1Le château de la Butte au Diable occupe un rebord de plateau du pays de Caux, le long de la vallée de la Seine. Le site est constitué d’une enceinte ovalaire fossoyée avec un talus de contrescarpe et une basse cour attenante au nord ; un troisième enclos, pourvu d’une mare, borde l’ensemble à l’est. L’enceinte, munie d’un donjon ou grosse tour quadrangulaire attribuée à la période ducale (xi^e-xii^e s.), comprend un mur défensif, interrompu au nord par un châtelet d’entrée à deux tours circulaires d’une période plus tardive. Dans la cour, un puits circulaire et les vestiges de bâtiments sont visibles. En 2018, deux sondages, répartis au nord et au sud de l’enceinte, ont permis de dégager certaines portions de ces bâtiments ; ils ont aussi révélé une forte densité d’occupation dans ces secteurs. Au cours de l’été 2019, les sondages ont été agrandis de façon à former deux zones de fouille. La première s’étendait contre la courtine nord jusqu’au contact de l’une des tours du châtelet ; la seconde reprenait les contours d’un ancien sondage clandestin localisé dans la partie sud de l’enceinte.

2Dans le secteur nord, le dégagement partiel des pieds de la courtine a montré l’existence de plusieurs phases architecturales. La plus ancienne, englobant des maçonneries en opus spicatum, est datée par C entre le xi^e et le xii^e s. Cet état primitif du mur d’enceinte s’accorde bien avec la première des trois phases de construction d’un bâtiment accolé contre la courtine et observé en fouille. Le deuxième état du bâtiment est placé, pour l’heure, avant le xiv^e s. ou au début de celui-ci. Le dégagement de la partie orientale de cette même courtine nord indique que le mur d’enceinte avait été perturbé par l’installation d’un espace culinaire équipé d’un évier. À cet endroit, les couches d’occupation ont livré des restes de coquillages, des clous et des monnaies datées des xiv^e-xv^e s. Dans la partie centrale de la zone de fouille, un dallage en craie fonctionnait vraisemblablement avec l’espace culinaire. Des couches charbonneuses, pouvant correspondre à des foyers ou à des résidus de combustion, sont aussi apparues. Plus à l’est, un escalier en pierre semble avoir été construit pour circuler sur un possible cône de démolition de la tour occidentale du châtelet. En bordure sud de ces structures, des fosses ont été creusées dans les sédiments de la cour. L’une d’entre elles comportait des déchets de forge ainsi qu’une guimbarde.

3La fouille du secteur sud, quant à elle, a permis de dégager les contours d’un bâtiment quadrangulaire d’une facture peu soignée (maçonnerie de pierres de craie et de silex irréguliers). Les remblais du comblement de cette structure comme l’implantation de celle-ci, qui semble en effet recouper des couches sédimentaires accumulées dans la cour, suggèrent la restitution d’une cave construite à cet endroit durant la période moderne ou contemporaine. Sur la bordure du secteur exploré, la fouille très limitée des dépôts sédimentaires de la cour s’est poursuivie jusqu’à atteindre ponctuellement le sol géologique. La datation du xiii^e s. de l’une de ces couches offre un repère chronologique important puisqu’il suppose un lien probable entre les niveaux sous-jacents de ce secteur et la phase de construction primitive de la courtine nord.

4La prochaine campagne devrait conduire à dégager les contours de la tour d’entrée occidentale du châtelet, à mieux cerner ses relations stratigraphiques avec la courtine nord et l’espace dallé. Dans le secteur sud, l’élargissement de la zone de fouille sera nécessaire pour comprendre l’ensemble des structures de la supposée cave et pour saisir sa relation avec différents niveaux d’occupation associés à la cour.