1Ce diagnostic archéologique préventif intervient dans le cadre du projet de construction à Sciez (Haute-Savoie) d’un nouveau groupe scolaire. L’emprise étudiée concerne une surface de 15 721 m2. L’emprise est située entre 385 et 396 m d’altitude dans la pente se trouvant à l’aplomb du rebord du plateau des Petits Crêts, limité, à l’est, par le ravin du Foron, et, à l’ouest, par les marais de Niva.
221 tranchées ont été creusées du 6 au 13 décembre 2022. Ces sondages n’ont pas révélé de vestiges témoins d’occupations anciennes. En particulier, le site néolithique des Petits Crêts, implanté directement au sud sur le plateau terrassé dans les années 1970 et 1980, ne s’étend pas dans l’emprise du projet.
3La surface sondée correspond à une ancienne zone glacio-lacustre datée de l’Épipaléolithique avec des colluvions datées du Mésolithique. À la fin du Mésolithique, lorsque la terrasse fluvio-lacustre s’est formée vers 387 m d’altitude (niveau FL+15), la zone sondée devait être sans doute humide. Elle s’est fossilisée avec la mise en place du grand Lac Léman, dont le niveau a baissé de plus de 20 m entre le Néolithique ancien et moyen (FL+10 puis FL-4). La surface diagnostiquée correspond donc principalement à un ancien fond lacustre (lac glaciaire) avec simplement des colluvions modernes en bordure de la terrasse de kame du niveau FG+30.
4Le rebord septentrional du plateau des Petits Crêts est entamé entre 1960 et 1966 par une carrière de sable, fossilisée aujourd’hui à l’extrémité orientale de l’emprise et visible sur le cliché d’une mission aérienne datée de janvier 1967. Cette carrière impacte fortement le rebord du plateau et la pente située à l’aval, des remblais récents recouvrant le substrat en plusieurs endroits. En bas de pente, le secteur a présenté un paysage marécageux jusqu’à récemment, paysage marqué par l’écoulement d’un ruisseau encore actif affluent du Foron et probablement l’un des exutoires du marais de Niva. Un niveau de pseudo-tourbe s’est notamment formé. Il contenait de nombreux restes ligneux et des graines. Vers l’ouest, le secteur a fait l’objet d’assainissements par l’apport de remblais de matériaux récents, de béton en particulier, puis de terrassements, contemporains de l’aménagement des terrains de football.
5Un échantillon prélevé dans la pseudo-tourbe a permis d’isoler une douzaine d’akènes de sureau noir (Sambucus nigra) et de ronce-mûre (Rubus fruticosus), sur lesquels une datation isotopique a été réalisée. Elle fournit un intervalle entre 4841 et 4711 cal. av. J.-C. Ce résultat situe ainsi l’épisode paysager palustre correspondant à cette couche vers la transition entre le Néolithique ancien et le Néolithique moyen. La population du village des Petits Crêts se serait ainsi établie peu après cette date, au Néolithique moyen, au bord d’un marais, contexte favorable par les ressources halieutiques que le marais fournit. Un tel schéma d’implantation n’est pas sans rappeler celui du site contemporain du Genevray à Thonon, lequel est installé au bord du marais de Versoie.
6À Sciez, sur l’emprise étudiée, comme il n’y a pas eu de dynamique sédimentaire importante depuis la disparition du lac glaciaire, les conditions d’enfouissement ont été défavorables par la suite, jusqu’à l’époque romaine.
7Malgré l’absence de vestiges archéologiques, cette nouvelle campagne de sondages permet donc d’affiner le modèle chronostratigraphique des terrasses de Thonon que l’Inrap construit au fil des fouilles et diagnostics préventifs.
Fig. 1 – Plan général du site des Petits Crêts
DAO : C. Landry (Inrap).
