1Le gisement du Loup (anciennement grotte de la Gaillardie) est localisé sur la commune de Brive-la-Gaillarde, au lieu-dit Galop. La grotte du Loup se situe au sud-ouest de la Corrèze, au cœur du bassin de Brive. Il s’agit d’un pseudo-karst creusé dans les Grès attribués au Permien.

2La première intervention sur le site fut réalisée sous la conduite de J. Bouyssonnie qui effectua un sondage devant l’entrée de la cavité au cours des années 1930. Il faudra ensuite attendre 1965 pour qu’un second sondage de 2 m² soit réalisé par J.-L. Couchard.

3La fouille systématique du gisement aura lieu entre 1966 et 1972 sous la direction de G. Mazière. Une superficie de plus de 100 m² fut fouillée. La stratigraphie mise en évidence par G. Mazière et J.-P. Raynal, qui assura l’étude géologique du remplissage, est complexe et indique l’existence de plusieurs sous-niveaux au sein de chaque couche et des différences notables dans la stratigraphie des différentes zones fouillées (chantiers 0, 1 et 2). Dans ses grandes lignes, la stratigraphie relevée dans et à l’extérieur de la grotte du Loup comprend donc 5 niveaux. La couche 1, sommitale, présente des industries mélangées appartenant au Paléolithique (Châtelperronien, Aurignacien, Gravettien ancien et Solutréen) et au Moyen Âge. La couche 2 est attribuée à une phase récente de l’Aurignacien. Les fouilleurs décrivent ensuite un niveau archéologiquement stérile, ou considéré comme tel, qui sépare cet Aurignacien de deux niveaux (couches 4 et 5) de Châtelperronien.

4Les travaux de reprise du site effectués en 2012 ont été réalisés en deux temps. Le premier a consisté à entamer la révision des séries lithiques issues des fouilles Mazière. La campagne de fouille s’est ensuite déroulée dans un second temps. Celle-ci a essentiellement consisté à remettre en état le gisement et à évaluer le potentiel informatif des témoins encore en place.

Étude des anciennes séries

5Si l’état actuel de la série a limité certaines analyses (couches non triées et matériel partiellement lavé) et ralenti l’avancée de nos recherches, les résultats obtenus cette année apparaissent toutefois significatifs. Ainsi, si l’attribution de la couche 2 à l’Aurignacien récent (phase à burins busqués déstructurés) et des couches 4 et 5 au Châtelperronien a pu être confirmée, il est cependant apparu que la couche 3, décrite comme archéologiquement stérile par G. Mazière, ne l’est pas. L’analyse des couches 4 et 5, châtelperroniennes, a permis de confirmer d’une part cette attribution, et d’autre part l’absence de vestiges moustériens.

6L’analyse taphonomique débutée cette année, couplée à l’analyse des archives des fouilles Mazière, a également permis de mettre en avant l’existence de problèmes dans l’attribution des niveaux sur les chantiers 1 et 2 (talus et porche de la cavité), dus à notre avis à une méthode de fouille peu adaptée. Ainsi, concernant le Châtelperronien par exemple, les projections réalisées ne laissent pas clairement transparaître l’existence de deux niveaux distincts. D’ailleurs les très fortes similitudes techno-économiques observées entre les ensembles 4 et 5, associées à la présence de nombreux raccords inter-couches, semblent plaider en faveur d’un unique niveau châtelperronien. Cette hypothèse devra bien entendu être confirmée à l’avenir par une analyse plus fine des projections, et par la fouille de la grande coupe témoin. De fortes présomptions de mélanges existent pour le fond de la cavité. L’utilisation de la grotte comme clapier pourrait en être à l’origine.

7Le diagnostic tracéologique réalisé sur les séries Mazière s’est révélé positif et augure de bonnes perspectives. Toutefois, ce dernier a mis en évidence l’existence d’une patine plus prononcée à l’avant de la cavité, rendant délicate la lecture des vestiges. Il s’agit malheureusement du secteur où les séries semblent être les plus homogènes.

Opération de terrain

8Nous nous étions fixé pour but cette année de nettoyer et d’évaluer le potentiel des témoins encore en place. Après avoir réalisé un relevé topographique complet de la cavité et de ses abords, nous avons focalisé nos travaux sur la grande coupe témoin (fig. 1) laissée sur la paroi gauche (vue depuis l’intérieur) et sur le fond de la cavité. La coupe a ainsi été ravivée sur toute sa longueur afin de réaliser les premières observations géologiques. Nous avons également procédé à la vidange et à la remise en état d’un sondage profond réalisé par G. Mazière. Les données stratigraphiques ont donc pu être intégrées à celles qui ont été obtenues pour la coupe témoin (fig. 1).

9La reprise et le nettoyage de la grande coupe ont permis de récolter du matériel dans deux unités stratigraphiques ainsi que dans l’humus. L’humus et la couche A sous-jacente ont livré de l’Aurignacien récent. La couche D a quant à elle livré des vestiges châtelperroniens.

10Les différentes couches décrites par J.-P. Raynal peuvent être comparées avec les unités mises en évidence sur la grande coupe. Précisons que la coupe étudiée par J.-P. Raynal se trouvait en face, à environ 2 m de la grande coupe témoin. Des variations latérales de faciès ne sont donc pas à exclure. Il nous a été difficile sur la seule base de ces descriptions de faire un rapprochement entre les différentes fouilles. Toutefois au vu de la description et du contenu archéologique de notre US D, qui contient du Châtelperronien, il est possible de la rapprocher de la couche 5 précédemment décrite. De même en raison de sa couleur et de la présence de lentilles argileuses, la couche 6 peut être comparée à notre US E/F. Ce niveau semble en apparence stérile. En revanche les couches 4, 3 et 2 semblent relativement différentes des US A, B et C que nous avons pu observer. Cependant, d’après le contenu techno-typologique nous proposons de rapprocher d’une part l’humus à la couche 1, et d’autre part notre couche A avec la couche 2 décrite par G. Mazière.

11Bien que cette étude soit encore préliminaire, nos observations vont dans le sens des conclusions précédemment énoncées par J.-P. Raynal concernant la mise en place des dépôts. Les processus mis en jeu ici sont essentiellement l’œuvre de la gélifraction entraînant l’altération des parois par le gel couplé à des phénomènes de ruissellements et/ou de circulations d’eau plus importants en provenance de l’intérieur de la cavité.

12Les travaux de reprises du site, couplés au réexamen des anciennes séries, ont permis d’obtenir des résultats encourageants sur les différentes occupations de la cavité. La poursuite des fouilles devrait permettre de répondre aux différentes questions soulevées cette année.