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Chroniques des fouilles médiévales en France en 2020
II. – Constructions et habitats ecclésiastiques
II. 2 – Prospections

Plounéour-Ménez, Langonnet (Finistère, Morbihan). Abbaye du Relec, abbaye de Langonnet

Responsable d’opération : Merlin Muzellec
p. 236-237

Notes de la rédaction

Organisme porteur de la fouille : Association Arvales

Texte intégral

1Le territoire de l’ancien duché de Bretagne connaît quinze fondations d’abbayes cisterciennes, échelonnées sur les xiie et xiiie siècles. L’implantation de ces complexes monastiques, malgré des environnements humains et physiques variables, doit répondre à un faisceau de besoins et permettre, de ce fait, la mise en place de la vie régulière. Ainsi, de nombreux aménagements sont réalisés au fil des siècles à proximité des sites afin de viabiliser et pérenniser l’installation des communautés. Pour caractériser davantage cette emprise, contextualiser les anciens ensembles monumentaux et étudier l’organisation spatiale de l’abbaye, des prospections accompagnées de relevés topographiques sont réalisées dans le cadre d’une thèse en cours à l’Université Rennes 2. L’année 2020 a vu la mise en place de deux opérations, à l’automne, sur les abbayes Notre-Dame du Relec et Notre-Dame de Langonnet.

Plounéour-Ménez (Finistère). Abbaye Notre-Dame du Relec

2L’ancienne abbaye Notre-Dame du Relec est installée sur le versant sud de la vallée du Queffleuth qui s’étend, d’ouest en est, au pied des contreforts septentrionaux des monts d’Arrée. Le site se trouve à 3,8 km à l’est du bourg de la commune de Plounéour-Ménez. Dans l’Ancien Régime, l’abbaye se trouvait aux confins du diocèse de Léon, à proximité immédiate de ceux de Cornouaille et de Trégor.

3Le processus d’implantation de l’abbaye du Relec souffre, en l’absence d’acte intéressant la fondation, d’importants hiatus. Selon la tradition, les moines s’installèrent en 1132, mais l’identité exacte des fondateurs reste inconnue. Le site est en revanche bien documenté par l’archéologie, et notamment par les travaux menés depuis 2001 par Ronan Perennec, qui permettent d’appréhender sur le temps long l’espace du carré claustral et des communs.

4Le relevé topographique a été réalisé sur une surface de 6,7 ha, sur le tronçon de vallée au nord du site, limité à l’ouest par la digue de l’étang le plus proche de l’abbaye. L’organisation des bâtiments monastiques tire avantage du relief de la vallée : l’installation de l’abbaye s’est faite en mettant à profit une terrasse naturelle du versant sud, dominant légèrement le fond de vallée. Le relief nord, en vis-à-vis, est nettement plus abrupt et aurait nécessité des travaux d’importance pour permettre le déploiement des différents édifices. L’installation de deux étangs en amont, immédiatement à l’ouest du site, permettait la maîtrise de l’eau et des terres de la plaine alluviale.

5La lecture de la morphologie ancienne à l’endroit de la vallée où s’implantent les moines du Relec est cependant perturbée par un ensemble de structures monumentales (canaux et terrasses maçonnées), installées à la fin du xviiie s. lors d’une importante phase de reconstruction et de réorganisation du site. Au nord, au pied d’une terrasse maçonnée haute de 6 m installée contre le versant, un canal principal évacue les eaux du Queffleuth en provenance de l’étang et du moulin, selon un axe SO-NE. Cette structure s’étend sur 175 m de long pour une largeur comprise entre 3,50 et 5 m. Elle est dédoublée en partie ouest par un muret, permettant le passage des eaux sous une petite structure quadrangulaire dont la nature exacte reste à déterminer. Un ouvrage similaire, parallèle au canal d’évacuation, se trouve au pied des terrasses du versant sud. D’une longueur de 122 m pour une largeur de 6 m, ce canal sud n’est pas alimenté par un cours d’eau mais capte les eaux de ruissellement des canalisations en provenance du secteur bâti. Enfin, deux canaux de 6,50 m de large pour 102 m de long, installés perpendiculairement aux ouvrages précédents, font la jonction entre le canal sud et celui d’évacuation au nord. Ces réalisations permettent d’isoler plusieurs espaces sur la plaine alluviale, notamment une plateforme quadrangulaire de 102 sur 69 m, entourée de canaux de tous côtés. Cet espace central ne semble pas avoir accueilli de bâtiment, contrairement à la plateforme au pied de la digue, à l’ouest, où se trouve notamment un moulin et celle bordant la clôture, à l’est, qui était équipée d’un petit édifice dans son angle NE.

