1Cinquième ville de France par la taille de sa population, Nice doit à sa position très excentrée d’être restée pendant longtemps à l’écart du développement de l’archéologie de sauvetage puis préventive que connaissait le territoire national. La mise en œuvre des deux lignes de tramway a fourni l’occasion de créer un véritable service archéologique municipal et de mettre en valeur le patrimoine de la ville.

Le développement progressif d’une archéologie de sauvetage

2L’archéologie niçoise prend naissance à l’issue de la seconde guerre mondiale avec la volonté de quelques jeunes étudiants niçois (parmi lesquels deux élèves de l’école des Chartes, Jacques Thirion [1926-2007] et Paul-Albert Février [1931-1991]), regroupés autour de l’archiviste municipale Armance Royer (1907-1981), de se lancer dans des travaux archéologiques. Leur choix se porte sur la colline du Château : ils souhaitent d’abord entreprendre une campagne de prospection des souterrains de l’ancien château, mais devant les difficultés administratives, ils se rabattent sur les ruines du chevet de la cathédrale qui étaient restées visibles depuis les fouilles des années 1859-1860. Leurs premiers travaux (février à mai 1950) sont suivis d’une exposition à la galerie des Ponchettes. Ils attirent l’attention de Fernand Benoit, alors Directeur des Antiquités de Provence qui reprend les fouilles sous son autorité à partir de juillet 1951 [ill. 1]. D’abord menées avec Armance Royer, les opérations sont ensuite conduites par deux assistantes de Fernand Benoit, Arlette Pelat puis Danièle Mouchot pour les dernières campagnes. Ces fouilles ont trouvé l’appui de la municipalité et du maire de l’époque, Jean Médecin, qui finance les travaux et les contrats des assistantes de fouille. La main-d’œuvre est fournie par des prisonniers de guerre tandis que la fouille reste dirigée par l’État par le biais de Fernand Benoit.

3En parallèle, de nouvelles fouilles sont mises en œuvre sur le site de la ville antique de Cimiez, autour du frigidarium des Thermes du Nord et de la villa Garin de Coconato. Ces fouilles sont l’occasion de développer un premier musée pour accueillir les découvertes archéologiques. Installé d’abord dans la villa de Cimiez, où se trouve maintenant le Musée Matisse, il accompagne le dégagement progressif du site grâce à la présence permanente de Danièle Mouchot, qui devient l’archéologue de Nice. Dans les années 1970, 80 et 90, la colline de Cimiez se couvre progressivement d’immeubles qui sont l’objet d’un suivi archéologique et de fouilles d’urgence, souvent mal documentées (les rapports sont très peu détaillés), mais qui alimentent en grande quantité le Musée et ses réserves en mobilier archéologique.

4À partir de 1989, le Musée est déplacé dans un nouveau bâtiment construit spécialement sur le site. Relativement bas avec un seul étage, il constitue un ensemble de salles d’exposition et de salles de travail, avec une bibliothèque, qui permet d’accueillir une équipe permanente d’archéologues. Mais si le Musée est un véritable instrument de recherche archéologique, ses interventions se limitent quasiment toutes à la ville antique de Cimiez (Cemenelum). Certes, celle-ci est prestigieuse puisqu’elle fut la capitale de la province romaine des Alpes maritimae, mais elle est éloignée de Nice, héritière de la Nikaia fondée par les Grecs de Marseille. Les travaux dans le Vieux-Nice sont peu nombreux car il est protégé sous forme de secteur sauvegardé. Malgré tout, quelques interventions rapides seront faites comme celle du parking du Cours Saleya.

