Atomes et rayonnement
Plan
Haut de pageNotes de la rédaction
Le cours intitulé « Les interactions entre particules dans les gaz quantiques » devait avoir lieu du 22 avril au 27 mai 2020, et devait être suivi du colloque « New trends in the physics of quantum fluids », le 3 juin 2020. Le cours et le colloque ont malheureusement été annulés du fait du confinement lié à la crise sanitaire (Covid-19).
Texte intégral
Enseignement
1Le cours et le colloque initialement prévus ont été annulés pour des raisons sanitaires dues à la Covid-19.
Recherche
2La recherche menée par l’équipe de la chaire est centrée sur l’étude de la matière ultra-froide. Nous utilisons des gaz d’atomes préalablement refroidis par laser pour étudier les phases nouvelles susceptibles d’apparaître à très basse température. Le domaine physiquement intéressant est celui où la longueur d’onde associée à chaque atome devient plus grande que la distance entre particules. La nature statistique des atomes en jeu, bosons ou fermions, joue alors un rôle déterminant pour l’état d’équilibre ou la dynamique de ces nouveaux fluides.
3L’activité menée dans notre équipe est essentiellement expérimentale, avec quatre projets distincts, tous localisés sur le site Marcelin Berthelot. Ces projets sont encadrés par cinq chercheurs ou enseignants-chercheurs : Jean Dalibard (titulaire de la chaire), Jérôme Beugnon (maître de conférences à Sorbonne Université), Fabrice Gerbier (directeur de recherche au CNRS), Raphael Lopes (chargé de recherche au CNRS) et Sylvain Nascimbene (maître de conférence à l’École normale supérieure). Cette équipe fait partie du laboratoire Kastler Brossel, dont le Collège de France est cotutelle. Nous détaillons ci-dessous les principaux résultats obtenus sur chaque projet au cours de l’année académique écoulée.
Projet « Gaz spineur »
4Les atomes utilisés dans les expériences de gaz quantiques peuvent exister dans plusieurs états internes distincts et ce degré de liberté vient s’ajouter aux variables habituelles (externes), position et impulsion, des particules. On peut même réaliser la situation extrême où l’on gèle les degrés de liberté externes pour ne garder que le degré de liberté interne, c’est-à-dire le spin de chaque atome. Cela ouvre une nouvelle voie pour l’étude des phénomènes magnétiques résultant d’une interaction entre atomes dépendant de leur spin. Nous avons utilisé notre montage de refroidissement d’atomes de sodium pour étudier la dynamique de ces interactions spin-spin, qui sont pour le sodium antiferromagnétiques. Nous avons mis au point une nouvelle méthode d’imagerie qui permet de compter (à un atome près !) la population de chaque état de spin. Nous avons ensuite tiré parti de cette grande sensibilité pour produire et caractériser des états de spins « comprimés » pour notre assemblée d’atomes. Il s’agit d’états corrélés dans lesquels la mesure d’une composante de spin peut se faire avec une incertitude bien inférieure à la limite quantique standard, la contrepartie étant une incertitude augmentée pour une autre composante de manière à satisfaire l’inégalité de Heisenberg. De tels états comprimés peuvent trouver de multiples applications en métrologie, où l’on utilise des assemblées atomiques pour mesurer avec une grande précision des champs magnétiques, des accélérations, ou encore des rotations.
Projet « Gaz de Bose à deux dimensions »
5Ce projet est consacré à l’étude des gaz de bosons planaires (rubidium) pour lesquels les excitations dans la direction perpendiculaire au plan des atomes sont gelées. Au cours de l’année écoulée, nous nous sommes d’abord intéressés à une quantité physique nommée « contact de Tan » qui unifie de nombreuses propriétés de ces fluides en interaction. Plus précisément, le « contact » permet de relier la physique à deux corps aux propriétés macroscopiques du gaz. Nous avons développé un nouveau protocole expérimental fondé sur la spectroscopie à haute résolution pour accéder à cette quantité pour un gaz de Bose bidimensionnel. Nous l’avons mesurée dans toute la gamme de températures allant d’une valeur quasi nulle jusqu’à une valeur supérieure à la température critique pour la transition superfluide. Nos résultats sont en bon accord avec les valeurs prévues à basse et haute température, et ils fournissent également une détermination précise du contact au voisinage de la transition superfluide, régime où les prédictions théoriques font encore défaut. L’autre aspect étudié cette année concerne les interactions dipôle-dipôle magnétiques dans les gaz à deux composantes de spin. Nous avons mis en évidence ces interactions et démontré notre capacité à varier leur amplitude par l’application d’un champ magnétique extérieur. Ces résultats fournissent un nouvel outil pour contrôler les mélanges de gaz quantiques.
