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Temporalités techniques

Les techniques et la très longue durée : réflexions croisées

Techniques and the Very Long Term: Cross-References
François Jarrige, Jean-Baptiste Fressoz, Anaël Marrec, Marie Durand et Alexandre Disser
p. 207-227

Texte intégral

1Lors de l’atelier « Techniques et temporalités », organisé dans le cadre des activités du Groupement de recherche « Techniques et production dans l’histoire », a eu lieu une table ronde qui a permis à des chercheurs et des chercheuses de différentes disciplines (archéologie, anthropologie sociale et histoire) de partager leurs réflexions autour de la temporalité de leurs objets de recherche. Nous publions ici leurs contributions à ces interrogations, qui mettent en évidence les perspectives, les débats et les limites qui émergent lorsque l’on s’intéresse aux techniques dans la longue durée. Elles apportent ainsi des éléments pour penser dans toute leur complexité et leur richesse les formes du temps, leurs stratifications et persistances, en critiquant la linéarité des récits et les approches discontinuistes, mais aussi en soulignant les différentes durées dans lesquelles s’inscrivent les pratiques techniques.

Défaire la linéarité des temporalités techniques

François Jarrige

Université de Bourgogne 2

  • 1 Charle, 2011 ; Hartog, 2016.
  • 2 Fureix, Jarrige, 2015.

2La question du temps et la déconstruction de sa représentation comme un mouvement ascendant vers le progrès ou comme une flèche linéaire est depuis longtemps au cœur de l’épistémologie de l’histoire, à l’origine de riches discussions sur les « régimes d’historicité », le poids du « présentisme », les « discordances » temporelles ou encore les approches contrefactuelles1. Alors que le rapport au temps est devenu une obsession des sociétés contemporaines, le désir de rompre avec les narrations trop linéaires, de faire ressurgir la pluralité des expériences, a conduit à d’importants déplacements. Avec Emmanuel Fureix, nous avions ainsi tenté un panorama réflexif des manières d’écrire l’histoire du xixe siècle après l’effondrement des visions progressistes2. Nous proposions une histoire de ce siècle, le premier à se nommer et qui fut sans cesse traversé de débats et d’interrogations sur l’avenir, émancipée des linéarités et de la téléologie progressiste, en insistant sur la pluralité des expériences.

  • 3 Jarrige, 2009, 2014.
  • 4 Jarrige, 2023.

3L’histoire des techniques a sans doute été l’un des domaines le plus enclin aux constructions linéaires et téléologiques, se focalisant sur le récit des inventions, la succession des systèmes techniques et la logique des substitutions, comme si toute technique nouvelle chassait nécessairement celles en usage. Cette vision, privilégiant le succès des macro-inventions et l’idée de révolution technique, a longtemps dominé les récits historiques, autour notamment de la révolution de la vapeur devenue l’étalon pour mesurer l’innovation dite « de rupture ». En m’attachant aux oppositions et négociations ouvrières à l’égard des machines, comme aux dégâts et crises environnementales qui accompagnent l’essor des nouveaux systèmes techniques, je me suis efforcé, avec d’autres, de rompre cette flèche du temps3. En approfondissant l’étude et la persistance des équipements jugés obsolètes, comme les manèges et les appareils à force animale, manifestations d’un « progrès avec prudence », il s’agissait aussi d’explorer d’autres temporalités techniques à la fois parallèles et concurrentes, portées par des groupes et des acteurs différents4.

  • 5 Hunter, 1979.
  • 6 Benoit, 2020.
  • 7 Hilaire-Pérez, Jarrige (dir.), 2020.

4De nombreux auteurs ont précocement questionné la linéarité des temporalités techniques depuis 40 ans. Dans la foulée des études menées en Amérique du Nord par Louis Hunter par exemple5, l’historien Serge Benoit a ainsi interrogé les singularités de la voie française de l’industrialisation qu’il a proposé de nommer « la modernité de la tradition6 ». Contre la thèse du retard, et la vision de l’industrialisation nécessairement arrimée aux grosses machines fossiles, il s’est intéressé aux convertisseurs anciens, « classiques », en premier lieu hydrauliques, pour montrer leur importance, les innovations constantes dont ils firent l’objet, leur adaptation à la diversité des contextes et des usages. Loin d’une technique périmée ou archaïque, il a montré combien l’énergie hydraulique joua un rôle essentiel, modelant les rapports sociaux et l’organisation productive de nombreux départements comme l’Eure ou la Côte-d’Or, sur lesquels ont porté ses premières enquêtes7.

  • 8 Edgerton, 1998.
  • 9 Edgerton, 2013.
  • 10 Mom, 2003, 2009.
  • 11 Fressoz, 2024.

