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AccueilRégionsCorse20202A – Corse-du-SudBonifacio – Cavallo-San Bainzu

2020
2A – Corse-du-Sud

Bonifacio – Cavallo-San Bainzu

Sondage (2020)
Responsable d’opération : Sébastien Clerbois
Notice rédigée avec Nicolas Paridaens, Nicolas Authom, Catherine Coquelet, Laetitia Cavassa et Henry-Louis Guillaume

Entrées d’index

Année de l'opération :

2020

Numéro d’opération :

082084

Nature de l'opération :

opération de diagnostic
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Notes de la rédaction

Organisme porteur de l’opération : Université libre de Bruxelles

Texte intégral

1Une première campagne de fouille et d’étude géologique a été conduite en octobre 2019 par l’Université libre de Bruxelles, sur le site de Cavallo-San Bainzu (archipel des Lavezzi, Bonifacio). En complément des sondages réalisés lors de la campagne 2019, trois nouveaux sondages ont été ouverts lors de la campagne d’octobre 2020 sur San Bainzu. Le premier (2020.1) a été implanté dans la partie nord-est de l’îlot, là où des prospections menées en 2019 avaient permis de remarquer un niveau charbonneux, le long du littoral actuel. Le deuxième (2020.2) se situe dans la partie la plus encaissée de la carrière A2. Le dernier (2020.3) a été positionné sur le carreau de la carrière A1, au pied du front de taille. Les objectifs principaux étaient de repérer des horizons stratigraphiques susceptibles de dater l’exploitation de la carrière et confirmer les activités à l’époque romaine.

Fig. 1 – San Bainzu, orthophotographie générale avec l’emplacement des sondages (2020.1 à 3), des carrières (A1 à A4) et des différentes structures archéologiques (B à F)

Fig. 1 – San Bainzu, orthophotographie générale avec l’emplacement des sondages (2020.1 à 3), des carrières (A1 à A4) et des différentes structures archéologiques (B à F)

Clichés et DAO : H.-L. Guillaume, N. Paridaens (ULB).

2Les fouilles du secteur 2020.1, couvrant 7 m2, permettent de restituer plusieurs phases d’occupation au niveau d’un espace situé au nord-est de San Bainzu, empiétant partiellement sur une plage dont l’étendue est difficile à définir en fonction du niveau de la mer à l’époque romaine.

3La phase principale correspond à l’aménagement du mur ou soubassement (US 1521), constitué de gros blocs non taillés, de façon à rehausser une banquette naturelle formée par le rocher à cet endroit, selon un axe ouest-est. Des activités métallurgiques sont attestées au même endroit, marquées par un épais niveau d’occupation (US 1520) contenant 123 fragments de culots et de scories argilo-sableuses ainsi qu’une réserve de charbon de bois. L’examen du mobilier et les datations radiocarbone permettent de situer ces activités au cours de la fin du ier s. et durant le iie s. apr. J.-C. Dans un second temps, le mur de terrasse est nivelé de façon à aménager une « rampe » (US 1519), destinée à relier les parties basses et hautes du secteur. Du mobilier céramique, des TCA et du verre à vitre témoigneraient de la présence d’un bâtiment construit à proximité.

4Pour le sondage 2020.2, l’objectif était de vérifier si la carrière A2 avait été exploitée « en fosse » et si des niveaux archéologiques non perturbés étaient conservés au fond de cette structure. La fouille a révélé le carreau de cette partie de la carrière. Le dégagement des profils fait apparaître qu’il ne s’agit pas d’une carrière « en fosse », mais plutôt d’une carrière en gradins profondément encaissée, dont la partie est sert de rampe pour extraire les blocs vers la surface. En revanche, la fouille n’a pas révélé d’indice chronologique.

5Le sondage 2020.3 a été ouvert dans la partie orientale de la carrière A1 de San Bainzu ; un nettoyage de surface a été réalisé à l’aplomb du front de taille FT 1128. Le carreau de la carrière, affleurant partiellement à cet endroit, a ainsi été dégagé sur une surface de 19,50 m2 (3 m x 6,50 m).

6Seule la partie sud du sondage ayant conservé des niveaux sédimentés a fait l’objet d’une fouille en sous-sol.

