1Une prospection archéologique couplée à une étude du bâti a pu être menée en août 2020 au sein du camp de concentration de Natzweiler-Struthof, principalement dans la zone de la carrière. Cinq bâtiments ont été débroussaillés et étudiés (cantine, dépôt, forge et deux poudrières). Leurs plans et leurs modes de constructions, jusqu’alors inédits, ont pu être documentés à travers une étude archéologique des élévations, afin d’identifier leurs organisations, évolutions et fonctions. La mise en place d’un protocole d’étude des bétons a contribué à identifier leurs phases de construction et de réaménagement. La composition des bétons connaît en effet une typologie variée permettant de proposer une chronologie et de mettre en relation des bâtiments différents.

2Les résultats de la campagne ont concerné quatre périodes : les recherches géologiques préalables à l’installation du camp (1940), l’exploitation concentrationnaire de la carrière (1941-1943), le centre de réparation concentrationnaire de moteurs d’avions pour la firme Junkers (1943-1944) et la période pénitentiaire (1944-1949). Pour la première période, deux emplacements de sondages géologiques ont pu être identifiés en contrebas de la grande carrière. Ces vestiges correspondent aux recherches menées en 1940 avant l’implantation du camp par la deutsche Erd- und Steinwerke (DEST), entreprise minière SS créée en 1938.

3Une réflexion sur le travail des déportés mené à partir de 1943, alors que la carrière n’est plus exploitée et reconvertie en centre de réparation de moteurs d’avions, a été amorcée grâce à l’étude de bâtiments (dépôt et forge) et de galeries. Quatre foyers d’une forge de type industriel, comportant chacun deux espaces de travail, ont pu être identifiés. Les vestiges du système de ventilation (fixations de soufflets), de chauffe (foyers), d’évacuation des fumées (cheminées), de trempe (bassins) et de frappe (bases d’enclumes) ont pu être étudiés. Ces premiers éléments permettent d’affirmer que le travail des déportés ne se limitait pas au démontage des moteurs et qu’un travail impliquant vraisemblablement la réparation et/ou la fabrication de pièces de rechange était mené sur le site. Deux des trois galeries creusées dans le granite par les déportés ont pu être étudiées. Jusqu’à présent, la localisation et le relevé précis de ces infrastructures étaient inexistants. Leur développement non rectiligne, leurs importantes largeurs et le suivi des failles géologiques semblent confirmer l’hypothèse qu’il ne s’agit pas de galeries d’exploration ou d’exploitation du granite mais d’espaces probablement créés pour y installer une usine souterraine protégée des raids aériens, comme ce fût le cas par exemple dans le camp de Dora-Mittelbau (Allemagne, Thuringe) ou dans le camp annexe du Natzweiler à Thil (Meurthe-et-Moselle). Des objets à mettre en relation avec leur creusement ou leur utilisation ont également été découverts à l’intérieur.

4Quelques observations ont également été menées à l’emplacement de plusieurs dépotoirs et du block-bunker. Un inventaire des graffitis de la période pénitentiaire présents sur la porte d’une cellule de ce bâtiment a été réalisé afin de tester la mise en place d’un protocole scientifique d’étude. Une centaine de graffitis ont ainsi pu être enregistrés.

Natzwiller, ancien camp de Natzweiler-Struthof, vue de la façade SO de la forge (cl. J. Brangé).

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