Site
Pianliancheng
Jilin
Chine

Date
12 août-22 septembre 2017

Surface fouillée
1 020 m²

Équipe

Anthropologie
Kan Hou, Université du Shanxi
Elizabeth Berger, University of California, Riverside
Gwendal Guegen, Nantes Métropole, UMR 6566 « CReAAH »

Numismatique
Lyce Jankowski, Musée royal de Mariemont, UMR 8155 « CRCAO »

1L’opération menée par la Mission archéologique franco-chinoise dans le nord-est de la Chine (MAFNEC) en 2017 (voir « Un site fortifié médiéval en Mandchourie » dans ce numéro) a aussi permis de dégager un cimetière catholique. En Chine, où l’archéologie des périodes historiques est peu développée, c’est la première fois qu’un cimetière aussi récent est fouillé et fait l’objet d’une publication.

2La fouille de deux secteurs, situés à l’extérieur de la ville médiévale (le long du fossé d’enceinte, au sud de la porte ouest), a livré 39 tombes (38 dans le secteur nord [ill. 1 et 2] et une dans le secteur sud) datées entre les années 1890 et 1930. En majorité orientées vers le nord-est, ce sont des fosses rectangulaires à bords droits, de profondeur variable (de 5-20 cm ou 40-80 cm) équipées d’un cercueil de planches assez fines. La plupart de ces sépultures sont individuelles ; quatre sépultures doubles ont été recensées (deux primaires côte à côte et deux comprenant une inhumation primaire et une réduction secondaire). Il s’agit généralement de sépultures primaires, seules cinq sépultures secondaires ont été repérées. La plupart des défunts avaient un coussin sous la tête. Quelques monnaies en bronze, retirées de la circulation à cet effet, avaient été jetées dans certains cercueils (16 tombes sur 39 ont livré des monnaies) et, souvent, un bol en porcelaine déposé à la tête du défunt (15 tombes sur 39 ont livré des porcelaines).

1. Photographie aérienne et orthophotos des tombes du secteur nord du cimetière de Pianliancheng.

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P. Sebillaud, CNRS

2. Plan des sépultures du secteur nord.

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P. Sebillaud, CNRS

3L’étude des bols en porcelaine et des éléments du vêtement (boutons) permet d’attribuer ces tombes à deux phases successives (1890-1910 et 1910-1930). La distribution spatiale (en deux lignes), l’orientation, le type de cercueil et le mobilier diffèrent de ceux des cimetières familiaux traditionnels de la région (Launay, 1905, p. 103 ; Wang et al., 2016). Le recrutement du cimetière, comprenant un quart d’adolescents, deux tiers de femmes entre 20 et 40 ans, et seulement quelques hommes de 30 ans et plus, est également inhabituel. La découverte d’une médaille miraculeuse dans une tombe [ill. 3], puis l’étude des archives de la ville de Lishu et des Mission étrangères de Paris (MEP) montrent qu’il s’agit du cimetière catholique de la communauté chrétienne fondée à Lishu par le Père Armand-Joseph Déan autour de 1895.

3. Médaille miraculeuse découverte dans une tombe (n. 14, secteur nord).

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P. Sebillaud, CNRS

4Les défunts sont les membres de cette petite communauté formée par les missionnaires des MEP, composée de familles locales (dont une proportion importante des « Vierges des MEP », femmes chinoises consacrant leur vie à la religion en restant dans leur famille et en travaillant pour les missionnaires) et probablement de vicaires chinois. L’étude paléopathologique a montré un taux important de tuberculose et d’autres maladies infectueuses dans cet échantillon de population rurale.

5La mise au jour d’un cimetière catholique dévoile un pan méconnu de l’histoire de cette région et des échanges avec les premiers étrangers installés pour de longues périodes en milieu rural. C’est une occasion unique de constater l’influence des missionnaires catholiques sur les coutumes funéraires et les structures sociales au tournant du XX^e siècle.