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AccueilRégionsÎle-de-France199378 – YvelinesHoudan–Bazainville – Déviation RN 12

1993
78 – Yvelines

Houdan–Bazainville – Déviation RN 12

Sondages et sauvetages urgents (1993)
Responsables d'opération : José Ajot, Paul Brunet, Valérie Gonzalez et Michel Philippe
Notice rédigée avec Marie-France André, Guy Boulay, Nathalie Paccard et Christian Piozzoli

Notes de la rédaction

Organisme porteur de l’opération : Afan

Texte intégral

1La RN 12, principal axe routier Paris–Bretagne, est en cours d’aménagement sur le pourtour de l’Île-de-France. Dans ce cadre, la DDE des Yvelines a effectué une déviation longue de 11 km entre Houdan et Bazainville. Le tracé de cette route à quatre voies traverse la plaine de Houdan d’est en ouest. Durant ce trajet, elle franchit une vallée sèche et deux cours d’eau (la Vesgre et l’Opton). Tous les terrains concernés par ces travaux étaient à l’origine occupés par des exploitations agricoles.

2La réalisation des infrastructures a été précédée par une étude d’impact archéologique qui a permis de repérer puis de fouiller partiellement quatre sites recoupés par le futur tracé : un important complexe de vestiges protohistoriques et historiques résultant de la récurrence de l’occupation sur un plateau surplombant le bourg de Houdan ; des implantations de La Tène finale et du haut Moyen Âge sur les deux rives de la Vesgre ; un petit habitat rural (médiéval ?) dans la plaine de Houdan.

3Les travaux archéologiques, effectués par une équipe qui a été progressivement renforcée jusqu’à un effectif de dix personnes, se sont déroulés sur près de six mois, du 15 janvier à la fin juin 1993, étude d’impact comprise.

Les implantations du plateau, Houdan, Les Brosses – Le Saule Guérin

4Aux alentours de l’amorce sommitale d’un plateau surplombant Houdan à l’ouest, de nombreux témoins attestent une récurrence de l’implantation humaine sur plus d’un millénaire, du premier âge du Fer au Moyen Âge classique, avec cependant un hiatus pour la période du haut Moyen Âge.

Trois ensembles protohistoriques

(fouille Paul Brunet)

5Un premier ensemble est constitué par quatre silos, une fosse d’extraction de limon et une petite fosse. L’abondant mobilier céramique recueilli dans ces structures permet de les rattacher au Hallstatt final : forte proportion de jattes (un quart du corpus, soit environ 30 vases), présence de jattes à bords festonnés, de céramique peinte et de vases situliformes. Ce site, un des premiers découverts dans les Yvelines, servira de référence pour le département.

6À une centaine de mètres de ces structures, une petite nécropole de La Tène finale a livré trois urnes à incinération dont deux ont été recueillies intactes. La parure associée comprend des fibules en fer et un anneau en bronze. Une sépulture double en pleine terre très érodée a été relevée à quelques mètres des fosses cinéraires, mais l’absence de matériel associé ne permet pas de s’avancer quant à sa datation.

7Sur la bordure sud-est de la villa, et dans une de ses cours, un large fossé dont la portion reconnue (50 m) forme un angle droit, des fosses, silos et trous de poteau composent un ensemble qui pourrait constituer la périphérie d’une implantation agro-pastorale Hallstatt final – La Tène Ia, avec une tendance vers cette dernière période.

Une villa gallo-romaine

(fouille Valérie Gonzalez)

8La présence de cette villa était totalement ignorée avant notre intervention. La partie dégagée (70 m est-ouest, 50 m nord-sud) ne représente probablement qu’un tiers de l’ensemble de cette exploitation agricole. Elle est entourée de murs de clôture, dont un flanqué d’un petit bâtiment. Ce même mur est doublé par un alignement de vingt trous de poteau qui témoigne sans doute d’un premier système de clôture en palissade.

9L’espace intérieur, subdivisé en trois parties par des murs, comprend deux bâtiments.

10Le premier, le plus important et le plus complexe, est certainement l’espace résidentiel. Il comportait plusieurs salles, dont une très spacieuse, et avait probablement un étage. Une petite cave, dont le comblement recelait un abondant mobilier céramique, était creusée près de son angle nord-ouest. Plusieurs séries de trous de poteau en alignement joignent ce bâtiment à celui lié au mur d’enceinte. Le type de construction qui s’élevait ici est sujet à caution (bâtiment en bois, unique ou double ; galeries entourant un espace central non couvert).

