1Le hameau d’Emorots conserve un bâtiment médiéval considéré comme une grange cistercienne de l’abbaye de Fontenay, fondation claravalienne de 1119. Ce grand bâtiment d’un seul niveau de plain-pied et coiffé d’une voûte brisée abrite dans sa partie nord une chapelle dédiée à Sainte-Anne. Les autres pièces, non concernées par les travaux et propriété privée, laissent penser que cette construction correspond très vraisemblablement au logis des convers dont la présence est attestée depuis 1201. La création de la grangia et sa place dans le temporel de l’abbaye restent encore à établir mais le bâtiment semble attribuable à la seconde moitié du xii^e ou à la première moitié du xiii^e s.

2Menée dans le cadre de travaux de restauration engagés par la commune, l’analyse archéologique de la chapelle montre que cet espace existe en tant que tel depuis l’origine. Il est possible de l’interpréter comme un oratoire, conformément aux règlements cisterciens organisant le quotidien des convers. La petite dimension de la pièce ne permet guère d’autre fonction (6×4 m) et l’installation des aménagements liturgiques dans une seconde phase médiévale pérenniserait les fonctions cultuelles antérieures. Simplement éclairé par deux baies, cet oratoire était coiffé dès l’origine, comme le reste de la construction, d’une couverture en laves directement posée sur la voûte, sans charpente intermédiaire. Le reste de ce grand bâtiment abritait probablement aussi une cuisine et un dortoir comme en témoignent plusieurs aménagements (passe-plat, série de baies, etc.). Il était sans doute articulé avec deux ailes en retour au nord et au sud où se trouvait le réfectoire, le tout formant une cour avec puits et citerne.

3La modification de la baie orientale de l’oratoire pour recevoir un autel à l’emplacement de son allège et la création d’une piscine liturgique interviennent clairement dans un second temps et caractérisent la mise en place de la chapelle proprement dite en donnant la possibilité de célébrer la messe. La datation de ces aménagements n’est pas précisément établie, mais les traces picturales et les traces d’outils laissent envisager la période des xiii^e-xiv^e s., période postérieure à 1225 quand l’Ordre fut implicitement autorisé à établir des autels dans ses granges. Fait remarquable, l’allège est aménagée d’un coffre reliquaire, lui-même fermé par un second plus petit.

4Cette configuration de la chapelle semble perdurer jusqu’au milieu du xvii^e s. Alors que la gestion de la grange est passée sous fermage depuis le xv^e s., la chapelle nécessite d’importants travaux sans doute liés à la suppression de l’aile nord : reprise de presque toutes les élévations extérieures, installation d’une première entrée en 1639, puis d’une seconde en 1652, bouchage de la baie orientale et agrandissement de la baie nord, création d’un autel en bois en saillie. Le culte de saint Anne, très populaire, est peut-être en partie à l’origine de ces modifications, mais rien n’est établi sur le plan historique.

5Dans les années 1760, le porche occidental en bois est mis en place sous sa forme actuelle. Un mur-écran surmontant la porte rétablie en 1639, présente trois niches destinées à recevoir les statuettes de sainte Anne, de la Vierge et de saint Joseph. Enfin, le beffroi est installé vers 1830, mais un aménagement campanaire existe sans doute depuis le xvii^e s. comme en témoigne le millésime « 1631 » porté actuellement par la cloche.

Fontaines-en-Duesmois, la grange d’Emorots : plan et proposition de phasage.

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Dessin X. D’Aire, CEM, 2019