5Un mouvement parallèle avait lieu outre-Manche autour du travail de l’historien des techniques David Edgerton, qui mettait en cause la sacralisation de l’innovation en s’appuyant sur la sociologie et l’économie (la path-dependency) pour souligner la force des apprentissages, des améliorations, des investissements dans la qualification sociale des techniques, tout en insistant sur la lenteur des modalités de diffusion, à commencer par les machines à vapeur8. Les travaux d’Edgerton ont placé les usages et la non-linéarité du temps technologique au cœur d’une relecture riche de l’histoire globale9. Le même type d’approche était développé en parallèle par l’historien des mobilités, Gijs Mom, explorant la lente motorisation du transport. Il pointait combien le cheval « n’a pas été automatiquement remplacé par un véhicule à moteur : des tendances asynchrones, discontinues et surtout complémentaires ont été la règle plutôt que l’exception10 ». Loin de disparaître ou d’être remplacée par le charbon, l’énergie animale s’est en effet développée parallèlement à la mécanisation du travail pour compenser localement le manque de cours d’eau ou lorsque la vapeur était jugée trop coûteuse et dangereuse, dans une logique symbiotique récemment explorée de façon plus systématique par Jean-Baptiste Fressoz11.

6S’il existe évidemment des changements et des transformations des systèmes techniques et énergétiques, ceux-ci ne s’inscrivent généralement pas dans les dynamiques temporelles linéaires au cœur des récits habituels de la « révolution industrielle » et du « progrès technique ». Au xviiie siècle et au début du xixe siècle, les moteurs animés représentent ainsi une part importante de l’énergie mobilisée alors que le pouvoir musculaire continue de dépasser la force combinée des moulins à vent, des moulins hydrauliques et de la vapeur. Dans de nombreux secteurs – le textile, le bâtiment comme dans les petites industries rurales – ces équipements à manège offraient un moyen d’utiliser la force animale. Loin d’être uniquement des archaïsmes ou des techniques traditionnelles, il s’agissait d’innovations qui accompagnèrent l’industrialisation en offrant de nouvelles opportunités d’usage et des réponses originales afin de répondre aux besoins de force motrice dans un contexte de doutes à l’égard des énergies fossiles.

  • 12 Krebs, Weber (dir.), 2021 ; Bernasconi et al. (dir.), 2022.

7Au lieu d’explorer comment l’innovation surgit, se diffuse, circule dans l’espace et le temps, il s’agit aussi de comprendre comment un équipement devient obsolète, comment il se dégrade jusqu’à être progressivement démantelé ou mis au rebut12. Cette perspective, peu présente jusqu’à présent, tend à se développer, en mettant au cœur de l’analyse la question de la « désaffectation », de la « défabrication » ou, pour le dire comme les chercheurs anglophones, de « l’ex-novation » d’un appareil ou d’une infrastructure, question devenue particulièrement urgente à l’heure de l’anthropocène et des appels à abandonner ou démanteler les systèmes techniques fondés sur le cycle du carbone.

L’histoire de l’énergie : une expansion symbiotique

Jean-Baptiste Fressoz

CNRS-EHESS

  • 13 Gille, 1978 : « Le charbon est devenu depuis la fin du xviiie siècle la principale source d’énergie (...)

8Il se pourrait que les questions de temporalité et de transitions entre systèmes techniques aient beaucoup trop préoccupé les historiens. « Les systèmes techniques se sont succédé dans le temps », écrivait Bertrand Gille. Lorsqu’on voit les erreurs qu’il a commises en matière d’histoire de l’énergie, on comprend que cette notion de système devrait être maniée avec beaucoup de circonspection13. En focalisant le regard sur les « cohérences » reliant techniques, matières et énergies à chaque époque, les « systèmes techniques » ont en effet entretenu une vision discontinuiste de l’histoire de l’énergie, calquée sur les dynamiques de substitution technologique. Cinquante ans après Gille et bientôt un siècle après Mumford, les livres d’histoire de l’énergie continuent d’être organisés selon un prisme transitioniste : des chapitres initiaux traitent du bois et de l’hydraulique à l’époque préindustrielle ; les chapitres centraux s’occupent de charbon et de vapeur au xixe siècle ; s’ensuivent des chapitres sur le pétrole, l’électricité et le nucléaire. Et pourtant, la consommation de charbon s’envole au xxe siècle, de même que celle de bois. Par exemple, de nos jours, le bois produit deux fois plus d’énergie que le nucléaire.

  • 14 Allen, 2012.

9Cette question ne relève pas seulement du débat académique sur l’interprétation de la modernité. L’enjeu est aussi celui de la politique de l’histoire face au changement climatique. Depuis les années 2000, on cherche dans l’histoire de l’énergie des indices, des bribes de réponse aux questions contemporaines les plus brûlantes : combien de temps la transition pourrait-elle prendre ? Comment la hâter ? Quel est le rôle du marché ?de l’État ? de l’innovation ? Des historiens se sont prêtés de bonne grâce à ce jeu, et l’on a pu voir des collègues spécialistes de la révolution industrielle prodiguer des conseils en transition, alors même qu’ils n’avaient jamais étudié que des additions énergétiques14.

