Site
Les Mataux
Saint-Rémy-de-Provence
Bouches-du-Rhône

Date
Octobre-novembre 2016

Surface
600 m²

Équipe

Anthropologie
Renaud Lisfranc, Inrap, UMR 7269 « LAMPEA »

Céramologie
Susanne Lang-Desvignes, Inrap, UMR 7299 « Centre Camille Jullian »

Étude du verre
Janick Roussel-Ode, UMR 7299 « Centre Camille Jullian »

Analyses organiques
Laboratoire Nicolas Garnier

1Distante d’environ 2 km de l’agglomération antique de Glanum (Saint-Rémy-de-Provence), la fouille des Mataux a mis au jour un petit ensemble composé de quatre inhumations (III^e/IV^e siècle) et trois fosses-bûchers (fin I^er/II^e siècle) associées à trois dépôts secondaires réoccupant un espace autrefois dédié à l’agriculture (Sagetat-Basseuil, 2018). Une des fosses-bûchers [ill. 1], qui a livré seulement 8,1 g de restes osseux crémés, localisés contre la paroi nord au niveau d’un effondrement de celle-ci et contre la paroi est (ce qui montre que les cendres du défunt ont été récupérées après la crémation), présente un caractère exceptionnel du fait de la profusion des objets qu’elle recèle [ill. 2] : seize lampes à huile identiques, un autre modèle en huit exemplaires, quatre coupes en céramique de même type, sept bouteilles en verre identiques. S’ajoutent à cet ensemble d’autres contenants en céramique et verre et deux objets de parure : une bague en cristal et un objet composé de perles d’ambre.

1. Localisation des dépôts mobiliers dans la fosse-bûcher.

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R. Lisfranc, E. Sagetat-Basseuil, Inrap

2. Distribution des types et formes de mobilier découvert dans la fosse-bûcher.

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R. Lisfranc, E. Sagetat-Basseuil, Inrap

2Le service à boire et à manger déposé dans cette fosse se compose d’au moins 51 objets en céramique et en verre. La bague en cristal de roche [ill. 3] figure la déesse Omphale (Dasen, 2008), portant les attributs d’Héraclès qui la rendent invincible, pour lutter contre les forces démoniaques affectant la santé féminine. L’objet, alliant perles d’ambre, bronze et argent issu des ateliers d’Aquilée, a été interprété par Janick Roussel-Ode comme une quenouille [ill. 4]. Si certains chercheurs envisagent ce type d’objets essentiellement sous un angle symbolique lié aux Parques, ou comme un objet utilitaire qui marque le rôle des femmes (certains de ces objets, réalisés en matériaux nobles, sont des quenouilles de mariage), l’interprétation la plus convaincante les associe à l’importance économique et à la valeur noble du travail de la laine. Quatre grandes tiges métalliques munies d’une platine carrée, découvertes aux angles de la fosse, appartiendraient à la structure des pieds d’un lit à pleutus. Une vingtaine d’autres clous, dont une série est localisée sur le pourtour de la fosse, peuvent être attribués soit au cadre composant le lit funéraire, soit à l’assemblage du bûcher ou pour clouer de fines planches de bois habillant le bûcher lui-même. Quoi qu’il en soit, ce type de lit à dossier, connu dans les cités vésuviennes, constitue un critère de datation, puisqu’il aurait remplacé au cours du I^er siècle de notre ère le lit à fulcra (accoudoirs) connu dans les provinces septentrionales de l’Empire dès le début de l’époque impériale (Béal, 2009).

3. Bague en cristal de roche.

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R. Lisfranc, E. Sagetat-Basseuil, Inrap

4. Objet en perles et rondelles d’ambre sur une tige métallique, interprété comme une quenouille.

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R. Lisfranc, E. Sagetat-Basseuil, Inrap

3Les nombreuses lampes à huile ne semblent pas avoir toutes été utilisées. La question d’une fonction apotropaïque se pose. La recherche de matières organiques, en cours, a été réalisée dans les lampes à huile, les coupes en céramique et les bouteilles en verre. L’analyse du contenant des bouteilles met en évidence différentes associations : corps gras d’animal non ruminant et de corps gras végétal, de cucurbitacée (inédit pour les périodes antiques en Gaule narbonnaise) et de vin, de corps gras d’animal non ruminant exclusivement, ou encore de vin seul. Enfin la dernière bouteille n’a livré aucune trace de marqueurs organiques. Il faut en conclure qu’elle était déposée vide ou contenant de l’eau. Les quatre coupes en céramique ont livré des graisses d’animal non ruminant, chauffées avec la peau, interprétées comme un dépôt alimentaire carné ou une forme de matière grasse (type saindoux). On note également la présence de vin, ou de raisin. Les coupes seraient utilisées comme des lampes après avoir contenu des aliments.

4Outre le luxe et l’abondance marquant cette découverte, l’ensemble des éléments recueillis permettent d’interpréter certains gestes funéraires. La majorité des objets sont déposés post-crémation, avec la disposition d’une bouteille et d’une coupe en céramique à chaque angle de la fosse.