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1998
39 – Jura

Fontenu – Lac de Chalain, station 19, Îlot sous Doucier

Fouille programmée (1998)
Responsable d’opération : Pierre Pétrequin

Entrées d’index

Année de l'opération :

1998

Chronologie :

Préhistoire, Néolithique

Nature de l'opération :

fouille programmée
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Notes de la rédaction

Organisme porteur de l’opération : CNRS

Texte intégral

1Chalain 19 appartient à la zone archéologique de l’Îlot sous Doucier, c’est-à-dire aux sites néolithiques qui sont groupés à l’angle sud-ouest du lac de Chalain (Jura).

2Pendant la première année de fouille programmée, les sondages systématiques à la sonde pollinique ont été orientés pour reconnaître la géométrie des remplissages littoraux, pour détailler en chronologie la séquence néolithique de 3200 à 2400 av. J.-C., enfin pour déterminer l’emplacement et l’extension des différents villages qui se sont succédés – ou qui ont été habités conjointement – pendant ce laps de temps.

3Pendant la deuxième année, le décapage au centre de CH 19 a été porté à 240 m2, surface nécessaire pour comparer l’évolution technique et culturelle de trois ensembles stratigraphiques d’habitat, respectivement datés du 32e s. (Horgen), puis des 31e et 30e s. av. J.-C. (Clairvaux ancien). Comme c’était le cas dans la zone archéologique de la Prise d’Eau, la fondation du village doit être sans réserve attribuée à la culture de Horgen, avec de premières importations de céramiques Ferrières. Après une courte période d’abandon du site au cours de la première moitié du 31e s., le village est reconstruit pour une occupation permanente au moins jusqu’au milieu du 31e s. ; cette occupation permanente coïncide, d’une part avec la croissance démographique démontrée par ailleurs à Chalain et à Clairvaux, d’autre part avec la véritable mutation culturelle qu’entraîne l’arrivée massive d’éléments Ferrières.

4La troisième année de la fouille programmée a été consacrée à une approche spatiale du village de CH 19, pour mettre en contexte la séquence stratigraphique et architecturale reconnue. La surface totale du décapage a été portée de 240 à 1 000 m2, en particulier du côté de la terre ferme où les sédiments postérieurs au 30e s. sont de relativement faible épaisseur. L’organisation générale du village apparaît maintenant avec clarté.

5Au sud, un chemin de planches, de plus de 100 m de longueur, relie le village à la terre ferme à travers le bas marais inondable. Ce chemin, d’une largeur moyenne de 1,90 m, a été classiquement implanté sur des paires successives de pieux, renouvelées à chaque reconstruction de cette voie d’accès au village. Mais l’existence d’un sentier bien marqué entre les deux lignes parallèles de pieux qui délimitent le chemin, permet de suggérer que pendant certains épisodes les bois horizontaux du tablier étaient complètement détruits et que la circulation piétonne se faisait directement sur des litières végétales posées à même le sol. On est donc en droit de se demander si la reconstruction du chemin de planches (pour charrier les bois d’œuvre) ne précédait pas, chaque fois, une reconstruction générale du village ; plus tard, pendant le temps de vie des habitations nouvelles, on aurait laissé le chemin se dégrader sans entretien, jusqu’au prochain épisode de reconstruction. A. Viellet devrait pouvoir répondre à cette question en comparant les séquences d’abattage des bois utilisés pour le chemin et des bois de fondation des habitations.

6Du côté de la terre ferme, l’espace villageois était fermé par une palissade à tracé demi-circulaire, de 75 m de long, dont les extrémités s’engagent dans le lac ; le tracé de l’enclos suit une dépression marécageuse inondable. L’état actuel de cette palissade avec des poteaux très rapprochés, mais de typologie variable, semble bien n’être que l’aboutissement d’une longue série d’arrachages partiels et de réfections pendant une durée de deux siècles et demi. Là encore, l’apport de la dendrochronologie s’avère capital, pour comprendre la forme architecturale de cette clôture et la gestion sociale des nécessaires réfections régulières, forme d’approche qui n’a jamais été envisagée jusqu’ici.

7L’espace villageois est divisé en une moitié orientale à bâti dense, où le plan des poteaux permet d’ores et déjà de suggérer des petites constructions rectangulaires d’environ 4 m sur 8 m ; et en une moitié occidentale, avec un large espace non construit, occupé en son centre par les ruines d’un seul bâtiment reconstruit pendant plus de trois décennies à peu près sur le même plan. Cette division de l’espace villageois et cette opposition de plans architecturaux pourrait être un bon indice de divisions sociales de la communauté ; c’est ce que nous testerons l’an prochain en fouillant le grand bâtiment isolé et ses abords.

8Enfin, la fouille de l’entrée du village a réservé une surprise inédite. Immédiatement au-dessus de la couche d’abandon du village, déformée par les piétinements, le corps d’un enfant de 9 à 12 ans a été déposé en position légèrement fléchie, en travers du chemin, seul accès à l’espace villageois, et juste avant l’interruption de la palissade. Il ne s’agit pas d’une sépulture puisque le corps, déposé à même le sol et probablement recouvert d’une peau ou d’un cuir, a été recouvert progressivement par les sédiments lacustres. Mais la position et l’orientation du corps, tête à l’ouest, pieds à l’est, ne laisse aucun doute sur le dépôt volontaire de ce corps d’enfant. Une telle découverte, excessivement rare, pourrait s’inscrire dans les rituels de fermeture d’un village au moment de l’abandon, comme en témoignerait d’ailleurs l’habitude d’incendier les maisons vidées de leur contenu.

9Les trois prochaines années de fouille seront consacrées d’une part à l’étude du grand bâtiment isolé de CH 19, qui suggère des rapports sociaux inégalitaires, d’autre part au décapage extensif du chemin d’accès et de l’espace entre palissade et terre ferme, une aire qui n’a jamais été touchée par les fouilles des villages littoraux ; ici, de premiers indices (quelques ossements humains déconnectés, des poteaux sans rapport avec le village et avec le chemin) nous incitent à penser que le marais entre village et terre ferme n’était peut-être pas la zone déserte et inutilisée que les auteurs ont imaginé sans vérification.

Fig. 1 – Chalain 19, 3173-2916 av. J.-C.

Fig. 1 – Chalain 19, 3173-2916 av. J.-C.

DAO : P. Pétrequin (CNRS).

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 – Chalain 19, 3173-2916 av. J.-C.
Crédits DAO : P. Pétrequin (CNRS).
URL http://journals.openedition.org/adlfi/docannexe/image/26152/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 397k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Pierre Pétrequin, « Fontenu – Lac de Chalain, station 19, Îlot sous Doucier » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Bourgogne-Franche-Comté, mis en ligne le 01 septembre 2019, consulté le 18 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/adlfi/26152

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Auteur

Pierre Pétrequin

CNRS

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Responsable d’opération

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Droits d’auteur

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