Projet « Gaz sur réseau »
6Ce projet s’attache à étudier la physique des gaz d’atomes ultra-froids confinés dans des potentiels spatialement périodiques. Dans un premier temps, nous nous sommes intéressés à la dynamique de ces systèmes en présence de dissipation. La dissipation est induite ici par l’existence de pertes à deux corps qui surviennent lorsque les atomes (ytterbium) sont excités optiquement dans un état métastable. Nous avons montré que ces pertes peuvent être fortement atténuées grâce à un phénomène remarquable, l’effet Zénon quantique. Nous avons mis en évidence cet effet aussi bien pour des paires atomiques isolées que pour des gaz unidimensionnels. Dans un deuxième temps, nous avons exploré la diffusion de spin dans ces gaz. Contrairement aux études précédentes, il s’avère que la dynamique observée est liée au couplage par effet tunnel entre les sites du réseau, et non à l’interaction de super-échange entre sites. Cet effet pourrait être expliqué par la dynamique des lacunes résiduelles dans ce système.
Projet « Gaz en dimension synthétique »
7Notre expérience de gaz d’atomes de dysprosium vise à exploiter le grand spin électronique de cette espèce pour réaliser différentes phases de la matière quantique. Dans un premier projet, nous avons soumis le spin à un couplage non linéaire, permettant l’étude d’un système de qubits en interaction présentant une transition de phase. Nous avons notamment mis en évidence le comportement critique au voisinage de la transition et étudié le mécanisme de brisure spontanée de symétrie. Dans un deuxième projet, nous avons réalisé un couplage cohérent entre le mouvement des atomes et leur état de spin au moyen de transitions optiques excitées par laser. Ce couplage induit une dynamique analogue à celle des électrons soumis à un champ magnétique, et il nous a permis de mettre en évidence un phénomène similaire à l’effet Hall quantique. Nous allons maintenant aborder l’étude des phases de la matière quantique en interaction en présence de cet effet Hall quantique artificiel, comme par exemple les arrangements réguliers de vortex appelés réseaux d’Abrikosov.
Publications
8Navon N., Eigen C., Zhang J., Lopes R., Gaunt A.L, Fujimoto K., Tsubota M., Smith R.P. et Hadzibabic Z., « Synthetic dissipation and cascade fluxes in a turbulent quantum gas », Science, vol. 366, 2019, art. 6463, p. 382-385, https://doi.org/10.1126/science.aau6103.
Qu A., Evrard B., Dalibard J. et Gerbier F., « Probing spin correlations in a Bose-Einstein condensate near the single-atom level », Physical Review Letters, vol. 125, no 3, 2020, art. 033401, https://doi.org/10.1103/PhysRevLett.125.033401.
Bouganne R., Bosch Aguilera M., Ghermaoui A., Beugnon J. et Gerbier F., « Anomalous decay of coherence in a dissipative many-body system », Nature Physics, vol. 16, 2020, p. 21-25, https://doi.org/10.1038/s41567-019-0678-2.
Chalopin T., Satoor T., Evrard A., Makhalov V., Dalibard J., Lopes R. et Nascimbene S., « Probing chiral edge dynamics and bulk topology of a synthetic Hall system », Nature Physics, vol. 16, 2020, https://doi.org/10.1038/s41567-020-0942-5.
Zou Y.-Q., Bakkali-Hassani B., Maury C., Le Cerf E., Nascimbene S., Dalibard J. et Beugnon J., « Tan’s two-body contact across the superfluid transition of a planar Bose gas », 2020, https://arxiv.org/abs/2007.12385.
Zou Y.-Q., Bakkali-Hassani B., Maury C., Le Cerf E., Nascimbene S., Dalibard J. et Beugnon J., « Magnetic dipolar interaction between hyperfine clock states in a planar alkali Bose gas », 2020, https://arxiv.org/abs/2007.12389.
Zhang J., Eigen C., Zheng W., Glidden J., Hilker T.A., Garratt S.J., Lopes R., Cooper N.R., Hadzibabic Z. et Navon N., « Many-body decay of the gapped lowest excitation of a Bose-Einstein condensate », 2020, https://arxiv.org/abs/2004.11363.
Christodoulou P., Gałka M., Dogra N., Lopes R., Schmitt J. et Hadzibabic Z., « Observation of first and second sound in a Berezinskii-Kosterlitz-Thouless superfluid », 2020, http://arxiv.org/abs/2008.06044.
Pour citer cet article
Référence papier
Jean Dalibard, « Atomes et rayonnement », L’annuaire du Collège de France, 120 | 2023, 55-58.
Référence électronique
Jean Dalibard, « Atomes et rayonnement », L’annuaire du Collège de France [En ligne], 120 | 2023, mis en ligne le 01 février 2023, consulté le 12 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/annuaire-cdf/18130 ; DOI : https://doi.org/10.4000/annuaire-cdf.18130
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