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Soigner les malades au xve siècle. L’exemple de la fouille de l’hôtel-Dieu de Valenciennes (Nord)

Healing the sick in the 15th c.: the excavations of the Hôtel-Dieu in Valenciennes (North of France)
Das Gelände des Hôtel-Dieu in Valenciennes wurde Die Krankenpflege im 15. Jahrhundert
David Delassus, Marie Derreumaux, Dominique Frere, Marie Huin, Hélène Poirier, Tarek Oueslati, Coralie Favero, Arnaud Tixador, Maxime Rageot, Delphine Barbier-Pain, Matthieu Deltombe, Patrice Korpiun, Martin Laugero et Nima Saedlou
p. 121-162

Résumés

Résumé : Le site de l’hôtel-Dieu de Valenciennes a été fouillé par le service archéologique municipal en 2016. Cette fouille constituait une opportunité unique de documenter l’état médiéval d’un hôpital fondé en 1430, jusque-là uniquement connu par des sources archivistiques et iconographiques. L’opération permit notamment la mise au jour de la partie occidentale du bâtiment principal. L’étude du bâti a révélé que la salle des malades et la chapelle n’occupaient pas à l’origine la totalité de cet édifice puisqu’un troisième espace, en partie excavé, était logé dans son tiers occidental. D’autres aménagements placés dans le même bâtiment (citerne, cave) témoignent de la volonté des concepteurs du projet de faciliter le travail des hospitalières et de concilier au mieux les exigences du sacré et du soin des corps. Le modèle proposé fut jugé efficient par les contemporains puisqu’il influence, quelques années plus tard, la construction du grand bâtiment sur rue des hospices de Beaune. Enfin, la fouille de deux ensembles clos nous renseigne sur l’environnement matériel des malades et du personnel ainsi que sur différents aspects du soin : alimentation, hygiène et remèdes. La découverte de deux aspersoirs en verre témoigne de l’influence du monde arabe sur la composition du matériel utilisé dans l’hôpital du xve siècle.

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Texte intégral

  • 1 Cette première occupation est matérialisée par des fosses, fossés et vestiges de bâtiments sur pote (...)
  • 2 Bavard, Boudrot 1881, p. 11.

1Entre les mois de juin et novembre 2016, le Service archéologique de Valenciennes a mené une fouille sur une emprise de 1 100 m² au centre de la ville actuelle, cœur du « vieux-bourg » médiéval (fig. 1). Le site, occupé à partir du xe ou du xie siècle1, fut choisi, vers 1430, pour accueillir le premier hôtel-Dieu de la cité, fondé par la comtesse de Hainaut Jacqueline de Bavière. De l’hôpital médiéval et moderne, en grande partie détruit dès 1867, peu d’informations étaient jusqu’alors conservées : un dessin représentant la salle des malades et la chapelle vers 1650, des plans du xviiie siècle, ainsi que des documents d’archives, notamment les lettres patentes des souverains hennuyers et bourguignons portant sur l’administration de l’institution. Cet établissement de moyenne importance occupa pourtant, dès la fin du xixe siècle, une place particulière dans l’histoire de l’architecture hospitalière puisqu’il fut considéré, grâce aux travaux d’Étienne Bavard et de Jean-Baptiste-Claude Boudrot, comme le principal modèle du bâtiment sur rue des célèbres hospices de Beaune2. L’hypothèse, fondée sur une source archivistique, ne pouvait pourtant pas être vérifiée, faute de documentation suffisante sur l’édifice valenciennois. Dans ces conditions, la fouille archéologique représentait une opportunité unique d’étudier l’état médiéval de l’hôpital et son évolution architecturale. L’impact du projet immobilier, qui prévoyait la construction de deux immeubles d’habitation donnant sur la rue Derrière-la-Tour pour l’un et la rue des Hospices pour l’autre, a néanmoins circonscrit l’opération archéologique à la partie ouest de l’établissement comprenant l’extrémité occidentale du bâtiment principal ainsi qu’une construction en grès qui accueillait la brasserie de l’hôpital au xviiie siècle. Entre les deux, les niveaux médiévaux avaient été en grande partie détruits par le creusement de caves dans la seconde moitié du xixe siècle. La découverte de latrines du xve siècle a, quant à elle, permis de documenter l’environnement matériel dans lequel vivaient les malades et les sœurs hospitalières dans les premiers temps de l’hôtel-Dieu. Dans le cadre de cet article, nous présenterons ainsi les données obtenues en relation avec le projet hospitalier originel et, plus particulièrement, l’architecture du bâtiment principal qui abritait la « grande salle » et la chapelle. Nous nous pencherons ensuite sur la question de l’accueil et du soin des malades à travers l’étude du matériel issu de ces latrines.

Fig. 1 Localisation de l’opération archéologique sur le cadastre actuel.

Fig. 1 Localisation de l’opération archéologique sur le cadastre actuel.

DAO D. Delassus.

1. L’hôtel-Dieu d’après les sources écrites et iconographiques (D. Delassus, M. Deltombe)

1.1. Les origines de l’hôpital

  • 3 AM Valenciennes, 8 JJ A 1.

2L’hôpital de Valenciennes trouve son origine dans une initiative bourgeoise. Au début du xve siècle, la confrérie de Saint-Jacques souhaita établir un nouvel hôpital à Valenciennes et se tourna dans ce but vers la comtesse de Hainaut, Jacqueline de Bavière. La création de l’institution fut officialisée par les lettres patentes datées du 5 juin 1430, qui en confia l’administration aux confrères. Les trois premiers lits furent fondés par la comtesse l’année suivante. Cet acte de charité répondait à des motivations spirituelles et pratiques clairement explicitées dans les mêmes lettres de 1430. En fondant l’hôpital, la comtesse œuvrait pour le salut de son âme et celles de ses héritiers mais elle répondait également à une situation sanitaire critique car les structures existantes ne pouvaient plus accueillir les malades valenciennois, qui devaient être conduits hors de la ville pour être soignés3.

  • 4 Brocard 2004, p. 207.
  • 5 Révillion 2004, p. 154.
  • 6 Mollat 1982, p. 100.

3Le terrain acquis par la confrérie pour y bâtir l’hôpital possédait certains avantages (fig. 2). Il était situé au centre de la ville médiévale, à quelques dizaines de mètres seulement des halles et à proximité des lieux du pouvoir politique et économique de la ville. Cette position centrale nous renseigne indirectement sur le public visé : l’institution fut d’abord tournée vers les Valenciennois, les « pauvres connus »4. Néanmoins les contraintes urbaines y étaient fortes. L’îlot était densément construit depuis le xiiie siècle, ce qui a pu limiter les possibilités d’extension de l’hôpital et explique sûrement l’exiguïté de sa cour distributive. Au sud, en effet, l’établissement était voisin du couvent des Dominicains, ordre particulièrement impliqué dans la promotion des œuvres de charité5. Enfin, il était situé en rive gauche d’un canal urbain : la rivière Sainte-Catherine, qui pouvait offrir des solutions pratiques pour l’évacuation des déchets6.

Fig. 2 Localisation de l’hôtel-Dieu et emprise de l’opération (en rouge), sur le plan de la ville en 1767.

Fig. 2 Localisation de l’hôtel-Dieu et emprise de l’opération (en rouge), sur le plan de la ville en 1767.

DAO D. Delassus.

  • 7 AM Valenciennes, 8 JJ A 52.

4Notons que les travaux n’ont laissé presque aucune trace dans les archives. Tout au plus peut-on signaler la construction de « loges » contre le mur du couvent des Dominicains, ce qui laisse envisager l’existence, dès l’origine, de deux ailes parallèles séparées par l’étroite cour méridionale7. L’édification du bâtiment principal a pu se poursuivre jusqu’en 1435, date à laquelle l’hôpital fut vraisemblablement en mesure d’accueillir ses premiers malades.

1.2. L’action de Philippe le Bon

  • 8 AM Valenciennes, 8 JJ A 6.

5À partir de 1432, le pouvoir en Hainaut passa progressivement dans les mains du duc de Bourgogne Philippe le Bon. Par les lettres patentes du 8 mai de cette année, celui-ci approuva les dispositions prises précédemment en faveur de l’hôpital et confirma la gestion de l’institution par les confrères de Saint-Jacques. Très vite, Philippe le Bon montra son intérêt pour l’hôpital jusqu’à s’en déclarer fondateur en 14348.

  • 9 AM Valenciennes, 8 JJ A 6.
  • 10 AM Valenciennes, 8 JJ A 10.
  • 11 Une lettre anonyme de 1468-1469 indique que la « salle des pôvres » des hospices de Beaune abritait (...)
  • 12 AM Valenciennes, 8 JJ A 8.
  • 13 Saunier 1993, p. 7.

6La même année, le duc précisait la fonction de l’hôpital en excluant, sur des critères médicaux, une partie du public potentiel. Ainsi, seules seront admises les « povres créatures malades de maladies sanables et selon nature currables et garissables »9. L’institution accueillera donc des personnes soignables souffrant notamment de blessures, fistules ou autres « chaudes maladies ». Les raisons invoquées sont avant tout d’ordre économique : les faibles revenus de l’hôtel-Dieu ne lui permettaient pas d’accueillir des personnes invalides et d’immobiliser des lits sur une trop longue période. Ces malades furent pris en charge par une communauté de sœurs hospitalières dont le nombre est de dix ou douze en 144310. D’après le décompte des fondations des lits, l’hôpital pouvait abriter, vers 1451, vingt lits, soit potentiellement une quarantaine de malades11. Nous pouvons donc avancer l’hypothèse qu’au milieu du xve siècle, chaque sœur hospitalière avait la charge de deux lits. Les textes disponibles nous livrent peu d’informations sur les malades. Ces derniers sont le plus souvent désignés comme des « pauvres » ou « pauvres malades ». Faut-il en conclure qu’il s’agit exclusivement de personnes issues des franges les plus défavorisées de la société médiévale ? Les lettres du 6 juin 1438 permettent d’en douter12. Dans ce document, Philippe le Bon reproche aux membres du magistrat de Valenciennes, prévôt et échevins, d’« envoyer a ladite maison Dieu pauvre malade de leur affinité ou familier au prejudice de notre ditte maison Dieu, aucune fois par commendement et autrefois par priere […] », sans tenir compte des capacités d’accueil de l’hôpital et au grand désarroi des administrateurs. Il semble donc que, dès les premières années de fonctionnement, l’hôtel-Dieu ait accueilli – parfois contre son gré – des individus faisant partie de l’entourage ou de la famille des membres du magistrat, eux-mêmes issus des élites locales. La recherche d’une « bonne mort », dans un lieu consacré à la charité et à la prière, pouvait également faire partie des motivations de ces individus souhaitant intégrer l’hôpital13.

1.3. L’hôpital d’après les sources modernes

  • 14 Le Boucq 1978, p. 220.
  • 15 Ibid.

7L’ouvrage du prévôt de Valenciennes Simon Le Boucq, Histoire ecclésiastique de la ville et comté de Valenciennes, nous livre, en 1650, la première représentation du bâtiment principal de l’hôtel-Dieu (fig. 3). Celui-ci se présentait alors sous la forme d’un vaisseau unique terminé par une chapelle à pans coupés et sans doute couvert d’ardoises. Le gouttereau sud était percé de dix baies à arcs brisés, reliées entre elles par une moulure filant le long de la façade. Deux portails sous auvent permettaient d’accéder à un rez-de-chaussée légèrement surélevé par rapport à la cour. Deux petites ouvertures indiquent la présence d’espaces excavés sous l’édifice. L’auteur précise que le bâtiment, malgré son apparente homogénéité, a déjà été agrandi par deux fois, comme « il se peult veoir par les joinctures qui sont ès murailles »14. La date exacte des premiers travaux n’est pas précisée mais nous savons, par ailleurs, qu’en 1468 le comte de Ligne effectue un don de cent livres à l’hôpital pour l’agrandissement du dortoir. Un second agrandissement en 1552 permet d’y ajouter six lits supplémentaires15.

Fig. 3 Bâtiment principal de l’hôtel-Dieu en 1650 dans l’Histoire ecclésiastique de la ville et comté de Valenciennes par Simon Le Boucq, prévôt.

Fig. 3 Bâtiment principal de l’hôtel-Dieu en 1650 dans l’Histoire ecclésiastique de la ville et comté de Valenciennes par Simon Le Boucq, prévôt.

Médiathèque Simone Veil de Valenciennes, Ms. 673, p. 545.

  • 16 AD Nord, 57 Fi 119.
  • 17 Plan de 1790 (AM Valenciennes, 3 O 2 feuille 37).
  • 18 Plan dressé en 1804 et reproduit en 1937 dans une brochure anonyme intitulé Les établissements hosp (...)

8Le premier plan connu est dressé au xviiie siècle, avant 176716. Le bâtiment principal, long d’environ 60 m pour 12 m de largeur, est désigné comme étant la « grande salle pour les hommes ». Il se trouvait alors au centre d’un ensemble de bâtiments répartis sur un domaine d’environ 4 000 m² (fig. 4). L’organisation générale, pour le moins irrégulière, traduit sans doute une élaboration opportuniste de l’ensemble, effectuée au gré des dons et des possibilités d’achats de terrains. En outre, le document indique les fonctions des bâtiments annexes : réfectoire, brasserie, boulangerie, salle des femmes ou encore le logement de la directrice accolé au gouttereau nord du bâtiment principal. Les plans plus tardifs, réalisés au cours du xviiie siècle17 et au début du xixe siècle18, nous renseignent surtout sur les changements d’affectation des différents bâtiments de l’hôpital. Les modifications du patrimoine bâti au xviiie siècle concernèrent surtout la construction d’un nouvel édifice pour abriter le réfectoire auparavant situé dans le prolongement du bâtiment principal. Parallèlement, le bâtiment de la brasserie fut transformé pour accueillir des logements.

Fig. 4 L’hôtel-Dieu au xviiie siècle d’après le plan dressé entre 1709 et 1767 conservé aux Archives départementales du Nord.

Fig. 4 L’hôtel-Dieu au xviiie siècle d’après le plan dressé entre 1709 et 1767 conservé aux Archives départementales du Nord.

AD Nord, 57 Fi 119 ; DAO D. Delassus.

  • 19 Machelart 2009, p. 77.

9L’aménagement intérieur de la salle des malades et son décor sont peu documentés. Une vue de la chapelle peinte par l’artiste valenciennois François Baisier au xixe siècle nous montre la chapelle de l’édifice couverte d’un berceau brisé à entraits et poinçons apparents, sans doute lambrissé19. Simon Le Boucq indique, quant à lui, la présence, vers 1650, d’une flagellation du Christ contre la porte du grand dortoir ainsi qu’un « tableau anticque » figurant une Descente de croix, placé dans la chapelle. Cette iconographie, lourde de sens, associe les malades alités à l’image du Christ souffrant et renvoie directement à la vision spiritualisée de la maladie au Moyen Âge.

2. L’architecture de l’hôpital et son évolution au xve siècle (D. Delassus)

2.1. Le bâtiment principal : vestiges du projet originel (phase 1)

10La fouille archéologique a principalement permis d’appréhender le tiers occidental du bâtiment principal de l’hôtel-Dieu (fig. 5). Les opérations de terrassement ont ainsi fait apparaître une vaste construction délimitée au nord et au sud par les fondations des murs gouttereaux distants de 10,7 m, orientés NO-SE. Des refends en pierre ou en briques subdivisaient l’emprise de la construction en différents espaces excavés. Si l’organisation globale des vestiges semblait donc correspondre a priori aux données livrées par les sources iconographiques, la diversité des matériaux employés (grès, craie, briques jaunes ou rouges liés par différents types de mortier) témoignait, sans aucun doute, de nombreux réaménagements effectués jusqu’à la fin du xixe siècle (fig. 6). Le démontage partiel des maçonneries les plus récentes ainsi qu’un examen attentif des structures a cependant permis d’identifier trois pièces appartenant au projet architectural originel : la citerne, la cave 1 et une pièce semi-excavée dotée d’une cheminée murale (fig. 7).

Fig. 5 Localisation des structures archéologiques sur le plan de 1790.

Fig. 5 Localisation des structures archéologiques sur le plan de 1790.

Document réalisé sur la base des superpositions de plans de François Bisman, Bisman 2014 ; DAO D. Delassus.

Fig. 6 Photogrammétrie des vestiges du bâtiment principal.

Fig. 6 Photogrammétrie des vestiges du bâtiment principal.

Photogrammétrie M. Laugero.

Fig. 7 Plan des structures archéologiques en relation avec le bâtiment principal et ses abords.

Fig. 7 Plan des structures archéologiques en relation avec le bâtiment principal et ses abords.

La place des latrines 3349M dans ce phasage n’est pas assurée.

DAO D. Delassus.

2.1.1. La citerne

  • 20 . Tixador, Huvelle et Korpiun 2003, p. 62.

11Cette première pièce couvrait une superficie de 28 m² (fig. 8). Construite en moellons de craie, elle fut creusée en partie sur l’emplacement de caves de la seconde moitié du xiiie ou du xive siècle, ce qui nécessita l’emploi d’arcs de décharge en briques à la base de son mur est. Une voûte en berceau, en craie et briques jaunes, partiellement conservée dans une maçonnerie du xixe siècle, couvrait la citerne (fig. 9). La hauteur sous voûte est estimée à environ trois mètres. Le sol de la pièce était composé d’une chape de mortier hydraulique permettant d’établir sa fonction. Des traces d’un revêtement de même nature étaient par ailleurs encore observables sur les premières assises du parement ouest. Le seul accès observé consistait en un conduit de 0,80 m de largeur et 0,70 m de hauteur, perçant le petit côté nord de la citerne et auprès duquel débouchait un escalier dont l’existence est signalée par un large seuil en grès associé à des bases de piédroits en craie (fig. 10). Le passage permettait sans doute l’entretien de la structure et son alimentation en eau bien que ce dernier point n’ait pas été précisément documenté par la fouille. Une pompe ou tout autre système de puisage venait sans doute alimenter directement la salle des malades. La place de la citerne dans le projet architectural révèle tout l’intérêt porté à l’approvisionnement en eau de qualité par ses concepteurs. Le personnel disposait ainsi d’une réserve, selon toute vraisemblance d’origine pluviale, pouvant être affectée à l’hygiène corporelle des malades, à l’alimentation, à l’entretien des bâtiments comme à la préparation d’eaux médicinales. Les eaux de la rivière Sainte-Catherine toute proche devaient apparaître trop polluées pour de tels usages. Les sondages réalisés dans le cours d’eau à l’occasion des fouilles du « Cœur de Ville » ont montré le rôle de ce canal urbain dans l’évacuation des déchets du quartier depuis au moins le xiiie siècle20.