10Les livres marquants de ces dernières années en histoire de l’énergie – ceux de Tim Mitchell et d’Andreas Malm – ont repris le récit transitioniste standard, et l’exacerbent même, en plaquant des récits politiques phasistes sur une histoire énergétique qui ne s’y prête pas. Concernant le livre de Malm, il n’y a pas vraiment de transition de l’hydraulique à la vapeur : l’énergie hydraulique – et les renouvelables en général – connaissent un essor important dans le monde entier au xixe siècle. Concernant le livre de Mitchell : le pétrole ne contourne évidemment pas les mineurs, tout simplement car il ne remplace pas le charbon. Le pétrole sert avant tout à faire avancer des voitures qui, à leur tour, nécessitent beaucoup de charbon pour être fabriquées. Les champs pétroliers américains des années 1950-1960 emploient plus de monde que les mines de charbon, et le nombre de mineurs diminue non pas à cause du pétrole, mais grâce aux gains de productivité dans les mines.

  • 15 Samuel, 1977 ; Schallenberg, 1975 ; Hunter, 1979 ; Benoit, 2020 ; Evans, Rydén, 2005 ; Baratay, 201 (...)
  • 16 Le titre du livre classique de Louis C. Hunter, Waterpower in the Century of the Steam Engine, 1780 (...)

11Une critique importante des fresques transitionistes est venue d’historiens fins connaisseurs des modes de production du xixe siècle et, par conséquent, moins impressionnés par le charbon et la vapeur que leurs collègues spécialistes d’énergie. Ils ont montré l’importance, pour l’industrialisation, d’énergies considérées à tort comme traditionnelles : qu’il s’agisse du muscle humain, de l’hydraulique dans les usines, du bois dans la sidérurgie, des animaux dans les transports, les travaux agricoles ou comme force mécanique industrielle15. Mais en tant que critique de la transition, cette histoire des persistances reste au milieu du gué16. L’idée selon laquelle les énergies traditionnelles « résisteraient » face aux fossiles prend encore trop au sérieux le récit transitioniste.

  • 17 Fressoz, 2024.

12Pour comprendre l’histoire de l’énergie, il faut se défaire à la fois du darwinisme schumpéterien mais aussi de la dialectique des vainqueurs et des vaincus. Aux xixe et xxe siècles, les renouvelables ne font pas de la résistance, elles ne font pas face aux fossiles, mais progressent et se développent grâce à ces dernières. Le charbon et le pétrole ont énormément accru la production de bois et donc sa disponibilité pour des usages énergétiques. Les renouvelables se modernisent grâce à l’acier et au ciment, deux matériaux étroitement dépendants du charbon, qui leur permettent de capter bien plus efficacement des énergies diffuses. En France, les turbines en acier des années 1900 produisent trois fois plus d’énergie que les moulins en bois de 1800, à un coût bien moindre, et cela avant même l’essor des grands barrages hydroélectriques évidemment tributaires du pétrole et du charbon pour leur construction. De même, le pétrole et le gaz ont permis d’accroître la production agricole et donc la disponibilité du muscle humain. Pour ces raisons et bien d’autres encore, l’histoire de l’énergie n’est ni celle de transition, ni celle des résistances, ni même d’additions, c’est l’histoire de l’intrication et de l’expansion symbiotique de toutes les énergies17.

Les temporalités dans l’histoire des techniques de l’énergie au xxe siècle

Anaël Marrec

Centre François Viète, Nantes Université

  • 18 Gras, 2003.
  • 19 Massard-Guilbaud, 2019 ; Fressoz, 2013.

13L’histoire des sociétés industrielles repose sur la mise à disposition d’une quantité croissante d’énergie grâce aux techniques qui portent le rêve d’une maîtrise de l’espace et du temps sur le modèle d’une machine thermique puissante, modulable et transportable18. Les conséquences concrètes de cette accumulation des forces productives sont aujourd’hui bien palpables, et l’on peut aisément interpréter les problèmes écologiques contemporains comme des débordements temporels, tel le réchauffement climatique lié à la libération en quelques décennies d’énergie accumulée pendant des centaines de milliers d’années ou la génération de déchets radioactifs hautement et durablement dangereux, excédant les horizons temporels des sociétés humaines. Ainsi, la crise écologique rappelle aux historiens de l’ère industrielle la matérialité des modes de vie contemporains et l’historicité des environnements. Celles-ci appellent de nouveaux récits en histoire des techniques de l’énergie qui intègrent les environnements comme acteurs dynamiques et où l’innovation n’est plus le moteur d’un progrès universellement bienfaiteur, « désorientant » de ce fait la flèche du temps19. La question des temporalités dans l’histoire des énergies renouvelables et nucléaires m’amène à suggérer deux perspectives dans l’optique d’une histoire sociale et environnementale des changements énergétiques contemporains.

  • 20 Edgerton, 2013.

14(1) Des appels salutaires à une histoire, non des innovations, mais des usages, ont souligné l’importance cruciale de rendre compte des réalités techniques qui étaient celles de la majorité des sociétés passées20. Cependant, étudier les choix techniques passés suggère aussi de se pencher sur une histoire des innovations, si tant est qu’elle soit délestée des horizons téléologiques et techno-optimistes attachés à la notion. Quoique toujours et nécessairement ancrées dans des pratiques et des savoirs plus anciens, les innovations ont opéré des changements socio-environnementaux majeurs. Le moment des projets techniques révèle des rapports de pouvoir entre les différents acteurs ainsi que leurs motivations, mais ils montrent aussi l’agentivité des environnements, qui, condition nécessaire des projets, s’avèrent souvent facteur d’échecs. Ces échecs découlent souvent de résistances et de conflits sociaux ou de batailles perdues contre des environnements peu coopérants.

