Site
Gare Saint-Laud-Sernam
Angers
Maine-et-Loire
Date
7-25 mars 2011
Superficie
15 000 m²

1La gare Saint-Laud a déjà fait l’objet d’importantes découvertes dans le domaine funéraire (Brodeur, Chaumot, Leroy, Mortreau 2000). Lors de sa construction, entre 1848 et 1853, l’archéologue Victor Godard-Faultrier avait identifié une nécropole urbaine du Haut et Bas-Empire, notamment un ensemble d’incinérations, des inhumations dans des caveaux et cercueils de plomb. En 2000, cette zone funéraire a été fouillée (cf. Archéopages, 14) : 176 structures ont été étudiées, parmi lesquelles, des inhumations en coffrage de bois, cercueils de bois, sarcophages monoxyles, un caveau et deux cercueils de plomb (analyse anthropologique : Isabelle Souquet-Leroy, Inrap). La présence de tombes de Germains orientaux du milieu du iv^e siècle au tout début du v^e siècle, à ce jour les plus occidentales connues du monde romain, avait attiré l’attention des chercheurs.

2Dix ans plus tard, le diagnostic a fait apparaître le cimetière paroissial médiéval et moderne, relativement anecdotique dans les chantiers précédents (Brodeur 2011).

3La surface enclose de ce cimetière créé en 1234 (Brodeur, Comte, Frager, Prigent, Siraudeau 1994) et utilisé au-delà de 1834, est prise intégralement dans le projet de construction. Quinze sondages en tranchées de 3 m de large sur des longueurs variant de 6 à 48 m, certains avec des fenêtres, ont été effectués à la pelle mécanique [ill. 1]. Six d’entre eux se sont avérés positifs et indiquaient la présence de vestiges archéologiques sur près des trois quarts de la surface d’1, 5 ha du projet. La mise en évidence de plusieurs niveaux d’inhumations à ce stade [ill. 2] a conduit à mener une étude la moins destructrice possible et à effectuer des projections sur le reste de la surface en fonction des données nouvellement acquises et anciennes.

1. Plan des structures reconnues lors du diagnostic de mars 2011, dont l’accumulation de sépultures.

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DAO : Inrap.

2. Accumulation de squelettes visible dans le sondage n° 1.

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Photo : Inrap.

4La limite de l’extension occidentale de la trame viaire antique semble avoir ainsi été reconnue. Les sondages ont montré la suite d’aménagements urbains d’un ilot repéré en 2000, notamment une citerne soigneusement maçonnée. Des restes d’habitats organisés sur une orientation différente de la trame le confirment. Un fossé perdure au moins jusqu’au haut Moyen Âge pour un espace redevenu rural. La nécropole à inhumations du Bas-Empire installée sur des ilots abandonnés au cours de la deuxième moitié du second siècle est restée cantonnée à l’intérieur de cette ancienne zone urbaine du Haut-Empire. Une estimation moyenne de cinq cents tombes a été envisagée par comparaison entre la répartition vue dans les sondages et celle de 2000.

5Les résultats de terrain avec la découverte de tombes médiévales et modernes sur cinq sondages ont été confrontés à une étude documentaire visant à préciser la chronologie des inhumations, une éventuelle évolution spatiale du cimetière, sa densité probable et sa complexité. En 1234, la décision par Blanche de Castille régente au nom de son fils Louis IX, futur saint Louis, de construire une vaste forteresse dans l’ancien castrum à l’extrémité du promontoire d’Angers dominant la Maine chasse les chanoines de Saint-Laud qui y étaient installés (Comte, Juret, Matz 1994).

6On demande à l’abbé de Saint-Aubin de céder des terres comportant notamment l’église paroissiale Saint-Germain mentionnée dès la première moitié du xi^e siècle, sans doute bien plus ancienne. Le cimetière touché par le diagnostic est donc celui créé au moment du transfert des chanoines. Les textes ont indiqué une autorisation exceptionnelle d’inhumer au-delà de la date de fermeture décidée en 1834. Une enquête préfectorale donne 354 inhumations pour 1805, 203 l’année suivante, et 246 pour 1807. Les registres paroissiaux conservés livrent des chiffres entre 1583 et 1789 avec un manque entre 1642 et 1772. L’analyse critique d’Élodie Cabot a permis d’envisager un chiffre potentiel compris entre 12.000 et 28.000 tombes sur plusieurs niveaux. Des « charniers » ont également été repérés qui alourdissent encore ces données.

7Ainsi, le simple stade du diagnostic a donné des résultats très probants sur la limite de la ville du Haut-Empire (Bouvet, Brodeur, Chevet, Mortreau, Siraudeau, 2003) et sur l’évolution de l’occupation du Bas-Empire aux périodes médiévales et modernes. La problématique d’étude d’un cimetière paroissial urbain relativement bien documenté a été abordée dans l’hypothèse d’une éventuelle opération d’archéologie préventive. Face à ce site exceptionnel à divers titres, le Service régional de l’Archéologie a engagé une réflexion avec l’aménageur pour statuer sur la méthodologie à adopter, y compris la possibilité de solutions techniques permettant une préservation des vestiges pour les générations futures.