11La seconde construction, moins importante, devait être plutôt affectée aux travaux d’exploitation agricole, pour l’engrangement des récoltes par exemple. Une cave, dont l’escalier et une partie des murs était bien conservés, était remblayée avec des rejets agricoles (fumier, céréales : blé, millet, orge, avoine), le tout surmonté d’éléments de charpente rejetés après démontage, puis brûlés. L’incendie a causé une carbonisation des céréales ce qui, complété par une forte humidité ambiante, a entraîné une excellente conservation de ces déchets végétaux (étude chimique : Frédéric Bazile ; carpologique : Véronique Matterne). Du matériel céramique, des objets en fer ou en bronze et quelques monnaies ont été trouvés au sein du comblement final qui surmonte ces couches d’incendie.

12Quelques structures annexes, telles que bâtiment extérieur, petit four domestique, grenier sur poteaux, complètent la vision de la vie quotidienne de cette exploitation rurale durant l’Antiquité. Elle fut édifiée sur le point culminant du plateau, vers le milieu du ier s. Après un abandon et une destruction presque complète vers la fin du iiie s., elle a fait l’objet d’une réoccupation jusqu’à la fin du ive s. Cette dernière phase, qui n’est représentée que dans les comblements de caves et quelques fosses, a cependant dû être très limitée et, en tout cas, bien éloignée de ce que fut l’ensemble durant sa prospérité.

Fig. 1 – Le Saule Guérin, plan de la villa gallo-romaine

Fig. 1 – Le Saule Guérin, plan de la villa gallo-romaine

DAO : J. Ajot (Afan).

Des habitats du Moyen Âge classique

(fouille P. Brunet)

13L’occupation du site à cette époque est constituée par une grande habitation (7 x 12 m) sur trous de poteau, deux fonds de cabane – dont l’un distant de plusieurs centaines de mètres des autres structures, est situé aux abords de la villa – et une fosse contenant un bovidé en connexion. L’ensemble a livré du mobilier attribuable au xie s. Le bâtiment se compose de deux rangées latérales de cinq trous de poteau et de quatre travées de trois trous de poteau. La façade nord, exposée aux vents dominants, ainsi que sa travée médiane sont munis de poteaux doubles d’inégale longueur. Les deux fonds de cabane, dotés de cinq trous de poteau (trois sur l’axe central, un sur chaque bord de l’excavation) peuvent être interprétés comme des unités artisanales.

14La nature des différentes structures présentes sur le site laisse supposer que nous n’avons reconnu qu’une infime partie d’un ensemble plus conséquent tel qu’un manse.

Les implantations de la vallée de la Vesgre, Maulette, L’Arpent Long et Cayenne

15Les rives de la Vesgre, qui coule dans une vallée très évasée, semblent avoir fait l’objet d’une fréquentation relativement intense du Chalcolithique au haut Moyen Âge. À l’exception de deux ensembles de structures organisées – l’un mérovingien, l’autre de La Tène finale – situés chacun de part et d’autre du cours d’eau, cette fréquentation n’est toutefois attestée sur le tracé que par du matériel épars et des structures sans organisation perceptible situées au sein des sables stampiens qui tapissent le fond de la vallée.

Maulette, L’Arpent Long

(fouille José Ajot)

16Sur la rive gauche de la Vesgre, les aménagements repérés recelant du mobilier ont tous été datés de la période mérovingienne.

17Il s’agit, en bas de pente, d’une série de fossés parallèles à la rivière – jusqu’à six – et d’une zone assez dense de blocs de calcaire et de rognons de silex qui peut correspondre à une installation de type digue.

18En haut de pente, quatre fonds de cabane étaient cantonnés dans un secteur circonscrit par deux fossés perpendiculaires à ceux proches de la rivière. Les fonds de cabane possèdent quatre trous de poteau disposés chacun dans un angle. Leur remplissage contenait un mobilier (céramique, os, fer) relativement abondant. L’un d’eux, comblé de pierres et de quartiers de bovidés représentant au moins deux individus, semble avoir connu une activité plus intense (étude faunistique : Djillali Hadjouis). Plusieurs remontages céramiques permettent d’établir un lien chronologique entre ces structures, au moins dans leur phase de comblement. Leur fonction est difficile à déterminer (trois d’entre eux seraient peut-être des greniers, garde-mangers ?).

Fig. 2 – Fond de cabane mérovingien avec dépôt de pierres et de quartiers de bovidés

Fig. 2 – Fond de cabane mérovingien avec dépôt de pierres et de quartiers de bovidés

Cliché : J. Ajot (Afan).

19L’ensemble du secteur étudié a aussi livré une douzaine de fosses plus ou moins riches et quelques trous de poteau sans organisation particulière.

20Enfin, sur les 5 000 m2 fouillés dans les limites arbitraires de la déviation, la faible densité des structures découvertes laisse supposer que l’on est en bordure d’une installation plus conséquente : ce site présente tous les éléments constitutifs d’un habitat rural classique du haut Moyen Âge, sauf les grandes habitations sur poteaux qui s’y trouvent normalement associées. Cette absence s’explique aisément du fait de la faible surface étudiée par rapport à l’étendue de ce type d’établissement qui couvre généralement plusieurs hectares.