5À partir du milieu des années 1980, la Direction des Antiquités commence à exercer un regard plus direct sur les travaux de construction. Le décret de 1986 renforce la législation et c’est dans ce cadre-là qu’intervient une première fouille véritable dans le Vieux-Nice, à l’occasion du creusement du parking de la place du Palais de justice ; elle est conduite par une équipe d’archéologues venus d’Aix-en-Provence. À la fin des années 1990, une opération de restructuration du centre de la Providence, dans la partie nord du Vieux-Nice, amène la réalisation d’une autre opération archéologique, qui connaît de nombreuses difficultés (entre autres le vol des notes de fouilles qui privera l’opération d’un rapport archéologique). Il faut dire que la distance par rapport à Aix-en-Provence, où se trouve la Drac (à presque deux heures de route), ne facilite pas la gestion administrative d’une archéologie qui passe progressivement d’une notion de sauvetage à une notion de prévention.

La première ligne du tramway de Nice, prémices d’une archéologie nouvelle

6La conjonction de l’arrivée d’un nouveau conservateur au service régional de l’Archéologie, Franck Suméra – issu d’un service archéologique de collectivité et ayant été confronté durant des années à la gestion de dossiers complexes –, et de la mise en place du projet d’une nouvelle ligne de tramway va transformer la gestion de l’archéologie niçoise. Dans le même temps, une véritable loi sur l’archéologie se met en place. Elle devient effective en 2001. C’est dans ce nouveau cadre que s’inscrit l’opération archéologique du tramway. L’arrêté est pris en 2002 ; le diagnostic archéologique, désormais obligatoire, est réalisé par le nouvel Institut ayant en charge l’archéologie préventive, l’Inrap, héritier de l’Association pour les fouilles archéologiques nationales (Afan). En préalable, une étude documentaire avait été conduite par Aurélie Dumont. Elle guidera la réalisation du diagnostic archéologique, organisé en deux grandes phases : une campagne de carottages à visée géomorphologique, destinée à retrouver d’éventuelles lignes de rivage préhistoriques, et une série de tranchées ouvertes sur le boulevard Jean-Jaurès, percé au XIX^e siècle sur l’ancienne ligne de fortification en bordure d’un fleuve connaissant des crues impétueuses, le Paillon.

7La fouille du tramway de l’agglomération de Nice-Côte d’Azur est de fait la première grande opération d’archéologie préventive à Nice. Elle a permis d’explorer pour la première fois les vestiges de la fortification urbaine et du seul pont franchissant le Paillon. La difficulté était extrême : il fallait sonder un boulevard avec tous ses réseaux actifs et une circulation qui ne pouvait pas être déviée, pour essayer de retrouver le positionnement des différents éléments de la fortification urbaine le long du fleuve, fortification qui avait été entièrement détruite en 1706 sur l’ordre de Louis XIV. Un travail sur plan avait été effectué lors de l’étude documentaire, en numérisant un plan ancien de Nice et en essayant de le repositionner sur le fond des contours d’îlots actuels. Il s’agissait de la première approche de ce genre tentée à Nice. Réalisé rapidement, sans tenir compte des cadastres du XIX^e siècle ou des plans des XVII^e et XVIII^e siècles et sans l’expérience d’études urbaines, ce positionnement s’est avéré erroné. On s’en aperçoit aisément en comparant ce document avec celui qui a pu être élaboré grâce aux recherches menées depuis 2004 à Nice [ill. 2]. En particulier, la superposition des deux documents fait apparaître des différences notoires pour les diverses « excroissances » fortifiées que constituent les bastions. Nous ne détaillerons pas plus les difficultés de ce diagnostic, mais il constitue le premier pas vers la mise en place d’une opération archéologique lourde. Il faut noter par ailleurs que les premières découvertes (chaussée de l’ancien pont franchissant le fleuve, tour de la fortification) ont fait l’objet d’une appropriation rapide par les associations locales œuvrant pour la défense du patrimoine, au premier rang desquels Henri Geist, président du Cercle d’histoire et d’archéologie des Alpes-Maritimes (CHAAM) et Jean-Marc Giaume, alors président de la fédération des associations du Comté de Nice et ancien étudiant en histoire à l’Université de Nice.

