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2020
2A – Corse-du-Sud

Bocognano, Carbuccia, Tavera, Ucciani – Vallée de la Gravona

Prospection diachronique (2020)
Archaeological project director: Hélène Paolini-Saez

Editor's notes

Organisme porteur de l’opération : Laboratoire régional d’archéologie (Corse)

Full text

1Depuis 2018, une opération de prospection-inventaire diachronique a été initiée pour quatre communes de la vallée de la Gravona : Bocognano, Tavera, Ucciani et Carbuccia. Cette opération archéologique s’inscrit dans le programme européen LEADER porté par le GAL du pays d’Ajaccio (action no 2) sous le titre « Archéologie et patrimoine bâti : de l’information à la diffusion du savoir ». Cette troisième année a permis de compléter le corpus de sites ou indices de site pour une cinquantaine d’entités comprenant des sites de la carte archéologique et d’autres nouvellement inventoriés. La finalité de ce travail, qui arrivera à échéance en décembre 2022, est de proposer des schémas d’occupation de la vallée de la Gravona de la Préhistoire jusqu’à la fin du Moyen Âge. Cette réflexion permettra aussi de présenter des pistes de diffusion de l’information à destination de la population locale et touristique. Cette étude est couplée avec celle de la vallée du Prunelli menée par N. Ameziane-Federzoni sur les communes de Bastelica, Ocana, Tolla, Eccica-Suarella et Bastellicaccia. Les problématiques et le cadre d’intervention sont les mêmes. Aux âges des métaux, apparaît une répartition des sites selon deux schémas possibles : soit deux aires d’influence distinctes séparées par un hiatus de sites, soit une aire centralisatrice.

2Une première aire d’influence est marquée en limite occidentale par l’oppidum d’I Casteddi (Tavera). Éperon rocheux situé à 423 m d’altitude où se localisent un habitat fortifié et une statue-menhir à quelques centaines de mètres sur un col, le statut du site renvoie à un habitat structuré occupé du Bronze moyen au second âge du Fer. L’aire d’influence de cet éperon, en l’état actuel de nos travaux, s’articule avec un zonage archéologique de 2,5 ha à Castiglionu, à 3 km vers l’est. Il s’agit de plusieurs structures organisées, d’abris aménagés et d’un petit dolmen associés à du mobilier épars. La proximité géographique permettrait de voir une relation très forte entre l’oppidum perché, qui par sa position d’habitat dominant a pour fonction de contrôler le territoire et les déplacements de population, avec un établissement annexe voire une nécropole, au regard de la présence d’un dolmen et de certains abris dont la fonction funéraire n’est pas à écarter. La covisibilité entre I Casteddi et Castiglionu est attestée.

Fig. 1 – Dolmen de Castiglionu, Bocca Vacca

Fig. 1 – Dolmen de Castiglionu, Bocca Vacca

Cliché : H. Paolini-Saez (LRA).

3Par ailleurs, au nord d’I Casteddi, à 1,3 km, le site perché de Castidducciu à 573 m d’altitude se présente comme un lieu d’observation remarquable et stratégique. La présence de plusieurs tronçons d’enceinte renvoie à un aménagement sans qu’il soit encore possible d’en définir la finalité (structures domestiques, avant-poste d’observation ?). Cette position dominante vient en appui de l’oppidum d’I Casteddi et apporte un autre point de vue, notamment sur les massifs méridionaux. La covisibilité entre les deux éperons est parfaite.

4Plus éloignés, à 4,3 km vers l’est, les aménagements variés de la Punta Vitriccia semblent correspondre à des lieux de vie s’apparentant à un établissement secondaire. La covisibilité n’est pas assurée de façon directe avec I Casteddi mais ils semblent répondre à un même territoire. Une seconde aire d’influence est marquée par les sites perchés de Capu Retu et Punta Pianeddu. Distants de 1,5 km, ils dominent avantageusement la moyenne vallée de la Gravona, avec des altitudes dépassant les 700 m. Leurs aménagements fortifiés leur confèrent une place importante dans le contrôle de cet espace géographique, tant pour l’observation que pour la défense du territoire. Plusieurs sites satellites, caractérisés par différentes structures hors sol, se positionnent aux alentours, formant un maillage d’occupations anthropiques avec des distances allant de 700 à 800 m jusqu’à 2 km vers l’ouest. Deux sites se démarquent dans cette répartition spatiale : I Gruteddi et Casedda. Ils se trouvent en contrôle direct avec les deux sites perchés. Leur configuration topographique ainsi que leur toponymie pourraient plaider pour y voir des établissements ruraux d’altitude en lien direct avec les deux oppida. Les données partielles ou absentes du sous-sol ne permettent pas de statuer sur la fonction précise de ces indices d’occupation (habitats, occupations sommaires, etc.), et notamment sur la contemporanéité fine. Néanmoins, les résultats des sondages d’I Gruteddi et les structures d’aménagements hors sol font référence aux critères typologiques des sites protohistoriques bien connus aujourd’hui.