15(2) Par ailleurs, des bilans quantitatifs ont fait état d’une pression environnementale exponentielle à l’ère industrielle et du caractère illusoire de « transitions énergétiques » passées, pensées comme la substitution d’un ensemble des sources d’énergie à un autre. Ces bilans matière-énergie ne suffisent pas à expliquer et comprendre l’évolution des modes de mobilisation de l’énergie, qui non seulement sont le fruit de choix techniques passés, mais impliquent aussi des bouleversements environnementaux et sociaux différenciés en fonction des territoires. Leur compréhension nécessite une histoire au ras des territoires, qui restitue aux acteurs et aux écosystèmes leur agentivité et rende compte de la pluralité des expériences du changement.

  • 21 Marrec, 2023.
  • 22 Marrec, 2024.
  • 23 Marrec, 2018.

16Ainsi, l’histoire du projet échoué de centrale nucléaire de l’estuaire de la Loire (1974-1997) montre non seulement une mobilisation anti-nucléaire particulièrement tenace, mais aussi le rôle d’un écosystème mouvant, qui fut à la fois un moteur et un obstacle pour EDF, ainsi qu’un levier d’action juridique pour les mobilisations écologistes21. L’analyse d’une centrale électrique aux biogaz issus d’une décharge géante à Montréal (1996-aujourd’hui) met quant à elle en évidence l’importance des héritages environnementaux et sociaux dans les territoires d’implantation, ainsi que celle de la forme socio-technique des infrastructures énergétiques. Les habitants et travailleurs qui souhaitaient bénéficier de l’énergie produite en compensation des nuisances historiquement subies se mobilisent contre l’injection de l’électricité produite dans le réseau électrique parce qu’ils considèrent qu’elle ne permet pas une juste redistribution de la ressource issue d’un héritage toxique22. Plus généralement, l’histoire des énergies renouvelables en France sur le long xxe siècle (1880-1990) révèle les inerties matérielles et cognitives qui constituent un véritable verrou sociotechnique à un modèle énergétique qui ne serait pas fondé sur la croissance23. Deux manifestations de ce phénomène sont, d’une part, l’abandon progressif, au cours du xxe siècle, des usages locaux des énergies renouvelables et, d’autre part, des projections énergétiques de plus en plus affirmées vers leur intégration dans les réseaux. Les temporalités sont cruciales dans ce double phénomène : si les énergies renouvelables ont perdu de leur importance relative, c’est en partie qu’elles échappent, plus ou moins en fonction de leur nature, à la possibilité de régularisation et de production à volonté. Ce constat est classique en histoire de l’énergie. Un fait moins connu est l’ancienneté et la persistance du projet d’intégration des énergies renouvelables dans les réseaux. Malgré ces échecs récurrents, ces projets ont alimenté la confiance dans le progrès technologique et sa capacité à toujours repousser les limites du mode de production industriel, ainsi que l’horizon temporel de son développement, plutôt que de remettre en question le modèle de croissance énergétique lui-même.

  • 24 Marrec, 2022.
  • 25 Bruyerre, 2020.
  • 26 Carnino, Hilaire-Pérez, Lamy, 2024 ; Bécot, 2022.
  • 27 Labussière, Nadaï, 2020.
  • 28 Pritchard, 2014.

17Pour conclure, il me semble inadéquat de décrire les changements énergétiques passés comme le passage d’un système énergétique (organique) à un autre (fossile). La notion de « système énergétique » tend à surinterpréter des cohérences technologiques et à réduire les pratiques et les espaces à leur dimension énergétique24. Les mutations contemporaines des modes d’utilisation de l’énergie se décrivent bien davantage comme la disparition progressive d’une multiplicité d’usages localisés et intégrés dans des contextes non exclusivement énergétiques au profit de macro-systèmes techniques exclusivement destinés à l’extraction et la distribution d’énergie. Cependant, au-delà de ces constats généraux, des études de cas localisées montrent que les différents modèles d’utilisation des énergies renouvelables ne se laissent pas saisir selon une dichotomie aussi nette entre intégration dans le réseau et déconnexion25. Comme y invitent l’histoire globale des techniques et l’histoire environnementale26, une multiplication d’analyses multiscalaires et territorialisées permettront de mettre en lumière les « temporalités entremêlées27 » des acteurs, des techniques et des environnements28. Un tel geste permet aussi, en restituant leur agentivité, de sortir les sociétés et les environnements du rouleau compresseur de l’anthropocène, dont les récits victorieux des innovations technologiques, mais aussi les seuls tableaux de flux, risquent d’accentuer le pouvoir d’écrasement.

L’histoire devant soi : techniques et temporalités dans le nord du Vanuatu (Mélanésie)

Marie Durand

Laboratoire interdisciplinaire en études
culturelles (LinCS – UMR 7069), Université de Strasbourg

  • 29 Hau’Ofa, 2000.

