• 1 Commune nouvelle des Garennes-sur-Loire.
• 2 Commune nouvelle de Segré-en-Anjou-Bleu.
• 3 Chevalier 1998 ; Soulez-Larivière 1937.

1Traversé d’est en ouest par la Loire, le département de Maine-et-Loire reprend approximativement les limites de l’ancien diocèse d’Anjou. Sous cette apparente homogénéité historique, ce territoire se partage entre le Massif armoricain à l’ouest et les franges du Bassin parisien pour la moitié orientale. Le substrat géologique recèle des ressources aptes à la production de matériaux de couverture. Ainsi, les argiles issues de l’altération du socle hercynien servent à la production de tuiles canal au sud-ouest. À l’opposé, dans le tiers nord-est du département, les argiles, essentiellement issues des horizons du Cénomanien inférieur, ont permis la fabrication de tuiles plates et de tuiles creuses à crochet. En l’état des connaissances, l’aire de diffusion de chacun de ces deux centres de production est mal cernée mais ne semble pas avoir débordé de beaucoup au-delà de la Loire. Néanmoins, l’Anjou est plus connu pour son bassin de production d’ardoises, qui s’étire du sud d’Angers, avec les carrières de Juigné-sur-Loire1 et Trélazé (séparées par la Loire), au nord-ouest de l’Anjou, avec les gisements de Segré et Noyant-la-Gravoyère2. Ces filons de schiste de l’Ordovicien se prolongent en Bretagne avec d’autres bassins d’exploitation dont celui de Châteaubriant, proche de l’Anjou (fig. 1). Cette perception traditionnelle de l’Anjou aux toitures d’ardoise, fixée par les géographes Furcy Soulez-Larivière et Cécile Chevalier3, est le reflet d’une longue évolution dans laquelle l’ardoise a pris progressivement le dessus, avec une accélération au xix^e s., au détriment principalement de la tuile à crochet et de la tuile plate.

• 4 Brodeur 1997, vol. 3, p. 119-122. Ces plaques de schiste ont été mises au jour au sein d’un solin (...)

2L’ardoise, feuillet de pierre dont la finesse parfois relative la distingue de la lauze, couvre, en ce début du xxi^e s., de nombreuses toitures de ces contrées bordant la Loire. L’apparente dominance de ce matériau de couverture est le résultat d’un millénaire d’évolution. Les témoins archéologiques de couvertures d’ardoises restent peu nombreux avant la fin du Moyen Âge. La plus ancienne attestation remonterait au viii^e s.4 avec la découverte, au château d’Angers, de grandes plaques épaisses percées d’un trou mais il faut attendre le xi^e s. pour rencontrer les premiers témoins conséquents de couvertures d’ardoises, tout au moins sur les grands édifices d’Angers.

• 5 Hunot 2011.

3Les vestiges mis au jour au fond des reins de voûte de l’abbatiale Notre-Dame-de-la-Charité dite du Ronceray à Angers sont datables de la fin du xi^e s. Le contexte stratigraphique ainsi que le réemploi d’une partie de ces éléments lors d’une réfection de la charpente au xv^e s. permettent de rattacher ces ardoises à la couverture initiale de cette église5. Elles se caractérisent par des largeurs comprises entre 6,8 cm et 21,5 cm, des longueurs de 21,5 cm à 41,6 cm et des épaisseurs de 0,7 cm à 1,8 cm (65 à 90 kg/m² pour un pureau représentant le tiers). Avec une moyenne de 1,2 cm, ces épaisseurs apparaissent assez fortes au regard des productions de l’époque contemporaine, qui oscillent entre 0,27 cm et 0,54 cm. Mais, plus que l’épaisseur, la variabilité des dimensions, où la largeur n’est pas proportionnelle à la longueur, renvoie, sur ces versants droits inclinés à 32°, à un mode de pose très vraisemblablement à pureau décroissant et à joints brouillés (fig. 2). Dans cette technique, les plus grandes ardoises sont disposées à l’égout et les plus courtes au faîtage tout en mêlant les largeurs pour décaler systématiquement les joints verticaux. Elle permet ainsi l’emploi de toute la variété dimensionnelle issue directement des carrières et minimise les pertes.

• 6 Ibid.
• 7 Hunot, Favreau 2024, vol. 1, p. 168 ; la datation dendrochronologique de ces bois a été réalisée e (...)

