Busse (Christian), Weinbau und Weinrecht im Reichsland Elsass-Lothringen. Betrachtung zu einer Strassburger preisgekrönten Dissertation von 1911
Busse (Christian), WeinbauundWeinrechtimReichslandElsass-Lothringen. BetrachtungzueinerStrassburgerpreisgekrönten Dissertation von 1911, Wiesbaden, « SchriftenzurWeingeschichte, 199 », 2020, 120 p.
Texte intégral
1Édité par la Société pour l’histoire du vin (allemand), l’ouvrage de Christian Busse s’intéresse à une dissertation (thèse en équivalent français) de 1911, soutenue à la Kaiser WilhelmsUniversitätStrassburg par un Alsacien, originaire d’Ammerschwihr. La dissertation, qui avait obtenu un prix en 1911, sert de prétexte à une présentation du vignoble alsacien au temps du Reichsland. Ce qui fait de ce livre un hybride, paraphrasant parfois la dissertation, y ajoutant un apport historique non négligeable.
2Le plan de l’ouvrage correspond aux attentes : la présentation de l’auteur de la dissertation et de ses professeurs, un exposé sur l’histoire de « l’Alsace-Lorraine » depuis le Moyen Âge (!), un exposé sur l’histoire de l’Université au temps du Reichsland, un autre sur l’histoire du droit à cette époque (sans doute la plus intéressante à cause de la recension des ouvrages du moment), les positions de l’auteur alsacien de la dissertation quant à la situation du vignoble régional avec une comparaison avec des opinions futures. Une bibliographie, de plus d’une centaine de titres, clôt le volume, lequel est agrémenté d’une cinquantaine d’illustrations.
3L’on aurait pu en rester là, s’il ne se dégageait pas à la lecture de ce Weinbau und Weinrechte un indéfinissable sentiment de gêne qui débute par le parcours de la bibliographie, plus décorative que véritablement utilisée. Le malaise s’identifie vite. Un seul titre en français : le Journal officiel de la République française de 1936. Tous les autres sont en langue allemande, du plus inattendu (Bieber, 1941 ; Bleicher, 1942) au plus sérieux (Hiery, 1986 ; Kulisch, 1909). Klaus Nohlen et Bernard Vogler, reconnus pour la qualité de leurs travaux, sont cités dans leur version allemande. Médard Barth, Der Rebbau im Elsass, la bible sur l’histoire du vignoble alsacien, figure en bonne place.
4La méconnaissance (ou l’occultation ?) de la bibliographie alsacienne de langue française est, pourtant, sidérante. Elle fait de l’ouvrage recensé l’archétype de la difficulté d’écrire l’histoire de l’Alsace lorsqu’on est monolingue. Il est désagréable, dans un compte-rendu, de devoir pointer des manques récurrents liés à cette pratique (ou ce choix ?).
5Pour commencer, Christian Busse n’a pas effectué de recherches aux Archives de l’Archevêché de Strasbourg. Il y aurait trouvé l’identité complète de l’auteur de la dissertation. Jules Frick est né à Ammerschwihr le 13 août 1879 et est ordonné prêtre le 25 juillet 1906. Il débute comme vicaire à Strasbourg Musau en 1906, poursuit comme vicaire à Schiltigheim en 1909. Mgr Fritzen, évêque allemand du diocèse de Strasbourg, l’autorise à suivre des cours d’économie, en 1910, qu’il couronne par un titre de docteur en 1911. Il est alors vicaire à Sélestat Sainte-Foy, avant de devenir administrateur de Schweinheim en 1916. En congé le 1er octobre 1919, sans que l’on sache pourquoi, il termine sa carrière ecclésiastique comme professeur au collège Saint-étienne de Strasbourg, où il professe du 15 juillet 1921 au 30 juin 1931. Il décède à Ammerschwihr le 15 mai 1939.
