Morieux – Église Saint-Gobrien
Notes de la rédaction
Organisme porteur de l’opération : Afan
Texte intégral
1En 1992, à l’occasion de travaux effectués sur la charpente de l’église, une peinture murale représentant le Christ en majesté, placée au-dessus de l’arc triomphal, a été découverte. L’intérieur de l’église a été classé au titre des Monuments Historiques et à la suite d’une campagne de sondages, ayant révélés plus de 200 m2 de peintures allant de l’époque romane au xviie s., un projet de restauration a été mis en œuvre par la conservation régionale des Monuments Historiques. L’église de Morieux a des caractéristiques propres à l’architecture romane, remarquables surtout dans sa partie occidentale : baies étroites et hautes, largement ébrasées vers l’intérieur, contreforts plats, porche d’entrée composé d’une ouverture en plein cintre encadrée de deux contreforts plats… À l’intérieur, deux colonnes, dont l’une est dotée d’un chapiteau décoré, ont été préservées au niveau de l’arc triomphal. Ce dernier a été transformé, certainement au xiiie s. : un arc ogival a remplacé l’ancien arc en plein cintre d’origine. La nef est à vaisseau unique. Le chœur actuel, bordé de demi bas-côtés, date des xive-xve s.
2Une approche archéologique a semblé nécessaire, afin d’affiner les connaissances sur cet édifice (modes de construction, évolution), et en particulier pour préciser le plan du chœur primitif. Trois sondages ont été effectués à l’emplacement présumé des murs du chœur roman, autour des piliers de l’arc triomphal et sous l’arcade donnant accès au collatéral nord. Un quatrième sondage a été ouvert sous la sacristie actuelle, afin de vérifier le retour du chevet roman sous le chevet postérieur.
3La fouille a mis en évidence le premier état roman du chœur. Le mur d’abside a été mis au jour sous les arcades au nord et au sud. Il se compose, au niveau des parements, de petits moellons dont le lit d’assise n’est pas régulier et qui sont liés avec un mortier sablo-argileux roux compact, mais friable et homogène. La partie interne est constituée d’un bourrage de petits moellons liés par le même mortier. Les pierres de fondations sont liées entre elles par un mortier argileux, noir et compact.
4La présence d’un corbeau et d’une baie (mise au jour lors de la restauration des peintures par l’atelier Scarlatescu), de facture romane, au-dessus des arcatures nord, démontre que les maçonneries romanes sont conservées en élévation. Le corbeau, actuellement caché sous la nouvelle voûte lambrissée, doit même indiquer un mur extérieur de l’époque. Le mur de chevet n’a pas été repéré. La campagne de construction du nouveau chevet et, plus tard, celle de la sacristie (xixe s.), ont fortement bouleversé la stratigraphie. En outre, l’exiguïté des sondages nous a limité à une vision très partielle des structures.
5Cependant, d’après les murs de l’abside, on peut conclure à un chevet plat dont la profondeur demeure inconnue. La largeur du chœur était de 6,10 m et il présente donc un plan rétréci par rapport à la nef qui présente une largeur de 7 m. Une maçonnerie, dont la fonction n’a pu être clairement établie, a été mise en évidence à 1,40 m du chevet actuel. Ce mur en pierres sèches, parementé uniquement sur sa face orientale, s’appuie contre le mur d’abside et semble avoir été arasé. Il aurait pu servir de support à une marche, à une surélévation du sol, ou bien correspondre à un petit mur bahut formant un couloir le long du chevet. Il aurait également pu servir à retenir les déblais pour la reconstruction du mur du chevet à l’époque gothique.
6Un emmarchement et un sol de terre battue associé ont été découverts sous l’arc triomphal, à une profondeur de 0,40 m. L’emmarchement était curieusement placé au niveau du radier de fondation du pilier roman (mortiers identiques). Il permettait d’accéder de la nef au chœur par une volée de trois marches en pierres de taille. Le temps a manqué pour son démontage qui aurait permis de préciser sa contemporanéité éventuelle avec les piliers et le chœur romans. Une succession de sols ou de niveaux de travail de terre battue ou de mortier de chaux viennent recouvrir l’emmarchement. Ces niveaux s’appuient contre les maçonneries romanes (mur d’abside et base du pilier roman). Aucun élément n’a permis la datation précise de ces sols. On se contentera de constater qu’ils sont antérieurs à l’agrandissement du chœur.
7Des sépultures postérieures aux xive et xve s. ont recoupé les niveaux les plus anciens. Les inhumations paraissent avoir été fort nombreuses, en particulier dans les chapelles latérales. Ceci a fortement perturbé la stratigraphie, et donc la lisibilité des niveaux à partir desquels elles ont été creusées, ainsi que les niveaux supérieurs. Ces couches, ainsi que le comblement des fosses, peuvent être interprétés comme des remblais de destruction ou de construction (couches hétérogènes mêlées de mortier, avec des fragments d’enduits peints, de vitraux, clous...).
8Tous les corps étaient orientés est-ouest, avec la tête à l’ouest. Très peu de mobilier a été trouvé avec les sépultures. L’église est certes d’époque romane, mais jusqu’à présent plusieurs datations ont été proposées pour cet édifice. Deux thèses sont en présence : celle de P. Guigon qui, reprenant Couffon penche pour une construction datant du début du xiie s., et celle de M. Déceneux qui, à l’inverse, souligne une qualité architecturale (matériaux polychromes, contreforts, décor sculpté) que l’on pourrait rattacher à un édifice plus récent, c’est à dire à la fin du xiie s. La fouille n’a apporté aucun élément supplémentaire, en dehors d’une chronologie relative. Il resterait à effectuer un travail de comparaison dans un secteur géographique où de nombreuses églises modifiées au xixe s. conservent des éléments architecturaux et des maçonneries d’époque romane (Hillion, Coëtmieux, Henanbihen, Erquy, Plurien, Pleherel…).
9Il serait nécessaire de préciser la datation de certains édifices lorsqu’elle n’a été établie qu’à partir des seuls critères stylistiques, archivistiques (mentions) ou architecturaux. Il faudrait ainsi porter un regard plus archéologique sur ces édifices, à travers la réalisation d’études de bâti et de fouilles archéologiques.
Pour citer cet article
Référence électronique
Stéphanie Hurtin, Ludivine Tribes, « Morieux – Église Saint-Gobrien » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Bretagne, mis en ligne le 01 septembre 2019, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/23637
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