Fig. 8 Vue de la citerne située sous le bâtiment principal.

Fig. 8 Vue de la citerne située sous le bâtiment principal.

Cl. J.-C. Largillière.

Fig. 9 Relevé de la voûte de la citerne du xve siècle.

Fig. 9 Relevé de la voûte de la citerne du xve siècle.

Relevé N. Cartier, DAO D. Delassus.

Fig. 10 Vue du conduit menant à la citerne. On distingue à gauche la base de l’escalier au-dessus de la voûte de la cave 1.

Fig. 10 Vue du conduit menant à la citerne. On distingue à gauche la base de l’escalier au-dessus de la voûte de la cave 1.

Cl. N. Cartier.

2.1.2. La cave 1

12Placé contre la fondation du gouttereau nord, le second espace se présentait sous la forme d’une cave couverte d’une voûte en berceau, d’à peine 2 m de large (fig. 11). Ses dimensions exactes ne sont pas connues, la structure se prolongeant au-delà de l’emprise fouillée. L’ensemble était là encore construit à l’aide de moellons de craie à l’exception du parement nord, réalisé en blocs de grès soigneusement équarris. Au contact de ce dernier, un niveau de calcaire damé pourrait correspondre au sol d’origine ou à un niveau de préparation et de nivellement préalable à la construction d’un sol. Enfin, sur son petit côté ouest, une porte et un seuil en grès permettaient l’accès depuis l’espace occidental semi-excavé. Aucun élément mobilier n’a malheureusement pu être mis en relation avec sa fonction d’origine. Cette partie de l’édifice était probablement destinée au stockage de denrées ou de petit matériel. Néanmoins, la forte humidité du sous-sol devait certainement limiter les possibilités de conservation, notamment de produits alimentaires périssables au sein de la structure.

Fig. 11 Vue de la cave 1 après la condamnation de la porte et sa transformation en latrines.

Fig. 11 Vue de la cave 1 après la condamnation de la porte et sa transformation en latrines.

Cl. M. Zeebroek.

2.1.3. La pièce semi-excavée

13Un large mur de refend séparait la citerne d’une troisième pièce occupant l’extrémité occidentale du bâtiment (1002M). De manière originale, cette maçonnerie était constituée d’au moins deux arcs de décharge en briques, noyés dans un blocage de mortier de chaux et de blocs de craie. Elle reposait sur une fondation en tranchée comblée par des blocs de calcaire sans liant. Sa face ouest présentait un parement de briques et de moellons de craie en partie détruit par des modifications postérieures. Ces précautions prises pour assurer sa stabilité nous renseignent sur la fonction porteuse de la structure qui devait supporter une cloison structurant le rez-de-chaussée.

14Au cours de la fouille, il est vite apparu que l’ensemble des niveaux de circulation d’origine avait été détruit dans cette partie de l’édifice. Le seul vestige à pouvoir être mis en relation avec l’utilisation de cet espace était une cheminée adossée à la face ouest du refend 1002M (fig. 12). Son contrecœur était constitué de tuiles formant un motif en gradins, complétées par des briques aux angles supérieurs. L’ensemble était encadré par des piédroits en craie arrachés ultérieurement. L’âtre, lui-aussi en briques, surplombait de 80 cm le sol de cave du xviiie siècle, ce qui nous indique que la pièce occupait à l’origine une position semi-excavée avant d’être décaissée pour l’aménagement de la cave 3 (fig. 13).

Fig. 12 Vue de la cheminée dans l’espace semi-excavé.

Fig. 12 Vue de la cheminée dans l’espace semi-excavé.

Cl. É. Di Rosso.

Fig. 13 Relevé de la cheminée.

Fig. 13 Relevé de la cheminée.

Relevé A. Tixador.

2.2. Réaménagements et requalification des espaces du bâtiment principal (phase 2)

2.2.1. Les latrines de la salle des malades (1029M)

15Ce premier état du bâtiment principal eut une durée de vie des plus limitées. La petite cave voûtée fut d’abord condamnée puis comblée par des apports de matière organique associés à d’abondants rejets détritiques (fig. 14). Ces derniers étaient, dans leur grande majorité, constitués de vaisselle de table (céramique, bois) ou d’ustensiles relatifs au soin et à l’hygiène. A contrario, et comme nous le verrons plus loin, les ustensiles de cuisine (marmites, poêlons) sont presque absents du corpus. Tout porte ainsi à croire que la structure a fonctionné comme cuve réceptacle de latrines et dépotoir, associé prioritairement à la « grande salle » où étaient soignés les malades. Les déchets issus des cuisines devaient être majoritairement orientés vers un autre dépotoir, ou évacués directement par les cours d’eau qui encadraient l’établissement. La structure contenait également, mais dans une moindre mesure, des éléments du vêtement, une ceinture en cuir, ou des semelles très cintrées en accord avec la mode des xive et xve siècles. Un carreau de poêle indique l’utilisation de ce mode de chauffage dans le bâtiment principal. Les datations obtenues grâce au mobilier céramique et l’éclairage des sources écrites témoignent d’une utilisation relativement brève de ces latrines qui ne semble pas se prolonger au-delà du xve siècle. Une épaisse couche d’ardoises scellait l’ensemble, confirmant la présence d’une toiture réalisée dans ce matériau. Le mobilier céramique associé à ce remblai date l’abandon définitif de la structure au xviie siècle.

Fig. 14 Pichets et bols à anse dans le comblement des latrines 1029M.

Fig. 14 Pichets et bols à anse dans le comblement des latrines 1029M.

Cl. M. Zeebroek.

2.2.2. Les caves 2 et 3, le couloir

16Les modifications les plus significatives concernèrent l’ancienne citerne et la partie occidentale de l’édifice d’abord occupée par la pièce semi-excavée. La première fut partiellement comblée par des gravats traduisant sans doute des interventions d’ampleur sur le bâti. La pièce, qui avait cependant conservé sa voûte de craie et de briques, fut transformée en cave et reçut à cette occasion un sol constitué de matériaux de qualité à savoir blocs de grès et dalles de pierre bleue (cave 2, fig. 15). Par la suite, le conduit qui perçait le mur nord fut condamné pour former une niche. Cet abandon de la citerne implique une modification de la stratégie d’approvisionnement en eau de la salle des malades. Celui-ci était peut-être dès lors assuré grâce au puits situé dans la cour, visible sur le dessin de 1650 contre le portail de la salle des malades.

Fig. 15 Vue de la cave 2 aménagée dans l’ancienne citerne.

Fig. 15 Vue de la cave 2 aménagée dans l’ancienne citerne.

Cl. A. Tixador.

17À l’ouest du mur de refend 1002M, la cheminée fut détruite et l’espace semi-excavé entièrement décaissé afin d’aménager une cave supplémentaire (cave 3). Ces travaux mirent à nu les fondations du refend qui furent alors masquées par un nouveau parement de briques rouges liées par un mortier sableux verdâtre. Parallèlement, une tranchée de pillage ouvrit un passage d’1,40 m de large dans la fondation du gouttereau nord afin d’aménager un couloir rendant accessibles les sous-sols du bâtiment principal depuis l’extérieur. Ce nouvel axe de circulation était délimité par des murs de briques rouges et par le refend 1002M rénové (fig. 16). Une ouverture fut également créée dans ce dernier, qui semble alors avoir perdu son rôle de mur porteur, afin de desservir la cave aménagée dans l’ancienne citerne. Le sol d’origine du couloir était composé de briques jaunes, dont quelques éléments étaient encore en place.

Fig. 16 Couloir desservant les caves sous le bâtiment principal.

Fig. 16 Couloir desservant les caves sous le bâtiment principal.

On aperçoit dans le sondage, au premier plan, le sol en brique d’origine.

Cl. D. Delassus.

18La cave 3 était divisée en deux pièces par des refends en briques mais seule celle jouxtant le couloir fut observée dans son intégralité. Elle couvrait une superficie d’environ 50 m². Dans son emprise, une couche de mortier sableux verdâtre correspondait vraisemblablement au lit de pose d’un sol construit puis démonté. Le niveau de circulation à l’intérieur de la pièce, comme dans le couloir, avait en effet été rehaussé au cours de l’époque moderne (fig. 17).

Fig. 17 Vue de la cave 3.

Fig. 17 Vue de la cave 3.

Les sols en brique correspondent à l’état du xviiie siècle.

Cl. J.-C. Largillière.

19En dehors des latrines de la salle des malades, les éléments datants sont peu nombreux. La céramique associée à la pose du premier remblai de rehaussement de sol de la cave 3 couvre une fourchette chronologique s’étendant du xive à la première moitié du xvie siècle au plus tard. Le premier sol de briques du couloir reposait sur un lit de pose sableux contenant un fond de cruche daté du xive ou du xve siècle. La chronologie relative apportée par la lecture stratigraphique montre, quant à elle, que le couloir fut aménagé après la transformation de la cave 1 en latrines au cours du xve siècle. Ces quelques éléments, bien que ténus, offrent néanmoins un cadre chronologique cohérent qui semble placer les travaux dans la seconde moitié du xve ou la première moitié du xvie siècle.

2.3. Les bâtiments annexes

2.3.1. Le bâtiment en grès

  • 21 Bisman 2014.
  • 22 Ces derniers n’étaient vraisemblablement pas occupés directement par les sœurs hospitalières mais f (...)

20Les informations concernant les bâtiments annexes au xve siècle sont beaucoup plus minces. Un bâtiment en grès a été mis au jour au nord de l’emprise fouillée (fig. 18). De plan légèrement trapézoïdal, l’édifice couvrait une superficie au sol de 72 m². Son pignon nord, encore debout en 2015, présentait une élévation en grès de près de 7 m de hauteur, percée d’une porte décentrée surmontée d’un arc en plein cintre21. Celle-ci ouvrait sur une cour encadrée par des bâtiments élevés dans la seconde moitié du xiiie siècle ou au xive siècle22 (fig. 5). Si le bâtiment faisait bien partie des possessions de l’hôtel-Dieu au xviiie siècle et accueillait la brasserie de l’hôpital, nous ne pouvons assurer que celui-ci fut bien à l’initiative de sa construction, qui intervint dans la seconde moitié du xive siècle ou au cours du siècle suivant. De même, en l’absence de niveaux d’occupation ou de dépotoirs associés, sa fonction originelle reste indéterminée. Nous nous bornerons donc à souligner l’aspect original de l’édifice dans le paysage urbain valenciennois par l’emploi massif du grès. Il devait, par ailleurs, apporter un aspect à la fois austère et monumental au bâtiment, qui paraît en accord avec une fonction hospitalière.

Fig. 18 Vue du bâtiment en grès depuis le nord.

Fig. 18 Vue du bâtiment en grès depuis le nord.

Cl. D. Delassus.

2.3.2. Les latrines 3349M et le « logement de la directrice »

  • 23 Monnet 1992, p. 12.
  • 24 Brocard 2004, p. 218.

21Situées à proximité du gouttereau nord du bâtiment principal, les latrines 3349M forment une fosse maçonnée carrée d’environ 1,10 m de côté, construite en moellons de craie disposés en appareil régulier (fig. 19). Son fond plat était tapissé d’une couche de sable mais sa faible épaisseur ne nous incite pas à y voir un dispositif de filtrage comme cela pouvait être le cas dans les fosses à fond perdu de la cour Napoléon du Louvre23. Les deux niveaux d’utilisation organiques contenaient un mobilier détritique (céramique, faune, verre) témoignant d’une utilisation comme dépotoir et fosse d’aisance. La confrontation avec les plans du xviiie siècle nous montre que la cuve se situait à cette époque sous un petit bâtiment rectangulaire accolé au gouttereau nord du bâtiment principal, désigné alors comme le logement de la directrice. La construction de celui-ci pourrait donc remonter au xve siècle, d’autant plus que le couloir menant aux caves décrites précédemment semble passer sous cet édifice. Si nous ne pouvons déterminer sa fonction première, la possibilité d’accéder aux caves 2 et 3 depuis ce bâtiment plaide encore une fois pour un espace dédié plus spécifiquement au personnel hospitalier. L’exemple du Saint-Sépulcre de Salins, étudié par Nicole Brocard, où les caves et celliers ferment à clef et restent sous la surveillance des recteurs et sous-recteurs de l’établissement pour protéger les denrées qui y sont conservées, va dans ce sens24.

Fig. 19 Les latrines 3349M en cours de fouille.

Fig. 19 Les latrines 3349M en cours de fouille.

Cl. M. Zeebroek.

2.4. Synthèse pour le cadre architectural

  • 25 Jean Imbert cité dans Mollat 1982, p. 103.
  • 26 AM Valenciennes, 8 JJ A 55.

22Les données récoltées par la fouille permettent de reconstituer les grandes lignes de l’organisation du bâtiment principal de l’hôtel-Dieu au xve siècle. Notons que, sur plusieurs points, elles s’accordent parfaitement avec les sources cartographiques et écrites. En effet, les vestiges mis au jour confirment bien que le bâtiment principal, construit entre 1430 et 1435, formait un vaisseau large de 13 m orienté NO-SE. Contrairement à ce que pourrait laisser penser l’ouvrage de Simon Le Boucq, aucune trace d’un agrandissement du bâtiment n’a été observée. La longueur donnée par les plans modernes, 60 m environ, semble correspondre à celle du bâtiment du xve siècle. Ainsi, l’hôpital paraît bien avoir adopté dès l’origine le plan linéaire de l’ » hôpital-église »25 à nef unique, connu depuis au moins le xiiie siècle (hôtel-Dieu de Tonnerre), et toujours utilisé au xve siècle (bâtiment sur rue de l’hôtel-Dieu de Beaune). Mais l’apport le plus significatif de la fouille concerne l’organisation interne de l’édifice. La position du refend 1002M comme celle de la cheminée murale adossée à ce dernier nous montrent que, dans son état d’origine, la chapelle et la salle des malades n’occupaient pas la totalité de la surface du bâtiment. Une cloison séparait cette dernière d’un troisième espace couvrant une superficie au sol de l’ordre de 165 m² (15 sur 11 m). Cette partie de l’édifice étant semi-excavée, nous pouvons raisonnablement supposer l’existence d’au moins un étage au-dessus de la pièce dotée d’une cheminée. Reste la question de la fonction de cet espace occidental. Bien qu’il nous soit impossible d’être précis en la matière, la proximité de la citerne et l’accès à la cave sont autant d’indices qui évoquent une destination « technique » de cette partie de l’édifice, réservée au personnel hospitalier. L’hypothèse de la présence des cuisines peut être soulevée, comme le laisse entendre une archive de 1452 mentionnant les « eaux et goutieres venant de sur la grande salle et cuisine »26, ce qui permet de supposer la coexistence du dortoir et des cuisines sous le même toit.

  • 27 Sécula 2004, p. 272.
  • 28 Soit une vingtaine de mètres carrés par lit. Mollat 1982, p. 107 ; Brocard 1998, p. 39-94.

23Les dimensions exactes de la salle des malades ne sont pas connues faute de données concernant la profondeur de la chapelle. En supposant un rapport longueur de la chapelle/longueur totale de la salle des malades de 1/4 comme dans la « salle des pôvres » de Beaune27, nous pouvons avancer les chiffres de 32 m sur 11 m pour la salle des malades de Valenciennes et donc une superficie d’environ 352 m². Les vingt lits comptabilisés pour le milieu du xve siècle pouvaient, dans ce cas de figure, disposer de 17,6 m² chacun, un peu en-dessous des estimations citées par Michel Mollat28.

24Cette organisation tripartite de l’espace interne du bâtiment principal semble avoir été rapidement modifiée. D’importants travaux touchèrent aux fondations de la partie ouest de l’édifice, peut-être dès la seconde moitié du xve siècle. La cheminée fut détruite, la pièce semi-excavée remplacée par une cave plus profondément enterrée. Ces modifications rendirent théoriquement possible le décloisonnement de l’espace interne, le refend 1002M ne portant plus de cheminée, et l’extension de la salle des malades vers le nord-ouest, l’espace semi-excavé ayant disparu. Dans les faits, nous disposons bien d’une preuve de la volonté d’agrandir le dortoir des malades en 1468, grâce au don réalisé dans ce but par le comte de Ligne. Un second agrandissement du dortoir est réalisé en 1552 pour l’installation de six lits supplémentaires. Les modifications apportées au bâti correspondent très certainement à un de ces événements visant à augmenter les capacités d’accueil de la « grande salle » au détriment de l’espace occidental et faisant ainsi disparaître l’ancienne distribution sur deux niveaux, qui n’apparaît pas sur le dessin de 1650. Les anomalies dans les jointures de la maçonnerie signalées par Simon Le Boucq et interprétées par lui comme les preuves d’une extension du dortoir résultaient sans doute de ces travaux d’envergure.

2.5. Un modèle pour les hospices de Beaune ?

  • 29 Sécula 2004, p. 162-163.
  • 30 Ibid., p. 390.

