1Le projet de réaménagement des places Delille et Salford et de leurs abords a nécessité la mise en œuvre d’un diagnostic archéologique préalable qui s’est déroulé du 13 mars au 7 avril 2023. Le projet scientifique d’intervention prévoyait l’ouverture de 18 tranchées, réparties majoritairement dans l’emprise des chaussées, mais, pour des raisons diverses (présence de réseaux, espace laissé disponible par le maintien de la circulation insuffisant), seules onze tranchées d’une surface cumulée de 384 m² ont pu être réalisées.

Fig. 1 – Localisation des sondages réalisés, sur fond cadastral

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Échelle : 1/2 000.

Topographie : S. Dohr ; DAO : G. Alfonso, S. Dohr (Inrap).

2Les principaux résultats archéologiques proviennent du sondage 14, ouvert dans la partie nord de la place Delille, et du sondage 17, réalisé rue Godefroy-de-Bouillon, devant la chapelle de la Visitation, et concernent les périodes romaine et médiévale. Le recouvrement sédimentaire important explique que les niveaux antiques n’aient pas été atteints dans la plupart des autres tranchées, terrassées à une profondeur de 2 m à 3,80 m.

3Boulevard Trudaine, les sondages 1 à 5 révèlent, jusqu’à -3 m, une séquence de remblais limono-sableux, meubles, contenant du mobilier du xviii^e s. Ils témoignent de la phase de colmatage du fossé défensif médiéval, qui a précédé la création du boulevard dans le dernier quart de ce siècle.

4Dans le sondage 7, place Salford, l’angle d’une cave, orientée parallèlement au bord sud-ouest de la place, contenait du mobilier du xix^e s. ou du début du xx^e s.

5Dans la partie sud de la place Delille, le sondage 8 recoupe, jusqu’à une profondeur de 3 m, des remblais recelant de rares éléments mobiliers du bas Moyen Âge et peut-être du xvi^e s., tandis que, dans le sondage 9, une épaisse séquence des xii^e-xiv^e s. recouvre un possible niveau romain apparaissant à -3,80 m. Un mur est-ouest arasé à -1,20 m appartient à une construction dont la datation n’est pas assurée, mais probablement moderne.

6Dans le sondage 15, réalisé rue Godefroy-de-Bouillon, contre la chapelle du lycée du même nom, une séquence des xii^e-xiv^e s., remaniant un peu de mobilier antique, se développe directement sur le substrat marno-calcaire, localisé à 3,20 m de profondeur. C’est le seul sondage du diagnostic qui ait permis d’atteindre le substrat. Ancrée sur ce niveau, une fondation est-ouest, proche de la façade actuelle de la chapelle, date probablement de la période contemporaine.

7Implanté dans la partie nord de la place Delille, le sondage 14 (fig. 2) est le seul qui ait livré, à 2,40 m de profondeur, des vestiges structurés vraisemblablement antiques, conservés en élévation : deux murs nord-sud soigneusement bâtis qui ne sont pas tout-à-fait alignés, dont l’un constitue la limite occidentale d’une pièce pourvue d’un sol de béton. Aucun mobilier ne permet de dater précisément ces constructions. Comme dans la majorité des tranchées, la base des niveaux archéologiques n’a pas été atteinte. Seules leur mise en œuvre, ainsi que la présence de mobilier en terre cuite antique (terre cuite architecturale et céramique) sur le sol de béton au nord, et à la base du mur au sud, amènent à rattacher ces vestiges à la période romaine. Cependant, ces lots ne sont pas homogènes, puisqu’au mobilier céramique du Haut-Empire sont associées des productions du Bas-Empire (iv^e-v^e s.) et des vi^e-viii^e s. On est vraisemblablement en présence d’un bâtiment antique, dont les ruines furent fréquentées durant le haut Moyen Âge. Au-delà de cette période, l’axe nord-sud des murs antiques a perduré sous la forme d’un mur en pierres liées à la terre et à la chaux, au moins jusqu’au Moyen Âge central.

Fig. 2 – Partie nord, vues des murs M1401, M1408, M1409 et M1410 et du sol de béton 1411

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Sondage 14.

Clichés et DAO : G. Alfonso (Inrap).

8Le sondage 17 (fig. 3), rue Godefroy-de-Bouillon, a été ouvert devant la façade de la chapelle de la Visitation, qui correspond à une partie de l’église du couvent des Jacobins, édifié à partir des années 1230, et en grande partie détruit à la fin du xviii^e s. Il ne subsiste que quatre travées de l’église, qui devait en compter au moins le double, d’après les dimensions du monument figuré sur le plan de la ville dressé en 1791 par Augustin Loriette.

Fig. 3 – Plan détaillé et orthophotographie

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Sondage 17. Échelle : 1/100.

Photogrammétrie : M.-L. Thierry ; DAO : G. Alfonso (Inrap).

9Les vestiges bâtis mis au jour dans le sondage se trouvent dans le prolongement du vaisseau nord de l’église. Deux maçonneries est-ouest, espacées de 4 m environ, coïncident avec les murs latéraux du vaisseau nord, entre lesquels s’insère une structure maçonnée souterraine de 2 m de largeur nord-sud, interprétée comme un probable caveau funéraire. Arasées à une profondeur de 0,20 m à 0,70 m seulement sous le sol actuel, ces constructions sont aménagées dans des niveaux antiques du Haut-Empire et scellées par des remblais de démolition des xviii^e-xix^e s. Il est regrettable qu’aucun mobilier ne permette de les dater. Seule une analyse ¹⁴C pratiquée sur le squelette d’un individu, inhumé dans l’espace localisé entre le caveau supposé et le mur nord de l’église, fournit un intervalle compris entre le dernier quart du xiii^e s. et la fin du xiv^e s. Deux autres inhumations sont présentes au même emplacement. De part et d’autre du caveau, ont également été mises au jour deux réductions, dont l’une contenait des ossements datés entre 1176 et 1274. Elles sont sans doute liées à la phase de destruction de la partie occidentale de l’église des Jacobins intervenue à la fin du xviii^e s.