Saint-Jean-de-Bournay – Tour Lesdiguières, chemin du Château, chapelle Saint-Pierre
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Année de l'opération :
2023Numéro d’opération :
2214905Sujets :
habitat, château, fortification, rempart, bâtiment militaire, fossé défensif, tour, latrines, installation hydraulique, réservoir, citerne, mur, cave, graffitiChronologie :
époque médiévale, Moyen Âge classique, Bas Moyen Âge, époque moderne, époque contemporaineNature de l'opération :
opération de diagnosticNotes de la rédaction
Organisme porteur de l’opération : Inrap
Martin G. 2024 : Saint-Jean-de-Bournay, Isère, Auvergne-Rhône-Alpes. Tour Lesdiguières, chemin du Château, chapelle Saint-Pierre, Rapport de diagnostic, Bron, Inrap.
Texte intégral
1L’objectif de cette opération était de tenter de trouver les témoins, dans les élévations d’un édifice anciennement fortifié, de ses différentes époques de construction et de son environnement en les confrontant aux informations historiques à notre disposition.
2Le diagnostic archéologique concerne l’ancienne tour « Lesdiguières », seul vestige en élévation du château du même nom.
3Nous avons accumulé lors de ce diagnostic une somme conséquente de données issues d’une investigation mixte, couplant étude de bâti et contextualisation documentaire. Le balayage des sources documentaires a fourni une documentation abondante, que nous sommes venus confronter aux considérations de terrain. La fusion de plusieurs apports et de sources écrites publiées nous a permis de dresser une esquisse de l’évolution de la parcelle, de sa genèse jusqu’à nos jours.
4L’objet du diagnostic, une tour, seul vestige en élévation d’un château détruit, est situé dans la commune de Saint-Jean-de-Bournay, dans le département de l’Isère. Cette petite agglomération, autrefois une paroisse de la province royale du Dauphiné et ancien siège de la communauté de communes de la région saint-jeannaise, est désormais membre de la communauté de communes Bièvre-Isère depuis 2014.
5Le contexte de cette intervention archéologique est le projet de réhabilitation de la tour partiellement effondrée, ainsi que du soutènement adjacent. La municipalité de Saint-Jean-de-Bournay souhaite sauvegarder cet ensemble architectural, unique témoin d’une occupation castrale d’envergure, et envisage des travaux pour stabiliser les ruines et les rendre accessibles au public. L’authenticité du lieu est un enjeu majeur de ce projet de restauration.
6Le château, appelé château de Lesdiguières en vertu du nom d’un de ses derniers détenteurs, est implanté sur une parcelle en partie municipale et en partie privée. Des murs de soutènement, considérés comme faisant potentiellement partie d’un ancien réseau de fortifications, ainsi qu’un pavillon d’angle, sont mitoyens avec une propriété privée au sud. Initialement, des travaux d’aménagement des accès sur le site ont été envisagés, mais ils ont été abandonnés, en raison de leur impact potentiel sur les vestiges enfouis. L’intervention archéologique s’est concentrée principalement sur la tour elle-même, bien que des observations aient également été étendues aux parcelles privées adjacentes. L’état de conservation de l’ensemble bâti est médiocre, avec une végétation abondante qui a contribué à accélérer la dégradation de la structure au fil des années. Les étages sont en partie effondrés, et des signes de dégradation sont visibles sur les murs de soutènement.
7En raison des risques liés à la sécurité, les travaux sur le terrain sont restés limités. Seul un relevé photogrammétrique par drone a été réalisé pour établir une chronologie sommaire des élévations. Malgré les défis posés par l’accessibilité et l’état de la structure, la tour présente des attributs distincts de la fin du Moyen Âge, bien qu’avec des dispositions architecturales inhabituelles, telles qu’une large porte charretière traversant le rez-de-chaussée.
8Les objectifs scientifiques de l’opération archéologique incluaient l’établissement de la chronologie des aménagements, la caractérisation des éléments architecturaux et la mise en évidence du phasage chronologique de l’édifice. Les principes méthodologiques dictaient une approche sélective, avec des études des maçonneries, des prélèvements pour analyse et une documentation complète conforme aux normes.
