1Les objectifs de la campagne 1992 étaient essentiellement centrés sur les vestiges de l’activité minière et métallurgique.

Les aménagements hydrauliques

2Le plateau de Brandes est sillonné par trois grandes canalisations nord-sud (C1, C2, C3), qui vont s’alimenter à différents niveaux du déversoir du Lac Blanc, situé 1 000 m en amont. Les dérivations, captages et barrages, sont encore visibles. Cela représente des travaux d’aménagement considérables, que seuls les besoins de l’artisanat justifient. Toutes ces dérivations sont creusées dans l’argilite grise du plateau, et elles sont bordées de pierres sur les côtés. Une rigole ouest-est redistribue l’eau de la canalisation C2 en divers points du plateau, à l’aplomb de bâtiments, dont l’un a été fouillé en 1992. Le relevé topographique très précis de ce réseau hydraulique a débuté. La canalisation la plus occidentale (C1) est jalonnée de dépressions, replats, et dérivations latérales, etc., qui pourraient être des retenues de régulation et des aires de travail. Les questions qui se posaient en 1991 à propos du canal de l’Écluse (C3) ont trouvé un début de réponse, puisque ce gigantesque aménagement hydraulique a été conçu pour permettre l’extraction du minerai, et non pas pour faire de la métallurgie.

3L’ampleur de ces vestiges, ce qu’ils induisent sur la gestion de l’exploitation, témoignent de l’importance de cette dernière, et de l’intervention d’une volonté politique supérieure celle du Dauphin.

Les ateliers

4Partant de la canalisation orientée ouest-est, deux levées de terres renforcées de pierres conduisent l’eau à l’aplomb de deux édifices parallèles, dont un a fait l’objet d’une fouille en 1992. L’hypothèse était qu’il s’agissait d’un atelier qui utilisait une chute d’eau pour les besoins de la métallurgie.

5À la fin de la campagne, le résultat n’est pas probant, car la fouille a mis au jour une habitation de petite dimension, qui comporte au moins deux phases d’occupation. Elle recouvre partiellement une construction plus ancienne, dont la fouille n’est pas terminée. Il paraît donc certain que l’aménagement hydraulique situé en arrière et en amont de la maison ne fonctionnait plus au moment de l’occupation de cette dernière.

6Seule la campagne de 1993 permettra de savoir si l’édifice antérieur est bien un atelier. Cette découverte confirme que les édifices du village avaient une durée de vie assez limitée et que les constructions se sont superposées et recoupées, en changeant de fonction.

L’extraction du minerai

7Trois secteurs ont fait l’objet de travaux archéologiques.

La tranchée occidentale

8C’est sur ce secteur que les travaux portent depuis plusieurs années. Les découvertes faites en 1990 et 1991 sont de première importance pour écrire l’histoire des techniques. Les difficultés rencontrées dans les deux galeries en cours d’étude, Saint-Philippe et le Porche (120 tonnes de remblais évacuées l’an dernier et présence permanente d’eau), n’ont pas permis de progresser plus avant dans le réseau souterrain. Le travail a porté sur l’observation des traces en parois, l’étude de la gitologie, les différentes variétés de minerais et de gangues, etc. Une partie des traverses de la voie de circulation a été prélevée, pour datation et restauration.

Le canal de l’Écluse

9La campagne 1992 a vu s’ouvrir un nouveau chantier, à l’extrémité orientale du site, en bordure du canal de l’Écluse. Cette « canalisation » posait un problème d’interprétation, en raison de sa topographie. Long de plus de 500 m, le chenal est fait de deux tronçons, séparés par une rupture de pente : une partie amont, très rectiligne et abrupte, et une partie aval plus sinueuse, moins profonde. L’ensemble s’est révélé être un chantier d’extraction du minerai de première importance, justifiant ainsi une partie des haldes importantes stockées dans ce secteur. La partie amont était alimentée en eau par un réservoir, lui-même relié au déversoir du Lac Blanc par une conduite de 700 m de longueur. Ce dispositif sert à déblayer les épais sédiments par des chasses d’eau répétées, la partie aval étant une zone de dépilages et de galeries.

10La fouille a permis de dégager des travaux d’exploitation à ciel ouvert, dans la roche, et des travaux de recherche, sous la forme d’un couloir boisé creusé dans l’argilite avec étais verticaux, chapeaux et latérales de section triangulaire. Une tête de puits boisée a également été mise au jour. Elle a conservé les deux montants d’un treuil et quatre étais, correspondant à une toiture, à l’image de l’iconographie de reconnaissance. Des bois dégagés lors d’un sondage de reconnaissance, en 1991, sont datés de 1212 et 1213. Les systèmes de chevilles et de tenons-mortaises, ainsi que la taille et l’assemblage des planches du couloir boisé, montrent une parfaite maîtrise du boisage minier.

Le Lac du Milieu

11La reprise des prospections dans le massif de l’Oisans permet d’identifier une nouvelle zone d’extraction du minerai, à 2 900 m d’altitude. Il s’agit d’un grand dépilage subvertical qui donne accès à des travaux souterrains. L’étude de ce secteur débutera en 1993, mais, d’ores et déjà, les techniques mises en œuvre paraissent très comparables à celles observées à Brandes et au Lac Blanc, situés en contrebas et sur le même ensemble filonien.

12Les progrès réalisés dans la connaissance des chantiers miniers liés à « l’argenteria de la brandas » (prospections, fouille), en donnent, de plus en plus, l’image d’une grande entreprise, bien gérée, et exploitée avec les meilleures techniques du temps.