Les Aires (Hérault). Saint-Michel de Mourcairol
Texte intégral
1Le château de Saint-Michel de Mourcairol se situe à 35 km au nord de Béziers, au sud du Massif Central. Quelques fragments de mobilier antique attestent de la présence romaine sur le site mais l’essentiel des données relevées à ce jour ramènent à la période médiévale. Le site, dominant la vallée de l’Orb, se situe à 463 m d’altitude. L’éminence rocheuse fait pendant aux collines qui s’échelonnent jusqu’aux contreforts du Massif Central. Depuis trois ans, le site fait l’objet de fouilles archéologiques et d’une réhabilitation des structures mises au jour. L’origine de l’implantation des nombreux sites fortifiés du rebord du Massif Central languedocien (Calberte, Olargues…) remonterait aux xe, xie et xiie s. Plusieurs éléments ont motivé la mise en œuvre de tels sites : leur emplacement stratégique en raison du relief et de la proximité d’une voie de circulation à vocation économique. Dans le cas de Saint-Michel de Mourcairol, les deux paramètres étaient effectivement réunis : la voie gallo-romaine reliant Toulouse à Lodève passait au pied du site et elle desservait, notamment, les mines d’argent de Villemagne l’Argentière. Cette exploitation du minerai participa au développement économique local et favorisa par là même la mise en fortification de certains points névralgiques sur le chemin du précieux métal. La possession des droits d’exploitation du minerai fut d’ailleurs disputée entre le vicomte de Béziers, dont dépendait la zone depuis le xie s., et le vicomte de Narbonne. Afin de contrer les velléités d’implantation de leur adversaire dans la région, les Trencavel établirent une ligne défensive s’étendant de Béziers à Carcassonne, formée de simples tours de guet ou de castra de grande envergure, tel Mercoirol. L’essentiel des sources dont nous disposons pour le château témoigne de la complexité des hommages liant les seigneurs de Mourcairol aux Trencavel, jusqu’au début du xiiie s. Une étude minutieuse devrait permettre dans l’avenir de préciser cet aspect.
2En 2004 et 2005 fut mis au jour dans l’une des tours, située sur le versant occidental du site, un trésor monétaire de 24 monnaies. Ce dernier permit de mieux appréhender la nature des échanges dans la plaine littorale du Bas-Languedoc à l’époque féodale. De nombreux deniers melgorien, quelques monnaies locales du vicomte de Béziers ainsi que quelques exemplaires provenant de Vérone en Italie, frappés aux noms de Federicus (Frédéric Barberousse ?), et de France, portant le nom de Philippus (Philippe Auguste ?) ont été découverts.
3Le château primitif de Saint-Michel de Mourcairol se limitait à un ensemble comprenant la chapelle, un bâtiment résidentiel (sous forme de tour ou donjon) et des dépendances attenantes. Cet ensemble suffisait à assurer le contrôle de la circulation des biens et des personnes. Les Trencavel augmentèrent ce castrum superior (comprenant la demeure fortifiée du seigneur et une zone d’habitat) avec un castrum inferior, ce qui se traduisit par un accroissement du domaine et donc de l’activité économique. Ce nouvel ensemble, intégrant le chemin à vocation « économique » situé à la lisière orientale, fut entièrement mis en défense.
4Il est difficile de savoir si l’évolution des techniques militaires a conditionné le parti architectural des concepteurs de l’ouvrage. Il reste toutefois que la mise en défense du versant méridional relève d’une conception élaborée. Elle met en œuvre trois éléments : l’ouvrage de flanquement (tour), le mur d’enceinte et les hourds. Placées à intervalles réguliers (tous les 24 m), les tours reliées par des courtines pouvaient être pourvues de hourds et d’archères. Le système était verrouillé par la salle des Gardes et les structures adjacentes qui protégeaient les accès septentrionaux de la place-forte. Ces dernières étaient reliées par une porte, elle-même défendue par des hourds. L’ensemble formait une souricière de même type que celle réalisée à Puilaurens au milieu du xiiie s., avant que le château ne passe dans le domaine royal.
5Grâce aux nombreux indices laissés sur le rocher, il nous est plus facile d’identifier le type d’extraction en cours entre le xe et le xive s. On utilisait des coins placés sur des diaclases naturelles ; le choc provoqué par la masse rendait aisé le délitement. Les traces enregistrées in situ permettent de distinguer certains petits éclats situés sur la partie supérieure de la paroi d’où le bloc a été détaché. Ces traces d’impact laissées par les carriers témoignent du choix des constructeurs de procéder à l’aménagement du sol naturel pour réaliser l’assiette de la construction, plutôt que d’utiliser des remblais nécessitant une grande quantité de matériaux.
6L’ensemble du mobilier exhumé permet de déterminer deux périodes d’occupation : l’une comprise entre 1080 et 1280 et l’autre aux xive-xvie s. Il ne nous est pas possible d’identifier des zones spécifiques de production réservées à un artisanat quelconque. La céramique mise au jour (« pégaus », grandes jattes, mortiers, marmites) semble avoir été réservée à la seule fonction alimentaire : cuisson des mets ou conservation des aliments.
7Les causes de l’abandon du site au xvie s. sont malaisées à définir à l’heure actuelle. Certains secteurs présentent des couches d’incendie. Les investigations de l’année à venir nous permettront peut-être de connaître la nature de cet incendie, tout en précisant le rôle du site au cours de la croisade contre les Albigeois.
Table des illustrations
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Titre | Les Aires, Saint-Michel de Mourcairol. |
URL | http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/48789/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 684k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Guillaume Roquefort, « Les Aires (Hérault). Saint-Michel de Mourcairol » [notice archéologique], Archéologie médiévale [En ligne], 36 | 2006, mis en ligne le 15 mai 2023, consulté le 23 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/archeomed/48789 ; DOI : https://doi.org/10.4000/archeomed.48789
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