4L’autre point significatif pour cette période des xi^e et xii^e s. réside dans le mode de fixation. À proximité de l’extrémité de ces ardoises, un trou circulaire, d’un diamètre moyen de 9 mm, aux bords abrasés, recevait l’extrémité étroite d’un crochet en esse confectionné dans un fer plat (fig. 3)6. Des niveaux contemporains (xi^e s.) de la collégiale Saint-Martin d’Angers ont également livré quelques exemplaires de ces crochets. À l’abbaye Saint-Aubin d’Angers, des crochets, dont certains étaient encore liés à un fragment d’ardoise, ont été retrouvés dans des niveaux de démolition associés à la reconstruction de l’aile orientale entre 1688 et 1692. À cette date, la charpente romane subsistait encore et les réemplois d’éléments de la charpente médiévale résultent d’un abattage vers 1108-11257. Il est donc ainsi possible de dater ces crochets liés à cette charpente xii^e s. Enfin, lors de la fouille de la nécropole du haut Moyen Âge à proximité du château de Champtocé-sur-Loire, un autre exemplaire de crochet a été mis au jour.

• 8 Guitton 1988.
• 9 Soulez-Larivière 1986.
• 10 Hunot 2011.

5Entre le xii^e et le xiv^e s., la technique de pose au crochet est abandonnée au profit de la seule fixation au clou. Ce mode de pose est indirectement évoqué lors de la reconstruction du château de Beaufort-en-Vallée en 1348 par l’achat simultané de clous à ardoise et de milliers d’ardoises8. Ces mentions d’achat d’ardoises ou en relation avec les droits d’extraction plus nombreuses semblent refléter une augmentation des carrières tant à Angers que pour l’ensemble des gisements de schiste ardoisier de l’Anjou (fig. 4)9. Les ensembles archéologiques de la fin du Moyen Âge confirment cette pose au clou. Ainsi, les ardoises mises au jour dans les remblais de démolition d’un bâtiment antérieur à la construction de la galerie René de Bourbon à l’abbaye de Fontevraud (1515-1520) sont représentatives de cette mise en œuvre. Elles présentent une grande variété dimensionnelle et sont majoritairement fixées par un seul clou (82 %) sur des liteaux obtenus par la fente de jeunes tiges de chêne. Les longueurs de 23 à 30 cm ainsi que les largeurs de 8 à 19,5 cm montrent une grande dispersion. Cette hétérogénéité, qui se retrouve aussi dans des épaisseurs de 0,5 cm à 1,5 cm, est proche de celle des lots plus anciens. Le mode de pose est le même que celui déjà évoqué pour la période antérieure mais diffère par la fixation au clou (fig. 5 et 6)10.

• 11 Londres, British Library, Add. ms. 21201, fol. 97 r, 14, s. d. [1368].
• 12 Chapelot et Chapelot 1996.
• 13 Soulez-Larivière 1986.
• 14 Cayla 2002 ; Foucher 2022.
• 15 Vigué 2017.
• 16 Soulez-Larivière 1986, p. 13.
• 17 Cayla 2002.

6En ce qui concerne le matériau, les qualificatifs attestés dès le la fin du xiv^e s.11 d’ardoises tachées ou rousses désignant les productions utilisées en Anjou suggèrent l’emploi de produits de second choix tandis que les meilleurs partent, entre autres endroits, pour Paris par Rouen via la Seine12. Ainsi « fine », « claire » ou « carrée » désignent les ardoises d’exportation destinées à couvrir des toitures éloignées des bassins de production. Si nous ne disposons que de très rares informations sur la qualité des matériaux vendus hors de l’Anjou, les appellations de « grande carrée » ou de « carrée » renvoient aussi à un produit de meilleure qualité décrit précisément au xviii^e s. par Fougeroux de Bondaroy mais dont les noms apparaissent dès le xiv^e s.13. Il apparaît en effet logique de sélectionner les ardoises les mieux formées et les plus fines, donc plus légères pour une surface couverte équivalente, a destination du commerce à longue distance. Les ardoises utilisées en Anjou au cours de l’époque moderne conservent cette même hétérogénéité dimensionnelle ainsi que de fortes épaisseurs, alors que les sources ainsi que quelques découvertes fortuites montrent l’exportation d’une autre gamme de produit aux dimensions homogènes. Ainsi le chargement d’une épave du xvii^e s. mise au jour dans le lit de la Loire en aval d’Angers semblait constitué d’un seul modèle d’ardoise (43 cm x 20 cm x 0,54 cm)14. En remontant la Loire, la diffusion se fait vers la Bourgogne mais aussi vers Paris depuis l’ouverture du canal de Briare (1642). L’importance de ce commerce est difficile à apprécier, mais les épaves chargées d’ardoises mises au jour tant en milieu fluvial qu’en milieu maritime témoignent des quantités transportées15, en parfaite corrélation avec l’augmentation des mentions de carrières dans le bassin Angevin depuis le xiv^e s. ainsi que la taxation de l’ardoise au titre de la Cloison d’Angers à partir de 137216. Au début du xix^e s., des documents comptables nous renseignent sur le volume des transports : les plus courants correspondent à 85 tonnes soit environ 141 000 ardoises ; régulièrement, ils dépassent les 300 tonnes pour plus de 500 000 ardoises17.