That the past is ahead, in front of us, is a conception of time that helps us retain our memories and to be aware of its presence. What is behind us cannot be seen and is liable to be forgotten readily. What is ahead of us cannot be forgotten so readily or ignored, for it is in front of our minds’ eyes, always reminding us of its presence. The past is alive in us, so in more than a metaphorical sense the dead are alive – we are our history.29

  • 30 Fabian, 2014.
  • 31 Thomas, 1991.
  • 32 Gluckman, 1940a, 1940b ; Balandier, 1951.
  • 33 Gell, 1992.
  • 34 Bensa, Fassin, 2002 ; Bensa, 2006 ; Naepels, 2011.
  • 35 Sahlins, 1989 ; Wachtel, 1990.

18La question des temporalités n’est pas neutre pour l’anthropologie sociale et culturelle : elle fut l’un des moteurs de la remise en cause des paradigmes de la discipline dans les années 198030. Dans la première moitié du xxe siècle, les transformations temporelles des sociétés étaient en effet mises en retrait dans un certain nombre d’analyses synchroniques centrées sur les traits structurels des sociétés et sur leurs cohérences culturelles, les plaçant dans un « hors du temps31 » largement critiqué depuis32. Au contraire, la pluralité des expériences personnelles ou collectives du temps33 constitue un axe fort des recherches contemporaines, dont certaines interrogent directement les rapports de l’anthropologie à l’histoire34. Ces croisements disciplinaires ont produit un appareil conceptuel riche35, affirmant le caractère fondamental de l’historicité des collectifs à partir d’analyses fines des vécus temporels, des co-présences dans le temps, des rencontres, des conflits, des résistances, des hybridations et des catégories opératoires de l’action sociale.

  • 36 Thomas, 1991.

19Dans des régions telles que le Pacifique sud où l’asymétrie des sources écrites ne permet pas de faire émerger à leur juste mesure les voix, les logiques d’actions des Océaniens et leurs transformations au cours du temps, l’étude des traces matérielles de ces histoires constitue une alternative. L’historien et anthropologue Nicholas Thomas36 décrypte par exemple les logiques temporelles différentes des échanges entre insulaires et Européens au xviiie et au début du xixe siècle, en analysant les objets et les gestes des transactions ainsi que les transformations des systèmes d’échanges aux Marquises ou à Fidji. Penser les expériences du temps par le biais des rapports globalisés entre productions et circulations matérielles ainsi que de l’analyse des systèmes techniques et de leurs transformations pose alors, que les recherches soient historiques ou contemporaines, la question des épistémologies vernaculaires. Les quelques éléments qui suivent proposent une réflexion sur la place centrale de celles-ci à partir du travail d’ethnographie des techniques de construction des maisons que je mène en Mélanésie, avec les communautés de l’île de Mere Lava, au nord du Vanuatu, depuis 2010.

20Sur cette île, et plus largement dans la région, les techniques de construction impliquent des connaissances localisées au sens fort du terme. Les savoirs et savoir-faire techniques de construction font ainsi partie d’ensembles associés à des lieux dont ils sont jugés originaires. Ces lieux eux-mêmes, nommés génériquement ne-verê dans la langue mwerlap, correspondent à des espaces géographiques délimités, mais également aux réseaux d’humains et de non-humains originaires de ces espaces (les vivants, les ancêtres, les esprits), ainsi qu’à toutes les pratiques matérielles par lesquelles ils et elles l’habitent. Discuter des techniques de construction revient donc à parler de savoir-faire produisant des personnes situées. À ce titre, les savoirs techniques font l’objet de droits qui doivent être payés afin de les acquérir, et qui président ainsi aux circulations des techniques.

  • 37 Bien que les femmes puissent prendre part aux chantiers de construction des maisons et y effectuer (...)

21Pour les hommes, montrer leur capacité à maîtriser les techniques de construction revient aussi à produire une déclaration d’ordre politique, au sens où ils démontrent leurs capacités d’action locales, leurs liens avec les ancêtres à l’origine de ces savoir-faire, et où cela ouvre pour eux et leurs familles des possibilités d’actions futures dans ces lieux. Pour les femmes également, l’habileté technique produit des effets similaires, majoritairement dans d’autres domaines que la construction37. Dans ce cas, le sens vernaculaire de « techniques » comprend des agentivités sociales et territoriales singulières.

22Par ailleurs, cette compréhension localisée des savoirs et savoir-faire ne se limite pas aux techniques qualifiées de « coutumières ». Elle peut s’appliquer à des matériaux et/ou des techniques exogènes. Les circulations évoquées précédemment sont multiples : sans forcément perdre leurs ancrages d’origine, de nombreuses techniques sont relocalisées par le biais d’achats de droits. Les innovations matérielles constituent ainsi des sujets de conversation fournis dans la vie quotidienne, et l’on croise très régulièrement des personnes essayant de nouvelles choses ou mettant à profit des connaissances acquises à l’extérieur de l’île. Montrer son habileté à innover en mobilisant des techniques ou des matériaux exogènes est l’une des manières qu’ont les personnes de légitimer et de renforcer leurs statuts locaux : ils et elles démontrent alors leurs capacités de maîtrise de réseaux sociaux, spatiaux et temporels étendus.

