1Après deux années probatoires (2017 et 2018), la fouille programmée 2019 s’inscrit désormais dans le cadre d’une campagne triennale du Programme Collectif de Recherches (PCR) « Topographie générale et insertion territoriale de la ville de Briga », coordonné par Étienne Mantel (SRA de Normandie). Constitué de Jean-Yves Marc (professeur d’archéologie classique, université de Strasbourg) qui en assure également la présidence, Séverine Blin (chargée de recherches, CNRS), Matthieu Poux (professeur d’archéologie, université Lumière Lyon II), Thierry Dechezleprêtre (Conservateur du patrimoine, Conseil départemental des Vosges) et Laurent Popovitch (maître de conférences, université de Bourgogne), ce conseil scientifique du PCR défini les priorités de cette action et les moyens mis en place pour en optimiser les résultats scientifiques sur le site archéologique du Bois-l’Abbé.
2Pour caractériser plus précisément cette ville, dont des quartiers entiers n’ont fait l’objet d’aucune observation précise, il ne fait aucun doute que les dizaines d’hectares concernés devront être investigués de manière raisonnée afin de caractériser les occupations qui s’y sont succédé. La quasi-absence d’indices postérieurs à l’abandon de la ville romaine jusqu’à nos jours, l’accessibilité des terrains, son unique propriétaire, son classement au titre des Monuments Historiques depuis 1987, la continuité de la recherche sur le long terme et l’état de la documentation constituent de réels atouts pour étudier les dynamiques de peuplement et l’évolution des occupations entre la Protohistoire et la période romaine, jusqu’à sa disparition à l’aube du Moyen Âge. Dans le paysage archéologique national, Briga constitue un véritable laboratoire de recherche à ciel ouvert pour réfléchir sur la fin de la période gauloise, sur la naissance des agglomérations dans le nord de la Gaule, sur l’évolution de cette ville romaine, etc. L’objet du PCR est également d’apporter des éléments de réflexion sur les thématiques d’organisation urbaine, sur le statut des agglomérations du territoire ou encore sur leur insertion dans l’ensemble plus vaste qu’est la cité, ici des Bellovaques (Mantel, Dubois, Parétias et al. 2020a).
3Conjointement aux trois opérations de fouilles programmées qui se sont succédé du début du mois de juin à la fin du mois d’août (Mantel, Dubois, Parétias et al. 2020b), les prospections géophysiques menées par Bruno Gavazzi (Institut de physique du globe de Strasbourg, UMR 7516) depuis 2017 dans l’emprise de la zone classée au titre des Monuments Historiques ont été poursuivies. L’acquisition a été affinée dans les secteurs qui avaient livré des anomalies remarquables les années précédentes, particulièrement au sud-est des « petits thermes », pour atteindre une couverture totale de 15 ha (fig. 1 ; Gavazzi, Reiller 2020 ; Mantel, Dubois, Parétias et al. 2020a). Elles ont aussi été associées à un test de résistivité électrique par Hugo Reiller (Institut de physique du globe de Strasbourg, UMR 7516) dans de petites zones grâce au concours d’Archéologie Alsace qui a mis à disposition le matériel nécessaire (Reiller, Gavazzi 2020). Ces résultats stimulants participent à mettre en exergue des concentrations de bâtiments et confirment le caractère dense de l’occupation, même si leurs plans ne peuvent pas être précisés dans le détail. Leur reconduction lors de la campagne 2020 permettra de couvrir l’ensemble de la clairière et participera à cibler, à terme, les actions de terrain.
Fig. 1 – Carte de l’anomalie de l’intensité du champ magnétique et propositions d’interprétations associées
Plan : É. Mantel (SRA) ; données géophysiques : B. Gavazzi ; DAO : J. Parétias (Archimède).
4Cette première année effective du PCR s’est accompagnée d’une ouverture aux disciplines connexes des sciences de la terre. Une première campagne d’acquisition LiDAR par drone a été menée par l’entreprise Altamétris sur une surface d’environ 19 ha, dans une zone boisée à l’est des petits thermes (fig. 2). Ces premiers résultats laissent entrevoir un potentiel fort prometteur pour appréhender toutes les anomalies dans un environnement élargi (Assali 2020).
Fig. 2 – Vue perspective du modèle numérique de terrain en rendu par portion de ciel visible
Crédits : Altamétris.
5Suite aux observations de glissements de terrain caractérisées depuis près d’une décennie, des premiers contacts ont été pris pour mener des analyses pédologiques (avec l’université de Strasbourg) et géomorphologiques (avec l’Université de Caen-Normandie) et des interventions sont programmées dès l’année prochaine. Enfin, la publication de la synthèse monographique paraîtra en 2021 dans la Revue Archéologique de Picardie (Mantel, Dubois dir. à paraître). Elle intègre l’ensemble des données acquises jusqu’en 2019 et sera le socle qui permettra de se projeter sur d’autres thématiques, en lien avec les recherches programmées croisées avec les études de mobilier.