• 18 Londres, British Library, Add. ms. 21201, fol. 97r.
• 19 Hunot 2011.
• 20 Poulain 2006 ; Hunot 2011.
• 21 Poulain 2005.

7Si l’ardoise de qualité est vendue hors du bassin d’extraction angevin, et sans doute posée sur quelques édifices locaux dont le commanditaire cherche à se distinguer, les productions moins fines et moins régulières sont utilisées localement, quel que soit le rang du bâtiment. Ainsi, une partie des ardoises destinées à la reconstruction du château de Saumur au xiv^e s. sont qualifiées « ardaise rousse », c’est-à-dire issues de niveaux supérieurs où les bancs moins aptes à la fente se signalent par des plans de fissibilité avec des tâches d’oxyde de fer18. Un lot d’ardoises attribuables au xvii^e s., mis au jour au chevet de l’église abbatiale de Fontevraud, dont les dimensions varient tant en largeur qu’en longueur avec des épaisseurs comprises de 0,5 à 1,7 cm, en apporte la démonstration19. Seule la pose à joints brouillés et pureau décroissant peut s’accommoder d’ardoises de tailles aussi diverses, fixées majoritairement par un seul clou. Cette technique de mise en œuvre employant des ardoises épaisses de second choix, attestée depuis le xi^e s., a continué d’être couramment employée jusqu’au début du xx^e s. (fig. 6)20. L’apparition du crochet à ressort, plus économique en main-d’œuvre, dans le dernier quart du xix^e s. entraîne le déclin de cette mise en œuvre21.

• 22 Nauleau 2016.
• 23 Commune nouvelle de Baugé-en-Anjou, observation faite lors de la réfection de la toiture en 2003, (...)

8Dès que l’on quitte le bassin d’extraction, d’autres matériaux ont été substitués à l’ardoise. La tuile, sous différentes formes, se rencontre tant au nord-est qu’au sud-ouest de la région. La documentation archéologique, parcimonieuse, ne permet pas encore de cerner l’origine et l’aire d’extension de la tuile canal sur des charpentes à faible pente ni celle de la tuile creuse à crochet. Nous utiliserons un premier bilan des découvertes archéologiques récemment dressé par Jean-François Nauleau22 pour mieux évaluer leur présence face à l’ardoise en Anjou. La tuile plate, en l’état des recherches, ne semble pas être introduite dans la partie nord-est de l’Anjou avant le xviii^e s. La plus ancienne attestation a été révélée à la Fontaine, Cheviré-le-Rouge23, où une tuile plate à crochet porte la mention incisée avant cuisson « tuilerie de Chanteau…1778. »

• 24 Hunot 2011. Les charpentes bordelaises se distinguent par des jambettes cintrées placées en avant (...)
• 25 Hunot 2019.
• 26 Ibid.
• 27 Commune nouvelle de Saint-Léger-de-Linière.
• 28 Le blocage des couvrantes pouvant être assuré ponctuellement par du mortier.