23Pour ce qui est des constructions, le jeu sur les matériaux locaux ou importés, ainsi que les innovations architecturales, ou l’emploi de techniques coutumières permettent aussi de négocier les temporalités du monde contemporain et de continuer d’assurer une présence dans l’île tout en travaillant régulièrement à l’extérieur de celle-ci. Pour la construction des maisons, les choix sont ainsi faits entre deux points extrêmes :

  • Construire en matériaux végétaux locaux, ce qui demande la mobilisation sociale de la parentèle pour assurer les étapes du processus technique, ainsi qu’une présence continue pour assurer l’entretien du bâti – qui pourrit rapidement lorsqu’il n’est pas habité. Les matériaux végétaux utilisés permettent de démontrer les capacités du constructeur à mobiliser des parents nombreux sur un temps limité (un à trois mois environ). Souvent, ce choix s’accompagne d’un futur pensé sous l’angle d’une présence sur l’île, car il est nécessaire de reconstruire entièrement ces maisons tous les cinq à dix ans ;
  • construire en béton et matériaux importés (tôles, poutres) des maisons généralement très grandes, rectangulaires et sans saillance technique particulière. Ce choix, souvent fait par des personnes qui ne résident pas sur l’île et sont employées dans les centres urbains, permet à ces dernières de montrer leurs capacités économiques et l’extension de leurs réseaux sociaux ; mais elles mettent souvent des années à finir la construction. En revanche, les bâtiments sont plus pérennes : ils nécessitent moins d’entretien – pas besoin de chauffer au feu de bois pour éviter le pourrissement des bois et les insectes. Certains interlocuteurs parlent de maisons qui durent 30 ans, d’autres évoquent même 50 ans, en fonction de la qualité du béton réalisé. La présence sociale effective dans l’île est, dans ce cas, actualisée par l’accueil des membres de la famille en visite.

24Quelque part entre ces deux extrêmes se trouvent des prouesses architecturales telles que la première maison de l’île construite avec un sol en béton à l’étage. Construite en suivant toutes les règles coutumières de travail avec la famille étendue, cette maison était encore debout en 2023, bien que fissurée par de nombreux tremblements de terre. Son caractère d’affirmation politique était en revanche parfaitement compris dans l’île au moment de sa construction et a rejailli sur le prestige de son constructeur.

25Les choix architecturaux sur Mere Lava semblent donc être faits entre deux formes de durabilité : d’une part, une durabilité socio-technique reposant sur une reconstruction continue et la démonstration de connaissances techniques ; d’autre part, une durabilité plus strictement « temporelle » fondée sur l’utilisation de matériaux qui se comportent mieux dans le temps et une présence plus irrégulière. Ces différentes formes de durabilité ne correspondent pas à des logiques linéaires de transformations des matériaux utilisés, qui inciteraient les habitants à choisir plutôt l’emploi de matériaux importés, tels que le béton, que l’emploi de matériaux locaux. En revanche, les migrations croissantes vers l’étranger ou vers des zones plus connectées de l’archipel où les accès à l’éducation, aux services de santé et à des emplois rémunérés sont facilités, s’accompagnent aujourd’hui d’une nette augmentation des constructions de maisons en béton.

  • 38 McGrath, 2022.

26S’il est difficile de projeter directement ces quelques éléments contemporains dans la très longue durée, ces derniers peuvent en revanche être appréhendés comme des « traces » au sens où ils agrègent des histoires longues et constituent des indices, non pas pour retrouver telles quelles des trajectoires techniques anciennes, mais plutôt pour interroger les modalités de leurs transmissions. Ces « traces » ouvrent des questions qui, pour la région, se posent ensuite nécessairement dans un dialogue transdisciplinaire, entre archéologues, historiens, linguistes, généticiens, botanistes, conservateurs des musées, etc. ; ce que les travaux portant sur l’« histoire profonde » tentent aujourd’hui de développer38. Enfin, le Pacifique invite généralement à adopter une position critique quant à la question de la disparition des savoirs, de savoir-faire et de réseaux relationnels socio-techniques anciens, dont certains se révèlent en réalité « dormants » et disponibles pour des réactivations contemporaines. « Le passé se trouve devant », comme le disait l’anthropologue samoan et tongien Epeli Hau’ofa.

Réduction des minerais de fer dans la vallée de Vicdessos (Ariège) : percevoir la longue durée à travers les sources historiques et archéologiques

Alexandre Disser

Laboratoire Archéomatériaux et prévision de l’altération (UMR 7065 IRAMAT et UMR 3685 NIMBE)

  • 39 Verna, 2001 ; Cantelaube, 2005 ; Dubois, 2000.
  • 40 Seul un site daté du xiie siècle était connu à l’échelle du département.

