Le Tremblay-sur-Mauldre – La Ferme d’Ithe
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Année de l'opération :
2018Numéro d’opération :
1010742Chronologie :
Antiquité, Antiquité gréco-romaine, Antiquité romaine, époque médiévale, époque moderneNature de l'opération :
fouille programméeNotes de la rédaction
Organisme porteur de l’opération : Université Paris IV-Sorbonne/Université de Paris I Panthéon-Sorbonne
Blin O. (dir.), avec la collaboration de De Mecquenem C., Fleury L., Calligaro G. 2019 : Le Tremblay-sur-Mauldre (Jouars-Pontchartrain), « La Ferme d’Ithe » (78 – Yvelines), vicus antique et ferme cistercienne. Campagne 2018, APSADiodurum, université Paris-Sorbonne (Paris IV), École nationale des Chartes, Paris, Inrap CÎF, UMR 7041 ArScAn Nanterre, SRA d’Île-de France, 207 p.
Texte intégral
1L’agglomération antique est située dans la vallée de La Mauldre, au carrefour de plusieurs voies dont deux sont archéologiquement avérées. L’une, d’est en ouest, reliait Paris (Lutecia) à Dreux (Durocasses), l’autre, du sud vers le nord, permettait certainement, depuis Orléans (Cenabum), de rejoindre la vallée de la Seine. Les éléments fournis par la photographie aérienne montrent par ailleurs plusieurs embranchements, en particulier vers le sud-ouest, sans doute vers Chartres (Autricum), par l’actuel village de Bazoches-sur-Guyonne, et vers le nord-est en direction des Mureaux, autre site d’agglomération.
Fig. 1 – Plan général du site réalisé d’après les vues aériennes

Photographies aériennes 1976-1996 : D. Giganon, P. Laforest (Service archéologique départemental des Yvelines), J.-M. Lemoine, F. Zuber et les relevés des fouilles 1994-1999 (S. Eusèbe, P. Lenhardt et équipe de fouille Afan/Inrap) ; analyse : O. Blin, J.-M. Morin (Inrap) ; DAO : J.-M. Morin (Inrap).
2C’est un vicus, comme l’atteste un fragment d’inscription découvert en 1996 et dont le mot vicani, nous est parvenu complet ; c’est actuellement le seul clairement identifié de la Civitas Carnutum. Son statut et sa situation en limite de ce territoire, à la frontière avec les Parisii, en font donc l’un des rares vici du nord de la Gaule. Il est identifié à Diodurum, étape située d’après l’un des Itinéraires d’Antonin à 15 lieues de Paris (Lutecia) et à 22 de Dreux (Durocasses) sur l’une des routes menant à Rouen (Rotomagus). Le nom même de Jouars, église et hameau installés sur une petite éminence à environ 400 m à l’est du site, le long de la voie antique, dériverait en effet du toponyme antique, lui-même construit sur les racines gauloises divo (divin, sacré) et durum (bourgade, village), devenu, par corruption au bas-latin avec retranchement de la lettre initiale, Iodurum puis Iotrum ou Jotrum.
3La « Ferme d’Ithe » qui donne son nom actuel au site et dont les ruines sont encore visibles au cœur de la vallée, est attestée au début du xiie s. Elle appartient à l’abbaye cistercienne de Notre-Dame des Vaux de Cernay, et consiste en une grange, « la Grange d’Ayte », et terrains en dépendant. Elle demeure domaine cistercien jusqu’au xviie s. En 1692, Louis Phélypeaux, seigneur de Pontchartrain, rachète le domaine et entreprend d’importants travaux dont rendent compte plusieurs documents d’archives.
4Suite aux opérations d’archéologie préventive menées sur le site antique de 1994 à 1999 dans le cadre de la déviation de la RN 12, un projet de fouille programmée a été proposé à l’emplacement de la Ferme cistercienne en 2003 au Service régional d’archéologie d’Île-de-France.
5Durant l’été 2004, une première série de sondages de reconnaissance du sous-sol, a été engagée sur la parcelle correspondant aux ruines de la ferme. Celles-ci avaient été dégagées de la végétation qui les emprisonnait durant l’année 2003.
6Ces sondages visaient la reconnaissance et l’identification de la sédimentation de ce secteur du site, où se trouve le carrefour de deux axes antiques devenus chemins médiévaux, non seulement pour la période gallo-romaine, mais également pour les époques médiévales et modernes.
