1Le site castral, implanté dans la commune de La Châtelaine, occupe le bord de la Reculée des Planches, une profonde vallée où coule la Cuisance.

2Les vestiges conservés s’organisent en deux grands ensembles, autrefois délimités par une enceinte. La partie NE du site est occupée par le pôle seigneurial formé d’une haute cour, abritant les restes d’un donjon, et d’une basse cour orientale, séparées par un fossé. La partie SO correspond, quant à elle, à un ancien bourg. Une tour-porte planchéiée, dont les élévations sont encore conséquentes, en contrôlait l’accès. Entre le milieu du xi^e et la fin du xv^e s., ce bourg abritait, entre autres, une chapelle transformée en église paroissiale, un cimetière, ainsi qu’un four à pain banal. Quelques données archéologiques et textuelles éclairent les origines ainsi que l’abandon du site. En 2013 et 2016, des sondages localisés dans le secteur nord du bourg ont, en effet, livré les indices d’une occupation qui s’étend du Bas-Empire au vii^e s. Plus tardivement, en 1088, la mention de la création d’une chapelle suppose la continuité ou la réoccupation du site dans la seconde moitié du xi^e s. En 1294, l’on sait que Mahaut d’Artois reçut en don de son mari, Othon IV, la seigneurie de La Châtelaine. C’est alors que l’ancienne basse cour fut entièrement reprise au profit de la structuration d’un bourg selon une trame viaire orthonormée. L’abandon du site castral est bien renseigné par les textes. En 1460, le terrier rédigé pour Philippe Le Bon ne recensait que quatre chefs de famille dans le bourg. Les 18 autres personnes payant un cens au duc de Bourgogne résidaient ailleurs, sur le plateau occupant des terres ne relevant pas de la directe seigneuriale. Ce phénomène de désertification des habitats de hauteur au cours du xv^e s. est attesté, dans le Jura, dans d’autres terriers ducaux. En 1552, le site est décrit comme une « place maintenant presque réduite à l’état de hameau et dans le château lui-même s’étalent des jardins ». En 1632, ne demeuraient plus que le cimetière et l’église paroissiale qui fut détruite peu de temps après.

3Avec l’aval du Service régional de l’archéologie, une campagne de fouille programmée triennale, portant sur une partie d’un îlot septentrional du bourg, a débuté en 2019. La pièce nord (E29) d’un grand bâtiment édifié à la fin du xiii^e s., son extension occidentale ajoutée vers la fin du xiv^e s. (E 46), ainsi que d’autres pièces contiguës (E 28 et E 45) ont été ainsi entièrement étudiés. Ces investigations ont permis de distinguer au moins quatre états archéologiques.

4L’état 1 correspond au creusement d’une carrière. Néanmoins, la découverte de mobilier compris dans une large fourchette chronologique, du Néolithique moyen à la période médiévale, suggère l’identification d’un certain nombre d’états préexistants très mal identifiés.

5L’état 2 comprend la construction du grand bâtiment entre les années 1284 et 1304, comme l’indique une monnaie trouvée dans la maçonnerie de l’élévation de l’un des murs de la pièce nord (E29). La datation par le ¹⁴C des niveaux de sol de cette pièce s’inscrit dans une fourchette chronologique allant de 1295 à 1486. Dans la pièce sud (E28), très partiellement fouillée, la datation des derniers sols en place signale une permanence d’occupation entre 1417 et 1490. L’étude des maçonneries permet de distinguer quatre phases au sein de l’état 2. Outre la phase 2.1 témoignant de la construction du grand bâtiment, les trois phases suivantes coïncident avec des remaniements successifs de l’édifice. On relève notamment la création (phase 2.2) d’une grande porte située au centre du mur de refend transversal séparant les deux pièces occidentale et orientale (E29 et E45). Une fois toutes les communications supprimées entre ces deux pièces (phases 2.3 et 2.4), ces dernières sont alors équipées de cheminées. On peut ainsi penser que la fonction du rez-de-chaussée du grand bâtiment évolue en se transformant en habitat. Dans la pièce sud (E 28), des sols en terre battue très peu altérés ont été observés. L’analyse céramologique montre qu’un local (E 46) est édifié contre l’une des pièces lors de la restructuration du grand bâtiment (phase 2. 4). Les artefacts dégagés dans les sols du local E46 conduisent à penser que son rez-de-chaussée avait une vocation de forge et de stockage (présence de battitures, d’objets lithiques liés à l’affûtage, d’outillages et de différents éléments en fer provenant de mobiliers mis au rebut et destinés à la refonte).

6L’état 3, qui intervient dans les deux derniers tiers du xv^e s., est marqué par des partitions de jardins, installés sur d’anciens dépotoirs, ainsi que par la création d’espaces de circulation extérieurs. C’est au cours de la phase 3.1 que la grande pièce sud (E 28) est divisée à l’aide d’une cloison afin de créer une quatrième pièce (E 50). La phase 3.2 est marquée par des démolitions.

7Les ultimes récupérations de matériaux, liées à des récupérations ponctuelles de moellons dans différentes maçonneries, appartiennent à l’état 4 daté du début du xvi^e s. Le mobilier céramique semble encore chronologiquement hétérogène, ce qui indique un brassage résultant de comblements et de remblaiements à l’emplacement des anciens bâtiments détruits.

La Châtelaine, site castral, localisation de la campagne de fouille de 2019 et des sondages de 2013 et 2016.

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Relevé J. Berthet, DAO J. Berthet, C. Méloche