27Des prospections archéologiques ont été engagées à partir de 2017 à l’échelle du département de l’Ariège (Occitanie) afin de repérer d’éventuels vestiges d’activités sidérurgiques et minières. Celles-ci ont constitué le cœur de l’économie de ce territoire entre le xive siècle et la seconde moitié du xixe siècle. Ces travaux s’intègrent dans le cadre de deux programmes de recherche, le FEDER FERMAPYR (« L’industrie du fer dans le massif des Pyrénées », dirigé par Gaspard Pagès et Catherine Verna, financé par l’Union européenne) et le PCR FERAPO (« Le fer en Ariège et dans les Pyrénées-Orientales », dirigé par Gaspard Pagès et Alexandre Disser, financé par le ministère de la Culture). Malgré des recherches historiques et archéologiques de grande qualité39, des lacunes importantes persistaient sur plusieurs plans. On constatait en effet une absence quasi totale40 d’indices d’activités entre le ive et le xive siècles. Ce hiatus était particulièrement frappant pour un espace offrant de très abondantes ressources ferrifères. Par ailleurs, nous avons souhaité approfondir la question des rythmes d’adoption de l’innovation technique, en l’occurrence l’utilisation de l’énergie hydraulique. Ceux-ci avaient fait l’objet d’une analyse historique par Catherine Verna et Jean Cantelaube, qui ont souligné certaines lacunes dues à la nature et aux conditions de conservation des sources textuelles. Nous avons pensé que ces manques pouvaient être en partie comblés par la découverte de nouvelles sources matérielles.

28Nous avons décidé de multiplier les observations chronologiquement définies à l’échelle d’entités géographiques cohérentes (nous raisonnerons ici en termes de vallées montagnardes), ceci nous paraissant essentiel pour appréhender sur la longue durée les temporalités de la métallurgie ariégeoise. Afin d’illustrer les connaissances que peut apporter cette démarche extensive, nous abordons ici le cas de la vallée de Vicdessos, l’un des secteurs majeurs de la sidérurgie pyrénéenne.

Appréhender les rythmes de la métallurgie sur le temps long

29Auparavant, le Vicdessos était réputé pour le fort développement qu’y a connu la métallurgie du fer à partir du xive siècle. Seul un contexte antique mis au jour dans les années 1990 attestait d’une exploitation antérieure. Mais s’agissait-il d’un hapax, dont le hasard avait permis la découverte, ou d’un témoin d’activités beaucoup plus importantes ? Les recherches récentes ont mis en évidence six autres sites datés de l’Antiquité tardive (iv-ve siècles n. è.) répartis sur toute la moitié amont de la vallée. Ces nouveaux résultats offrent une image nouvelle de la production de fer antique dans ce secteur. D’autre part, les travaux ont mis en évidence trois sites datés du haut Moyen Âge (le premier ayant probablement fonctionné au cours du viiie siècle, les deux autres au cours du ixe siècle). Un dernier contexte a été, quant à lui, daté du début du xiiie siècle. D’après les évaluations de volume des amas de déchets repérés, la production combinée de ces sites s’élèverait à plusieurs dizaines, voire centaines de tonnes de métal.

30Malgré ces avancées notables, il est encore délicat de saisir l’ampleur des activités à une époque donnée, les occurrences connues étant encore trop peu nombreuses et la résolution temporelle des datations radiocarbone trop basse (parfois près d’un siècle). Il est probable que sept sites reconnus pour l’Antiquité et le début du Moyen Âge aient fonctionné durant une ou quelques saisons. Dans trois cas, on peut supposer un fonctionnement de l’ordre d’une ou deux décennies. L’image révélée par les données actuelles est donc plutôt celle d’une activité de faible intensité. Néanmoins, gardons à l’esprit que les processus d’érosion et l’occupation humaine intense des versants de basse et moyenne montagne sont nettement défavorables à la conservation des sites archéologiques, ce qui pourrait nous conduire à sous-estimer l’ampleur de la sidérurgie aux époques les plus anciennes. La découverte et la datation de nouveaux sites permettraient à l’avenir de proposer un modèle de dynamiques sidérurgiques plus complet et solide.

La coexistence des techniques sur le temps long dans l’espace ariégeois

  • 41 Verna, 2001, p. 88-98.

31Nous avons déjà mentionné les profondes mutations induites par l’utilisation de l’énergie hydraulique sur la production du fer en Ariège à partir du xive siècle, marquées par l’implantation de forges hydrauliques appelées « moulines ». Qu’était-il alors advenu des techniques utilisées auparavant par les « forges à bras », qui se fondaient exclusivement sur le recours à l’énergie musculaire ? Très probablement, elles n’ont pas disparu subitement, supplantées par la mouline41. Toutefois, les modalités précises de l’abandon progressif de ces techniques nous sont encore largement inconnues. Les forges à bras, qui nécessitent des investissements matériels et pécuniaires modérés, échappent généralement à l’enquête de l’historien ou de l’historienne, qui dispose principalement d’actes notariés et de documents fonciers, dans lesquels seules figurent les installations plus conséquentes, telles que la mouline. Les prospections ont mis en évidence une forge à bras ayant fonctionné au milieu du xve siècle sur le plateau de Génat, situé au débouché de la vallée de Vicdessos. Dans une vallée voisine, celle de Massat, une forge à bras ayant produit des quantités importantes de métal a fonctionné au tournant du xviie siècle. La découverte de ces deux sites sous-tend la persistance des techniques non hydrauliques près de trois siècles après l’introduction de la mouline dans les Pyrénées centrales. La concomitance des techniques nous invite donc ici à envisager l’existence d’acteurs sidérurgiques insoupçonnés, minoritaires, dont les motivations et les activités pourraient s’inscrire dans une temporalité du quotidien, distincte de celle du puissant écosystème sidérurgique ariégeois régi par des aristocrates, des maîtres de forge et des marchands.