6Jules Frick mentionne dans ses remerciements, sur la page de garde de sa dissertation, son compatriote Joseph Sussenthaller, né à Ammerschwihr le 26 octobre 1880, ordonné prêtre le 25 juillet 1907. L’homme est apparemment de santé fragile, car il n’occupe que des vicariats à Wintzenheim en 1908, puis à Sierentz la même année, enfin à Mulhouse Saint-étienne début 1913. Il décède le 29 août 1913. Aucune explication de la présence de ces deux prêtres, l’auteur et l’ami, dans l’ouvrage de Christian Busse. L’occasion manquée de rappeler le rôle des hommes de Dieu, tant protestants que catholiques, dans l’écriture des choses de la vigne en Alsace (Claude Muller, Alsace, une civilisation de la vigne, 2010), d’évoquer le rôle de Rerum Novarum en 1891 pour inciter les ecclésiastiques catholiques à investir les champs politique et social et surtout les débuts tonitruants des Caisses Raiffeisen portées à bout de bras par les mêmes clercs.
7La partie consacrée à l’Université de Strasbourg aurait mérité d’autres développements. L’auteur ne connaît pas les ouvrages sur le sujet de Georges Livet et de Georges Bischoff, ni de J. E. Craig, Scholarship and nation building. The Universities of Strasbourg and alsatian society (1870-1939), Chicago-Londres, 1984. Les professeurs évoqués se réduisent à Paul Laband (1838‑1918), lequel cherche à justifier la souveraineté politique allemande dans l’Alsace annexée en consacrant dans son traité de droit public impérial de nombreuses pages aux problèmes du Reichsland. Sa biographie par Marcel Thomann dans le Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, 22, 1994, p. 2 165‑2 166, n’est visiblement pas connue.
8Les deux professeurs d’économie qui ont dirigé la dissertation de l’abbé Jules Frick passent par contre à la trappe. Il s’agit pourtant de Georg Friedrich Knapp (1842-1926), qui fait la réputation de l’Université de Strasbourg, beau-père de Theodor Heuss, futur président de la République fédérale d’Allemagne (Marcel Thomann, NDBA, 21, 1993, p. 2019) et de Werner Wittich (1867-1937), « l’Allemand qui a le mieux compris l’Alsace, selon R. Redslob (Léon Strauss, François Uberfill, Clauss Wittich, NDBA, 40, 2002, p. 4 277‑4 279). Forcément, on ne trouve que peu d’indications sur Auguste Hertzog (1857-1924), originaire de Gueberschwihr, cité p. 77, économiste, administrateur de l’hôpital de Colmar, historien (Henri Fleck, NDBA, 16, 1990, p. 1 561).
9L’affaire de Saverne est évoquée sans mention des conclusions de Jean-Noël Grandhomme et de Pierre Vonau dans leur direction d’ouvrage paru en 2017. On ne trouvera par ailleurs aucune allusion climatique, ni de données de rendements fournis par Médard Barth, alors qu’ils sont très faibles à cette époque, ni d’allusions aux procès liés aux fraudes où apparaît le nom de Sartorius, ni des tourments vignerons qui s’étalent dans les Haussbücher (Claude Muller, Chronique de la viticulture alsacienne au XIXe siècle, 1991 et … au XXe siècle, 1, 1995).
10Une remarque pour terminer. Dans la conclusion, p. 107, Christian Busse affirme : « Ohne Zweifel hat Elsass-Lothringen gesamtwirtschaftlich durch die Annexion gewonnen. » Le recenseur ne conteste pas fondamentalement cette assertion. Mais la manière dont la démonstration a été menée le laisse très dubitatif.
Pour citer cet article
Référence papier
Claude Muller, « Busse (Christian), Weinbau und Weinrecht im Reichsland Elsass-Lothringen. Betrachtung zu einer Strassburger preisgekrönten Dissertation von 1911 », Revue d’Alsace, 147 | 2021, 375-377.
Référence électronique
Claude Muller, « Busse (Christian), Weinbau und Weinrecht im Reichsland Elsass-Lothringen. Betrachtung zu einer Strassburger preisgekrönten Dissertation von 1911 », Revue d’Alsace [En ligne], 147 | 2021, mis en ligne le 01 janvier 2022, consulté le 22 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/alsace/4856 ; DOI : https://doi.org/10.4000/alsace.4856
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