1Cette troisième campagne de fouilles du site de Notre-Dame a été déterminante pour observer les transformations radicales et très rapides qui se sont opérées sur les sites castraux de Provence aux alentours de l’an Mil. Ce castrum a été établi au cours du x^e s. sur un relief s’avançant en bordure du plateau qui domine la vallée. L’église au pied de la butte est peut-être plus tardive. Les deux premières campagnes avaient mis au jour une enceinte de bois semi-circulaire qui abritait une maison construite en bois et terre.

2Au-dessous, la dernière campagne a révélé au milieu de la plateforme un bâtiment de plan hexagonal (fig.) construit en pans de bois, avec un diamètre de 7,3 m hors œuvre. Au milieu de l’espace, deux gros poteaux distants entre eux de 1,15 m supportaient sans doute la charpente. Ils encadraient un foyer constitué d’une plaque d’argile d’environ 0,7 m de diamètre. D’autres poteaux soutenaient sans doute un plancher, car ce bâtiment maître, que nous interprétons comme une tour, devait avoir au moins un étage. Les premières données chronologiques placent le début de cette occupation vers la fin du x^e s. et l’arrêt vers le milieu du xi^e s. Le caractère élitaire transparaît dans des fragments de jeu de trictrac et plusieurs pièces d’échec : un pion, une tour, un roi et une reine. Un plan de bâtiment aussi original démontre une manifeste volonté de paraître, qui s’appuyait sans doute sur un modèle observé ailleurs. Le seul exemple analogue que nous ayons trouvé pour l’instant est la motte de Bouillon (xi^e-xii^e s.), en Belgique.

3Enfin, un autre sol d’occupation, daté du x^e s., a été découvert à une quarantaine de centimètres au-dessous du précédent. Pour l’instant, nous avons mis au jour deux trous de poteau et deux fosses qui pourraient être des silos. Au sud de la butte, une construction en terre et bois de 9 × 3 m, détruite par un incendie, appartient à cette première séquence. Il s’agit vraisemblablement d’une forge.

4Un habitat a été mis au jour à 92 m de la butte et 25 m plus bas, sur une surface d’environ 75 m². Un autre sondage à mi-pente entre la fortification et ces installations a livré le même type de vestiges, qui semblent donc se développer sur plus d’un hectare ; une prospection Lidar est envisagée. Pour s’établir dans la pente, le substrat a été décaissé afin d’obtenir une plateforme subhorizontale. Dix-neuf trous de poteau dessinant trois alignements parallèles délimitent des espaces rectangulaires d’environ 1,6 × 2,5 m qui paraissent avoir eu des affectations spécifiques d’artisanat, habitation, stockage et circulation. Il semble que des zones couvertes ou semi-couvertes alternaient avec des espaces ouverts. Le mobilier permet de situer cette occupation entre la deuxième moitié du xi^e s. et le troisième quart du xii^e s. On ignore encore s’il s’agit d’un simple habitat groupé, dépendance du castrum ou d’un véritable village.

Allemagne-en-Provence, vue aérienne du castrum, vers l’an Mil.

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