9Le rapport a fourni un aperçu du contexte géologique, historique et archéologique de la région, en mettant en évidence les caractéristiques géomorphologiques, géologiques et hydrologiques locales. La commune de Saint-Jean-de-Bournay, située dans le nord du département de l’Isère, est traversée par la Gervonde, une petite rivière coulant d’est en ouest vers le Rhône. Son territoire présente une topographie variée, avec des formations glaciaires et des affleurements de molasse sablo-gréseuse, qui ont été largement utilisés dans l’architecture locale.
10Le diagnostic a fourni une analyse de l’histoire du bourg de Saint-Jean-de-Bournay ainsi que de sa seigneurie, en explorant plusieurs aspects allant de la structure urbaine à l’évolution des propriétaires du château en passant par les récentes investigations menées sur le site.
11En ce qui concerne le château, il est situé sur le rebord d’un plateau surplombant le village, avec les habitations concentrées autour de deux rues principales. Une grande étendue non bâtie, pentue, sépare le château du bourg, et une chapelle dédiée à Saint-André est positionnée entre les deux entités. Cette configuration met en évidence l’organisation spatiale régulière du bourg, typique des villes neuves médiévales fondées au xiie s., et souligne l’importance des portes principales et des axes de circulation.
12La morphologie générale du site met en évidence une disposition en quadrilatère sur un promontoire et l’existence de larges fossés révélés par l’analyse des données LiDAR. L’attention a été portée sur les détails topographiques, y compris les accès nord et ouest du château, suggérant des dispositifs défensifs, tels que des fossés et des remparts pour contrôler l’entrée.
13La seigneurie de Saint-Jean-de-Bournay semble remonter au xiie s. et est étroitement liée à plusieurs familles aristocratiques locales, telles que la famille de Burnay et les familles de la Tour et Coligny. On suit, grâce aux sources documentaires, l’évolution de la propriété du château à travers les siècles, depuis son acquisition initiale jusqu’à son transfert au duc de Lesdiguières au xviie s., puis à la famille Garnier jusqu’à la Révolution française. L’étude des sources permet de mettre en lumière les évolutions architecturales du château au fil du temps, y compris son démantèlement ultérieur.
14Dans le cadre contraint du diagnostic, nous avons tenté d’établir une chronologie des aménagements et de caractériser les éléments architecturaux encore existant. Cette intervention a impliqué l’utilisation d’un drone pour la création d’un modèle photogrammétrique afin de documenter les vestiges archéologiques.
15Ainsi, la tour méridionale, également appelée tour Lesdiguières, a fait l’objet d’une analyse de sa structure, de ses matériaux de construction et de ses caractéristiques architecturales. La tour mesure environ 14,5 m de haut et 7 m de diamètre maximal. La molasse et le calcaire sont les principaux matériaux mis à contribution. L’analyse de la tour révèle une enveloppe en fer à cheval avec un noyau pentagonal, ouvert au nord-est, et suggérant une utilisation mixte de la tour à des fins de résidence et de défense.
16Les différentes parties de la tour et leurs composantes architecturales ont été divisées en différentes unités stratigraphiques, qui témoignent d’un projet cohérent, fruit d’une campagne de construction homogène (US 2 à US 23), malgré quelques reprises postérieures :
- fondations et structure de base : la base de la tour est envasée et supportée par un glacis circulaire, posé sur des blocs de molasse. Une maçonnerie plus ancienne, en blocs et galets, peut-être une structure antérieure, a été identifiée ;
- maçonnerie d’élévation (US 5) : elle est composée de blocs et moellons de calcaire molassique, avec un parement extérieur presque circulaire. La technique de construction inclut un mortier de chaux compact, avec peu de joints visibles, et des traces d’oxydation naturelle sur certains blocs ;
- couronnement de la tour (US 6) : ce segment est moins bien conservé, principalement constitué de galets et présente peu de mortier. Il pourrait s’agir d’une reconstruction consécutive au démantèlement du site ou d’une technique d’une phase distincte du chantier ;
- fenêtres et ouvertures : trois niveaux de fenêtres moulurées (US 9 à US 11) orientées sud-ouest offrent un éclairage sur trois étages, avec des modénatures rattachables à la seconde moitié du xve s. ;
- aménagements défensifs : une canonnière (US 8) et une meurtrière (US 15) sont présentes, offrant des positions de tir stratégiques, mais probablement plus symboliques que fonctionnelles en termes de défense ;
- accès : la tour présente une large porte charretière (US 12) au nord, caractérisée par un arc surbaissé témoin d’une maîtrise des techniques de taille et de mise en œuvre ;
- intérieurs et autres aménagements : des traces de conduits, peut-être des systèmes de latrines sophistiqués, et des indications de démolition révèlent des aspects de l’utilisation quotidienne et des modifications au fil du temps ;
- voûtes et planchers : les niveaux sont structurés par des voûtes d’arêtes et des plans de planchers marqués par des négatifs de poutres, ce qui indique des techniques de construction adaptées à chaque niveau de la tour.