25Les liens unissant l’institution charitable et les hospices de Beaune sont explicités dès le xve siècle dans une lettre, anonyme, datant de 1468 ou 1469, soit 25 années après la fondation de l’hôpital bourguignon par Nicolas Rolin. Le document affirme sans détour que « le corps de maison du grant hospital et hostel-Dieu de Beaune a este construit et ediffié à la semblance de cellui de l’ospital de Saint Jaques de Valenciennes »29. Ce « corps de maison » fait sans doute référence au grand bâtiment sur rue qui accueillait entre autres la « salle des pôvres »30. C’est donc plus particulièrement dans l’architecture et l’organisation des deux bâtiments principaux qu’il convient de rechercher d’éventuelles caractéristiques communes. Dans sa thèse portant sur l’architecture de l’hôpital bourguignon, Didier Sécula avait déjà pointé quelques ressemblances entre les deux constructions et ce malgré la faiblesse de la documentation concernant l’édifice valenciennois. Ainsi, les concepteurs des deux bâtiments avaient-ils opté pour un plan linéaire à vaisseau unique prolongé par la chapelle. L’auteur remarque également qu’à Valenciennes comme à Beaune, une porte a été aménagée à l’extrémité de la salle des malades contre la chapelle. La localisation de cette dernière pouvait être déduite depuis l’extérieur grâce à la présence de fenêtres à remplage contrastant avec celles, plus sobres, des salles des malades. Pourtant des différences notables pouvaient être signalées : la place de la flèche ou encore la morphologie des chevets.

  • 31 Ibid., p. 392-393.

26Les données archéologiques permettent à présent d’établir de nouveaux points de comparaison, plus particulièrement en ce qui concerne la distribution des espaces au sein des deux édifices. Sur ce point, l’originalité de l’hôpital du chancelier Rolin réside dans la bipartition du bâtiment principal. Un couloir y sépare en effet la « salle des pôvres » et la chapelle de l’espace communautaire qui occupe le tiers occidental de l’aile sur deux niveaux. Celui-ci abritait un cellier (semi-excavé), le réfectoire, la chambre de la maîtresse et, à l’étage, le dortoir des sœurs. Toujours d’après Didier Sécula, cette organisation inscrit les différentes composantes de l’accueil hospitalier dans un tout harmonieux et cohérent et vise à l’efficacité dans la prise en charge des malades en plaçant les espaces de la communauté hospitalière à proximité du dortoir des malades31.

  • 32 Sécula 2010, p. 334.

27Or, comme nous l’avons vu, une configuration semblable se dessine à Valenciennes où la « grande salle » est prolongée au nord-ouest par l’espace semi-excavé surmonté d’un étage et séparé de la salle des malades par au moins un refend (fig. 20). Depuis cet endroit, il était possible, comme à Beaune, d’accéder à un espace de stockage, sans doute réservé aux hospitalières, et de manière plus hypothétique aux cuisines. Il apparaît donc que le principal emprunt des concepteurs de l’hôtel-Dieu de Beaune à celui de Valenciennes fut cette organisation tripartite de l’espace interne regroupant sous un même toit salle des malades, chapelle et espaces consacrés au travail ou au logement des sœurs hospitalières. Ainsi le groupe de sœurs valenciennoises appelé à Beaune par le chancelier Rolin pour servir le nouvel hôpital put exercer dans un cadre qui lui était en partie familier32.

Fig. 20 Comparaison des plans des bâtiments principaux des hospices de Beaune et de Valenciennes.

Fig. 20 Comparaison des plans des bâtiments principaux des hospices de Beaune et de Valenciennes.

DAO D. Delassus.

3. Soin et accueil des malades

28Les vestiges mobiliers en relation avec l’hôpital du xve siècle proviennent dans leur immense majorité du comblement des latrines 1029M et dans une moindre mesure de la structure 3349M. Leur étude permet de documenter différents aspects du soin à la fin du Moyen Âge : l’alimentation, l’hygiène, et les remèdes administrés. Il convient néanmoins de préciser que les latrines 1029M n’ont pu être fouillées dans leur totalité, le mobilier prélevé ne constitue donc qu’un échantillon des déchets rejetés dans la structure.

3.1. L’alimentation

3.1.1. L’alimentation végétale (M. Derreumaux)

29Les analyses carpologiques permettent de documenter l’alimentation végétale des malades en comparant les résultats obtenus à partir des prélèvements dans les deux fosses de latrines. Il faut toutefois poser dès à présent les limites de cette démarche. Les premières sont inhérentes à la discipline : la carpologie étudie les fruits et les graines ; en contextes humides, elle va essentiellement mettre en évidence la consommation de fruits. Les céréales, légumineuses, légumes-feuilles et légumes-racines ont peu de chance de laisser des carporestes dans les latrines. De plus, au sein même des fruits, certains produisent beaucoup de graines qui sont avalées en même temps que la chair tandis que d’autres produisent peu de graines qui ne sont pas ingérées. Les akènes de fruits rouges et de figue ont ainsi plus de chances d’être retrouvés dans des fosses d’aisance que des noyaux de cerise. Une troisième réserve quant à la mise en évidence d’une éventuelle spécificité de l’alimentation végétale des malades est d’ordre taphonomique : le matériel issu des latrines extérieures est moins bien conservé et une partie des carporestes a pu disparaître.

  • 33 Wiethold 2016.
  • 34 Flandrin 1988 ; Laurioux 2002 ; Mane 2005.
  • 35 Thinard-Morel 2016.

30D’après le matériel carpologique des deux US des latrines 1029M, les fruits consommés par les malades sont variés : pas moins de seize taxons différents ont été identifiés (fig. 21). La figue et la fraise totalisent à peu près 90 % du NMI. Une importance secondaire peut être attribuée aux mûres de ronce, à la merise/cerise, à la griotte, à la prune, à la pêche, à la nèfle et aux fruits du mûrier noir ou blanc. La pomme, la poire, la cornouille, la noisette, la noix et la myrtille ont fait l’objet d’une consommation sporadique. Le spectre de fruits découverts dans les latrines adossées au mur nord de l’hôpital est différent (fig. 21). Les identifications se réduisent à huit taxons. Il s’agit principalement de mûres de ronce, de fraise et de figue qui représentent 85 % du NMI. La consommation de framboise, raisin, Prunoïdées et fruits du mûrier noir ou blanc est assez marquée tandis que la nèfle, la groseille ou le cassis sont très discrets. Les assemblages carpologiques issus des latrines des malades contiennent une plus grande variété de fruits. Toutefois, la moins bonne conservation de la matière organique dans les latrines extérieures explique le plus petit nombre de fruits de son corpus, qui ne témoigne pas d’une alimentation de moins bonne qualité. Au contraire, la présence d’un reste de groseille ou de cassis, dont la consommation ne se démocratise pas avant le xvie siècle33, laisse penser que les utilisateurs de ces latrines bénéficiaient d’une alimentation végétale de grande qualité. Si la différence de proportions s’explique en partie par la taphonomie, la sous-représentation de la figue, dont les akènes sont pourtant résistants à la putréfaction, dans les latrines extérieures pourrait refléter une réelle disparité entre les malades et le personnel de l’hôtel-Dieu. L’usage de la figue comme édulcorant, discret dans les traités culinaires français mais très répandu dans la cuisine médiévale européenne34, pourrait suggérer que l’alimentation des malades était plus sucrée. En effet, d’après les travaux de Janine Thinard-Morel sur l’hôtel-Dieu de Paris à l’époque moderne, les religieuses distribuent aux malades et surtout aux « griefs malades » des douceurs et des fruits, considérés comme des mets de luxe35.

Fig. 21 Importance relative des fruits dans les latrines du xve siècle.

Fig. 21 Importance relative des fruits dans les latrines du xve siècle.

M. Derreumaux.

  • 36 Rambourg 2009.
  • 37 Couplan 1999, p. 42.
  • 38 Derville 2005.
  • 39 Id. 1990 et 2005.

31Les carporestes découverts dans les latrines des malades témoignent également de l’utilisation d’autres végétaux à usages multiples. La consommation de denrées végétales de base ne pose pas question. Notons ainsi la présence de blé nu et de deux à trois légumineuses : le pois et la fève ou la féverole. La présence de graines d’arroche trahit la consommation de ce légume. Il s’agit d’une « pot-herbe », soit une plante dont on mange les feuilles qui entrent dans la composition de potages et de potées, cuites, comme leur nom l’indique, en pot. L’usage des plantes condimentaires qui possèdent souvent des propriétés oléagineuses voire médicinales est parfois plus ambigu. L’aneth, la coriandre, le fenouil et la sarriette peuvent être considérés comme des plantes aromatiques. Le cas des graines du taxon valise moutarde noire/blanche/des champs/navette d’été et du pavot est plus problématique. Les semences attribuées soit aux moutardes, soit à la navette d’été peuvent rentrer dans la composition de la moutarde, que Le Ménagier de Paris classe parmi les sauces non bouillies36, ou relever directement des plats en sauce37, mais sont aussi potentiellement des graines oléagineuses. Les textes confirment la consommation d’huile végétale dans les hôpitaux médiévaux38 : à l’hôpital Saint-Sauveur de Lille, dans les années 1328-1353, les sœurs, les domestiques et les malades recevaient une ration annuelle, éclairage déduit, de 2,9 livres d’huile de navette. L’huile pouvait être produite par l’hôpital lui-même, à partir des récoltes de ses courtils et complétée si besoin par des achats d’huile ou de graines à battre, comme c’était le cas pour le grand hôpital de Béthune ou celui de Gosnay. L’usage du pavot est aussi multiple : il peut agrémenter pains et pâtisseries, mais, comme les moutardes/navette, il sert également à fournir de l’huile à partir de ses graines. Cependant, son huile est dite d’introduction récente dans les cultures d’oléagineuses du nord de la France en 1804 et Alain Derville n’en trouve pas mention dans les sources médiévales de cette même région39. Quant au rôle éventuel du pavot dans la pharmacopée, il sera discuté ci-dessous.

32Les latrines extérieures ont livré un échantillon assez comparable de plantes alimentaires et/ou oléagineuses. Le blé épeautre remplace le blé nu ; la coriandre et la sarriette sont absentes mais une plante aromatique supplémentaire a été identifiée : le céleri. Enfin, les plantes oléagineuses comptent une espèce complémentaire : le chanvre. La probabilité de l’utilisation thérapeutique du chanvre fera également l’objet d’une discussion infra.

  • 40 Durand, Bouby, Chabal et al. 2016.

33Les malades de l’hôtel-Dieu bénéficiaient donc d’une alimentation végétale variée, agrémentée de nombreux fruits, d’aromates et d’au moins un légume-feuille. Certains fruits, notamment ceux du murier noir ou blanc, suggèrent une alimentation de qualité40. La comparaison entre le matériel carpologique issu des deux latrines permet de poser l’hypothèse que l’alimentation des malades serait plus sucrée du fait d’un important usage de la figue séchée comme édulcorant.

3.1.2. Approche de l’alimentation carnée d’après l’étude des ossements issus des latrines (T. Oueslati)

34Les vestiges de consommation proviennent du ramassage à vue pendant la fouille ainsi que du tamisage de prélèvements effectués dans ces deux latrines.

3.1.2.1. Les latrines de la salle des malades

35Les vestiges d’animaux sont très bien conservés. On précisera que les couches profondes (6, 7, 9, 10, 12 et 14) présentent une coloration sombre caractéristique d’une conservation en milieu organique et humide suggérant qu’il s’agit ici d’accumulation de fèces (fig. 22). Au total, 296 restes ont été ramassés lors de la fouille dans 9 US. Il s’agit surtout des restes de bétail, d’oiseaux et de poissons, ainsi que d’animaux fréquentant l’hospice et ses abords, le chat, le chien, l’écureuil et le rat (fig. 23).

Fig. 22 Coupes dans la structure 1029M (cave 1).

Fig. 22 Coupes dans la structure 1029M (cave 1).

En gris, les niveaux d’utilisation des latrines/dépotoir.

Relevé M. Zeebroek.

Fig. 23 Inventaire des restes animaux issus des niveaux du xve siècle des latrines 1029M en fonction du nombre de restes.

Fig. 23 Inventaire des restes animaux issus des niveaux du xve siècle des latrines 1029M en fonction du nombre de restes.

36L’interface entre les couches 3 et 4 rassemble les rejets primaires de deux coqs (un adulte et un jeune) ainsi qu’une phalange d’oie subadulte. Le contexte comprend aussi une épine neurale de pleuronectiforme, un opercule de carpe dont la longueur totale a été estimée à 35,2 cm, un os pariétal de porcelet et une côte de capriné.

37L’assemblage issu de la couche 4 est de taille moyenne. La couleur des os y est plus claire que celle des os des couches plus profondes. De même, les rejets de bétail sont plus fréquents, renvoyant vers des rejets plus détritiques par rapport aux couches sous-jacentes qui sont organiques et plus riches en restes de volaille et de poisson. Ces différences pourraient être liées à la modification du fonctionnement de la structure à partir de la couche 4. On y note une abondance des caprinés qui affichent des stigmates de boucherie caractéristiques comme la désarticulation du tibia par tranchage de la région proximale (fig. 24). La présence de restes de veaux pourrait être un témoignage du début de développement de son élevage à cette époque. Par ailleurs, trois restes de poissons sont présents avec un interopercule de cyprinidé et deux côtes dont une de gadidé. Enfin, une valve de moule témoigne de la consommation de ce mollusque.

Fig. 24 Illustration du mode de dépeçage du gigot de mouton par percussion au couperet traversant la région proximale du tibia (1029-4).

Fig. 24 Illustration du mode de dépeçage du gigot de mouton par percussion au couperet traversant la région proximale du tibia (1029-4).
  • 41 Parmi les vestiges de ce dernier, le crâne présente des alvéoles pathologiques. Cette pathologie se (...)

38Dans le niveau 5, nous sommes en présence de rejets primaires de consommation de coq, d’oie, de pleuronectiforme et de porc. Ce petit assemblage inclut une probable connexion anatomique de coq41. Sur le plan taphonomique, un carpométacarpe d’oie affiche un impact de couperet sur l’articulation proximale, ce qui traduit l’amputation de l’extrémité de l’aile. On en déduit le rejet d’un déchet de préparation d’une carcasse d’oie dont l’abattage aurait pu se dérouler dans l’enceinte de l’hôtel-Dieu.

  • 42 Oueslati 2016.

39L’assemblage du niveau 6 est de taille moyenne, comprenant des rejets primaires de consommation, des éléments de carcasses de trois chats, de quatre rats noirs, d’un chien et d’un écureuil. Les restes de porc comprennent une section de cou composée de deux vertèbres cervicales fendues sagittalement. La fente concerne aussi bien le corps vertébral que le processus épineux, ce qui suggère le partage de la carcasse du porcin en deux moitiés. Un axis de capriné fendu de la même façon conforte le constat de la mise en œuvre de cette technique de partage de la carcasse qui supplante la technique coutumière de fente parasagittale. Les restes d’un chat subadulte et d’un jeune chat attestent du dépouillement des cadavres. L’individu subadulte comprend le crâne et la mandibule avec des stries de couteau (fig. 25). Le jeune chat est représenté par l’os frontal gauche portant deux stries parallèles de couteau. Les membres antérieurs et postérieurs de chat dont le tibia, les fibulas, le calcanéum et les métapodes n’affichent aucune trace en rapport avec le dépouillement. Il est difficile d’expliquer ce qui a motivé le dépouillement de ces deux chats au sein de l’hôtel-Dieu même si la consommation du chat et du chien est avérée en contexte d’habitat du xve siècle à Valenciennes42.

Fig. 25 Tête de chat ayant fait l’objet d’un prélèvement de la peau comme le suggèrent les stries de couteau visibles sur les os frontaux et sur les mandibules (1029-6).

Fig. 25 Tête de chat ayant fait l’objet d’un prélèvement de la peau comme le suggèrent les stries de couteau visibles sur les os frontaux et sur les mandibules (1029-6).

Cl. T. Oueslati.

40Les oiseaux sont dominés par le coq (NR=23). Le pigeon est représenté par un sternum fendu sagittalement dans le cadre de sa consommation et un fémur, tandis que l’oie n’est représentée que par un fragment de carpométacarpe. Les restes de coq comprennent certains os probablement issus d’un même individu, rejets de consommation de ce gallinacé domestique.

41Deux prélèvements, 1029-5 et 1029-9, ont été tamisés. Les restes animaux comprennent un grand nombre de petits os digérés. Il s’agit d’os ingurgités lors de la consommation des pieds de mouton, de cochon et de poulet. Les restes d’oiseaux témoignent aussi de l’ingurgitation du croupion avec les vertèbres caudales et le pygostyle (fig. 26-A) ainsi que des extrémités des ailes de poulet. Les restes de poissons issus du niveau 1029-5 sont dominés par le hareng (fig. 27) avec un minimum de trois individus distingués sur la base des différences de taille avec deux estimations de longueur totale de 15-20 cm, trois de 20-25 cm et deux de 25-30 cm. Le poisson de mer comprend également le merlan, les pleuronectidés et la raie bouclée. Enfin, l’anguille et les cyprinidés représentent les poissons d’eau douce. Au sein des cyprinidés, seule la carpe a été identifiée. Par ailleurs, l’ingestion d’une partie des os des poissons consommés est suggérée par la déformation et la forte dissolution des vertèbres (fig. 26-G et H). Les mammifères sont représentés par des restes de rongeurs (au moins deux souris et un rat noir). De petits fragments digérés non identifiés témoignent aussi de l’ingestion de petits os de mammifères. Enfin, les oiseaux comprennent d’une part des restes digérés de coq (phalanges de l’aile, des pattes et du tronc, fig. 26-C, D et E) et d’autre part trois restes d’un petit volatile de la famille des passériformes (fig. 26-F).

Fig. 26 Effets de la mastication et de la digestion sur le croupion de coq.

Fig. 26 Effets de la mastication et de la digestion sur le croupion de coq.

A- Vertèbres caudales et B- pygostyle, sur C- une côte de volatile, D- une phalange de l’aile de coq, E- les phalanges des pattes, F- un humérus, un ulna et une vertèbre de passériforme, G- des vertèbres de hareng et E- un épihyal de hareng.

Cl. T. Oueslati.

Fig. 27 1029-5.

Fig. 27 1029-5.

Inventaire de la faune issue du tamisage sur la maille de 2 mm.