8Le diagnostic a révélé deux sites de fouille : la partie méridionale du Pont-Vieux et la fortification autour de la porte Pairolière. Le rapport de diagnostic a permis de synthétiser pour la première fois des données géomorphologiques, archéologiques et historiques novatrices. L’ensemble a fait l’objet rapidement d’une première publication dans la revue Archéam, publiée par le Cercle d’histoire et d’archéologie d’Henri Geist. La fouille du Pont-Vieux était importante car elle parlait aux Niçois ; bien qu’il ait été détruit en 1921, son image orne encore de nombreux commerces du Vieux-Nice. Cette découverte rappelait une histoire de Nice qui la rattachait à ses origines savoyardes. La porte Pairolière, ancienne porte principale fortifiée permettant l’accès au nord de la ville, se situait quant à elle au milieu du boulevard Jean-Jaurès (au niveau du square Toja). Elle risquait de livrer des vestiges très bien conservés de la fortification de Nice : les premiers éléments du diagnostic indiquaient en effet une élévation conservée d’environ 6 m, le boulevard ayant été remblayé pour servir de protection face au fleuve. Sans présenter les découvertes, nous allons rentrer un peu dans le détail de cette fouille, car elle a constitué un élément déclencheur pour l’archéologie à Nice.

9Il faut noter d’abord que pour conduire la fouille, et à la demande du service régional de l’Archéologie, la Ville de Nice a ouvert un poste de conservateur du patrimoine qui a permis le recrutement d’un archéologue municipal, rattaché, à la demande du directeur général des services, à la mission tramway. Comme le tramway était de la compétence de la communauté d’agglomération (CANCA), un détachement a été fait auprès de celle-ci (direction du tramway, service des infrastructures), en gardant malgré tout un pied dans l’administration municipale. En outre, la nomination de l’archéologue municipal comme responsable scientifique par arrêté du Préfet de région a permis de diriger la fouille dont le marché avait été remporté par l’Inrap. Ainsi, tout concourrait à construire une véritable archéologie niçoise.

11En parallèle, la position en interne au sein de la collectivité a permis de travailler avec les ingénieurs pour concevoir un système de poutres, destinées à supporter la plateforme du tramway, qui soit le plus petit possible. Reposant sur une paroi moulée périphérique, ils étaient l’élément principal pour permettre, une fois la fouille terminée, une éventuelle conservation des vestiges en sous-sol. Cette volonté, très largement soutenue par le service régional de l’Archéologie, a conduit à créer une crypte archéologique, en même temps que l’on réalisait la fouille (Bouiron, Suméra, 2014).

12La fouille s’est terminée en septembre 2007, quelques mois avant les élections municipales qui ont vu la victoire d’un nouveau maire, Christian Estrosi. Dans le sillage de son élection en mars 2008 est apparu un délégué au patrimoine historique, Jean-Marc Giaume, celui-là même qui s’était préoccupé du sort du Pont-Vieux lors du diagnostic archéologique.

La création du service archéologique municipal et la fouille de la colline du Château

13Jusque-là il n’existait donc qu’un poste d’archéologue municipal, dont l’action n’était pas centrée uniquement sur la fouille du tramway. En effet, lors de la création du poste, le service régional de l’Archéologie avait proposé que les demandes de fouille, faites depuis plusieurs années par la Mission patrimoine de la Ville sur la colline du Château, fassent l’objet d’une réflexion dans le cadre d’un Projet collectif de recherche (PCR). Aussi, dès 2006, une première demande était faite, avec un premier programme triennal de 2006 à 2008. Durant toutes ces années, un travail de reprise de la documentation a été engagé tandis que des premières études approchaient les vestiges encore en place, principalement de l’ancienne cathédrale Sainte-Marie. Bien qu’isolé au sein de la structure municipale (avec toutefois des liens importants avec le Musée d’archéologie), c’est au sein du CEPAM que les contacts scientifiques les plus fructueux ont été noués. C’est principalement avec Yann Codou que s’est développée une collaboration qui a conduit de nombreux étudiants à participer à ce programme de recherche.