5En faisant abstraction du hiatus d’indices de sites entre la Punta Pianeddu et I Casteddi, l’organisation du territoire de la moyenne et la haute vallée de la Gravona peut aussi s’envisager comme centralisatrice, en articulant plusieurs oppida à autant de petites entités territoriales annexes sous influence. En ce sens, l’oppidum a un pouvoir dominant par le biais du contrôle territorial, d’observation et de défense. Nous remarquons aussi que des « binômes » des sites perchés sont observables, et ce à une distante équivalente. Ainsi, Capu Retu et Punta Pianeddu sont distants de 1,6 km et I Casteddi et Castidducciu, de 1,3 km. L’emprise spatiale est identique et permet une covisibilité venant compléter les besoins de domination géographique sous la forme d’« avant-poste ».

6En l’état actuel de nos réflexions, plusieurs questionnements émergent. Ces deux aires sont-elles le reflet d’un aménagement réel de l’espace ? Sont-elles un état des prospections ? Les critères géographiques comme le ruisseau U Munacu ont-ils pu influencer les occupations comme une barrière naturelle ? La poursuite des investigations sur le terrain permettra de répondre en partie à cette interrogation. De manière sous-jacente, le questionnement fait écho au nombre de communautés qui ont pu contrôler cet espace géographique. Y a-t-il eu une même communauté qui s’est implantée sur l’ensemble de la vallée en fonction des opportunités géographiques et topographiques et selon les possibilités d’exploitation des terrains proches ? Ou plusieurs communautés défendaient-elles leur propre territoire ? Enfin, il convient de ne pas négliger la potentielle occupation longue ou fluctuante de ces sites, qui peut faire varier les modèles de transversalité au sens hiérarchique des implantations.

7Au Moyen Âge, le maillage des édifices religieux de typologie romane privilégie l’emplacement sur les voies de communication durant les xie-xiiie s. Les chapelles sont presque alignées et forment un cheminement homogène de San Ghjusti, Santi Sari (Bocognano), San Polu (Tavera), Santa Barbara et Sant’Antonio (Ucciani). Chaque édifice est distant de 1 à 2 km et ceux-ci maillent le territoire sur plus de 6 km en linéaire. Sortent de cette ligne les édifices plus montagneux de San Micheli-A Mariaccia (Ucciani) et Santa Maria-Tavera Vechja (Bocognano), qui renvoient aux cheminements vers le col de Pazzara pour atteindre la vallée adjacente du Prunelli. L’association des habitats groupés primitifs et des édifices religieux apportera des informations sur les déplacements et les liens entre bâti civil et religieux.

8Les informations recueillies permettent de nourrir la problématique de l’occupation de la vallée. En cela, la démarche présentée à la communauté de communes du Celavu Prunelli dans le cadre du GAL LEADER Pays d’Ajaccio prend tout son sens. C’est à la lueur des implantations anciennes de ce large espace géographique que nous serons en mesure de proposer des actions permettant de faire connaître la riche histoire de la Gravona.

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List of illustrations

Title Fig. 1 – Dolmen de Castiglionu, Bocca Vacca
Credits Cliché : H. Paolini-Saez (LRA).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/155817/img-1.jpg
File image/jpeg, 1.5M
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References

Electronic reference

Hélène Paolini-Saez, “Bocognano, Carbuccia, Tavera, Ucciani – Vallée de la Gravona” [Note of archaeological project], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [Online], Corsica, Online since 18 March 2024, connection on 17 May 2025. URL: http://journals.openedition.org/adlfi/155817

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Hélène Paolini-Saez

Laboratoire régional d’archéologie (Corse)

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Archaeological project director

Hélène Paolini-Saez

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