7Deux horizons archéologiques (US 1515 et 1516) se superposent sur la surface granitique (US 1517), sur laquelle de nombreuses traces de taille ont été observées.

8Le premier (US 1516), directement posé sur le plateau de la carrière, peut être lié aux activités d’exploitation : il est formé d’éclats de taille aux arêtes vives (± 10 x 15 x 3 cm) mêlés à du limon, des granulats et du sable granitique issus de l’arénisation de la roche. Parmi le mobilier céramique issu de ce niveau archéologique, a été identifiée une coupe en sigillée africaine A. Les fragments sont assez petits, ne rendant pas l’identification facile. Il pourrait s’agir d’une coupe de type Hayes 4a ou 7a dont la production est attestée à partir du dernier quart du ier s. apr. J.-C. On note également un fragment de panse d’amphore de Bétique de type Dressel 20, dont la production débute à la période augustéenne.

9Par ailleurs, 25 scories ou fragments de scories (pour un poids total de 1 kg) ont été récoltés dans cette couche. Certains, en forme de calotte présentant une face supérieure ferreuse oxydée et partiellement magnétique, pourraient s’apparenter à des culots de forge. Un examen plus approfondi devrait permettre de préciser la composition de ces scories. Un dernier objet ferreux, conservé en connexion avec une scorie de ce type, témoigne de la réparation ou du forgeage d’un outil.

10De nature semblable, le second horizon (US 1515), limono-sableux, brun-gris foncé, chargé en éclats de taille (± 10 x 15 x 3 cm) et en granulats granitiques (< 10 mm), correspond au même niveau archéologique, plus fortement bioturbé et enrichi jusqu’à former un niveau humifère.

11Au niveau du sondage, la surface du rocher (US 1517), horizontale et irrégulière, a conservé de nombreuses traces d’exploitation. Côté nord, où la surface granitique affleure, ces traces ont été effacées par érosion. À l’ouest, le sondage a permis de mettre au jour l’entame de la carrière, à 5,40 m du front de taille actuel. À cet endroit, les carriers ont sommairement aménagé le rocher à l’horizontale, 20 cm plus bas que le niveau inférieur du carreau exploité. On ignore la hauteur du front de taille originel, mais celle-ci devait certainement atteindre plusieurs mètres eu égard aux dimensions du boulder contigu. Pour l’aménagement de ce premier front de taille, les artisans semblent avoir profité de la présence, à cet endroit, d’une longue diaclase sud-nord.

12Dans l’emprise du sondage, le carreau de la carrière, profond de 5,40 m, laisse apparaître quatre encoignures témoignant donc de quatre fronts de taille successifs. Une première encoignure en sillon de 20 cm court tout le long du bord de l’entame. En bordure des encoignures se distinguent la rigole et les traces d’arrachage de la roche par les coins. Les rigoles d’encoignure, dont ne sont conservées que les parties inférieures, font toutes 20 cm de large.

13La largeur des blocs extraits est aisément restituable : celle du premier bloc est de 2,04 m, celle du deuxième de 0,80 m, celle du troisième de 0,80 m et celle du quatrième bloc – seulement partiellement exploité – de 1,60 m. Les deuxième et quatrième fronts de taille ont été dictés par la présence de diaclases naturelles, bien visibles dans le substrat rocheux. La largeur recherchée du bloc extrait semble donc être de 0,80 m minimum.

14Côté est, le « front de taille », haut de 3 m à cet endroit, correspond à la face naturelle du boulder exploité suite à la présence d’une large diaclase verticale, orientée nord-sud, et qui venait partitionner le boulder à cet endroit. Cette fine diaclase de 2 cm de large a été utilisée par les carriers comme limite temporaire d’exploitation. Côté nord, elle est encore bien visible derrière le dernier bloc en cours d’exploitation.

