1La fouille fait suite à des opérations archéologiques menées depuis les années 1980 sur la même parcelle. Délimitée à l’est par la rue de la Tour-Neuve et à l’ouest par la rue Saint-Flou, l’emprise a concerné une surface de 167 m² à l’intérieur des bâtiments d’un ancien complexe industriel. Réalisée de juillet à novembre 2019, l’opération a mis au jour des vestiges de la fin de l’âge du fer jusqu’à l’époque contemporaine. Neuf périodes ont été individualisées. À l’exception des périodes moderne et contemporaine (pér. 7 et 8), les niveaux de sol ne sont pas conservés.

2Le terrain naturel en calcaire marneux est surmonté de formations sableuses alluviales (pér. 0). La topographie d’origine possède une pente du nord vers le sud, en direction de la Loire dont la berge antérieure au ii^e s. av. J.-C. est supposée se situer à une cinquantaine de mètres au sud de l’emprise. Le terrain est perturbé par plusieurs effondrements naturels (karsts) qui affecteront les périodes suivantes de manière importante.

3Une première occupation (pér. 1) se présente sous la forme d’un paléosol correspondant très probablement à des zones cultivées de la fin du i^er s. av. J.-C. au début du i^er apr. J.-C.

4Des traces d’urbanisation sont observées à partir du i^er s. apr. J.-C. (pér. 2). Il s’agit, tout d’abord, de l’aménagement de la topographie avec l’apport de remblais pour constituer des terrasses. Lui succède, ensuite, une première phase bâtie marquée par des structures en creux (trous de poteau) et une cave ou cellier (ST1). Au cours du ii^e s., une seconde phase de rénovation du bâti intervient, s’accompagnant de nouvelles constructions. La cave (ST1) est totalement refaite avec des murs maçonnés en pierres liées au mortier. Une deuxième cave (ST2) est construite au nord de la première. D’une surface dans-œuvre de 11 m², sa réalisation est extrêmement soignée (murs édifiés sur la base d’assises de moellons équarris alternant avec des briques). Au moins trois niches ont été identifiées et un escalier se développait vers le sud. Si les bâtiments associés à ces caves ont disparu, il est possible de supposer qu’ils s’organisaient au sein de longues parcelles dont le petit côté donnait sur une voie N-S, située à l’est de l’emprise et identifiée lors des fouilles de 1985 (Petit 1985).

5Le quartier est profondément modifié au cours du iv^e s. avec la construction de l’enceinte urbaine (pér. 3). Celle-ci traverse l’emprise de la fouille du nord au sud. Sa mise en place a nécessité le remblaiement de la cave ST1, la cave ST2 étant maintenue. La tranchée de fondation de cette enceinte consiste en un creusement linéaire de 3 à 4 m de large pour 0,70 à 1 m de profondeur. Son remplissage, avec un hérisson de pierres calcaires et des éléments de démolition, forme une semelle protectrice contre les remontées d’humidité. L’élévation identifiée prend la forme de trois tronçons. Des différences de mise en œuvre indiquent ici des périodes successives de chantier. L’ensemble de l’ouvrage s’adapte à la pente du terrain vers le sud. Aucune tour d’enceinte n’a été repérée dans l’emprise de la fouille.

6De part et d’autre de l’enceinte, des fosses réutilisées en dépotoirs signalent une occupation des vi^e-vii^e s. (pér. 4). Contre le parement intérieur de l’enceinte, dans la cave ST2 probablement toujours utilisée au cours de l’Antiquité tardive, un espace souterrain d’au moins 7 m de profondeur est aménagé. La nature et la fonction de ce creusement restent inconnues. Le souterrain est remblayé en même temps que les fosses-dépotoirs.

7Contre le parement intérieur de l’enceinte, des latrines (dont un possible silo réutilisé) témoignent d’une occupation domestique aux ix^e-x^e s. (pér. 5). Ces structures respectent encore la limite du parement intérieur de la muraille.

8Pour le second Moyen Âge (pér. 6), les vestiges disparates s’étendent du xii^e au xv^e s. De part et d’autre de l’enceinte, des puits de carrières sont liés à une activité d’extraction attestée dans le quartier dès le xi^e s. Le sud de l’emprise a été touché par un effondrement naturel, qui occasionna certainement une destruction partielle du parement intérieur de l’enceinte avant les xii^e-xiii^e s. Le vide alors créé fut progressivement comblé jusqu’au début de l’époque moderne. Des traces d’habitat sont également décelables sous la forme de fosses et d’un mur parcellaire indiquant l’emplacement d’un bâtiment le long du parement intérieur de l’enceinte. Il fut, au plus tard, bâti au xiv^e s., ce que confirment les archives de cette période.

9Dans ce secteur, l’abandon de l’enceinte urbaine à partir de la fin du xv^e s. engendre de profondes mutations, au moins à l’est de la fortification (pér. 7). En effet, les terrains occupés par la lice et le fossé de l’enceinte sont lotis dès 1477 et la fouille livre ici les vestiges de bâtiments en fond de cour. À l’intérieur de l’enceinte, le bâti médiéval, déjà identifié antérieurement, poursuit son évolution comme le montre la présence de latrines et de puits.

10L’îlot est une nouvelle fois complètement transformé à la période contemporaine (pér. 8) avec l’acquisition et la transformation progressive du bâti privé par une famille d’industriels, les Dessaux. L’objectif recherché était la création d’un grand complexe dédié à la production du vinaigre. Côté rue Saint-Flou, ce changement s’est d’abord traduit par l’implantation d’un grand bâtiment au milieu du xix^e s. Le volume de plain-pied va alors complètement araser les niveaux de sol des périodes antérieures. Côté rue de la Tour-Neuve, il faut attendre le dernier quart de ce siècle pour voir une transformation radicale du bâti antérieur, avec l’installation de grandes cuves en béton et d’espaces annexes. La dernière phase identifiée est celle de l’abandon du complexe industriel au cours des années 1980, avec un remblaiement des espaces excavés et la pose d’une dalle en béton sur l’ensemble des deux secteurs fouillés.

Orléans, vinaigrerie Dessaux, vue vers le nord de la tranchée de fondation et de l’élévation de l’enceinte urbaine sur le site de la vinaigrerie Dessaux à Orléans.

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Cl. É. Roux-Capron, Pôle d’archéologie de la ville d’Orléans, 2019