42L’ichtyofaune du niveau 1029-9 est plus abondante et plus diversifiée (fig. 28). Les effectifs des poissons d’eau douce dominent avec en tête le chabot et la loche franche, suivis par l’anguille. L’estimation du nombre d’individus donne une valeur de trente-quatre pour le chabot, neuf pour la loche et quatre pour les cyprinidés. Au sein du poisson de mer, le hareng est encore une fois en tête et il est accompagné de raie, de merlan et de poisson plat. L’abondance des restes de chabot suggère l’ingestion de poissons complets et la conservation différentielle des éléments les plus résistants notamment la vertèbre supportant la nageoire caudale.

Fig. 28 Inventaire de l’ichtyofaune issue du tamisage de la couche 1029-9.

Fig. 28 Inventaire de l’ichtyofaune issue du tamisage de la couche 1029-9.

3.1.2.2. Les latrines 3349M

  • 43 Oueslati 2016.

43Le niveau 3 (fig. 29) comporte uniquement des rejets primaires de consommation riches en restes d’oiseaux, surtout de coqs représentés par au moins six individus, auxquels s’ajoutent un reste de canard. Les poissons, dont la plie, l’alose et les cyprinidés, ont également été collectés lors de la fouille. Les vertébrés sont dominés par le bœuf, surtout des côtes d’adultes mais aussi de veau. Les côtes d’individus adultes comprennent deux parties proximales et neuf parties moyennes tandis que le veau comprend quatre portions proximales (fig. 30) et sept portions moyennes et distales. Une portion proximale d’une scapula et une autre de tibia, toutes deux issues d’individus immatures, constituent les seuls représentants des membres. Un talus de veau est attesté tandis que les vertèbres comportent deux éléments de cervicales adultes et une thoracique de veau. Les caprinés comprennent des éléments de moitiés de têtes dont un occipital affichant des condyles partiellement brûlés évoquant le rôtissage de la tête (fig. 30) comme cela a été observé sur les fouilles de la rivière Sainte-Catherine à Valenciennes43. Les côtes et les vertèbres fendues sagittalement sont bien attestées et, enfin, un calcanéum et un métacarpe de mouton achèvent cet inventaire des vestiges collectés à vue lors de la fouille. Le tamisage des prélèvements de la couche 3 de ces latrines a livré principalement des restes de harengs avec 153 restes attribués à un minimum de quatre individus.

Fig. 29 Coupe des latrines 3349M.

Fig. 29 Coupe des latrines 3349M.

1 : Abandon, gravats ; 2 : Sable gris, calcaire, mortier ; 3 : Niveau brun organique ; 4 : Niveau organique ; 5 : Sable gris et calcaire.

Relevé M. Zeebroek.

Fig. 30 Côtes de veau et vue occipitale de crâne de mouton portant des stigmates liés au rôtissage de la tête.

Fig. 30 Côtes de veau et vue occipitale de crâne de mouton portant des stigmates liés au rôtissage de la tête.

Cl. T. Oueslati.

3.1.2.3. Discussion

44L’étude de l’alimentation carnée au sein des hospices du Moyen Âge présente un intérêt particulier dans la mesure où les besoins des personnes malades ou convalescentes sont probablement différents du reste de la population.

45La fouille permet de compléter les sources écrites en caractérisant ce qui a été réellement consommé dans un laps de temps relativement court. Outre la composition de l’alimentation carnée, l’étude archéozoologique renseigne sur les animaux fréquentant l’institution et les traces de boucherie ou de digestion.

  • 44 Clavel 2001.
  • 45 Oueslati 2006.

46Dans le cas de l’hôtel-Dieu de Valenciennes, le bétail (bœuf, mouton et porc) est la principale source de viande consommée au xve siècle. Les latrines 1029M se caractérisent par des proportions équilibrées entre les trois taxons avec néanmoins des parts de moutons et de porc relativement importantes en comparaison avec les latrines contemporaines 3349M au sein desquelles les rejets alimentaires sont plus favorables au bœuf et au mouton. On notera la ressemblance entre les assemblages du xve siècle issus des latrines 1029M et ceux des latrines de l’habitat de l’Îlot du cinéma Palace à Valenciennes, avec comme différence une proportion de mouton supérieure à l’hôtel-Dieu. Il faut néanmoins relativiser ce rôle du mouton qui est nettement plus important sur trois sites de Paris datés du xive au xve siècle ainsi qu’à Lille, au château de Courtrai44 (fig. 31). On notera également la forte ressemblance entre les latrines du xvie siècle de l’hospice gantois à Lille45 et les latrines 3349M de l’hôtel-Dieu à Valenciennes. Ainsi, en se restreignant au contexte local, il ressort une alimentation ciblant le bœuf puis le mouton.

Fig. 31 Diagramme ternaire des fréquences de bœuf, de porc et de mouton des assemblages de Valenciennes indiqués par des marqueurs gris (1029, 3349 et 3174 = hôtel-Dieu ; L1012 = Îlot du cinéma Palace), de Lille (HG L04 = hospice gantois, latrines L04 ; château de Courtrai), de Paris indiqués par des marqueurs noirs (Ste-Barbe = Collège Sainte-Barbe ; Cordeliers, réfectoire du couvent des Cordeliers ; Paris Saint-Michel) et à Rennes (hôpital Sainte-Anne).

Fig. 31 Diagramme ternaire des fréquences de bœuf, de porc et de mouton des assemblages de Valenciennes indiqués par des marqueurs gris (1029, 3349 et 3174 = hôtel-Dieu ; L1012 = Îlot du cinéma Palace), de Lille (HG L04 = hospice gantois, latrines L04 ; château de Courtrai), de Paris indiqués par des marqueurs noirs (Ste-Barbe = Collège Sainte-Barbe ; Cordeliers, réfectoire du couvent des Cordeliers ; Paris Saint-Michel) et à Rennes (hôpital Sainte-Anne).

Les effectifs en fonction du nombre de restes ont été placés entre parenthèses.

  • 46 NR3 = total des restes de bœuf, de porc et de caprinés.

47L’alimentation carnée est complétée par les oiseaux de basse-cour, le gibier et le poisson. Les oiseaux sont représentés surtout par le coq (constituant 13,5 % NR346 dans 1029M et qui domine l’assemblage dans les latrines 3349M).

48Les poissons de grande taille proviennent de la pêche en eau douce, avec la grande alose, la carpe, les cyprinidés et de la pêche en mer avec la plie et la sole. L’étude des restes de poissons issus du tamisage a révélé une abondance de très petits poissons d’eau douce témoignant de leur piégeage en rivière et de leur consommation en friture. Il s’agit de chabots, de goujons et de loches franches.

  • 47 Oueslati 2016.
  • 48 Le Hamon 2008, p. 320.
  • 49 Ibid., p. 325.
  • 50 Ibid., p. 326.
  • 51 Ibid., p. 320.

49Le relevé des gestes liés à la préparation des carcasses a permis de souligner des pratiques de boucherie très semblables à celles de l’assemblage contemporain de la rivière Sainte-Catherine, qui a été interprété comme le produit du traitement des animaux par des artisans bouchers spécialisés dont les gestes s’uniformisent à cette période à Valenciennes, à Tourcoing, à Douai et à Lille47. Cela permet d’émettre l’hypothèse d’un approvisionnement en viande depuis des boucheries. Ce résultat n’est pas sans poser de problèmes dans la mesure où, à l’hôtel-Dieu de Douai, il est indiqué qu’il n’y a jamais d’achat de viande de boucherie48 tandis que les autres maisons charitables s’approvisionnent auprès de marchands49. On peut dès lors s’interroger sur le statut de l’hôtel-Dieu de Valenciennes et notamment sur un éventuel fonctionnement différent s’apparentant à d’autres hospices de Douai comme Saint-Thomas par exemple50. Par ailleurs, les archives de l’hôtel-Dieu de Douai nous renseignent sur la part importante des rentes et loyers en nature qui comprennent le porc et la volaille ou encore la production interne avec des bêtes et des potagers51. Cela pourrait expliquer la place particulièrement importante du coq au xve siècle sur notre site relativement aux occupations antérieures à partir des xe-xie siècles.

  • 52 Oueslati 2016, p. 60-61.
  • 53 Clavel inédit.

50Les traces de découpe relevées sur une tête de chat renvoient vers le prélèvement de la fourrure comme cela est attesté à Valenciennes au xve siècle52 ou à Paris (au collège Sainte-Barbe) au xive siècle53.

51Parmi les ressources carnées consommées à l’hôtel-Dieu de Valenciennes, le bœuf puis le mouton paraissent jouer un rôle dominant. Dans la séquence d’occupation diachronique du site depuis les xe-xie siècles, on notera que le mouton atteint sa fréquence la plus élevée au xve siècle. On peut préciser que la sélection des âges d’abattage des moutons porte sur des animaux de réforme probablement issus de la production lainière. La présence de volaille et de poissons montre une certaine diversification, qui répond probablement au calendrier religieux avec les jours de restriction alimentaire. Cette documentation archéozoologique sur les pratiques alimentaires ne prend pas en compte que le repas peut être un signe de distinction entre les pensionnaires, les hospitaliers ou encore les administrateurs. Le mélange des déchets de préparation et de consommation dans les mêmes dépotoirs est susceptible de brouiller les différences entre consommateurs. Néanmoins, la comparaison entre les deux latrines de l’hôtel-Dieu a mis en évidence des nuances dans les rejets de consommation de viande.

52Ainsi, la combinaison des données des fouilles et des archives est susceptible de fournir l’image la plus complète, notamment pour préciser le rôle dominant du pain et des pois dans l’alimentation ainsi que les mécanismes d’approvisionnement et de transformation des produits carnés.

3.2. La vaisselle de table, les ustensiles de cuisine et de stockage

3.2.1. La céramique (M. Huin)

53La vaisselle de table, les ustensiles de cuisine et de stockage, issus des latrines du xve siècle 1029M et 3349M, totalisent 707 tessons céramiques appartenant à au moins 66 individus (latrines 1029M : NR = 642 et NMI = 62 ; latrines 3349M : NR = 65 et NMI = 4). Le mobilier est réparti au sein de sept fabriques en fonction de la couleur de la pâte et des inclusions de chaque tesson (fig. 32). La majorité des céramiques sont en pâte grise (fab. 1). Elles représentent 56 % du lot, contre 37 % pour les pâtes rouges (fab. 4). Les grès sont peu présents (5 %, fab. 6), tout comme les pâtes claires (2 %, fab. 2). Le répertoire de formes est assez diversifié. Il est constitué de treize types (fig. 33).

Fig. 32 Liste des fabriques présentes dans le lot.

Fig. 32 Liste des fabriques présentes dans le lot.

Korpiun 2007, p. 137.

Fig. 33 Tableau de répartition du NMI par forme réparti au sein des différentes fabriques.

Fig. 33 Tableau de répartition du NMI par forme réparti au sein des différentes fabriques.

3.2.1.1. La vaisselle de table

54La vaisselle de table représente la majorité du lot, avec un nombre de 57 individus. Elle se caractérise par les éléments du service de la boisson (NMI = 52) et du repas (NMI = 6). Les céramiques liées à la boisson comprennent une coupelle, des gobelets, des pichets et des cruches, ainsi qu’une tasse polylobée.

  • 54 Roy 1997, p. 134 ; Korpiun 2007, p. 71, 78 ; Challe 2011, p. 301 ; Vincent 2012, p. 30 ; Blamangin, (...)

55Les pichets et les cruches sont les éléments les plus représentés (NMI = 32). Ils sont majoritairement en pâte grise (fab. 1). Quelques exemplaires sont en pâte rouge (fab. 4) ou en grès (fab. 6). Les pichets se caractérisent par un col étroit et cannelé, ainsi que par un profil élancé. Une anse ronde est attachée sur le col et la panse sur chaque objet. Plusieurs types de pichet ont été repérés : lèvre éversée et panse globulaire (fig. 34, 1), lèvre confondue ou éversée et panse ovoïde (fig. 34, 2), lèvre confondue et col concave (fig. 34, 3), col cylindrique évasé vers la lèvre confondue (fig. 34, 4), panse ovoïde et col cylindrique cannelé (fig. 34, 5). Un des pichets en pâte rouge est marqué par des traces de mise au feu sans doute pour réchauffer un liquide (fig. 35). Ces types de pichets ont été retrouvés sur des sites régionaux dans des contextes allant de la seconde moitié du xive au xve siècle54.

Fig. 34 Typologie des céramiques du xve siècle.

Fig. 34 Typologie des céramiques du xve siècle.

1, 2, 3 : Pichets, fabrique 1 ; 4 : Pichet, fabrique 4 ; 5 : Pichet, fabrique 6 ; 6 : Cruche, fabrique 1; 7 : Gobelet, fabrique 1; 8 : Gobelet, fabrique 6 ; 9 : Coupelle, fabrique 6 ; 10 : Tasse à ouverture quadrilobée, fabrique 2, glaçure plombifère brune et verte externe; 11 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère jaune interne; 12 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne; 13 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère jaune interne; 14 : Marmite, fabrique 4, glaçure brune externe; 15 : Poêlon, fabrique 4, glaçure plombifère brune; 16 : Pot à anse, fabrique 1, 17 : Plat, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne; 18 : Plat, fabrique 4; 19 : Couvercle, fabrique 4, 20 : Vase-réserve, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe; 21 : Pot, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe; 22 : Pot à anse en panier, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe.

Dessins N. Cartier, H. Derradj.

Fig. 35 Pichet présentant des traces de mise au feu, latrines 1029M.

Fig. 35 Pichet présentant des traces de mise au feu, latrines 1029M.

Cl. A. Tixador.

  • 55 Korpiun 2007, p. 71 ; Cercy et al. 2008, vol. 1, p. 35, vol. 2, p. 37 ; Clotuche 2015, p. 16.

56Une seule cruche est présente dans le lot. Elle est en pâte grise (fab. 1) et seule la lèvre a été trouvée. Elle est éversée et des cannelures sont visibles sur le départ du col (fig. 34, 6). Ce type de forme est fréquent dans les contextes des xive-xve siècles55.

  • 56 Challe 2011, p. 301 ; Korpiun 2011, p. 280 ; Korpiun 2007, p. 71, 78, 114 ; Lantoine 2019, p. 55-56

57Les gobelets sont également très présents puisqu’ils totalisent 18 individus. Ils sont majoritairement en pâte grise (fab. 1). Quelques exemplaires sont en grès. Ils se caractérisent par leur petite taille, une paroi fine, sans élément de préhension ni bec verseur, et une lèvre le plus souvent droite et en biseau. Les éléments en pâte grise ont une panse tronconique (fig. 34, 7), tandis que les éléments en grès possèdent les caractéristiques des productions des ateliers de Siegburg : un pied festonné et une panse ovoïde cannelée (fig. 34, 8). La datation de ces pièces se situe entre la seconde moitié du xive et le xve siècle56.

  • 57 Korpiun 2007, p. 67 ; Henton 2018, p. 166-167 ; Willot 1999, p. 102-103.

58L’unique exemplaire de coupelle mis au jour dans les latrines 1029M est en grès (fab. 6). Elle se caractérise par sa petite taille et une ouverture proche de deux fois sa hauteur. Cette forme est caractéristique des ateliers de Siegburg ou du Beauvaisis (fig. 34, 9). Sa base étant manquante, le lieu de production ne peut être déterminé. Toutefois, ce type de coupelle apparaît sur les sites régionaux dans des contextes de la seconde moitié du xive et du xve siècle57.

  • 58 Plaisirs et manières de table aux xive et xve siècles 1992, p. 166.

59Un rare exemplaire de tasse quadrilobée est également présent dans le lot. Elle est en pâte claire (fab. 2) et possède une glaçure brune et verte sur sa surface externe (fig. 34, 10). Elle est caractérisée par un fond plat, une panse galbée, un bord droit pincé en forme de trèfle à quatre feuilles et une anse verticale. Un exemplaire similaire a été découvert en région parisienne dans un contexte du milieu du xive siècle58.

60Les écuelles sont au nombre de cinq individus. Elles sont exclusivement en pâte rouge (fab. 4). Elles se caractérisent par un diamètre d’ouverture plus grand que la hauteur totale du récipient, une base plate et deux tenons opposés. Le bord est confondu à inflexion simple déversée, dont le sommet peut être légèrement incurvé, et le parement de la panse est arrondi (fig. 34, 11, 12, 13). Ces écuelles ont une contenance qui varie entre 34 cl et 48 cl. Aucun élément de comparaison n’a été trouvé.

3.2.1.2. Préparation, cuisson et présentation des mets

61Le mobilier céramique lié à la préparation, à la cuisson et à la présentation totalise 6 NMI. Il comprend une marmite, un poêlon, un pot à anse, des plats et un couvercle.

  • 59 Clotuche 2015, p. 21.

62Les plats sont les éléments les mieux représentés de cette catégorie avec deux individus. Il s’agit de formes ouvertes dont le diamètre d’ouverture est bien supérieur à la hauteur du récipient, plates ou légèrement creuses, reposant sur un fond plat ou muni de pieds pincés. Les deux plats trouvés dans les latrines 1029M, en pâte rouge (fab. 4), sont recouverts sur leur surface interne, pour l’un, d’une glaçure plombifère verte et, pour l’autre, d’une glaçure plombifère jaune. Les éléments étudiés ici comportent un marli plus ou moins large (fig. 34, 17, 18). Les deux plats sont de petite taille. Ils sont attribuables au xve siècle, comme ceux retrouvés à Ruisseauville59.

  • 60 Korpiun 2007, p. 95 ; Herbin et al. 2014, p. 37, 43 ; Vincent 2012, p. 54 ; Vincent 2016, p. 108.

63L’unique marmite est en pâte rouge (fab. 4). Sa forme ressemble à celle des marmites en métal : un pot sphérique sur lequel sont ajoutées deux anses opposées, généralement coudées, le tout reposant sur trois pieds fixés sur un fond lenticulaire. Elle est recouverte d’une glaçure brune sur sa surface externe (fig. 34, 14). Des exemplaires similaires ont été mis au jour à Valenciennes et sur d’autres sites régionaux dans des contextes allant de la fin du xive au début du xve siècle60.

  • 61 Notte 2019, p. 57-58 ; Vanwalscappel 2016, p. 192, 194 ; Roy 1997, p. 108.