9La tuile canal est actuellement répandue sur une aire correspondant au sud-ouest de l’Anjou et dont la limite septentrionale est constituée par la Loire et son affluent le Layon. Elle est posée sur des charpentes à pannes « classiques » à faible pente. Toutefois, ces charpentes apparaissent sous une forme différente, qualifiée de « charpente bordelaise », seulement au xvi^e s.24. L’aire de répartition de ces charpentes couvre la partie occidentale du Poitou jusqu’à la Gironde, au-delà de laquelle aucun exemple médiéval n’est connu à ce jour25. La nef de l’église Notre-Dame à La Séguinière, dont la charpente date de 1572, avec des pentes à 25°, est un exemple angevin de ces structures de couverture parfaitement adaptées à la tuile canal (fig. 7). Les quelques structures de combles antérieures au xvi^e s. et connues dans cette partie de l’Anjou présentent des versants aux inclinaisons supérieures ou égales à 45° incompatibles avec ces tuiles sans fixation qui sont maintenues par les seules forces de frottement. Il est tentant de voir dans cette mise en œuvre de la tuile canal une évolution à partir de pratiques plus anciennes, avec l’utilisation de tuiles creuses à crochet adaptées à des pentes plus fortes décrite ci-après. On ne peut négliger des influences venant de l’Aquitaine pour l’usage de la tuile canal et de toits à faible pente mais cela reste à démontrer. C’est d’autant plus vrai que ces charpentes bordelaises apparaissent comme une version abaissée de charpentes armoricaines dont nombre d’exemples conservés datent des xiv^e et xv^e s.26. À ce jour, les rares témoins de tuile canal ont été retrouvés en Anjou lors d’un diagnostic sur le site de la Tufferie à Beaupréau27 où un four de tuiliers a été attribué au xii^e s. Ils sont associés à des tuiles creuses à crochet suggérant des toitures où les deux types sont associés ; les tuiles creuses à crochet posées en courante sur le lattis et les tuiles canal en couvrante28. Toutefois, en l’absence d’autres découvertes similaires, il faut rester prudent sur cette association, mais cela pourrait souligner une origine locale de l’usage de tuile canal dans une mise en œuvre simplifiée.

• 29 Lebouteux 2001.
• 30 Girault-Labalte 1984.

10À l’opposé, la partie nord-est du département du Maine-et-Loire forme avec la Sarthe une partie de la limite occidentale de l’aire d’extension de la tuile plate à crochet, ou clouée, posée sur des pentes supérieures à 45°. Ce type de couverture s’étend sur la région Centre, la Normandie et l’Île-de-France29. Un autre type de tuile, la « tuile baugeoise », est employé dans cette partie de l’Anjou sans guère s’étendre au delà dans les départements voisins (sud de la Sarthe et nord-ouest de l’Indre-et-Loire). La couverture à la baugeoise, qui se caractérise par tuiles creuses à crochet, ne comporte que des courantes. Un joint de mortier, le crétis, est substitué aux couvrantes (fig. 8 et 9). Ce mode de couverture économique, en régression actuellement, ne semble avoir connu qu’une aire de diffusion assez limitée. Dans cette zone, son emploi reste relativement minoritaire au xx^e s.30. Mais qu’en était-il dans les siècles antérieurs ?

• 31 Hunot 2016.
• 32 Hunot, Guérin 2007.
• 33 Nauleau 2016.
• 34 Commune nouvelle de Huillé-Lézigné.
• 35 Hunot, Guérin 2007.

11De plus, les pentes de 45° à 60°, comme pour les charpentes, sont similaires à celles employées traditionnellement pour les couvertures d’ardoises, d’essentes et de tuiles plates de la région31. Si l’histoire de la couverture à la baugeoise reste à faire, il est tentant de l’identifier comme une évolution de la couverture de tuile à crochet avec courante et couvrante dont témoignent les vestiges médiévaux de couverture en tuiles creuses retrouvés sur le territoire de l’ancien Anjou. On peut citer quelques lieux de découverte significatifs comme les églises Saint-Aubin de Bazouges-sur-le-Loir et Saint-Jean-Baptiste de Huillé32 mais également au Plessis-Rolland à Précigné et, dans une moindre mesure, sur le site du Château de Saint-Jean-de-Linière33. Au sud de la Loire, de nombreuses découvertes ont eu lieu dans le Bas-Poitou. Ces vestiges se concentrent aux confins de la Loire-Atlantique et de la Vendée. Tous ces sites recelaient des tuiles creuses dotées d’un crochet. Sur les églises de Bazouges et de Huillé34, ces vestiges sont conservés en place sur l’extrados des voûtes des chœurs qui sont attribués à la seconde moitié du xii^e s.35. La mise en place des charpentes des combles, respectivement en 1223 et en 1489, assure que ces témoins de couverture en tuiles sont contemporains de la construction initiale. Deux modèles de tuiles creuses constituent ces toitures posées à bain de mortier sur les voûtes. Les tuiles courantes, longues de 42 cm et au profil ouvert large de 20 cm, sont dotées à l’extrémité la plus large d’un crochet servant à la suspension sur les liteaux. Les couvrantes de longueur équivalente présentent un profil plus étroit. Le crochet est, quant à lui, posé environ à 5 cm de l’extrémité la plus étroite pour bloquer la tuile supérieure (fig. 10 et 11).