14À l’issue de la fouille, la mise à disposition auprès de la CANCA ayant cessé et la Mission tramway ayant disparu, la proposition de créer un véritable service au sein d’une nouvelle direction du Patrimoine historique a permis de structurer véritablement l’archéologie municipale. Son action a été portée à plusieurs niveaux. Tout d’abord il a fallu la doter de personnels ; une assistante, Patricia Martin, puis deux agents du Musée archéologique, Alain Grandieux et Danièle Bocchino, ont intégré le service. La demande d’obtention d’un agrément a nécessité le recrutement d’un archéologue, Romuald Mercurin. Le service a reçu son agrément pour les diagnostics archéologiques, ce qui a permis de débuter une action dans le domaine de l’archéologie préventive. Plusieurs diagnostics ont été entrepris, mais le plus important, à venir, est celui de la deuxième ligne du tramway. Nous y reviendrons dans le chapitre suivant, mais cette opération a constitué la deuxième phase de structuration du service. Par la suite, Hervé Barelli, historien, a rejoint un temps le service avant d’être remplacé par Fanny Lelandais, historienne travaillant sur le bâti et les textes d’archives, et Stéphane Morabito, épigraphiste et archéologue sous-marin.

15Durant le même temps, le PCR de la colline du Château a pris de l’ampleur et des premières fouilles sont entreprises en 2009. Concentrées à la fois sur la cathédrale [ill. 4] et sur la fortification de la ville haute, elles ont accueilli de jeunes archéologues avec des contrats pour encadrer les dizaines de bénévoles venus de toute la France. La redécouverte du cimetière a en outre nécessité la présence d’étudiants anthropologues. Le PCR de la colline du Château a bénéficié d’une médiatisation importante. à l’instigation de l’adjoint délégué au patrimoine historique, le maire est venu annuellement visiter la fouille, manifestant ainsi tout l’intérêt qu’il avait pour ces découvertes et pour l’archéologie de manière plus générale. Cela a constitué un élément clef là aussi pour la croissance du service (Bouiron, 2013).

16En parallèle encore, l’action du jeune service s’est poursuivie auprès de tous les services de la ville ou de la communauté d’agglomération qui pouvaient y être confrontés. Dès 2006, des premiers suivis d’opération sur les bâtiments de l’ancien couvent des Franciscains contribuent à nouer des relations de travail avec les services techniques en charge des travaux sur le patrimoine communal. Une première étude, confiée à un archéologue du bâti, Fabien Blanc, amène à la redécouverte de la galerie du couvent. Progressivement, les archéologues sont présents aux visites dans le Vieux-Nice puis au comité du secteur sauvegardé.

17La meilleure visibilité vers les élus et les Niçois sera assurée par la création de la crypte archéologique [ill. 5], qui a représenté un enjeu patrimonial majeur pour la Ville de Nice, et dont l’aménagement s’est fait en quelques années (Bouiron, 2015). Il faut rappeler que la création de la crypte a été pensée dès le début de la fouille. Au-delà du simple respect du cahier des charges du service régional de l’Archéologie, il a été nécessaire de prévoir ce que serait la circulation à l’intérieur de l’espace sous dalle. Pour cela, un certain nombre de vestiges ont été soit démontés (comme les murs de la chapelle Saint-Sébastien contre la tour), soit recoupés (murs du ravelin et du bastion au contact de la tour) ou un peu entaillés (élargissement de l’ouverture de l’aqueduc dans le deuxième mur de bastion). Les décisions ont été prises en concertation étroite entre le directeur scientifique de la fouille et le service régional de l’Archéologie. À l’issue de la fouille, cette démarche a permis la création d’un cheminement continu d’un bout à l’autre du chantier. Dans le cadre d’une ouverture rapide au public, souhaitée par la municipalité, un aménagement spécifique a été mis en place, une passerelle permettant un parcours à travers les vestiges. Ce cheminement permettait la visite par un petit groupe, sous la conduite d’un guide, avec des panneaux explicatifs. Pour des raisons de sécurité (l’ouvrage, long de 80 m, ne disposant que d’une seule sortie), les groupes ne peuvent pas comporter plus de quinze personnes.