6D’importantes zones d’extraction de schiste, repérées sur le coteau nord, pourraient avoir alimenté le chantier en matériaux, en fournissant notamment le parement des canaux et de la terrasse nord, le chaînage d’angle étant réalisé en granit. Ces carrières ont également pu livrer des matériaux pour les constructions et reconstructions des xixe et xxe s. sur le site et ses alentours. Étant donné la proximité immédiate de l’abbaye il n’est pas non plus exclu qu’une exploitation antérieure des schistes du coteau nord ait eu lieu.

Langonnet (Morbihan). Abbaye Notre-Dame de Langonnet

7L’ancienne abbaye Notre-Dame de Langonnet se trouve dans la plaine alluviale de la vallée de l’Ellé, orientée NE-SO, à l’intersection avec un petit vallon secondaire, et à 4,3 km du bourg de la commune éponyme. Cette abbaye, située dans l’ancien diocèse de Cornouaille, était également à la limite de celui de Vannes.

8À l’instar du site du Relec, les débuts de l’abbaye de Langonnet ne nous sont pas connus. Selon l’historiographie cistercienne, la fondation serait à attribuer au duc Conan III en 1136. Après la Révolution, la présence humaine est restée conséquente sur le site, ce dernier accueillant à partir de 1806 les Haras nationaux, entreprise qui se maintint difficilement jusqu’en 1857 et l’acquisition de l’ancienne abbaye par la congrégation du Saint-Esprit. Ces installations postérieures n’ont cependant pas totalement effacé le passé du site. Plusieurs bâtiments de la période moderne, peut-être même médiévaux, sont abattus, de nouveaux édifices élevés et des accès supplémentaires créés, mais une part importante de l’organisation monastique ancienne subsiste à travers la réappropriation des édifices, des structures et des espaces.

9Le relevé topographique a été réalisé autour des bâtiments, du bas des versants au nord ainsi que sur le vallon au NO du carré claustral, soit une surface de 10,8 ha. La large plaine alluviale et le cours assez encaissé de l’Ellé, par endroits canalisé, a autorisé l’installation du complexe monastique au sein de celle-ci, place qu’elle occupe au plus tard depuis le xiiis., comme en témoigne la salle du chapitre médiéval, conservée dans l’aile des moines moderne. D’importantes terrasses maçonnées s’étendent en partie ouest du site, l’une étant, probablement à l’époque moderne, exploitée en allée monumentale.

10Le vallon secondaire joue un rôle essentiel dans l’aménagement du site, captant de nombreuses sources, présentes sur les reliefs au NE. Des traces d’extraction de pierre, ici du granit, sont également visibles. Deux digues, modestes, ont été identifiées barrant ce vallon. La plus proche des bâtiments conventuels mesure 50 m de long et 7 m de large, pour une hauteur conservée d’environ 1,20 m. La seconde, plus en amont, mesure 40 m de long et 7,50 m de large, pour une hauteur de 2,50 m. Les étangs formés par ces barrages ont aujourd’hui disparu en raison d’une restructuration du réseau hydraulique mais l’identification des digues permet d’estimer la dimension des retenues. L’étang aval mesurait ainsi environ 200 m dans sa longueur pour une largeur de 45 m. Celui amont était vraisemblablement plus modeste. Une troisième levée de terre barre le vallon mais ne semble pas être en lien avec les digues précédentes et correspondrait davantage à un chemin permettant de relier deux fermes après l’abandon des étangs. Au niveau de la seconde digue, une fontaine porte les armoiries de l’abbé de Bouteville qui dirigea l’abbaye au cours de la première moitié du xvie s. Cette fontaine alimente une canalisation, aménagée dans le flanc ouest du vallon, qui débouche au sein d’un collecteur. Ce réseau parallèle à celui des étangs pourrait correspondre à une deuxième phase dans l’exploitation du vallon, après leur abandon.

11Ces deux relevés, ainsi que d’autres, réalisés sur d’anciennes abbayes cisterciennes, contribuent non seulement à dresser un état des lieux des structures et aménagements conservés sur les sites monastiques, mais également à documenter les différents projets et solutions choisis par les communautés, à travers les siècles, en réponse aux contraintes et avantages inhérents aux espaces et ressources à leur disposition.

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Pour citer cet article

Référence papier

Merlin Muzellec, « Plounéour-Ménez, Langonnet (Finistère, Morbihan). Abbaye du Relec, abbaye de Langonnet »Archéologie médiévale, 51 | 2021, 236-237.

Référence électronique

Merlin Muzellec, « Plounéour-Ménez, Langonnet (Finistère, Morbihan). Abbaye du Relec, abbaye de Langonnet » [notice archéologique], Archéologie médiévale [En ligne], 51 | 2021, mis en ligne le 20 mars 2022, consulté le 19 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/archeomed/41158 ; DOI : https://doi.org/10.4000/archeomed.41158

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Auteur

Merlin Muzellec

Université Rennes 2 – Laboratoire LAHM – UMR 6566 CReAAH

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