• 36 Hunot 2016, les versants des charpentes médiévales (xii^e-xv^e s.) ont une inclinaison moyenne de 53 (...)
• 37 Les pentes relativement fortes limitent les remontées par capillarité.
• 38 Goutal 1996.
• 39 Nauleau 2016.
• 40 Bouvet 2013.

12Dans les exemples étudiés, les pentes de 27° et 45° répondent au bombement des voûtes au-dessus de l’arase des murs gouttereaux, mais une pose de ces tuiles à crochet sur liteaux est envisageable sur les pentes de 42 à 60°36 relevées sur les charpentes angevines des xii^e et xiii^e s. et compatible avec le faible recouvrement constaté37. Ce mode de pose, disparu actuellement d’Anjou, est attesté entre autres depuis l’époque médiévale en Lorraine38. Il est tentant de voir une filiation entre ces couvertures de tuiles creuses à crochet et la tuile baugeoise, pour laquelle la couvrante est remplacée par le crétis. Le passage de l’un à l’autre semble avant tout être un choix économique plutôt qu’un moyen d’alléger la charge de la toiture. De plus, le format et le profil de ces tuiles sont très proches de ceux des tuiles baugeoises. Dans le Maine, au nord de l’Anjou, nous avons pu observer quelques témoins de tuiles à crochet dans des contextes médiévaux. Sans négliger les découvertes en contextes archéologiques recensées par Jean-François Nauleau39, on peut mentionner les tuiles constituant la souche de cheminée des Perrières à Voivres-lès-Le-Mans (Sarthe) de la fin du xiii^e s. ou encore les fragments insérés dans les maçonneries du logis du xiv^e s. de la Grande-Courbe à Brée (Mayenne)40.

• 41 Hunot 2006 : à Saint-Pierre en Vaux, la présence de tuile à rebord sans horizon antique a été noté (...)
• 42 Nauleau, Verron 2016.

16Ces toitures de tuiles trouvent-elles leur origine dans les couvertures de tuiles à rebord et imbrices de l’époque antique ? Cela reste à démontrer même si quelques sites du haut Moyen Âge, tel celui de la Chaussée à Louresse-Rochemenier ou de Saint-Pierre-en-Vaux41, ont livré de nombreux restes de tuiles à rebord dans des niveaux archéologiques dépourvus d’autres vestiges gallo-romains. Si la récupération de matériaux ne peut être totalement rejetée, retrouver suffisamment d’éléments abandonnés depuis plusieurs siècles pour refaire des couvertures de plusieurs dizaines de mètres carrés semble peu crédible. La production sur le site de la Tufferie de tuiles à rebord spécifique42 au xii^e s. apparaît comme un témoin de cette transition.

• 43 Hunot, Marguerie 1999.
• 44 G. Desert cité par F. Soulez-Larivière 1988.
• 45 Lambert, Rioufreyt 1982 ; Épaud 2009.

17Les matériaux organiques (essentes, chaume, etc.) ne doivent pas être oubliés dans ce survol même si, en Anjou, aucun reste ancien ne nous est parvenu. Toutefois, les traces relevées sur un solin de l’église du xii^e s. de La Roë (Mayenne) ou les éléments du x^e s. étudiés à l’abbaye de Landevennec (Finistère)43 attestent de l’emploi d’essentes sur des édifices qui se rattachent à une architecture non rurale. Le chaume représentait encore près de 10 % des couvertures des habitations en Anjou au milieu du xix^e s.44. Les loges, ces abris servant de dépendance agricole jusqu’au milieu du xx^e s., constituent les derniers témoignages de ces couvertures végétales en Anjou ; les charpentes faites de perches sont couvertes de brandes (Erica scoparia L.) (fig. 12)45.