1Le PCR Sainte-Christie-d’Armagnac entame en 2020 sa première année d’opération triennale. En dépit des difficultés liées à la situation sanitaire, les membres du PCR ont été en mesure de réaliser la majeure partie du programme prévu, mais les opérations de terrain ont été décalées dans le temps et cela a considérablement réduit les délais de réflexion et de rédaction des rapports. Le programme de ce projet vise à explorer l’histoire de ce site situé en Bas-Armagnac à proximité de Nogaro. Le cœur du bourg est composé d’un certain nombre de monuments visibles : une motte et sa basse cour, un barri (quartier d’habitation), un « castet » quadrangulaire cerné par l’église paroissiale Saint-Pierre, deux tronçons de rempart en terre crue massive et le logis seigneurial qui prend appui sur l’un des fragments de rempart. Des éléments de fossé sont encore visibles ainsi que le vieux cimetière d’où ont été extraits des sarcophages monolithes.

2L’étude de bâti du logis seigneurial ou logis à pan de bois, dirigé par Laura Soulard avec l’aide d’Aude Aussilloux-Corréa et d’Alain Klein, n’a pas été intégrée au présent texte, car elle fait l’objet d’une notice archéologique particulière dans ce volume. Le sondage archéologique, réalisé du 31 août au 5 septembre 2020 par Nicolas Guinaudeau (Acter), avait pour but de cerner l’occupation sur l’emprise de l’ancien castrum mentionné en 1291. Deux tranchées mécaniques ont été réalisées dans la partie occidentale du site, à l’emplacement d’un ancien logis en pans de bois détruit au xx^e s. Les observations stratigraphiques ont révélé l’existence d’un décaissement mécanique qui a provoqué l’arasement des vestiges et la perte de tout potentiel stratigraphique, le creusement ayant été effectué jusqu’au substrat. Sept structures en creux ont toutefois été mises au jour au cours de l’intervention. Les cinq premières structures sont associées à une première occupation attribuée aux xiii^e-xiv^e s. Deux trous de poteau ont été repérés à l’extrémité nord du sondage 01, tandis que deux fonds de fosse ont été mis au jour plus au sud. Bien que fortement arasés, ces deux faits sont interprétés comme de possibles silos en raison de leurs caractéristiques morphologiques. La cinquième structure a été repérée dans le sondage 2. Elle est constituée d’un alandier aux parois rubéfiées et d’une fosse de travail de plan oblong aménagés dans l’encaissant naturel (fig. 1). La chambre de chauffe, localisée sous la berme sud du sondage, n’a pu être étudiée. Cette structure pourrait correspondre à un four domestique en partie enterré ou à un four à céramique. Un niveau de circulation attribué au xvi^e s. recouvre un fossé orienté N-S dont la chronologie n’a pu être établie. Au regard de son positionnement topographique, ce niveau constituait vraisemblablement le sol de la cour intérieure du castrum à cette période. Aucun vestige de la bâtisse recherchée n’a été retrouvé si ce n’est la dernière structure de plan quadrangulaire. Elle correspond à un espace excavé de 1,80 m de profondeur aux parois verticales et à fond plat. Cette cave, comblée durant la période contemporaine, doit probablement être associée au bâtiment utilisé comme chai à la fin du xix^e s.

3Les données archéologiques sont malheureusement en deçà de nos espérances pour un espace capital à la compréhension du site. Elles ne permettent pas d’infirmer ou de confirmer les données textuelles étudiées par Anaïs Comet, qui a pu montrer, grâce à un compoix de la seigneurie que, dès 1670, le plan du « castet » est proche de ce qu’il était sur le cadastre napoléonien. Il est en effet déjà devenu un espace seigneurial et les « houstaux » présents vers 1500 ont disparu.

4L’opération menée cette année a aussi permis d’identifier les brindilles qui sont posées en lit entre chaque couche de terre crue filante du rempart ouest, datées par datation ¹⁴C entre la fin du xiii^e et le xiv^e s. Nima Saedlou a pu déterminer qu’il s’agissait de bruyères, confirmant ainsi les traditions orales associées à cette technique.

5La première phase de l’étude de bâti du chevet de l’église Saint-Pierre, débutée en 2019, a été achevée (étude de Yoan Mattalia). Elle confirme l’importance des nombreux remaniements que l’édifice a connus au cours des âges. En dépit du faible nombre de murs non crépis, des éléments majeurs ont été mis au jour. Un premier édifice, probablement charpenté, est érigé entre le x^e et le xii^e s., mais sa datation devra être affinée. Il se distingue par son appareil et possède au moins deux baies, non ébrasées et couvertes par des arcs en plein cintre (fig. 2, FEN 214). Seuls deux de ces murs ont été reconnus et il est interprété comme un édifice ecclésial. Il fait l’objet d’une série de transformations qui débutent au moins au xiii^e s. ou plus sûrement au xiv^e s. Elles pourraient correspondre à une mise en défense du site. On assiste à une surélévation en briques du mur du chevet. Les quelques restes permettent de conclure à l’existence d’un étage, non seulement au-dessus de la nef actuelle de l’église, mais aussi au-dessus d’un autre bâtiment inconnu situé à l’emplacement de l’actuelle sacristie (possible premier chœur ?). La partie occidentale de l’église est remaniée au xv^e s. par l’édification de la base de l’actuelle tour qui va servir de chœur liturgique (fig. 2, mur 204). Elle entraîne la destruction d’un bâtiment totalement inconnu dont il ne reste qu’un fragment de maçonnerie fossilisé dans le mur nord de la tour du clocher. L’existence d’un bâtiment quadrangulaire implanté à l’angle NO de l’église est une découverte totalement inattendue (fig. 2, mur 215). L’utilisation d’une caméra thermique pour dépasser la barrière des enduits a permis de montrer qu’il s’élevait sur trois niveaux, dont seul le second est actuellement accessible depuis la nef de l’église. Le troisième niveau, juste observé à travers de petites ouvertures, conserve une porte dont la présence prouve l’existence d’un autre bâtiment à l’ouest doté d’au moins deux niveaux (à la place du collatéral actuel). La tour de pierre médiévale est surélevée à l’époque moderne (xvi^e s. ?) par des maçonneries en brique qui fonctionnent avec le petit escalier en vis extérieur qui subsiste encore (fig. 2, mur 210). C’est ensuite que l’actuel collatéral nord est construit. Au xix^e s., le chœur est transformé en sacristie et de nombreux travaux (clocher), en partie documentés par les archives, sont effectués et donnent à l’église son aspect actuel.

Fig. 1 Sainte-Christie-D’Armagnac, four 1005 avec niveau charbonneux en place au nord et alandier vidé au sud.

Agrandir Original (jpeg, 983k)

Cl. N. Guinaudeau, Acter

Fig. 2 Sainte-Christie-D’armagnac, Proposition de phasage du chevet de l’église Saint-Pierre.

Agrandir Original (jpeg, 1,3M)

DAO Y. Mattalia, 2020