18Le parcours démarre par le square Toja, où l’accès permet de descendre au niveau de la tour Pairolière [ill. 6] remontant à la fin du XIV^e siècle, puis emprunte l’ancienne voie d’Italie pour arriver dans l’emprise du ravelin du XV^e siècle. Son franchissement amène au pied d’un premier bastion (construit dans les années 1520 ?) qui a connu le siège franco-turc de 1543, puis à un second bastion prolongé par l’emprise du fossé du XVII^e siècle. En bout de fouille, les vestiges du pont qui permettait le franchissement du fossé sont particulièrement visibles.

19Une passerelle surélevée et des éclairages colorés variables suivant la nature des vestiges constituent le cadre de la visite. Pour y pénétrer, un espace d’accueil avec un escalier et un ascenseur ont été construits afin de passer de la surface du square Jacques Toja aux vestiges de la fortification, sous les rails du tramway. Par la médiatisation qu’a entraînée son ouverture au public, par le lien avec plusieurs services de l’agglomération, comme par la résonnance qu’elle a eu auprès du maire et de l’équipe municipale, elle a servi de support à une image positive de l’archéologie et du patrimoine enfoui, loin de l’image d’empêcheur de construire qui était celle qui prévalait vis-à-vis des archéologues au démarrage du diagnostic archéologique du tramway.

20En parallèle, l’arrivée dans le service de Stéphane Morabito, qui avait jusque-là organisé des opérations d’archéologie sous-marine avec des plongeurs bénévoles, a donné l’occasion de développer un nouveau champ de recherche au sein de la collectivité, celle-ci devenant la seule en France à pouvoir intervenir en mer.

La deuxième ligne du tramway et le renforcement du service archéologique

21Si en 2009 et 2010 le service archéologique a pu prendre son essor, il a fallu l’arrivée de la deuxième ligne du tramway pour véritablement asseoir durablement son existence. Durant les premières années, le manque de personnel permanent rendait en effet fragile son développement. Limitée aux seuls diagnostics archéologiques, son action dans le domaine de l’archéologie préventive restait peu importante. Par ailleurs, la fouille programmée de la colline du Château restait dépendante d’un petit nombre d’archéologues encadrant l’opération. La volonté de créer une seconde ligne de tramway est-ouest, beaucoup plus longue que la première, a servi de déclencheur pour la seconde phase de développement du service en accord avec la direction générale adjointe pour la culture et la direction du patrimoine historique au sein de laquelle prenait place le service archéologique.