7Les bases d’une première approche du bâti, essentiellement descriptive et photographique, en vue de son étude exhaustive, avaient également été mises en place durant cette campagne.
8En 2005, une campagne probatoire avait permis d’engager la fouille d’un secteur de 100 m2 au nord de l’espace bâti de la ferme, de dégager les premiers niveaux (modernes et ponctuellement médiévaux) du bâtiment d’habitation cistercien fortement ruiné et d’amorcer les premiers relevés systématiques du bâti.
9Ainsi, durant 4 années (2006-2010 après les deux années de sondages et probatoire en 2004 et 2005), trois zones de fouilles ont été ouvertes (à raison d’un mois par an). Les premières années, les campagnes ont comporté des phases importantes de dégagement et de fouille des niveaux de destruction et d’effondrement des bâtiments de la ferme qui recouvraient les derniers niveaux modernes d’occupation (xviie-xxe s.). Le parti pris fut d’ailleurs d’opter pour une fouille stratigraphique exhaustive de tous les niveaux y compris les plus récents.
10En 2015, une demande de reprise du site a été déposée auprès du SRA d’Île-de-France dans l’optique de relancer une campagne programmée dont les objectifs s’attachaient à compléter la connaissance du bâti médiéval, en plus de la continuité des fouilles menées sur les secteurs antiques. La CTRA a validé ce projet et une année probatoire a été effectuée en 2016 suivi d’une triennale 2017-2019.
11Pour la période antique, la campagne 2019 s’est axée tout d’abord sur le sondage ouvert sur le tracé de la voie antique Orléans-Vallée de la Seine qui longe la façade occidentale de la Ferme cistercienne et dont le tracé a déjà été ponctuellement reconnu lors des fouilles préventives de 1994-1998. Les radiers supérieurs ont fonctionné dans ce secteur, sans doute pour l’accès à l’ensemble du bâti médiéval, jusqu’au xixe s. sans discontinuité et avec des recharges régulières. Confirmation a en effet été apportée cette année que les recharges supérieures se placent dans une stratification continue depuis le début du ier s. apr. J.-C..
12Par ailleurs, l’exploration menée depuis 2006 d’un secteur situé au nord du site, d’un quartier d’habitation antique bordant l’une des rues principales de l’agglomération gallo-romaine, s’est poursuivi. Plusieurs niveaux correspondent à des couches d’arasement de cette partie du site antique ont été reconnus avec, ponctuellement, des témoins des occupations tardives (tranchées de récupération, négatifs de poteaux…). Comme en 2018, dans le cadre du Chantier-École, une approche manuelle surfacique de ces niveaux, par passes successives, a été décidée afin de disposer d’un échantillonnage exhaustif des mobiliers, avec tamisage complet des couches, ce qui a permis de récolter de nombreuses petites espèces monétaires tardives qui, sans cela, n’auraient pas été, pour la plupart, découvertes. Les niveaux tardifs, bien qu’attestés par les mobiliers, apparaissent assez arasés et remaniés dans ce secteur avec du mobilier résiduel important. Néanmoins, des aménagements sur poteaux sont ponctuellement présents, mais la nature du contexte sédimentaire de « terres noires » ne facilite pas leur reconnaissance. Les vestiges du bâti du iiie s. sont en revanche présents mais très érodés. Il faut sans doute relier cette situation à l’aménagement du lieu pour les besoins de la ferme médiévale et moderne.
13Pour la période médiévale, cette campagne s’est inscrite dans la continuité de celles de 2017 et 2018. Elle a concerné la reconnaissance et la fouille des niveaux de la chapelle cistercienne. Relevés, analyse du bâti et sondages complémentaires de vérification au droit des élévations conservées et identifiées dans l’une des granges de la ferme moderne. Les résultats ont été confrontés à la reprise du sondage exploratoire réalisé en 2004, permettant sa relecture stratigraphique et sa ré-interprétation. Les vestiges d’un espace dédié à une activité métallurgique (xive-xvie s.) ont été découverts au nord de l’espace investigué.
14Par ailleurs, une reprise de l’étude architecturale du bâtiment d’habitation cistercien, par l’analyse des relations architecturales entre les différents éléments bâti (murs, fondations…) a été opérée afin de confirmer les différents états et phases d’aménagement.