64Le poêlon est un récipient de forme ouverte, muni d’un manche oblique, généralement creux. Le seul élément découvert dans les latrines 1029M est en pâte rouge (fab. 4) et possède une glaçure sur sa surface interne (fig. 34, 15). Il s’agit d’un poêlon de petite taille. En effet, sa contenance est identique à celle de la plus petite des écuelles, soit 34 cl. De plus, des traces de mise au feu sont présentes sur la partie du poêlon opposée au manche. Il a donc peut-être servi à faire cuire des rations individuelles pouvant être contenues dans les écuelles. Ce type de poêlon a été mis au jour dans des contextes du xve siècle sur plusieurs sites régionaux61.

  • 62 Lançon 2011, p. 90.

65Un pot à anse en pâte grise (fab. 1) a également été trouvé dans les latrines 1029M. Il s’agit d’un pot à panse ovoïde ou globulaire, muni d’une anse verticale dont le départ se fait sur la lèvre et atterrit sur la panse. Il est muni de quatre pieds pincés (fig. 34, 16). Des traces de mise au feu sont visibles sur la panse, à l’opposé de l’anse. Il est attribuable au xve siècle62.

  • 63 Korpiun 2007, p. 95 ; Desoutter 2012, p. 44.

66L’unique couvercle du lot, en pâte rouge (fab. 4), a été découvert dans 1029M. Cette forme est généralement plate avec une anse de préhension ou un bouton sur le dessus (élément manquant ici). Il ne comporte pas de glaçure, mais des traces de suie sont présentes sur son bord (fig. 34, 19). D’autres exemplaires ont été mis au jour dans des contextes allant de la seconde moitié du xive au xve siècle sur les sites régionaux et notamment à Valenciennes même63.

3.2.1.3. Le stockage

67Quelques éléments appartiennent à la catégorie du stockage. Il s’agit d’un vase-réserve, d’un pot et d’un pot à anse en panier.

  • 64 Desoutter 2011, p. 31, 74 ; Vistel 2014, p. 78.

68Le vase-réserve se définit par une forme généralement massive dont la panse est plus large que le diamètre d’ouverture. En pâte rouge (fab. 4), il possède une panse globulaire avec un col oblique et une lèvre munie d’un ressaut. Une glaçure plombifère brune est présente sur la surface externe du pot (fig. 34, 20). Il est attribuable au xve siècle64.

69Un pot a été mis à jour dans les latrines 3349M. Il se caractérise par une forme fermée dont le diamètre d’ouverture est inférieur à la hauteur du récipient. La panse est ici ovoïde, le fond concave, et la lèvre est étirée vers l’extérieur et possède une gouttière sommitale. Il est en pâte rouge (fab. 4) et une glaçure plombifère brune a été apposée sur sa surface externe (fig. 34, 21). Aucun élément de comparaison n’a été trouvé.

  • 65 Caloin 2020, p. 154.

70Au sein des latrines 3349M, un pot à anse en panier en pâte rouge (fab. 4) a également été découvert. Il s’agit d’un pot globulaire ou cylindrique possédant une anse se fixant de façon opposée sur la lèvre. Une glaçure plombifère brune a été appliquée sur la surface externe du pot (fig. 34, 22). Un exemplaire similaire a été trouvé dans un contexte allant de la fin du xve au xvie siècle sur un autre site de Valenciennes65.

3.2.1.4. Une vaisselle de second choix ?

71Parmi les formes présentées ici, plusieurs présentent des déformations : quatre pichets, un gobelet et un pot à anse. Les quatre pichets déformés sont en pâte grise (fab. 1). La déformation se situe principalement sur le bord de la céramique. Elle rend la forme asymétrique : le bord penchant soit vers l’anse, soit vers l’opposé de l’anse. Un des pichets possède sur la panse des traces d’appui contre une surface plane. Le gobelet déformé appartient également à la fabrique 1 (pâte grise). Dans ce cas, l’ouverture est ovale et non circulaire. Enfin, la déformation du pot à anse, lui aussi en pâte grise (fab. 1), se situe également sur le bord du récipient. Il est asymétrique du fait du léger abaissement de la lèvre à plusieurs endroits.

  • 66 Labaune-Jean, Pouille 2012, p. 31.

72Sur la fouille du site hospitalier de la place Sainte-Anne de Rennes, des céramiques déformées ont également été mises au jour au sein d’un dépotoir66. L’hypothèse émise pour la présence de ce type de céramique sur le site est celle d’un approvisionnement à bas prix. À Valenciennes, des revenus insuffisants ont également pu conduire les administrateurs à acquérir une vaisselle de second choix, moins onéreuse.

3.2.2. Le verre (H. Poirier)

73Le mobilier en verre provient également des latrines du xve siècle. Les fragments de verre appartiennent à des éléments de service de table ; le corpus est composé exclusivement de gobelets et de verres à pied ou à tige.

  • 67 Vanriest 2017.

74Les gobelets représentent la majorité des objets en verre du corpus, ce qui s’explique par le fait qu’il s’agit de la forme de verre à boire la plus répandue durant le xve et au début du xvie siècle, avant l’apparition et la diffusion des verres à pied puis à tige durant le xvie siècle67. Pour le xve siècle, il a été possible de dénombrer un NMI de neuf gobelets, retrouvés quasi exclusivement dans une même strate des latrines 3349M.

75Ces gobelets, représentés en grande majorité par leurs fonds, qui sont ici les seuls fragments en état d’être étudiés, comportent des éléments de décoration habituels du xve siècle, c’est-à-dire principalement des arêtes saillantes, étirées verticalement le long de la panse depuis le fond des gobelets, ainsi que des cannelures régulières, elles aussi verticales.

  • 68 Guilhot et al. 1990, n° 11 et n° 12, p. 228.
  • 69 Gubellini, Boniface 2002, p. 164.

76L’élément le mieux conservé du lot est un gobelet archéologiquement complet, à fond circulaire à la piqûre légèrement décentrée (fig. 36). Le verre est d’une grande finesse (environ 0,05 cm) et d’une couleur bleu-vert très pâle. Il est lui aussi décoré de côtes saillantes partant de la base et montant parallèlement vers le bord avec un léger mouvement de spirale vers la droite. Ce relief est surmonté d’une bande lisse à environ 0,7 cm du bord. Ce type de verre se retrouve dans l’est de la France (dans le contexte d’une verrerie de Metz68) mais aussi dans un environnement plus proche de l’hôtel-Dieu de Valenciennes, à l’hospice gantois de Lille69.

Fig. 36 Gobelet à côtes.

Fig. 36 Gobelet à côtes.

Dessin H. Poirier.

  • 70 Site de la rue Taison : Guilhot et al. 1990, fig. 1, n° 12, p. 233.
  • 71 Barrera 1992, n° 6 fig. 48, p. 79-80.

77Le lot de verres à pied ou à tige est issu, là aussi de manière très homogène, des latrines 1029M. Les fragments permettent d’isoler sept individus minimum. Parmi les éléments dont l’état de conservation permet de déceler des décors précis, on remarque des fragments de tiges ornées d’un cordon de verre formant une bague à mi-hauteur (c’est le cas notamment pour un fragment remarquable par sa couleur vert menthe), ou bien un pied de verre à tige décoré de grosses côtes aplaties, identique à un type de verre inventorié à Metz70, lui aussi daté du xve siècle. Un autre fragment de coupe de verre à tige présente des côtes très saillantes à sa base, ce qui permet de le relier à un type de verre du xve siècle retrouvé dans d’autres contextes comme les fosses de la Cour Napoléon du Louvre71 (fig. 37).

Fig. 37 Fragments de verre à tige.

Fig. 37 Fragments de verre à tige.

Cl. A. Tixador.

78Dans l’ensemble, les éléments de service en verre retrouvés à l’hôtel-Dieu de Valenciennes présentent des formes et des décors bien identifiés d’un point de vue typologique et chronologique, et leur présence ne surprend pas dans le contexte étudié.

3.2.3. La vaisselle en bois (C. Favero)

79Les huit éléments de vaisselle en bois sont représentés par six écuelles et deux tranchoirs, tous issus des latrines de la salle des malades 1029M.

3.2.3.1. Les écuelles (fig. 38)

Fig. 38 Mobilier en bois des latrines 1029M.

Fig. 38 Mobilier en bois des latrines 1029M.

1, 2, 3, 4, 5, 6 : Écuelles ; 7, 8 : Tranchoirs.

Dessins, DAO M. Laugero.

80L’écuelle 1, tournée dans du bois d’aulne, est archéologiquement complète et peu déformée. Son diamètre est de 17,6 cm pour une hauteur de 3,5 cm. La forme très évasée et peu profonde repose sur une base légèrement concave tandis que le bord est droit et fin. Les stries de tournage sont bien visibles sur les parois internes et externes à l’exception de la base et du fond. Ce type d’écuelle à paroi fine pouvait sans doute être directement porté à la bouche pour la consommation de mets liquides ou utilisé avec une cuillère.

81L’écuelle 2 est archéologiquement complète mais présente une légère déformation due à un effet d’écrasement dans un comblement humide. Son diamètre d’ouverture est de 16,5 cm, sa hauteur conservée est de 4,5 cm. Il s’agit d’une écuelle circulaire à pied très court et à bord droit et fin. Cette pièce présente des traces de façonnage au tour, laissant apparaître des stries profondes, absentes néanmoins de la base et du fond. La paroi interne, irrégulière, est marquée par un ressaut. Sa capacité est estimée à 0,25 l environ.

82L’écuelle 3 présente globalement les mêmes caractéristiques bien que son fond soit plus épais. Le diamètre d’ouverture est égal à 20 cm pour une hauteur de 4 cm. La pièce est très déformée.

83L’écuelle 4 présente un diamètre d’ouverture de 15 cm pour un diamètre de la base de 5 cm et une hauteur maximale de 4,5 cm. Cette pièce fragmentée mais archéologiquement complète présente des traces de façonnage au tour, laissant apparaître des stries grossières à espacements réguliers sur les parois intérieures et extérieures. Il s’agit d’une écuelle circulaire à bord droit et pied court.

84Les écuelles 5 et 6 sont incomplètes. Elles possèdent des pieds courts, les parois sont largement ouvertes et présentent également des stries de tournage.

  • 72 Mille, Deborde et Dumontet 2018.
  • 73 Tixador, Huvelle et Korpiun 2003, p. 18.

85De manière générale, ce type d’écuelle à pied peu marqué se rencontre dans les contextes archéologiques du nord de la France dès le xiie siècle72. À Valenciennes, des individus morphologiquement très proches ont été découverts dans des latrines du milieu ou de la seconde moitié du xive siècle73. Leur forme très ouverte n’est pas sans rappeler les écuelles remplies de soupe ou de bouillies du Repas de noces (1568) ou de la Visite à la ferme (1597) de Pieter Brueghel l’Ancien.

3.2.3.2. Les tranchoirs

  • 74 Mille, Couderc, Fouillet et al. 2014.

86Le premier tranchoir (fig. 38, 7), réalisé en chêne, est complet et possède un diamètre de 27 cm pour une hauteur de 1,5 cm. La partie centrale circulaire est plane tandis que la zone périphérique a été creusée au tour sur une largeur de 5,5 cm. Le marli de 2 cm de largeur est encadré par deux liserés décoratifs en léger relief. Une perforation centrale correspond peut-être à la marque de l’axe du tour. Quatre stries concentriques sont observables au revers. L’emploi du chêne semble original pour la réalisation de ce type d’objet plus fréquemment réalisé dans des bois d’érable ou de hêtre74. Aucune trace d’utilisation n’est visible mais l’objet était recouvert d’une couche assez épaisse de matière organique dont l’analyse est présentée plus loin dans le chapitre consacré aux remèdes.

87Le second tranchoir (fig. 38, 8) est un fragment de disque à bord biseauté de 0,4 cm d’épaisseur, dont une face présente des traces de découpe. Le bord, irrégulier, ne permet pas de déterminer le diamètre de la pièce.

3.3. Hygiène et soin du corps

3.3.1. Les ustensiles du soin (M. Huin, A. Tixador, D. Delassus)

  • 75 Korpiun 2007, p. 21.
  • 76 Id. 2016, p. 72-73.
  • 77 Id. 2007, p. 21.
  • 78 Missale et horae ad usum Fratrum Minorum, BnF, ms. lat. 757, fol. 337v.

88Les bassins et les bols à anse (fig. 39) constituent la majorité des ustensiles liés au soin et à l’hygiène du corpus. Par bassin nous désignons ici un type de récipient caractérisé par une ouverture plus large ou égale au diamètre de la panse et un épaulement haut. Le fond, concave, repose sur trois ou quatre pieds pincés75. Les exemplaires découverts lors de la fouille sont au nombre de huit, sept sont issus des latrines 1029M contre un seulement de la structure 3349M, ce qui en fait la quatrième forme la mieux représentée dans les latrines de la salle des malades. Sur le plan technologique, ces exemplaires sont tous réalisés en pâte grise sans revêtement glaçuré (fab. 1). Leurs dimensions sont très variables, les diamètres à l’ouverture étant compris entre 21,6 et 38,7 cm. Deux d’entre eux présentent une déformation au niveau de la panse ou de la lèvre. Si nous plaçons cette catégorie d’objet dans les ustensiles du soin, son usage en cuisine est également possible pour mélanger ou laver des aliments76. Au sein de notre corpus, le lien avec l’eau est suggéré par des dépôts de calcaire sur au moins trois récipients (fig. 40). Ce tartre affecte de manière homogène les parois internes jusqu’à 4 ou 5 cm sous le bord. Dans d’autres cas, des concrétions plus diffuses et présentes également sur la surface extérieure des céramiques pourraient résulter des conditions d’enfouissement en milieu humide. L’association de cette forme aux « tiernis à laver »77 mentionnés par les textes paraît être l’hypothèse la plus probable. Ces objets pouvaient être employés pour certains soins corporels à l’image des bassins plats métalliques représentés dans les sources iconographiques78.

Fig. 39 Bassins et pots à anse des latrines 1029M et 3349M.

Fig. 39 Bassins et pots à anse des latrines 1029M et 3349M.

1, 2, 3, 4, 5 : Bassins, fabrique 1; 6, 7 : Bols à anses, fabrique 4, glaçure plombifère brune interne; 8 : Bol à anse miniature, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne.

Dessins N. Cartier, H. Derradj.

Fig. 40 Tartre recouvrant les parois d’un bassin des latrines 1029M ?

Fig. 40 Tartre recouvrant les parois d’un bassin des latrines 1029M ?

Cl. D. Delassus.

89Avec vingt exemplaires issus des latrines de la salle des malades, les bols à anse constituent la deuxième forme la plus fréquemment rencontrée. Il s’agit de formes ouvertes, posées, comme les bassins, sur trois ou quatre pieds pincés et dotées d’une anse verticale. Leur diamètre d’ouverture, compris entre 16 et 22,5 cm, est supérieur à leur hauteur située entre 11,2 et 15,6 cm. Cependant, un individu se distingue par ses proportions réduites qui traduisent sans doute une fonction particulière (fig. 39, 8). À l’exception de trois exemplaires réalisés en pâte grise (fab. 1), l’écrasante majorité a été obtenue par cuisson oxydante (fab. 4), et présente une glaçure plombifère verte ou brune. Les bols possèdent une lèvre en bandeau et une panse galbée (fig. 39, 6) ou un bord évasé (fig. 39, 7). Dans ce dernier cas, la glaçure des parois internes est souvent partielle. Remarquons également que cinq individus présentent des fonds déformés. Ce type de récipient, fréquemment rencontré sur les sites d’habitats contemporains, peut porter des traces de mise au feu, témoignages de son utilisation en cuisine. Dans les latrines de l’hôpital, de tels stigmates ne concernent toutefois qu’un seul individu, vraisemblablement posé face à une flamme afin d’en réchauffer le contenu. De plus, ces objets présentent de fortes similitudes avec les pots de chambre plus tardifs découverts à Valenciennes sur le même site. Ces observations ainsi que le contexte de découverte nous conduisent donc à privilégier l’hypothèse d’une utilisation principale mais non exclusive en tant que pot de chambres à l’usage des malades ne pouvant se rendre aux latrines.

  • 79 Korpiun et al. 2017, p. 58.

90Le biberon (fig. 41) découvert dans les latrines 1029M est en pâte rouge (fab. 4). Sa morphologie est proche de celle du pichet à la seule différence qu’un bec tubulaire est attaché sur la panse. Il est en partie recouvert d’une glaçure verte sur sa surface externe. L’objet pouvait être utilisé auprès des malades ayant des difficultés à s’alimenter. Notons qu’un exemplaire de ce type a été mis au jour dans un contexte d’habitat attribué au xve siècle, place de la Barre à Valenciennes79.

Fig. 41 Le biberon.

Fig. 41 Le biberon.

Dessin N. Cartier, H. Derradj.

91La pince à épiler (fig. 42) est réalisée dans un alliage cuivreux (L. : 4,7 cm. ; l. : 0,7 cm. ; ép. : 0,6 cm). Chacune des branches porte un poinçon contenant la légende « AVE M[…] », correspondant au début de la Salutation angélique.

Fig. 42 La pince à épiler.

Fig. 42 La pince à épiler.

Cl. A. Tixador.

  • 80 Mille 2008.

92Le seul peigne en bois (fig. 43) provenant des latrines de la salle des malades est incomplet (L. : 8 cm ; l. : 5,1 cm ; ép. : 0,8 cm). Il s’agit d’une pièce biconvexe à deux rangées de dents. L’extrémité cintrée présente des facettes de taille. Des traces de sciage sont également visibles entre les dents. L’objet correspond au type C1 défini par Pierre Mille et reconnu dans des contextes datés de la fin du xiie siècle jusqu’au xive siècle80.

Fig. 43 Le peigne.

Fig. 43 Le peigne.

Dessin N. Cartier, H. Derradj.

3.3.2. Les contenants pharmaceutiques et cosmétiques (H. Poirier, C. Favero, D. Delassus)

  • 81 Kern 1990, p. 104.
  • 82 Mille et al. 2014.
  • 83 Alexandre-Bidon 2013, p. 43.