22Le tracé a été conçu en deux tronçons distincts : le premier, à l’est, traverse le centre-ville en souterrain, à une profondeur d’environ 25 m. Le second, à partir du boulevard Grosso, se fait de façon aérienne mais arrive jusqu’à la plaine du Var qu’il commence à remonter. La longueur du tracé, comme la nature de sa construction, permettait dès lors d’avoir une vision globale est-ouest de la plaine de Nice comme de l’ensemble des vallons se déversant dans la mer. En interne, une première alerte a été créée auprès des services techniques de la communauté d’agglomération, transformée ensuite en Métropole. En prévision du diagnostic archéologique, des premiers contrats ont été passés pour le recrutement de quatre archéologues supplémentaires : Lise Damotte (archéologue et céramologue), Aude Civetta (archéo-anthropologue), Éric Guilloteau (travaillant sur la fortification du château de Nice) et Élodie Sanchez (formée à l’archéologie du bâti). Le service régional de l’Archéologie ayant prescrit un diagnostic, les contrats ont été prolongés sur une durée de trois ans, ouvrant la voie à la pérennisation de ces emplois. Dès lors, un nouveau dossier a pu être déposé pour la demande d’agrément du service, qui obtint ainsi la possibilité de faire des fouilles pour les périodes allant de la Protohistoire à nos jours. Le service territorial a pris le parti, depuis le début, de ne pas chercher à obtenir une compétence pour la période préhistorique. Nice présentait en effet la particularité d’avoir une équipe, importante, travaillant sur le Paléolithique (autour du professeur Henri de Lumley et de la grotte du Lazaret, gérée par le conseil général des Alpes-Maritimes) et une équipe travaillant sur la Préhistoire récente, autour de Didier Binder au sein du laboratoire du CEPAM. Il était donc plus judicieux d’être complémentaire de ces deux équipes.

23Avec la réalisation du diagnostic de la deuxième ligne du tramway, conduit par Romuald Mercurin, l’équipe développe ses compétences (Mercurin et al., 2014). Durant la même période, les liens se renforcent avec les services techniques, désormais tous passés à la nouvelle Métropole et la fouille de la colline du Château prend une nouvelle ampleur. Des collaborations se renforcent avec l’Inrap, avec la réalisation d’une fouille en groupement d’opérateurs sur la rue Fodéré et des conventions de collaboration sont passées avec plusieurs laboratoires en archéologie.

24La dernière étape de développement devient effective avec la mise en œuvre d’une fouille sur l’une des stations de la deuxième ligne du tramway, au niveau de la rue Ségurane. Pour pouvoir gérer au mieux cette opération, il est apparu plus efficace de « mutualiser » le service archéologique au niveau de la Métropole afin de conduire cette fouille en régie directe (donc sans mise en concurrence). Cette dernière transformation a été compliquée : outre les difficultés internes qu’elle pouvait entraîner, il a fallu trouver une forme administrative (sous la forme d’un service commun entre la Métropole et la Ville de Nice) qui a de facto fait perdre l’agrément d’archéologie préventive (du fait du changement d’employeur) et causé quelques petites difficultés car il s’agit d’un regroupement autorisé seulement depuis 2014 et encore inconnu du ministère de la Culture et de la Communication. Malgré tout, tout a été fait pour ne pas entraver le démarrage de la fouille, qui a pu débuter en août 2015.

Un service désormais « adulte » mais toujours en devenir

25Entre le début du diagnostic de la première ligne du tramway, en octobre 2003, et la réalisation de la première phase de fouille de la deuxième ligne du tramway, en août 2015, la ville de Nice a connu une transformation importante du point de vue de la prise en compte du patrimoine archéologique. La création d’un poste d’archéologue municipal puis d’un véritable service a servi de point de départ à un développement de la connaissance historique et archéologique du territoire de la ville de Nice qui était jusqu’alors très embryonnaire pour les périodes antiques et médiévales.

26Structurée autour de grandes actions dans le domaine de l’archéologie préventive (lignes 1 et 2 du tramway et nombreux diagnostics) ou de grandes thématiques de recherche (PCR de la colline du Château, PCR de Cimiez avec la fouille de l’oppidum, recherches en archéologie sous-marine dans la baie des Anges, bâti ancien du Vieux-Nice), la recherche a été menée de manière active tout au long de la décennie écoulée. Avec toujours l’objectif d’en publier les résultats, en particulier dans la revue Archéam qui aura accueilli durant toutes ces années de très nombreux articles écrits par les membres du service municipal, ou par le biais d’ouvrages comme celui paru sur la colline du Château (Bouiron, Guilloteau, 2015 ; Bouiron et al., 2015) ou la collection de textes médiévaux et modernes sur l’histoire du comté de Nice (Barelli, Bouiron, 2014).