Streicher Jean-Claude, Pétain Pershing, frères d’armes (1917-1948)
Paris, Éditions Maïa, 2022, 206 p.
Texte intégral
1L’originalité de l’ouvrage porte sur une relation – celle de 30 ans entre le Français Philippe Pétain et l’Américain John Pershing – qui n’avait pas été étudiée jusqu’à présent de manière si approfondie. Lors de leur première rencontre, les deux hommes venaient à peine de prendre de très hautes responsabilités militaires pour leur pays en pleine guerre, l’un comme commandant en chef des forces françaises à partir de 1917, l’autre comme chef du Corps expéditionnaire américain en Europe. Collaborant étroitement sur le même terrain d’opérations et partageant souvent les mêmes options stratégiques, ils ont exercé leurs commandements sous la tutelle du même chef suprême, le général Ferdinand Foch, généralissime des troupes alliées en France à partir d’avril 1918. À l’issue victorieuse du conflit, les deux hommes reçurent les plus hautes distinctions militaires de leurs pays respectifs : Maréchal de France pour Pétain, General of the Armies pour Pershing, grade créé à son intention et qui reste le plus élevé dans l’armée américaine jusqu’à ce jour (et dont il fut le seul titulaire de son vivant). L’ouvrage est construit autour d’une trentaine de courts chapitres. Dès le premier, l’ascendance alsacienne de Pershing est évacuée par l’ancien journaliste qu’est l’auteur. S’il démontre certes qu’aucune source écrite ne corrobore cette origine que Pershing déclarait pourtant lui-même (en février 1917, il confia au journaliste Marcel Knecht : « Le berceau de ma famille se trouve en Alsace, non loin de Strasbourg »), l’auteur ne démontre pas non plus le contraire, soit une supposée généalogie badoise ou palatine. Pour lui, cette ascendance allemande du chef suprême de l’armée américaine avait été maquillée en alsacienne, en accord avec Pershing, pour ne pas heurter l’opinion publique en plein conflit mondial. A contrario, on notera que les origines germaniques des généraux Eisenhower et Schwartzkopf ne les handicaperont pas lors d’autres conflits. Les chapitres les plus intéressants sont parmi les dix premiers, ceux qui expliquent la convergence des vues de Pétain et Pershing pour un dénouement de la guerre sur le sol allemand, notamment avec l’offensive alliée prévue en Lorraine le 14 novembre 1918 et finalement annulée au profit d’un armistice sur le sol français (dans le célèbre wagon de Rethondes) trois jours auparavant. Pétain et Pershing ne furent pas suivis et en garderont rancœur selon l’auteur, à mesure que la suite des évènements semblait leur donner raison : « Vingt ans plus tard, tous deux rappelleront ainsi, mais séparément et sans s’être concertés semble-t-il, qu’il fallait regretter qu’ils n’eussent pas été suivis en octobre-novembre 1918 ». Pershing venant régulièrement en France pendant l’entre-deux-guerres dans le cadre de l’aménagement des cimetières militaires américains dont il avait accepté la responsabilité, la seconde moitié de l’ouvrage évoque les nombreuses retrouvailles des deux hommes, marquées d’empathie réciproque, les deux hommes se qualifiant mutuellement de « frères d’armes », sous-titre de l’ouvrage. La période de Vichy, à peine évoquée, ne sembla pas avoir affecté cette relation.
Pour citer cet article
Référence papier
Philippe Edel, « Streicher Jean-Claude, Pétain Pershing, frères d’armes (1917-1948) », Revue d’Alsace, 149 | 2023, 396-397.
Référence électronique
Philippe Edel, « Streicher Jean-Claude, Pétain Pershing, frères d’armes (1917-1948) », Revue d’Alsace [En ligne], 149 | 2023, mis en ligne le 01 mars 2024, consulté le 08 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/alsace/5718 ; DOI : https://doi.org/10.4000/11pkq
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