Maulette, Cayenne

(fouille Michel Philippe)

21Sur la rive opposée de la Vesgre, une nécropole à incinérations de La Tène finale a livré neuf urnes funéraires. La plupart ont été recueillies quasiment intactes. Sept d’entre elles étaient déposées dans des fosses, les deux autres ont été directement enfoncées dans le sable meuble. Trois fosses coïncidant avec des creusements antérieurs (réutilisation ?) attestent la matérialisation au sol d’au moins une partie des structures funéraires. Bien que le décapage en aire ouverte de plus de 3 500 m2 ait largement dépassé l’étendue supposée de la nécropole (inférieure à 400 m2), il a été impossible de retrouver des traces d’aménagements périphériques (pas d’enclos associé, pas de zone de bûcher).

22Suite à l’incinération, les restes des défunts ont fait l’objet d’une manipulation avec tri et mise en urne. Le tri a été effectué avec soin : pas de charbons ni de cendres dans les urnes, et peu ou pas dans les fosses. Pour chaque individu, un choix raisonné semble avoir été effectué parmi les ossements (étude anthropologique : Philippe Chambon). Le dépôt d’au moins un objet de parure à l’intérieur de l’urne est quasi-systématique.

23Un problème chronologique important est posé par le matériel provenant de cette nécropole et de celle de Houdan : dans les deux cas, un ensemble d’urnes tout à fait représentatif de La Tène finale, voire pour au moins un exemplaire de la phase post-conquête de cette période, contenait des éléments de parure de schéma Tène II : fibules en fer caractérisées par la grande dimension de certains exemplaires (jusqu’à 120 mm), le surbaissement de l’arc et la faible longueur du pied par rapport à l’arc (restauration : Jorge Vasquez). Deux exemplaires pourraient même être exempts de retour de pied. Une poursuite des études apportera sans doute dans l’avenir des éléments de réponse à ce problème.

L’implantation médiévale de Gambais, Le Grand Saule

(fouille Paul Brunet)

24Sur les 600 m2 décapés en bordure d’emprise, un fond de cabane à six trous de poteau (un pour chaque angle et deux doublant ceux du front sud) a été recoupé par l’implantation d’un grand bâtiment offrant un plan de trois rangées de cinq trous de poteau. Autour de celui-ci gravitent de nombreuses structures annexes : fours domestiques, fosses, trous de piquet et de poteau.

25La grande rareté du matériel ainsi que son mauvais état de conservation ne permettent pas de s’avancer précisément quant à leur datation, si ce n’est qu’il s’agit probablement d’une implantation médiévale. Un drain creusé le long de la fouille par l’aménageur a permis de reconnaître au moins deux fosses situées en direction du champ bordant le tracé. Sans doute faut-il en conclure que, là encore, nous n’avons traité qu’une partie du site concerné.

26Par la faible largeur d’exploration attribuée par l’emprise des travaux (ici, en moyenne 70 m) et, au contraire, la forte étendue de la longueur parcourue, toute opération sur tracé linéaire constitue avant tout un sondage aléatoire à travers la région concernée. Cet aspect est primordial dans le cas de cette opération : tous les sites repérés, quand ils n’appartiennent pas directement à un habitat, en révèlent la présence dans un espace voisin. Cette opération aura donc permis, en sus des résultats obtenus, d’attirer l’attention sur une région qui n’a jusqu’alors livré que peu de sites archéologiques.

27Un axe de cette importance est appelé à faire l’objet, dans un avenir plus ou moins proche, d’aménagements annexes. Certains sont d’ores et déjà programmés. Souhaitons que la poursuite du traitement préventif des sites repérés par notre intervention puisse être menée selon des délais compatibles avec nos impératifs minimums, ce qui n’a pas été le cas ici, notamment en ce qui concerne la villa, l’intervention archéologique ayant débuté en même temps que les travaux de gros œuvre.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 – Le Saule Guérin, plan de la villa gallo-romaine
Crédits DAO : J. Ajot (Afan).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/170415/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 391k
Titre Fig. 2 – Fond de cabane mérovingien avec dépôt de pierres et de quartiers de bovidés
Crédits Cliché : J. Ajot (Afan).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/170415/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 914k
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Pour citer cet article

Référence électronique

José Ajot, Paul Brunet, Valérie Gonzalez, Michel Philippe, Marie-France André, Guy Boulay, Nathalie Paccard et Christian Piozzoli, « Houdan–Bazainville – Déviation RN 12 » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Île-de-France, mis en ligne le 21 novembre 2024, consulté le 17 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/170415

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