1La démolition de cloisons modernes dans un local de la préfecture de l’Yonne a été l’occasion d’étudier les élévations originelles d’une salle située à l’est du palais épiscopal d’Auxerre, sous le promenoir édifié par Hugues de Montaigu (1114-1136). Datée du deuxième quart du xii^e s., la salle semi-enterrée dégagée peut être assimilée à un réfectoire, et ce malgré sa position inférieure dans l’édifice et la sobriété de sa construction. Constituée d’un appareillage de moellons et de pierres de taille finement layées préservant les tracés préparatoires et la signature des tâcherons, elle prend partiellement appui sur la fondation d’une habitation antérieure ou d’un mur de terrasse palliant la déclivité du terrain. Un plancher en chêne à solives de brin est associé aux maçonneries romanes. L’abattage des bois du plancher est daté par dendrochronologie de l’automne-hiver 1125-1126. La rareté des témoins de ce type pour la période romane place le plancher d’Auxerre comme référence dans la connaissance des techniques d’assemblage et de l’intégration à un ensemble architectural.

2Des baies en plein cintre à double ébrasement éclairaient la pièce. L’une d’elles subsiste au SE. Le mur occidental est rythmé par de larges arcades élancées invoquant une pièce aux vastes proportions, qui supportent un épais mur de refend. Au SO, une porte étroite à verrou flanquée d’une petite baie rectangulaire barrée offrait un accès secondaire à la pièce, l’accès principal se situant au nord de l’espace voisin. Deux niches aménagées dans le mur sud introduisent des conduits inclinés menant à une salle voûtée en contrebas, laquelle reçoit également le conduit des latrines de l’étage supérieur. Cette citerne présente une légère pente vers l’est, en direction de l’Yonne. Elle est reliée à un réseau d’égouts permettant le rejet de déchets domestiques ; le récurage s’effectue avec une évacuation dans les eaux de la rivière. Introduisant la question de la gestion de l’eau, cette découverte montre que la notion d’hygiène semble pleinement intégrée au programme architectural en milieu urbain auxerrois dès les débuts du xii^e s.

3Les travaux du xiii^e s. ont consisté à restaurer les piles ouest et à agrandir les baies orientales. Mais ce n’est qu’aux xv^e-xvi^e s., avec le bouchage des ouvertures, que les interventions dénoncent clairement un changement de destination de la salle qui est alors employée au stockage de foin, de bois et de fruits. Les restaurations du xix^e s. ont été suivies d’un cloisonnement de la pièce afin de créer des locaux de travail et d’habitation. Aucune des interventions postérieures à la construction primitive n’a touché à la structure bâtie originelle qui demeure alors relativement bien conservée. Les pièces adjacentes pourraient également témoigner d’une telle préservation des maçonneries romanes.

Auxerre. Préfecture de l’Yonne ; palais épiscopal.

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