93Le premier contenant, très lacunaire, est une boîte cylindrique en érable découverte dans les latrines 1029M (fig. 44, 1). L’ouverture présente une feuillure indiquant un système de fermeture par encastrement. Quelques traces de taille sur la paroi externe révèlent que l’objet a été partiellement taillé avec un outil plat. Un couvercle de boîte, en bois tourné et à languette d’encastrement, a été découvert dans le même contexte (fig. 44, 2). Compte tenu de ses dimensions, celui-ci ne peut néanmoins pas être associé à la boîte précédemment décrite. Ce type d’objet semble assez fréquent dans les dépotoirs de la fin du Moyen Âge. À Strasbourg, une boîte cylindrique a été mise au jour dans des latrines du xive siècle et contenait un onguent81. En milieu hospitalier, des exemplaires ont été découverts dans les latrines du début du xvie siècle de l’hôtel-Dieu de Tours82. L’association entre les boîtes cylindriques et le domaine médical et cosmétique transparait également dans les sources iconographiques notamment dans une version du xve siècle du Livre des simples médecines. Ces boîtes, aisément reconnaissables, y sont utilisées pour contenir céruse, sel, sel ammoniac et amidon83.

Fig. 44 Contenants pharmaceutiques et cosmétiques.

Fig. 44 Contenants pharmaceutiques et cosmétiques.

1 : Boîte cylindrique en bois; 2 : Couvercle de boîte cylindrique en bois; 3 : Flacon en verre à décor de « plume d’oiseau »; 4 et 5 : Aspersoirs en verre.

Dessins N. Cartier, H. Derradj, H. Poirier.

  • 84 Selon le terme employé dans Newman 1987, p. 75.
  • 85 Foy et Sennequier 1989, n° 284, p. 274.
  • 86 Gubellini, Boniface 2002.
  • 87 Foy et Sennequier 1989, n° 284, p. 274.
  • 88 Deloffre et al. 1991.
  • 89 Motteau 1981, p. 96.
  • 90 Le Boulanger, Labaune-Jean 1999, p. 20-23.

94Un flacon à panse lisse, cylindrique et légèrement cintrée dans sa partie basse, est muni d’un col court à lèvre arrondie infléchie vers l’extérieur (fig. 44, 3 et fig. 45). Le verre est de teinte vert-jaune. Il est décoré d’un filet d’émail noir opaque appliqué avant la fabrication de la forme puis étiré en accolade à la pointe, en coupant le filet alternativement vers le haut puis vers le bas. Ce décor de « plume d’oiseau » (combed decoration84) est répandu durant l’Antiquité puis repris par les fabriques vénitiennes au xvie siècle, marquant l’influence italienne sur les productions verrières en Europe85. Il apparaît sur une aiguière du xvie siècle des latrines de l’hospice gantois à Lille86, un verre bitronconique de la première moitié du xvie siècle à Châlons-sur-Marne87 ou encore à Beauvais à la fin du xve ou au début du xvie siècle88, ainsi que sur des gobelets de la fin du xve siècle à Tours89 et à Quimper90. La présence d’un flacon de ce type dans les latrines interroge en raison de la qualité d’exécution de l’objet, de son unicité et des hypothèses possibles quant à son usage (conservation d’huiles ou de produits pharmaceutiques ?).

Fig. 45 Flacon à décor de « plume d’oiseau ».

Fig. 45 Flacon à décor de « plume d’oiseau ».

Cl. A. Tixador.

  • 91 Ce type d’objet porte également le nom de glass (ou perfume) sprinkler, de qumqum ou encore de omom(...)

95Deux éléments remarquables au sein du corpus présenté ici ont permis d’identifier des exemplaires d’aspersoirs91, issus de l’UE 1029-6 (xve siècle). Le premier consiste en la moitié supérieure du récipient sous la forme d’une panse globulaire (⌀ 8 cm), aux flancs légèrement aplatis, et d’un goulot conique étiré et aminci à son extrémité (h. 7 cm, fig. 46). L’ouverture du goulot est plate et très étroite (0,1 cm). Le goulot est caractérisé par un léger renflement à sa base, au niveau de la rupture marquée par la panse (fig. 44, 5 et 46). Le verre, bien conservé malgré une très légère irisation superficielle, est d’une teinte vert pâle presque incolore. On remarque également de très nombreuses petites bulles dans le verre. Le deuxième aspersoir est un fond refoulé avec une trace de pontil et présente lui aussi une panse globulaire aux flancs légèrement aplatis et d’un diamètre maximal de 7,8 cm (fig. 44, 4). Là aussi, le verre est teinté d’une nuance très pâle de vert et présente également de très nombreuses bulles. Dans les deux cas, la paraison soufflée est d’une grande finesse (0,1 cm d’épaisseur) et dénuée de décor.

Fig. 46 Aspersoir.

Fig. 46 Aspersoir.

Cl. A. Tixador.

  • 92 Tyson 2013, p. 72.
  • 93 Ibid., p. 98.
  • 94 Blackmore et Tyson 2013, p. 81.
  • 95 Thomas 2009, p. 37.
  • 96 Alexandre-Bidon 2013, p. 86.

96Ce type d’objet, lié au monde arabe médiéval, est initialement produit en Syrie à partir du xiie siècle, puis en Égypte. Son usage est alors réservé à l’aspersion d’eau de rose et d’huiles parfumées, notamment dans le cadre des rituels encadrant l’hospitalité au sein du foyer ou lors de cérémonies religieuses. Au xvie siècle, des aspersoirs décorés sont également produits à Venise à destination du marché oriental92. Ces objets sont donc particulièrement rares sur les sites médiévaux d’Europe occidentale connus à ce jour. Des exemplaires ont néanmoins été découverts à Londres, issus de contextes situés chronologiquement entre le xiie et le xvie siècle. Sur les fouilles de Plantation Place, un fragment d’aspersoir originaire du Moyen-Orient ou de l’Espagne musulmane a été trouvé dans une fosse d’aisance utilisée au cours du xve et au début du xvie siècle93. La même structure a livré un alambic et de nombreux albarelli en provenance du Moyen-Orient et d’Italie, petits récipients habituellement identifiés comme pots à épices ou à onguent. Tous ces objets, liés à la sphère médicale, peuvent avoir appartenu à un apothicaire s’approvisionnant en ingrédients dans le pourtour méditerranéen94. La découverte de deux aspersoirs en contexte hospitalier à Valenciennes tend à prouver l’utilisation de ce type d’objet dans le cadre de soins thérapeutiques et hygiéniques dans l’Occident médiéval. L’hôtel-Dieu devait s’approvisionner en produits pharmaceutiques auprès d’apothicaires au fait des pratiques moyen-orientales. Ces objets pouvaient être livrés à l’hôpital avec leur contenu d’origine, ou réemployés par l’apothicaire pour délivrer ses propres préparations. Quant au contenu lui-même, il pourrait s’agir d’eau parfumée, comme l’eau de rose, dont l’usage est largement répandu à la fin du Moyen Âge pour la toilette ou dans les préparations médicales95. De manière générale, la forme est tout indiquée pour administrer une substance à petite dose, à l’instar des collyres que les médecins prescrivaient en gouttes96. Quoi qu’il en soit, les aspersoirs montrent l’influence des pratiques hygiéniques issues du monde arabe sur la composition du matériel hospitalier et peut-être également sur la nature des remèdes administrés.

3.4. Identification des remèdes d’après la carpologie et l’analyse des biorestes

3.4.1. Les plantes médicinales (M. Derreumaux)

  • 97 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990.
  • 98 Ibid.
  • 99 Ibid.
  • 100 Couplan 1999.

97Il est délicat de mettre en évidence l’usage de plantes médicinales à partir des restes carpologiques. En effet, les parties utilisées dans la pharmacopée n’incluent pas nécessairement les fructifications. L’administration de remèdes à base de feuilles, racines ou fleurs n’est pas décelable dans notre matériel. Certaines plantes identifiées dans le corpus possèdent cependant des propriétés médicinales qui ont pu être mises à profit pour soigner les malades de l’hôtel-Dieu. Comme cela a été évoqué dans le paragraphe dédié à l’alimentation végétale, les principes aromatiques des plantes condimentaires se doublent souvent d’une action thérapeutique. Ainsi, les fruits du fenouil sont utilisés pour leur vertus galactagogues, eupeptiques (qui facilitent la digestion), carminatives (qui facilitent l’expulsion des gaz intestinaux) et oestrogènes (qui provoque l’ovulation)97. Les fruits de l’aneth possèdent quant à eux d’importantes propriétés médicinales : ils sont diurétiques, antibactériens, fongicides et facilitent la digestion98. Les graines de coriandre, riches en linalol à l’action carminative, stomachique et antiulcéreuse, sont utilisées contre les crampes d’estomac99. Enfin, les feuilles de sarriette facilitent la digestion, notamment des légumineuses100.

  • 101 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990, p. 257.

98La jusquiame noire, identifiée dans les latrines des malades, est une plante sauvage qui n’a pas d’usage alimentaire mais qui est régulièrement retrouvée dans ce type de structure. Comme beaucoup d’espèces de la famille des Solanacées, la jusquiame noire est toxique par son action sur le système nerveux. Elle contient en effet trois alkaloïdes : la hyosciamine, l’atropine et la scopolamine. Ses feuilles sont utilisées contre la chorée, la maladie de Parkinson et les tremblements en général, mais aussi comme antiasthmatique, antisécrétoire, mydriatique et analgésique local en usage externe101. L’usage de la jusquiame noire comme plante médicinale est fort probable.

  • 102 Zohary, Hopf et Weiss 2012 ; Salavert 2010.
  • 103 Warolin 2010.
  • 104 Vivier 2014.
  • 105 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990.
  • 106 Juan-Tresseras et Villalba 1999.
  • 107 Warolin 2010.
  • 108 Ibid.

99Deux autres taxons ont pu servir à des fins médicinales mais leur usage mérite discussion : le pavot et le chanvre. Les modalités de mise en culture du pavot (Papaver somniferum) font encore l’objet de recherches ; il semblerait que, bien qu’originaire des régions côtières de l’ouest de la Méditerranée, le pavot ait été mis en culture au sixième millénaire en Europe occidentale102. Deux variétés existent à l’heure actuelle, sans que l’on sache quand celles-ci se différencient. Le pavot noir ou œillette – la variété adaptée à nos climats – a été traditionnellement utilisé dans la pharmacopée : les décoctions de tête de pavot étaient utilisées pour calmer les enfants en bas âge et la tisane de pavot un remède fréquent avant son interdiction en 1911103. L’œillette est actuellement cultivée en France pour produire de la paille de pavot vert comportant un fragment de tige et la capsule immature, afin d’en extraire par processus chimique les alcaloïdes dont la morphine104. Toutefois, l’œillette est surtout cultivée pour son huile. En effet, ses graines contiennent 40 % d’huile alors que ses capsules ont une teneur très faible en alcaloïdes (0,50 à 0,80 % de la matière sèche), soit une quantité bien inférieure à celle de la variété actuelle à graine blanche dite à opium qui ne pousse pas sous nos climats105. On appelle « opium » le latex séché du pavot. On trouve trace de sa consommation dès le Néolithique grâce à la mise en évidence de traces d’opium sur des dents, en Espagne, à Can Tintorer106. Au Moyen Âge, l’opium entre dans la composition d’électuaires et notamment la thériaque107. Il s’agit d’un produit qui n’est pas à la portée de toutes les bourses : il existe bien une thériaque du pauvre mais qui ne contient pas d’opium, uniquement de la myrrhe, de la gentiane, du laurier et de l’aristoloche serpentaire108. L’utilisation du pavot en tant que tisane est envisageable, bien que, dans le cadre d’un usage thérapeutique, la capsule ne soit pas récoltée à maturité. Ainsi, les graines de pavot identifiées dans les latrines des malades témoignent plus probablement de préparations alimentaires de type pains ou pâtisseries.

  • 109 Zohary, Hopf et Weiss 2012.
  • 110 Toulemonde, Zech-Matterne et Bandelli 2017.
  • 111 Boulen et Zech-Matterne à paraître.
  • 112 Ibid.
  • 113 Zohary, Hopf et Weiss 2012.
  • 114 Jédrusiak 2016, p. 292.
  • 115 Dioscoride, Matière médicale, I.42 ; Galien De la faculté des médicaments simples, XII.8 ; Oribase, (...)
  • 116 Jédrusiak 2016 ; Boulen et Zech-Matterne à paraître.
  • 117 André 1985, p. 47.

100Le chanvre (Cannabis sativa) est originaire d’Asie centrale109, mais des vestiges archéologiques témoignent de sa présence en Europe dès le premier âge du Fer, sous la forme de fragments de tissus110 et de graines dès le ve siècle avant notre ère111. Ces indices de la culture du chanvre sont toutefois très sporadiques jusqu’au xe siècle de notre ère. Les découvertes de carporestes se multiplient par la suite et les taux de chanvre/houblon dans les diagrammes polliniques deviennent significatifs d’une culture de chanvre112. En plus de la production d’huile et de fibres textiles, le chanvre et plus spécifiquement ses graines, appelées chènevis, peuvent nourrir la volaille et servir d’appât pour les poissons. Quant à l’usage du chanvre comme stupéfiant, il est provoqué par le tétrahydrocannabinol (THC) qui est issu d’une variété particulière souvent dénommée Cannabis indica qui ne pousse que dans les régions chaudes et n’a été découvert des occidentaux qu’au xviie siècle113. L’utilisation du chanvre à usage thérapeutique a cependant été évoquée par Florian Jédrusiak à propos des akènes observés en concentration élevée dans un puits du ive siècle de notre ère, dans l’agglomération de Châteaubleau (Seine-et-Marne)114. Si l’usage médicinal du Cannabis est effectivement attesté par les sources antiques115, il s’agit plutôt de médecine grecque, en Méditerranée orientale. En Europe occidentale, seul Pline l’Ancien, dans son Histoire naturelle (XX, 97) fait référence aux vertus médicinales du chanvre. De plus, malgré les références récurrentes à ces auteurs antiques116, la traduction proposée par Jacques André117 pour les textes de Dioscoride, Oribase et Pline l’Ancien n’est pas chanvre (Cannabis sativa) mais mauve faux-chanvre (Althaea cannabina L.) et l’usage médicinal du chanvre pendant l’Antiquité reste sujet à caution. La médecine médiévale qui se réfère aux textes antiques n’utilise le chanvre qu’en usage externe et le doute sur la plante réellement utilisée (Cannabis sativa ou Althea cannabina) persiste.

101En conclusion, l’utilisation du chanvre en tant que plante médicinale peut être écartée et celle du pavot sous forme de tisane demeure hypothétique, la capsule n’étant généralement pas récoltée à maturité. L’usage médicinal des plantes aromatiques – aneth, coriandre, fenouil, sarriette – peut être évoqué. Enfin, la jusquiame noire est la seule espèce dont le rôle dans la pharmacopée ne peut être dénié. Ainsi, d’après l’étude carpologique, avec toutes les réserves quant au type de restes exploités, au xve siècle, l’hôtel-Dieu ne semble pas mettre en œuvre une pharmacopée particulière et ne délivre aux malades que des remèdes domestiques.

3.4.2. Les analyses des biorestes du tranchoir en bois et d’une céramique des latrines (D. Frère, M. Rageot, D. Barbier-Pain)

  • 118 Garnier 2019.
  • 119 Ces MNP sont issus d’organismes variés : algues, champignons, cyanobactéries, invertébrés… et se re (...)
  • 120 Miras et al. 2018 ; Barbier-Pain et al. à paraître.
  • 121 Regert, Guerra 2015, p. 175-184.
  • 122 Comme cela a déjà été mis en valeur : Barbier-Pain, Miras, Silhouette et al. 2019.

102Les analyses concernent deux artefacts provenant des latrines : le tranchoir en bois (fig. 47) et deux fragments de l’embouchure d’un récipient en céramique fine vernissée (fig. 48). Les objectifs des analyses sont simples, à savoir en premier lieu identifier les matériaux organiques composant les macrorestes biologiques et en second lieu restituer la fonction des objets. Sachant qu’il n’existe pas de méthodologie générale pouvant s’adapter à tout type d’objet et tout type de contexte, les moyens analytiques doivent toujours être ciblés en prenant en compte la nature des objets, de leurs résidus et de leurs contextes, mais aussi les problématiques et les hypothèses formulées. Pour l’archéologie des produits biologiques, les ORA (Organic Residue Analyses) sont désormais couramment mises en œuvre pour l’identification des biomarqueurs d’une matière organique complexe qui est souvent le résultat de mélanges de matériaux animaux et végétaux divers ayant fait l’objet d’une ou de plusieurs transformations (broyage, séchage, fermentation, chauffage, etc.). Les analyses peuvent ainsi permettre non seulement d’obtenir des informations sur les composants d’un produit biologique mais aussi sur certains procédés techniques de transformation118. Deux méthodes complémentaires sont utilisées afin de révéler et d’identifier les restes de matériaux végétaux et produits biologiques d’origine animale et végétale, d’une part la palynologie couplée à la recherche des microfossiles non polliniques (MNP)119 et, d’autre part, la chimie organique (GC-MS). La première permet d’identifier les pollens et autres microfossiles d’origine végétale (comme les spores de champignons par exemple) ou d’origine animale (comme des œufs de parasites intestinaux)120 et la seconde d’isoler et caractériser différents biomarqueurs moléculaires caractéristiques de produits de la ruche, produits laitiers, boissons fermentées, huiles végétales, résines et goudrons végétaux, matières animales diverses dont les graisses sous-cutanées121. Les deux analyses sont complémentaires, le recours à la palynologie/MNP pour le tranchoir en bois étant motivé par la possibilité que la substance résineuse recouvrant une partie de sa surface ait pu capter et conserver des pollens et autres microfossiles122.

Fig. 47 Tranchoir.

Fig. 47 Tranchoir.

Cl. A. Tixador.

Fig. 48 Creuset.

Fig. 48 Creuset.

Cl. A. Tixador.

  • 123 Tranchoir : prélèvement de 3 g pour les analyses chimiques et de 2,43 g pour les analyses palynolog (...)

