1La cour intérieure du château de Chambord fait l’objet de travaux de drainage et de réfection des revêtements qui ont nécessité un décapage de la cour (environ 5000 m²) sur une profondeur moyenne de 0,60 m. Les travaux sont prévus en deux étapes : la moitié orientale en novembre 2006 et la moitié ouest en février 2007. En outre un sondage profond a été réalisé au pied de la tour SO du donjon afin d’observer les fondations de celle-ci, réputées avoir été posées sur des pilotis en chêne.

2Le décapage a mis en évidence des sols de circulation associés à la construction du château, notamment des aires de gâchage de mortier dont l’épaisseur pouvait atteindre 0,25 m. Ces sédiments suivaient un niveau assez régulier qui devait être le niveau d’origine de la cour voulu par les bâtisseurs. Celui-ci se situe à 0,10-0,15 m au-dessous de la base de la plinthe moulurée qui court au pied de tous les murs du donjon et des ailes de l’enceinte. Ce niveau de sol primitif était également matérialisé par des marches en pierre de taille devant certaines portes des tours du donjon. Ce premier sol avait été abandonné rapidement (absence d’usure sur les marches et remblaiement de la cour par 0,30-0,50 m de tufeau écrasé), sans doute à cause des inondations hivernales du Cosson dont les aménagements hydrauliques ne furent véritablement menés à bien qu’après le milieu du xviii^e s. Des photos prises dans les années 1860 montrent le donjon quasiment « emmotté » avec un sol qui arrive au niveau du bandeau saillant des tours, soit au moins 80 cm plus haut que le sol actuel.

3Le dégagement des fondations a permis d’observer un changement dans le module et le rythme des bases des pilastres au moment de l’implantation définitive des ailes ouest, sud et est de l’enceinte. En effet, la première assise de pierre de taille comporte des bases saillantes de 0,95 m de large qui correspondent au module des pilastres du donjon. Elles ont été abandonnées lors de la pose de la plinthe moulurée par le plaquage de bases de 1,28 m de large dont le rythme est complètement différent de celui des premières. Ce changement correspond sans doute à une réorganisation des murs de refend des trois ailes de l’enceinte.

4Les relations stratigraphiques entre les galeries et les tours d’escalier du côté nord de l’enceinte ont été observées. Les fondations de ces galeries sont effectivement postérieures à celles des tours NO et NE du donjon. Il s’agit donc d’une modification du plan d’origine, particulièrement visible dans la galerie orientale du côté nord dont la construction est attribuée à Gaston d’Orléans.

5Le décapage réalisé devant la façade sud du donjon n’a pas montré l’existence de fondations qui pouvaient correspondre aux départs des voûtes visibles au-dessus des portes de la façade. Ces pierres d’attente et un plan de Jean Chéreau de la fin du xvi^e s. (conservé à Gdansk) ont donné lieu à l’hypothèse d’une galerie couverte entre la façade sud et la porte Royale. Les résultats de l’opération archéologique suggèrent que le plan correspond à un projet plutôt qu’à un « plan d’exécution » ou un plan de l’existant.

6Finalement, la réalisation d’un sondage profond de 5 m au pied de la tour SO du donjon a permis deux découvertes. En premier lieu, une portion d’une tour circulaire d’un diamètre supérieur à 8 ou 9 m, partiellement intégrée dans les fondations de la tour SO, a été observée. Le parement externe en appareillage cubique de calcaire présente un léger talus et évoque une construction médiévale. Il pourrait s’agir d’un élément du château des comtes de Blois mentionné au xiii^e s. En second lieu, il a été possible d’observer les fondations de la tour jusqu’au niveau du terrain naturel. Elles semblent avoir été posées sur des fagots ou des clayonnages de bois, directement sur la surface du calcaire marneux qui forme le sol en place. Ce sédiment, assez dur, ne nécessite pas de stabilisation particulière, d’autant plus que la situation au fond d’un marais exclut tout risque de mouvement dû à l’assèchement du terrain.