque accident. Une approche énactive », qui traite des comportements et de l’attitude d’apprenants vis-à-vis des situations risquées et ce qui influence leur prise de décision. L’approche permet à la fois de saisir les expériences subjectives, préoccupations, croyances et intentions des jeunes en situation professionnelle risquée. Elle met en avant la nécessité d’instaurer, dans le cadre des apprentissages, une véritable culture de la santé et de la sécurité au travail. Enfin, celle de Benoît Dabouis intitulée « Un langage pour assister la conception d’UX – proposition d’un lexique, d’un modèle de chronique et d’une grammaire ». Se situant à l’interface entre ergonomie et sciences de la conception, le travail conduit dans une entreprise proposant des prestations d’UX Design met en lumière le manque d’un référentiel commun pour concevoir l’UX, et le manque d’outils pour assister le diagnostic des activités de conception d’UX. Il débouche sur une proposition et le test de trois outils destinés à construire un langage de conception d’UX.
6Nous vous remercions de votre intérêt et de vos contributions à la revue et nous vous souhaitons une bonne lecture.
Pour citer cet article
Référence électronique
Marianne Cerf, Justine Forrierre, Yvon Haradji, Nadia Heddad et Alexandre Morais, « Éditorial », Activités [En ligne], 22-1 | 2025, mis en ligne le 15 avril 2025, consulté le 22 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/activites/11084 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13ra7
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