103Le plat circulaire a été interprété, lors de la fouille, comme « tranchoir » et la céramique comme « creuset ». La paroi externe du tranchoir est recouverte par endroits d’une couche compacte, homogène et assez épaisse de biorestes de couleur jaune-marron s’apparentant visuellement à une résine. Les parois internes des deux tessons céramiques sont marquées par la présence, de 1 à 2 cm en dessous du bord de l’embouchure, d’une matière organique noire très peu épaisse, non homogène, d’aspect granuleux, s’apparentant visuellement à un résidu de cuisson. Les prélèvements mécaniques ont été faits au moyen de scalpels stériles123 sachant que les macrorestes des deux fragments céramiques sont insuffisants pour permettre une étude pollinique.

  • 124 Réalisées par Delphine Barbier-Pain au laboratoire « Extrapols » du campus de Tohannic de l’univers (...)
  • 125 Protocole mis au point par Frenzel 1964, repris par Bastin et Coûteaux 1966, puis perfectionné par (...)

104Les analyses palynologiques124 ont été effectuées en prenant un maximum de précautions, sous hotte dans une pièce confinée, pour éviter toute contamination par des pollens actuels. Cette étape primordiale de l’analyse palynologique vise à extraire et isoler les grains de pollen fossiles de leur milieu de conservation afin de permettre ultérieurement leur comptage et leur détermination. Les échantillons ont été traités suivant les protocoles faisant intervenir des bains d’acides (HCl, HF) et de base (NaOH) entrecoupés de rinçages et centrifugations ainsi qu’une acétolyse en fin de protocole125. Les résultats sont maigres, ne faisant apparaître qu’un unique grain de pollen de type Pinus. La substance traitée s’est transformée en « pâte » collante lors des premières phases des traitements chimiques, faisant penser à une substance « résineuse ». Il est à noter que l’analyse palynologique/MNP n’a curieusement pas donné des résultats conformes à ce que l’on attend de comblements des latrines (céréales, œufs de vers parasites intestinaux, spores de champignons coprophiles, etc.), à la différence des analyses faites à partir du contenu d’une coupe céramique des latrines médiévales de la place de la Barre à Valenciennes.

  • 126 Réalisées par Maxime Rageot à l’Eberhard Karls Universität de Tübingen dans le cadre d’une collabor (...)
  • 127 Voir Mottram et al. 1999 ; Garnier, Valamoti 2016 ; Rageot et al. 2016 pour les paramètres détaillé (...)
  • 128 Mottram et al. 1999.
  • 129 Rageot et al. 2016 ; Garnier et Valamoti 2016 ; Rageot et al. 2021.

105Les analyses chimiques126 des résidus organiques de surface ou imprégnés dans la matrice argileuse de la céramique ont principalement été réalisées à l’échelle moléculaire à la suite de leur extraction et analyse par chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse (GC-MS). Les méthodes d’extraction et instrumentales sont adaptées aux familles chimiques127. En effet, leur étude repose principalement sur l’identification des lipides incluant diverses familles chimiques comme les n-alcanes (cires d’abeille et végétales), cétones (cires végétales et graisses animales chauffées), diacides (dégradation des huiles/graisses mais également de la lignine et subérine) et acides gras (présents dans la plupart des substances naturelles), triglycérides (huiles végétales/graisses animales), esters à longue chaîne (cires d’abeille et végétales), stérols (nombreuses plantes, graisses animales terrestre et marines), di- et triterpènes (résines, goudrons végétaux). Enfin, l’étude de composés non solubles dans les solvants organiques, en particulier les acides et diacides à courte chaîne (présents en quantité importante dans les produits fruitiers, dont viticoles) est également intégrée. Les prélèvements obtenus par scalpels stériles ont été conditionnés dans du papier aluminium puis dans des tubes en verre stériles. Ils ont ensuite été traités suivant un protocole mis au point dans les années 1990128 et amélioré par la suite pour extraire la matière lipidique des macrorestes ainsi que des tessons céramiques qui ont pu s’imprégner de matière organique tout au long de leur utilisation, voire au niveau des autres étapes de la chaîne opératoire-fabrication, par exemple129.

  • 130 La contamination plastique est due au fait que les deux tessons étaient en contact direct avec le s (...)
  • 131 Les graisses animales ont été identifiées dans le récipient céramique grâce à une série d’acides gr (...)
  • 132 Une série d’esters palmitiques à nombre pair d’atomes de carbone compris entre 34 et 40 ont été dét (...)
  • 133 Argant, Boucher, Frère et al. 2012, p. 489 et 500.

106De la matière organique a été détectée dans tous les échantillons étudiés (fig. 49). Cependant, la présence de phtalates, issus des contaminations de plastiques lors des conditionnements, a été observée dans chacun d’entre eux. Ils sont particulièrement importants dans les deux échantillons des fragments céramiques, masquant pour partie le signal archéologique130. Ces deux fragments du même récipient ont livré des graisses animales dont l’assemblage moléculaire semble correspondre à des produits issus de la cuisson de graisses de ruminant131. Sur l’un des fragments, la présence de cire végétale peut témoigner d’une denrée végétale qui ne peut-être spécifiée (légumes, céréales, fruits ?)132. Notons que ces résultats sont très proches de ceux que nous avons obtenus de l’analyse chimique de céramiques avec encroûtement noir visible provenant de l’habitat médiéval de Wandignies-Hamage133.

Fig. 49 Synthèse des résultats des analyses chimiques.

Fig. 49 Synthèse des résultats des analyses chimiques.
  • 134 Au sein de l’échantillon provenant du tailloir, les analyses GC-MS ont permis de détecter des bioma (...)
  • 135 Aucun composé carboxylique à chaîne courte, présents en quantités relativement élevées dans les pro (...)

107Les analyses chimiques ont mis en évidence la présence de goudron de pin134 (c’est-à-dire de la poix), de cire végétale, d’huile végétale et de graisse de ruminant. La présence de produits viticoles n’a pas été attestée135.

  • 136 L’huile végétale détectée en chimie moléculaire peut correspondre à de véritables huiles extraites (...)

108Pour le plat en bois, les analyses chimiques et polliniques nous orientent vers un contenu formé d’une poix de pin qui a sans aucun doute été appliquée à la surface (vu les caractéristiques de la couche d’épaisseur homogène et régulière). Les analyses chimiques détectent de même de la graisse animale et de l’huile végétale136. S’il s’agit d’un tranchoir, comme cela a été proposé par les archéologues, celui-ci a sans doute servi à découper de la viande mais aussi à hacher des végétaux comme des légumes ou légumineuses. Quelle est la fonction de la couche goudronneuse recouvrant sa surface de travail ? Le goudron de pin ou poix peut faire office d’agent antiseptique de protection du bois ou d’agent de saveur, donnant un goût fortement résiné aux aliments. Connaissant le contexte de découverte, l’hypothèse la plus vraisemblable est celle que le tranchoir était utilisé pour la préparation de recettes médicinales tenant compte du fait que les anciens pharmacologistes présentent la poix comme une véritable panacée, aux usages thérapeutiques diversifiés. Le creuset a été utilisé pour un usage culinaire, à savoir la cuisson de parts de ruminant mélangées à des végétaux (céréales, légumes, fruits ?).

Conclusion

  • 137 D’après Dankwart Leistikow cité par Nicole Brocard : « La tâche du maître d’œuvre consiste à combin (...)

109La fouille de l’hôtel-Dieu de Valenciennes a démontré une véritable volonté d’efficacité dans l’accueil et le soin des malades au sein de l’institution au xve siècle. Celle-ci se matérialise très concrètement dans le projet originel qui inclut dans un seul bâtiment la chapelle, la salle des malades et des espaces techniques comme la cave et la citerne. Par son plan, l’hôpital de Valenciennes conciliait les exigences du sacré et celles relatives au soin du corps137. Les « pauvres malades » bénéficiaient ainsi du secours de la religion, tandis que les sœurs hospitalières évoluaient dans un cadre architectural visiblement pensé pour faciliter leurs tâches quotidiennes. Ce modèle fut sans doute jugé efficient par les contemporains puisqu’il inspire quelques années plus tard les concepteurs du bâtiment sur rue des hospices de Beaune.

  • 138 Saunier 1993, p. 163.
  • 139 . Ibid., p. 187-198.

110Pour Annie Saunier, « la recherche d’un confort matériel, le respect des soins d’hygiène élémentaires et le recours à une alimentation abondante et variée forment les bases du traitement hospitalier »138. Au sein de l’hôtel-Dieu, l’hygiène semble avoir fait partie des préoccupations des constructeurs de l’hôpital qui prirent soin de placer une citerne au plus près du dortoir des malades. Cette précaution assurait l’accès à une eau de qualité quand les cours d’eau environnants servaient surtout de dépotoirs aux riverains. Concernant le régime, les malades semblent avoir bénéficié d’une alimentation variée marquée par une grande diversité de fruits et semble-t-il assez sucrée. L’achat de fruits secs comme les figues, considérés comme particulièrement revigorants, apparaît d’ailleurs régulièrement dans les comptes hospitaliers de la France du nord139. L’approvisionnement en viande ciblait prioritairement le bœuf puis les moutons de réforme sans doute issus de la production lainière.

  • 140 . Ibid., p. 193.
  • 141 . Burri, Alifriqui, Bun et al. 2018.
  • 142 . Saunier 1993, p. 193.
  • 143 . Burri, Alifriqui, Bun et al. 2018.

111L’identification des remèdes reste, quant à elle, délicate. Une seule plante médicinale, la jusquiame noire, a été identifiée avec certitude bien que d’autres taxons, fenouil, aneth, coriandre, sarriette, aient pu être utilisés pour leurs vertus thérapeutiques. C’est aussi le cas du pavot que les hospitaliers de Beauvais cultivaient dans leur cimetière140. L’utilisation du goudron de pin (ou poix) pour la réalisation d’emplâtres ou d’onguents est également très probable même si cette matière pouvait être ingérée par les malades141. Ce type de produit est souvent cité dans les traités médicaux depuis l’Antiquité et se trouve également dans les achats de l’hôtel-Dieu de Paris au xvie siècle142. Les goudrons de pin sont d’ailleurs toujours utilisés dans la médecine traditionnelle en Turquie et au Maroc comme antiseptiques, anti-inflammatoires, antiparasites, antifongiques et antibactériens143.

112De manière générale, le mobilier ne montre pas de spécificités propres au milieu hospitalier et la plupart des objets identifiés se rencontrent tout aussi bien en contexte d’habitat ou dans les dépotoirs urbains valenciennois. Les aspersoirs font néanmoins figure d’exception. Ces objets, extrêmement rares en contexte archéologique, témoignent de relations – certainement indirectes – entre l’hôpital et le pourtour méditerranéen. À côté des remèdes domestiques fabriqués par les hospitalières, l’hôtel-Dieu devait acquérir des eaux médicinales préparées par des apothicaires locaux ou importées. L’influence des pratiques hygiéniques issues du monde arabe trouve ici une illustration concrète dans la composition du matériel hospitalier.

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Notes

1 Cette première occupation est matérialisée par des fosses, fossés et vestiges de bâtiments sur poteaux dont les plans sont malheureusement très lacunaires. Néanmoins, ces structures témoignent de l’apparition de ce « vieux-bourg » à l’origine de la ville médiévale. Il faut attendre la seconde moitié du xiiie ou le xive siècle pour voir l’apparition d’un habitat en pierre, élevé sur cave, le long des actuelles rues Derrière-la-Tour et des Hospices.

2 Bavard, Boudrot 1881, p. 11.

3 AM Valenciennes, 8 JJ A 1.

4 Brocard 2004, p. 207.

5 Révillion 2004, p. 154.

6 Mollat 1982, p. 100.

7 AM Valenciennes, 8 JJ A 52.

8 AM Valenciennes, 8 JJ A 6.

9 AM Valenciennes, 8 JJ A 6.

10 AM Valenciennes, 8 JJ A 10.

11 Une lettre anonyme de 1468-1469 indique que la « salle des pôvres » des hospices de Beaune abritait plus de lits que la salle des malades de Valenciennes. Cette dernière comptait donc a priori moins de trente lits à cette époque, Sécula 2004, p. 163.

12 AM Valenciennes, 8 JJ A 8.

13 Saunier 1993, p. 7.

14 Le Boucq 1978, p. 220.

15 Ibid.

16 AD Nord, 57 Fi 119.

17 Plan de 1790 (AM Valenciennes, 3 O 2 feuille 37).

18 Plan dressé en 1804 et reproduit en 1937 dans une brochure anonyme intitulé Les établissements hospitaliers de Valenciennes.

19 Machelart 2009, p. 77.

20 . Tixador, Huvelle et Korpiun 2003, p. 62.

21 Bisman 2014.

22 Ces derniers n’étaient vraisemblablement pas occupés directement par les sœurs hospitalières mais faisaient partie des « maisons » appartenant à l’institution en 1709 (AD Nord, 57 Fi 119).

23 Monnet 1992, p. 12.

24 Brocard 2004, p. 218.

25 Jean Imbert cité dans Mollat 1982, p. 103.

26 AM Valenciennes, 8 JJ A 55.

27 Sécula 2004, p. 272.

28 Soit une vingtaine de mètres carrés par lit. Mollat 1982, p. 107 ; Brocard 1998, p. 39-94.

29 Sécula 2004, p. 162-163.

30 Ibid., p. 390.

31 Ibid., p. 392-393.

32 Sécula 2010, p. 334.

33 Wiethold 2016.

34 Flandrin 1988 ; Laurioux 2002 ; Mane 2005.

35 Thinard-Morel 2016.

36 Rambourg 2009.

37 Couplan 1999, p. 42.

38 Derville 2005.

39 Id. 1990 et 2005.

40 Durand, Bouby, Chabal et al. 2016.

41 Parmi les vestiges de ce dernier, le crâne présente des alvéoles pathologiques. Cette pathologie serait liée à une inflammation ou à une possible infection par un parasite : Dobney, Irving et Jaques 1996, p. 36.

42 Oueslati 2016.

43 Oueslati 2016.

44 Clavel 2001.

45 Oueslati 2006.

46 NR3 = total des restes de bœuf, de porc et de caprinés.

47 Oueslati 2016.

48 Le Hamon 2008, p. 320.

49 Ibid., p. 325.

50 Ibid., p. 326.

51 Ibid., p. 320.

52 Oueslati 2016, p. 60-61.

53 Clavel inédit.

54 Roy 1997, p. 134 ; Korpiun 2007, p. 71, 78 ; Challe 2011, p. 301 ; Vincent 2012, p. 30 ; Blamangin, Vincent 2011, p. 271-272.

55 Korpiun 2007, p. 71 ; Cercy et al. 2008, vol. 1, p. 35, vol. 2, p. 37 ; Clotuche 2015, p. 16.

56 Challe 2011, p. 301 ; Korpiun 2011, p. 280 ; Korpiun 2007, p. 71, 78, 114 ; Lantoine 2019, p. 55-56.

57 Korpiun 2007, p. 67 ; Henton 2018, p. 166-167 ; Willot 1999, p. 102-103.

58 Plaisirs et manières de table aux xive et xve siècles 1992, p. 166.

59 Clotuche 2015, p. 21.

60 Korpiun 2007, p. 95 ; Herbin et al. 2014, p. 37, 43 ; Vincent 2012, p. 54 ; Vincent 2016, p. 108.

61 Notte 2019, p. 57-58 ; Vanwalscappel 2016, p. 192, 194 ; Roy 1997, p. 108.

62 Lançon 2011, p. 90.

63 Korpiun 2007, p. 95 ; Desoutter 2012, p. 44.

64 Desoutter 2011, p. 31, 74 ; Vistel 2014, p. 78.

65 Caloin 2020, p. 154.

66 Labaune-Jean, Pouille 2012, p. 31.

67 Vanriest 2017.

68 Guilhot et al. 1990, n° 11 et n° 12, p. 228.

69 Gubellini, Boniface 2002, p. 164.

70 Site de la rue Taison : Guilhot et al. 1990, fig. 1, n° 12, p. 233.

71 Barrera 1992, n° 6 fig. 48, p. 79-80.

72 Mille, Deborde et Dumontet 2018.

73 Tixador, Huvelle et Korpiun 2003, p. 18.

74 Mille, Couderc, Fouillet et al. 2014.

75 Korpiun 2007, p. 21.

76 Id. 2016, p. 72-73.

77 Id. 2007, p. 21.

78 Missale et horae ad usum Fratrum Minorum, BnF, ms. lat. 757, fol. 337v.

79 Korpiun et al. 2017, p. 58.

80 Mille 2008.

81 Kern 1990, p. 104.

82 Mille et al. 2014.

83 Alexandre-Bidon 2013, p. 43.

84 Selon le terme employé dans Newman 1987, p. 75.

85 Foy et Sennequier 1989, n° 284, p. 274.

86 Gubellini, Boniface 2002.

87 Foy et Sennequier 1989, n° 284, p. 274.

88 Deloffre et al. 1991.

89 Motteau 1981, p. 96.

90 Le Boulanger, Labaune-Jean 1999, p. 20-23.

91 Ce type d’objet porte également le nom de glass (ou perfume) sprinkler, de qumqum ou encore de omom.

92 Tyson 2013, p. 72.

93 Ibid., p. 98.

94 Blackmore et Tyson 2013, p. 81.

95 Thomas 2009, p. 37.

96 Alexandre-Bidon 2013, p. 86.

97 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990.

98 Ibid.

99 Ibid.

100 Couplan 1999.

101 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990, p. 257.

102 Zohary, Hopf et Weiss 2012 ; Salavert 2010.

103 Warolin 2010.

104 Vivier 2014.

105 Bezanger-Beauquesne, Pinkas, Torck et al. 1990.

106 Juan-Tresseras et Villalba 1999.

107 Warolin 2010.

108 Ibid.

109 Zohary, Hopf et Weiss 2012.

110 Toulemonde, Zech-Matterne et Bandelli 2017.

111 Boulen et Zech-Matterne à paraître.

112 Ibid.

113 Zohary, Hopf et Weiss 2012.

114 Jédrusiak 2016, p. 292.

115 Dioscoride, Matière médicale, I.42 ; Galien De la faculté des médicaments simples, XII.8 ; Oribase, Encyclopédie médicinale, IV.1, IV.20, IV.21 et IV. 31.