15Pour finir, la campagne a également permis le dégagement d’un petit bâtiment dont l’état xixe-xxe s. a vocation de poulailler. Néanmoins, l’observation des maçonneries laissait percevoir au moins un état ancien (typologie de la construction, matériaux utilisés…). Par ailleurs, un plan d’intendance du xviiie s. indique à cet emplacement le symbole d’un moulin. Les différents états sont confirmés, mais il reste à certifier la fonction éventuellement hydraulique du lieu (situé en aval du vivier-mare cistercien, bien attesté par les cartes anciennes) par la reconnaissance d’un éventuel bras d’amenée d’eau.
16Pour conclure, on signalera que le site de Diodurum/La Ferme d’Ithe, a été retenu au cours de l’année 2016 pour devenir le chantier-école de l’École nationale des Chartes (étudiants de première année). L’année 2017 a donc initiée pour la première fois la convention liant l’Apsa-Diodurum et l’ENC, prolongée en 2018.
17Il s’agit d’assurer une formation et sensibilisation aux problématiques de l’archéologie, à la diachronie et aux rapports (le site ici s’y prête spécialement) entre sources documentaires et sources archéologiques. Les étudiants bénéficient de deux semaines de formation à ces questions avec pratique de terrain (fouille et post-fouille).
18Le site est également inscrit comme chantier-école de l’université Paris IV Sorbonne pour les étudiants de Master 1 et 2 (cours de Nathalie Ginoux). L’objectif est de mettre en contact les étudiants désireux d’approfondir leur formation obligatoire à l’archéologie de terrain dans le cadre du cursus LMD avec divers partenaires institutionnels et experts dans divers domaines (archéologie du bâti, paléoenvironnement, recherches en archives, cartographie etc.). Il faut poursuivre également, à travers des sujets de mémoire de Master, des apprentissages réflexifs, notamment mettant en jeu l’utilisation des hautes technologies.
19Plusieurs stages de formation (céramologie, paléométallurgie, topographie) ont été dispensés aux étudiants durant les 3 semaines de campagne. Leur formation a intégré l’étude primaire du mobilier et le relevé archéologique (stratigraphie et planimétrie).
20Ce projet de programmation archéologique contribue donc concrètement à la formation des étudiants en Master aux nouvelles technologies en offrant le cadre d’un chantier expérimental à grande échelle pour les nouvelles technologies dans une perspective interdisciplinaire et combinée pour les différents instruments (relevés scanner laser, photogrammétrie et modélisation 3D).
21Par ailleurs, la Ferme d’Ithe, en dehors des vestiges enfouis de l’agglomération antique, est à ce jour le seul site de ferme cistercienne, fouillé et étudié en Europe. Il s’inscrit donc dans le développement en cours des recherches menées au sein de Sorbonne Université sur l’architecture cistercienne.
22Le contexte scientifique diachronique ainsi que les différentes configurations des vestiges archéologiques, relevant à la fois de l’archéologie urbaine, de la fouille en milieu rural et en milieu humide, de l’archéologie du bâti, offrent le cadre idoine au développement d’un tel chantier-école universitaire en Île-de-France, centré spécifiquement sur la formation des étudiants de Master aux technologies innovantes pour la fouille, l’étude, la mise en valeur et la médiation en direction des différents publics.
Table des illustrations
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Titre | Fig. 1 – Plan général du site réalisé d’après les vues aériennes |
Crédits | Photographies aériennes 1976-1996 : D. Giganon, P. Laforest (Service archéologique départemental des Yvelines), J.-M. Lemoine, F. Zuber et les relevés des fouilles 1994-1999 (S. Eusèbe, P. Lenhardt et équipe de fouille Afan/Inrap) ; analyse : O. Blin, J.-M. Morin (Inrap) ; DAO : J.-M. Morin (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/112729/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 741k |
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Titre | Fig. 1 – Plan de la ferme d’Ithe avec les zones fouillées |
Crédits | Topographie et DAO : P. Lenhardt. |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/112729/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 441k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Olivier Blin, « Le Tremblay-sur-Mauldre – La Ferme d’Ithe » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Île-de-France, mis en ligne le 26 novembre 2021, consulté le 24 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/112729
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