Saint-Martin – Baie-Rouge
Texte intégral
1Le gisement de Baie-Rouge se trouve dans la zone ouest de plateaux calcaires de l’île de Saint-Martin, appelée Terres-Basses. Ce site d’occupation se trouve en haut de plage, sous le couvert végétal des premiers grands arbres de la forêt littorale, à une altitude d’environ 10 m.
2Les premières publications concernant le site de Baie-Rouge (Red Bay) sont attribuées aux Bullen en 1961. Ces deux archéologues mentionnent quelques objets mobiliers découverts par l’anthropologue Keur en 1957 près de Red Pond dans les Terres-Basses. Ce site a ensuite été étudié par M.P. Sypkens Smit en 1982 qui fouilla plusieurs sondages totalisant 13 m2 au niveau du chemin d’accès qui mène à la plage. Au cours du mois de juillet 1993, l’Association archéologique Hope Estate fut avertie de la découverte de nombreux tessons de céramiques et de restes coquilliers au cours de la construction d’un mur d’enclos autour d’une villa. La richesse en mobilier archéologique et la menace de destruction qui pesait sur le site ont conduit à réaliser une petite opération de sauvetage décidée par le Service régional de l’archéologie afin de délimiter le site à l’intérieur de la propriété et d’en caractériser la ou les composantes culturelles. Ce chantier s’est déroulé entre août et septembre 1994.
3Les fondations ont été creusées dans le sédiment sableux lors de la construction du mur et nous avons pu observer sur une longueur de 40 m des tas de sable contenant le matériel issu de la tranchée. Le long du mur, à 27 m de la grille d’entrée et 1 m à l’intérieur de la propriété, apparaissait un talus s’étendant sur 12 m vers le nord.
4Après avoir tamisé les tas de sable issus de la tranchée de fondation du mur et observé la qualité et la fréquence du mobilier récupéré, nous avons effectué 12 sondages de 40 x 40 cm perpendiculairement au mur, chaque sondage étant espacé de 5 m.
5L’observation du matériel issu de ces sondages et les comptages nous ont permis de déterminer la zone des dépôts qui forme un demi-cercle de 40 m de long sur 8 à 10 m de large.
6Nous avons ensuite réalisé une coupe de 8 m de long. Cette coupe stratigraphique d’orientation nord-ouest – sud-est, a permis l’observation de plusieurs niveaux d’occupation et a été affinée en réalisant deux sondages de 2 x 2 m. De la base au sommet, nous avons observé trois niveaux d’occupations différents, dont le mobilier appartient à un même horizon culturel.
7Au niveau du sondage J1, nous avons découvert une sépulture humaine. Le défunt se présentait en décubitus dorsal, les jambes repliées sur le flanc gauche en position dite fœtale. Le corps était orienté nord-sud, la tête au sud. Le mobilier funéraire consistait en un racloir en Codakia orbicularis posé sur une demi céramique à deux points d’inflexion, comportant deux anses nasiformes, un Cittarium pica, posé sous le talon droit, une hache en radiolarite, découverte en bord de fosse, et un gros bloc d’andésite posé sous la tête et la partie supérieure du flanc gauche.
8Les études préliminaires effectuées sur les céramiques montrent une prédominance de la cuisson réductrice et de surfaces lissées. Plus de 60 % des céramiques étudiées ont une épaisseur comprise entre 7 et 10 mm. Les bords sont en majorité arrondis et les fonds de récipient sont convexes. Les formes les plus courantes sont des bols et marmites en demi sphère et les bols à ouverture restreinte, ainsi que les platines à manioc à bord arrondi. Les décors sur céramique consistent en des engobes rouges intérieures ou extérieures, des décors modelés-incisés, sur pâte humide, des incisions sur pâte sèche, des figurines modelées anthropomorphes ou zoomorphes, des papules, des anses et des pointillés sur les bords de certains plats. Les formes et les décors des poteries de Baie Rouge sont très semblables à celles observées sur le site de Atajadizo en République dominicaine et on y rencontre également des similitudes avec les sous séries chican-ostionoïdes du style esperanza définies par Irving Rouse à l’est de Porto-Rico et dans les Îles Vierges en 1992.
9Le matériel lithique est constitué de nombreuses herminettes, haches et pilons en radiolarite, des percuteurs en basalte ou en andésite, de nombreux éclats de calcédoine et quelques éclats de silex, deux perles cylindriques en quartz, une perle en jadéite et trois pierres à trois pointes simples, dont deux en calcirudite et une en calcite.
10Les résidus alimentaires consistent en une grande quantité d’ossements de poissons, notamment des espèces récifales, peu de crabe et surtout, des mollusques marins parmi lesquels Cittarium pica représente 37 %, Chione paphia 14 %, Arca zebra 11 %, Acanthopleura granulata 9 % et Strombus gigas 6 %.
11Deux échantillons de charbon de bois ont été sélectionnés pour la datation des niveaux d’occupation. Cette fouille de sauvetage a permis de découvrir pour la première fois à Saint-Martin, un site d’habitat postérieur à 800 apr. J.-C., attestant de l’influence des sous-séries chican-ostionoïdes au sud de Porto-Rico et des Îles Vierges, comme l’on pouvait s’y attendre après la découverte de vestiges similaires sur les sites de Kelbey’s Ridge 2 et Spring Bay 1c (Hofman, 1992) dans l’île de Saba, au sud-ouest de Saint-Martin.
Table des illustrations
Titre | Fig. 1 – Stratigraphie |
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URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/113913/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 295k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Christophe Henocq, Marcel Gamiette et Stéphane Kossmann, « Saint-Martin – Baie-Rouge » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Espace Caraïbes, mis en ligne le 01 mars 2022, consulté le 18 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/113913
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