116 Jédrusiak 2016 ; Boulen et Zech-Matterne à paraître.

117 André 1985, p. 47.

118 Garnier 2019.

119 Ces MNP sont issus d’organismes variés : algues, champignons, cyanobactéries, invertébrés… et se retrouvent conservés dans les préparations polliniques.

120 Miras et al. 2018 ; Barbier-Pain et al. à paraître.

121 Regert, Guerra 2015, p. 175-184.

122 Comme cela a déjà été mis en valeur : Barbier-Pain, Miras, Silhouette et al. 2019.

123 Tranchoir : prélèvement de 3 g pour les analyses chimiques et de 2,43 g pour les analyses palynologiques. Fragment céramique 1 : prélèvement d’1,5 g pour les analyses chimiques. Fragment céramique 2 : prélèvement d’1 g pour les analyses chimiques.

124 Réalisées par Delphine Barbier-Pain au laboratoire « Extrapols » du campus de Tohannic de l’université Bretagne Sud, dépendant du laboratoire TEMOS (UMR 9016).

125 Protocole mis au point par Frenzel 1964, repris par Bastin et Coûteaux 1966, puis perfectionné par Juvigné 1973, 1974.

126 Réalisées par Maxime Rageot à l’Eberhard Karls Universität de Tübingen dans le cadre d’une collaboration scientifique avec l’université Bretagne Sud.

127 Voir Mottram et al. 1999 ; Garnier, Valamoti 2016 ; Rageot et al. 2016 pour les paramètres détaillés.

128 Mottram et al. 1999.

129 Rageot et al. 2016 ; Garnier et Valamoti 2016 ; Rageot et al. 2021.

130 La contamination plastique est due au fait que les deux tessons étaient en contact direct avec le sachet plastique dans lequel ils étaient conditionnés.

131 Les graisses animales ont été identifiées dans le récipient céramique grâce à une série d’acides gras saturés à nombre pair et impair d’atomes de carbone compris entre 14 et 18. Cet assemblage inclut les acides pentadécanoïques et heptadécanoïques linéaires et ramifiés qui sont connus pour être formés dans l’intestin par synthèse bactérienne, et peuvent donc être attribués aux graisses animales des ruminants (Dudd, Evershed 1999 ; Regert 2011). La présence d’acide octadécénoïque C18:1 pourrait résulter d’huile végétale ou de la biohydrogénation des graisses alimentaires qui se produit dans le rumen des ruminants (Evershed et al. 1997). La chauffe des graisses animales semble attestée par la présence d’ester du cholestérol (produit de la chauffe d’acides gras et de cholestérol).

132 Une série d’esters palmitiques à nombre pair d’atomes de carbone compris entre 34 et 40 ont été détectés. L’assemblage ne correspond pas à celui de la cire d’abeille et est à rapprocher d’extraits végétaux provenant de cires épicuticulaires de fruits, fleurs et/ou de feuilles (Garnier, Dodinet 2021, p. 125-128).

133 Argant, Boucher, Frère et al. 2012, p. 489 et 500.

134 Au sein de l’échantillon provenant du tailloir, les analyses GC-MS ont permis de détecter des biomarqueurs de Pinaceae (l’acide déhydroabiétique en particulier). Les quantités plus importantes d’acide pimarique par rapport à son isomère l’acide isopimarique ainsi que la présence des acides α- et β-séco-déhydroabiétique permettent de préciser qu’il s’agit d’un produit issu du pin (Helwig, Monahan, Poulin 2008 ; Rageot 2015). La combinaison de ces marqueurs avec un assemblage d’hydrocarbures diterpéniques caractéristiques (par exemple rétène ; 18-norabiéta-8,11,13-triène ; 19-norabiéta-8,11,13-triène et Simonellite) et d’acide diterpéniques méthylés est associée aux goudrons de pin (Connan et al. 2002 ; Egenberg et al. 2002 ; Connan, Nissenbaum 2003 ; Hjulström, Isaksson, Hennius 2006).

135 Aucun composé carboxylique à chaîne courte, présents en quantités relativement élevées dans les produits fruitiers, notamment viticoles (acides tartrique et malique), n’a été détecté malgré une extraction ciblée.

136 L’huile végétale détectée en chimie moléculaire peut correspondre à de véritables huiles extraites pour être utilisées en cuisine ou en pharmacologie, mais aussi à un témoignage de plantes riches en graisses végétales qui imprègnent la surface du récipient ou du support en bois ou en céramique quand elles sont cuisinées. Voir Garnier, Dodinet 2021, p. 129-138.

137 D’après Dankwart Leistikow cité par Nicole Brocard : « La tâche du maître d’œuvre consiste à combiner le corps du bâtiment hospitalier avec les constructions consacrées au culte, à concilier parfaitement les exigences du sacré et du profane dans un édifice dont l’unité doit être aussi grande que possible », Brocard 2004.

138 Saunier 1993, p. 163.

139 . Ibid., p. 187-198.

140 . Ibid., p. 193.

141 . Burri, Alifriqui, Bun et al. 2018.

142 . Saunier 1993, p. 193.

143 . Burri, Alifriqui, Bun et al. 2018.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 Localisation de l’opération archéologique sur le cadastre actuel.
Crédits DAO D. Delassus.
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Titre Fig. 2 Localisation de l’hôtel-Dieu et emprise de l’opération (en rouge), sur le plan de la ville en 1767.
Crédits DAO D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-2.jpg
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Titre Fig. 3 Bâtiment principal de l’hôtel-Dieu en 1650 dans l’Histoire ecclésiastique de la ville et comté de Valenciennes par Simon Le Boucq, prévôt.
Crédits Médiathèque Simone Veil de Valenciennes, Ms. 673, p. 545.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-3.jpg
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Titre Fig. 4 L’hôtel-Dieu au xviiie siècle d’après le plan dressé entre 1709 et 1767 conservé aux Archives départementales du Nord.
Crédits AD Nord, 57 Fi 119 ; DAO D. Delassus.
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Titre Fig. 5 Localisation des structures archéologiques sur le plan de 1790.
Crédits Document réalisé sur la base des superpositions de plans de François Bisman, Bisman 2014 ; DAO D. Delassus.
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Titre Fig. 6 Photogrammétrie des vestiges du bâtiment principal.
Crédits Photogrammétrie M. Laugero.
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Titre Fig. 7 Plan des structures archéologiques en relation avec le bâtiment principal et ses abords.
Légende La place des latrines 3349M dans ce phasage n’est pas assurée.
Crédits DAO D. Delassus.
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Titre Fig. 8 Vue de la citerne située sous le bâtiment principal.
Crédits Cl. J.-C. Largillière.
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Titre Fig. 9 Relevé de la voûte de la citerne du xve siècle.
Crédits Relevé N. Cartier, DAO D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-9.jpg
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Titre Fig. 10 Vue du conduit menant à la citerne. On distingue à gauche la base de l’escalier au-dessus de la voûte de la cave 1.
Crédits Cl. N. Cartier.
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Titre Fig. 11 Vue de la cave 1 après la condamnation de la porte et sa transformation en latrines.
Crédits Cl. M. Zeebroek.
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Titre Fig. 12 Vue de la cheminée dans l’espace semi-excavé.
Crédits Cl. É. Di Rosso.
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Titre Fig. 13 Relevé de la cheminée.
Crédits Relevé A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 95k
Titre Fig. 14 Pichets et bols à anse dans le comblement des latrines 1029M.
Crédits Cl. M. Zeebroek.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 3,9M
Titre Fig. 15 Vue de la cave 2 aménagée dans l’ancienne citerne.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-15.jpg
Fichier image/jpeg, 3,8M
Titre Fig. 16 Couloir desservant les caves sous le bâtiment principal.
Légende On aperçoit dans le sondage, au premier plan, le sol en brique d’origine.
Crédits Cl. D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-16.jpg
Fichier image/jpeg, 1,6M
Titre Fig. 17 Vue de la cave 3.
Légende Les sols en brique correspondent à l’état du xviiie siècle.
Crédits Cl. J.-C. Largillière.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-17.jpg
Fichier image/jpeg, 4,0M
Titre Fig. 18 Vue du bâtiment en grès depuis le nord.
Crédits Cl. D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-18.jpg
Fichier image/jpeg, 3,2M
Titre Fig. 19 Les latrines 3349M en cours de fouille.
Crédits Cl. M. Zeebroek.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-19.jpg
Fichier image/jpeg, 4,0M
Titre Fig. 20 Comparaison des plans des bâtiments principaux des hospices de Beaune et de Valenciennes.
Crédits DAO D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-20.jpg
Fichier image/jpeg, 80k
Titre Fig. 21 Importance relative des fruits dans les latrines du xve siècle.
Crédits M. Derreumaux.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-21.jpg
Fichier image/jpeg, 178k
Titre Fig. 22 Coupes dans la structure 1029M (cave 1).
Légende En gris, les niveaux d’utilisation des latrines/dépotoir.
Crédits Relevé M. Zeebroek.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-22.jpg
Fichier image/jpeg, 94k
Titre Fig. 23 Inventaire des restes animaux issus des niveaux du xve siècle des latrines 1029M en fonction du nombre de restes.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-23.jpg
Fichier image/jpeg, 293k
Titre Fig. 24 Illustration du mode de dépeçage du gigot de mouton par percussion au couperet traversant la région proximale du tibia (1029-4).
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-24.jpg
Fichier image/jpeg, 187k
Titre Fig. 25 Tête de chat ayant fait l’objet d’un prélèvement de la peau comme le suggèrent les stries de couteau visibles sur les os frontaux et sur les mandibules (1029-6).
Crédits Cl. T. Oueslati.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-25.jpg
Fichier image/jpeg, 642k
Titre Fig. 26 Effets de la mastication et de la digestion sur le croupion de coq.
Légende A- Vertèbres caudales et B- pygostyle, sur C- une côte de volatile, D- une phalange de l’aile de coq, E- les phalanges des pattes, F- un humérus, un ulna et une vertèbre de passériforme, G- des vertèbres de hareng et E- un épihyal de hareng.
Crédits Cl. T. Oueslati.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-26.jpg
Fichier image/jpeg, 1,5M
Titre Fig. 27 1029-5.
Légende Inventaire de la faune issue du tamisage sur la maille de 2 mm.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-27.jpg
Fichier image/jpeg, 167k
Titre Fig. 28 Inventaire de l’ichtyofaune issue du tamisage de la couche 1029-9.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-28.jpg
Fichier image/jpeg, 82k
Titre Fig. 29 Coupe des latrines 3349M.
Légende 1 : Abandon, gravats ; 2 : Sable gris, calcaire, mortier ; 3 : Niveau brun organique ; 4 : Niveau organique ; 5 : Sable gris et calcaire.
Crédits Relevé M. Zeebroek.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-29.jpg
Fichier image/jpeg, 57k
Titre Fig. 30 Côtes de veau et vue occipitale de crâne de mouton portant des stigmates liés au rôtissage de la tête.
Crédits Cl. T. Oueslati.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-30.jpg
Fichier image/jpeg, 1017k
Titre Fig. 31 Diagramme ternaire des fréquences de bœuf, de porc et de mouton des assemblages de Valenciennes indiqués par des marqueurs gris (1029, 3349 et 3174 = hôtel-Dieu ; L1012 = Îlot du cinéma Palace), de Lille (HG L04 = hospice gantois, latrines L04 ; château de Courtrai), de Paris indiqués par des marqueurs noirs (Ste-Barbe = Collège Sainte-Barbe ; Cordeliers, réfectoire du couvent des Cordeliers ; Paris Saint-Michel) et à Rennes (hôpital Sainte-Anne).
Légende Les effectifs en fonction du nombre de restes ont été placés entre parenthèses.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-31.jpg
Fichier image/jpeg, 590k
Titre Fig. 32 Liste des fabriques présentes dans le lot.
Crédits Korpiun 2007, p. 137.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-32.jpg
Fichier image/jpeg, 193k
Titre Fig. 33 Tableau de répartition du NMI par forme réparti au sein des différentes fabriques.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-33.jpg
Fichier image/jpeg, 160k
Titre Fig. 34 Typologie des céramiques du xve siècle.
Légende 1, 2, 3 : Pichets, fabrique 1 ; 4 : Pichet, fabrique 4 ; 5 : Pichet, fabrique 6 ; 6 : Cruche, fabrique 1; 7 : Gobelet, fabrique 1; 8 : Gobelet, fabrique 6 ; 9 : Coupelle, fabrique 6 ; 10 : Tasse à ouverture quadrilobée, fabrique 2, glaçure plombifère brune et verte externe; 11 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère jaune interne; 12 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne; 13 : Écuelle, fabrique 4, glaçure plombifère jaune interne; 14 : Marmite, fabrique 4, glaçure brune externe; 15 : Poêlon, fabrique 4, glaçure plombifère brune; 16 : Pot à anse, fabrique 1, 17 : Plat, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne; 18 : Plat, fabrique 4; 19 : Couvercle, fabrique 4, 20 : Vase-réserve, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe; 21 : Pot, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe; 22 : Pot à anse en panier, fabrique 4, glaçure plombifère brune externe.
Crédits Dessins N. Cartier, H. Derradj.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-34.jpg
Fichier image/jpeg, 211k
Titre Fig. 35 Pichet présentant des traces de mise au feu, latrines 1029M.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-35.jpg
Fichier image/jpeg, 171k
Titre Fig. 36 Gobelet à côtes.
Crédits Dessin H. Poirier.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-36.jpg
Fichier image/jpeg, 49k
Titre Fig. 37 Fragments de verre à tige.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-37.jpg
Fichier image/jpeg, 4,3M
Titre Fig. 38 Mobilier en bois des latrines 1029M.
Légende 1, 2, 3, 4, 5, 6 : Écuelles ; 7, 8 : Tranchoirs.
Crédits Dessins, DAO M. Laugero.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-38.jpg
Fichier image/jpeg, 54k
Titre Fig. 39 Bassins et pots à anse des latrines 1029M et 3349M.
Légende 1, 2, 3, 4, 5 : Bassins, fabrique 1; 6, 7 : Bols à anses, fabrique 4, glaçure plombifère brune interne; 8 : Bol à anse miniature, fabrique 4, glaçure plombifère verte interne.
Crédits Dessins N. Cartier, H. Derradj.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-39.jpg
Fichier image/jpeg, 68k
Titre Fig. 40 Tartre recouvrant les parois d’un bassin des latrines 1029M ?
Crédits Cl. D. Delassus.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-40.jpg
Fichier image/jpeg, 520k
Titre Fig. 41 Le biberon.
Crédits Dessin N. Cartier, H. Derradj.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-41.jpg
Fichier image/jpeg, 46k
Titre Fig. 42 La pince à épiler.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-42.jpg
Fichier image/jpeg, 2,2M
Titre Fig. 43 Le peigne.
Crédits Dessin N. Cartier, H. Derradj.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-43.jpg
Fichier image/jpeg, 49k
Titre Fig. 44 Contenants pharmaceutiques et cosmétiques.
Légende 1 : Boîte cylindrique en bois; 2 : Couvercle de boîte cylindrique en bois; 3 : Flacon en verre à décor de « plume d’oiseau »; 4 et 5 : Aspersoirs en verre.
Crédits Dessins N. Cartier, H. Derradj, H. Poirier.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-44.jpg
Fichier image/jpeg, 90k
Titre Fig. 45 Flacon à décor de « plume d’oiseau ».
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-45.jpg
Fichier image/jpeg, 195k
Titre Fig. 46 Aspersoir.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-46.jpg
Fichier image/jpeg, 149k
Titre Fig. 47 Tranchoir.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-47.jpg
Fichier image/jpeg, 10M
Titre Fig. 48 Creuset.
Crédits Cl. A. Tixador.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-48.jpg
Fichier image/jpeg, 4,6M
Titre Fig. 49 Synthèse des résultats des analyses chimiques.
URL http://journals.openedition.org/archeomed/docannexe/image/54018/img-49.jpg
Fichier image/jpeg, 74k
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Pour citer cet article

Référence papier

David Delassus, Marie Derreumaux, Dominique Frere, Marie Huin, Hélène Poirier, Tarek Oueslati, Coralie Favero, Arnaud Tixador, Maxime Rageot, Delphine Barbier-Pain, Matthieu Deltombe, Patrice Korpiun, Martin Laugero et Nima Saedlou, « Soigner les malades au xve siècle. L’exemple de la fouille de l’hôtel-Dieu de Valenciennes (Nord) »Archéologie médiévale, 52 | 2022, 121-162.

Référence électronique

David Delassus, Marie Derreumaux, Dominique Frere, Marie Huin, Hélène Poirier, Tarek Oueslati, Coralie Favero, Arnaud Tixador, Maxime Rageot, Delphine Barbier-Pain, Matthieu Deltombe, Patrice Korpiun, Martin Laugero et Nima Saedlou, « Soigner les malades au xve siècle. L’exemple de la fouille de l’hôtel-Dieu de Valenciennes (Nord) »Archéologie médiévale [En ligne], 52 | 2022, mis en ligne le 21 décembre 2023, consulté le 09 juillet 2025. URL : http://journals.openedition.org/archeomed/54018 ; DOI : https://doi.org/10.4000/archeomed.54018

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Auteurs

David Delassus

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Marie Derreumaux

CRAVO, UMR 7209-MNHN.

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Dominique Frere

Laboratoire TEMOS, Université Bretagne Sud.

Marie Huin

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Hélène Poirier

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Tarek Oueslati

HALMA CNRS, Université de Lille Sciences humaines.

Coralie Favero

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Arnaud Tixador

Service archéologique municipal de Valenciennes.

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Maxime Rageot

Université de Tübingen.

Delphine Barbier-Pain

Inrap.

Matthieu Deltombe

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Patrice Korpiun

Service archéologique municipal de Valenciennes.

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Martin Laugero

Service archéologique municipal de Valenciennes.

Nima Saedlou

Laboratoire XYLOTREE.

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