Fig. 3 – Orthophotographie de la façade sud-ouest de la tour

Échelle : 1/40.
Clichés et DAO : J. Boudry (Inrap).
17Le diagnostic s’est également intéressé au vestige d’une seconde tour située dans la parcelle septentrionale. Bien que moins détaillée que la première, une analyse de sa structure, de ses caractéristiques architecturales et de ses aménagements intérieurs a été ébauchée. Cette tour arasée se présente comme une butte végétalisée avec des niveaux de circulation semi-enterrés. Elle n’a pas fait l’objet d’une étude stratigraphique détaillée en raison de son emplacement hors prescription.
18À l’extérieur, près de la porte d’accès ouest, un arrachement de maçonnerie est observé, probablement relié historiquement à la fortification du château. L’intérieur de la structure révèle des dimensions et des caractéristiques constructives proches de son homologue du sud, comme la hauteur des murs, le diamètre intérieur et extérieur. Les murs sont faits d’un assemblage de blocs de calcaire et de moellons de calcaire molassiques, liés par un mortier identique à celui de la première tour. Une voûte en coupole, altérée par des infiltrations d’eau, surmonte l’ensemble.
19Un graffiti du xixe s. a été identifié, ainsi qu’une trémie carrée donnant accès à un niveau inférieur, et qui pourrait avoir servi de citerne ou de cave. La présence de maçonnerie et de mortier hydraulique à ce niveau inférieur suggère une construction soignée et un usage potentiellement lié à la conservation ou au stockage.
20Au niveau 0, une meurtrière au nord-ouest et une latrine au sud-est sont également détaillées, soulignant la finesse de la taille des blocs de molasse et de grès utilisés. La question des flux de la fosse d’aisance et la proximité d’une réserve d’eau nécessiteraient des éclaircissements concernant l’intégrité structurelle et sanitaire du bâtiment.
21Enfin, il est fait mention d’un mur de soutènement oriental soulignant son rôle dans la structure globale du château. Bien qu’il ne soit pas de nature défensive et qu’il soit manifestement postérieur à la tour, ce mur semble jouer un rôle dans la stabilisation du terrain et l’accès aux communs à l’est.
22Ainsi, à l’issue de ce court résumé, il reste des secteurs moins explorés que d’autres et des zones d’ombre, ce qui peut par ailleurs réserver des découvertes potentielles, malgré un site presque intégralement arasé. Comme le lecteur l’aura compris, notre étude n’est qu’une ébauche mais l’exercice du diagnostic ne tend pas vers la connaissance exhaustive d’un site ou d’une entité construite. Cet exercice dresse un aperçu à travers des lucarnes afin de préparer la voie à un travail plus approfondi.
23Le développement des connaissances autour de la tour Lesdiguières et l’ancien château de Saint-Jean-de-Bournay viendrait étoffer la chronologie du lieu et enrichir les connaissances autour de ce site relativement méconnu.
Table des illustrations
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Titre | Fig. 1 – La tour aujourd’hui |
Crédits | Cliché : G. Martin (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/176594/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 547k |
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Titre | Fig. 2 – Le noyau de la tour |
Crédits | Cliché : G. Martin (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/176594/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 719k |
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Titre | Fig. 3 – Orthophotographie de la façade sud-ouest de la tour |
Légende | Échelle : 1/40. |
Crédits | Clichés et DAO : J. Boudry (Inrap). |
URL | http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/176594/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 3,9M |
Pour citer cet article
Référence électronique
Guillaume Martin, « Saint-Jean-de-Bournay – Tour Lesdiguières, chemin du Château, chapelle Saint-Pierre » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Auvergne-Rhône-Alpes, mis en ligne le 13 janvier 2025, consulté le 13 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/176594
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