32Par le recours à une archéologie extensive, nos travaux offrent ainsi une perception renouvelée des rythmes de la production sidérurgique. À un modèle fondé sur la très longue interruption de la production entre l’Antiquité et le Moyen Âge central succède celui d’une activité qui certes connaît une intensité variable au fil du temps, mais qui n’a probablement jamais cessé. La multiplication des sources archéologiques permet également d’explorer le temps synchrone par l’analyse des différents choix techniques faits par des métallurgistes qui opèrent au sein d’un même micro-territoire.

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Notes

1 Charle, 2011 ; Hartog, 2016.

2 Fureix, Jarrige, 2015.

3 Jarrige, 2009, 2014.

4 Jarrige, 2023.

5 Hunter, 1979.

6 Benoit, 2020.

7 Hilaire-Pérez, Jarrige (dir.), 2020.

8 Edgerton, 1998.

9 Edgerton, 2013.

10 Mom, 2003, 2009.

11 Fressoz, 2024.

12 Krebs, Weber (dir.), 2021 ; Bernasconi et al. (dir.), 2022.

13 Gille, 1978 : « Le charbon est devenu depuis la fin du xviiie siècle la principale source d’énergie » écrit-il ; et encore « à la fin du xixe siècle le pétrole a pris la première place dans la consommation d’énergie » (p. 871-872). On le voit aussi dans sa représentation du « système technique de la révolution industrielle » (qu’il fait remonter au xviiie siècle) avec la machine à vapeur au centre (p. 706). Ou encore à l’importance qu’il consacre aux réacteurs nucléaires, aux moteurs de fusée et aux usines marémotrices quand il parle des énergies contemporaines. Plus généralement, le chapitre intitulé « Vers un système technique contemporain » est centré sur le high tech et même la futurologie des années 1970.

14 Allen, 2012.

15 Samuel, 1977 ; Schallenberg, 1975 ; Hunter, 1979 ; Benoit, 2020 ; Evans, Rydén, 2005 ; Baratay, 2011 ; Tarr, 2007 ; Barles, 2005 ; Jarrige, 2023.

16 Le titre du livre classique de Louis C. Hunter, Waterpower in the Century of the Steam Engine, 1780-1930, en est un bon indice : il aurait fallu intervertir les termes.

17 Fressoz, 2024.

18 Gras, 2003.

19 Massard-Guilbaud, 2019 ; Fressoz, 2013.

20 Edgerton, 2013.

21 Marrec, 2023.

22 Marrec, 2024.

23 Marrec, 2018.

24 Marrec, 2022.

25 Bruyerre, 2020.

26 Carnino, Hilaire-Pérez, Lamy, 2024 ; Bécot, 2022.

27 Labussière, Nadaï, 2020.

28 Pritchard, 2014.

29 Hau’Ofa, 2000.

30 Fabian, 2014.

31 Thomas, 1991.

32 Gluckman, 1940a, 1940b ; Balandier, 1951.

33 Gell, 1992.

34 Bensa, Fassin, 2002 ; Bensa, 2006 ; Naepels, 2011.

35 Sahlins, 1989 ; Wachtel, 1990.

36 Thomas, 1991.

37 Bien que les femmes puissent prendre part aux chantiers de construction des maisons et y effectuer un certain nombre de tâches techniques.

38 McGrath, 2022.

39 Verna, 2001 ; Cantelaube, 2005 ; Dubois, 2000.

40 Seul un site daté du xiie siècle était connu à l’échelle du département.

41 Verna, 2001, p. 88-98.

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Pour citer cet article

Référence papier

François Jarrige, Jean-Baptiste Fressoz, Anaël Marrec, Marie Durand et Alexandre Disser, « Les techniques et la très longue durée : réflexions croisées »Artefact, 21 | 2024, 207-227.

Référence électronique

François Jarrige, Jean-Baptiste Fressoz, Anaël Marrec, Marie Durand et Alexandre Disser, « Les techniques et la très longue durée : réflexions croisées »Artefact [En ligne], 21 | 2024, mis en ligne le 11 novembre 2024, consulté le 07 juillet 2025. URL : http://journals.openedition.org/artefact/16097 ; DOI : https://doi.org/10.4000/12o3r

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Auteurs

François Jarrige

Université de Bourgogne

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Laboratoire interdisciplinaire en études culturelles (LinCS – UMR 7069), université de Strasbourg

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