15La présence exclusive de mobilier romain dans les niveaux de déchets de taille, directement posés sur le carreau d’exploitation, laisse à penser que cette carrière est romaine. En revanche, directement au nord du sondage, d’autres traces d’exploitation marquées par une technique différente (extraction par fracture aux petits coins) semblent liées aux activités du xixe s. et sont limitées aux blocs de découverture ou aux bordures non exploitées de la carrière antique. Outre les sondages archéologiques, des observations de terrain menées sur l’îlot de San Bainzu en 2020 ont permis de cartographier l’ensemble des sites d’extraction du granite. Ceux-ci s’organisent autour de quatre carrières (A1, A2, A3, A4), reliées à une plateforme de décharge par des rampes soit constituées de gros blocs recouverts de déchets de taille (C1), soit aménagées par de gros blocs placés à l’horizontale (C2). Ces dernières sont destinées à pallier une dépression naturelle orientée nord-ouest – sud-est, qui traverse l’île à cet endroit. La plateforme (B) est reliée à un ponton, aujourd’hui partiellement immergé, constitué de blocs équarris (D). Dans le prolongement du ponton, un alignement de blocs immergés entre l’îlot de San Bainzu et l’île de Cavallo forme une digue (E), jusqu’ici inexpliquée mais vraisemblablement liée à la régulation des courants maritimes dans cette zone sensible d’embarquement. Deux mortaises ménagées sur les planchers des zones de décharge constituent les uniques vestiges des infrastructures destinées au transbordement des blocs de la carrière jusqu’aux bateaux. Le long du littoral, une zone d’activité métallurgique (F) témoigne de pratiques de forge durant le Haut-Empire.

Fig. 2 – Principales traces techniques découvertes sur le carreau de la carrière A1 de San Bainzu au niveau du sondage 2020.3

Fig. 2 – Principales traces techniques découvertes sur le carreau de la carrière A1 de San Bainzu au niveau du sondage 2020.3

Cliché et DAO : N. Paridaens (ULB).

16La mission a également permis l’acquisition photogrammétrique en speed photogrammetry de 777 images d’un des deux bas-reliefs de l’île, situé à quelques dizaines de mètres de la villa de Cavallo et figurant un homme en médaillon flanqué, à droite, d’une massue. En lumière normale, rien n’est visible à gauche du personnage. La méthode de normal mapping met en évidence la présence d’un canthare invisible à l’œil nu et au toucher ; l’érosion du granite, à cet endroit, n’avait jamais permis de voir cet attribut. Cette découverte relance l’interprétation des deux reliefs présents sur l’île, connus de longue date. Le premier était décrit comme un portrait impérial, le second, comme un Hercule Saxanus. La présence du canthare permet d’identifier de manière certaine les deux personnages comme étant Hercule (sans l’épiclèse Saxanus), dieu protecteur des carriers. La présence d’une représentation d’Hercule près de la villa de Cavallo pourrait s’expliquer par une carrière proche encore non identifiée.

Fig. 3 – Relief de Cavallo

Fig. 3 – Relief de Cavallo

Image issue de la méthode du normal mapping.

Réalisation : H.-L. Guillaume (ULB).

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 – San Bainzu, orthophotographie générale avec l’emplacement des sondages (2020.1 à 3), des carrières (A1 à A4) et des différentes structures archéologiques (B à F)
Crédits Clichés et DAO : H.-L. Guillaume, N. Paridaens (ULB).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/155822/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 824k
Titre Fig. 2 – Principales traces techniques découvertes sur le carreau de la carrière A1 de San Bainzu au niveau du sondage 2020.3
Crédits Cliché et DAO : N. Paridaens (ULB).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/155822/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 907k
Titre Fig. 3 – Relief de Cavallo
Légende Image issue de la méthode du normal mapping.
Crédits Réalisation : H.-L. Guillaume (ULB).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/155822/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 1,4M
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Pour citer cet article

Référence électronique

Sébastien Clerbois, Nicolas Paridaens, Nicolas Authom, Catherine Coquelet, Laetitia Cavassa et Henry-Louis Guillaume, « Bonifacio – Cavallo-San Bainzu » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Corse, mis en ligne le 18 mars 2024, consulté le 17 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/155822

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Auteurs

Sébastien Clerbois

Université libre de Bruxelles

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Nicolas Paridaens

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Nicolas Authom

Service public de Wallonie, Agence wallonne du patrimone

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Catherine Coquelet

Service public de Wallonie, Agence wallonne du patrimone

Laetitia Cavassa

CNRS, Centre Camille-Jullian (UMR 7299)

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Henry-Louis Guillaume

Université libre de Bruxelles

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Responsable d’opération

Sébastien Clerbois

Université libre de Bruxelles

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