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Résumé

Programme de l’année 2023-2024 : I. Alexandrie. — II. Documents récemment publiés.

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Texte intégral

1La première conférence a principalement porté sur l’art d’Alexandrie. L’égyptianisation de la capitale des Lagides est une question toujours débattue, qui appelle une réponse plus nuancée que celle qui oppose la civilisation grecque à la civilisation égyptienne. Les Grecs connaissaient de longue date l’Égypte, s’en faisant une image que Christian Froidefond a qualifiée de « mirage égyptien » dans son livre sur Platon. Même si l’existence d’un village égyptien de Rhakotis avant la fondation est une invention, comme l’a indiqué Michel Chauveau, cette ville « en chantier », selon l’expression égyptienne, a reçu dès sa fondation une dénomination locale, qui souligne son implantation dans le pays. On ne peut donc tracer une frontière étanche entre Alexandrie et le monde indigène à sa fondation. L’égyptianisation progressive de la ville au cours de la période hellénistique est aussi une vue de l’esprit : la découverte du sanctuaire de Boubastis, restructuré sous Ptolémée III, suppose que les Grecs confiaient le salut de leurs enfants à une divinité courotrophe qui tirait son nom de la déesse Bastet, la grande divinité de Mendès. Cette découverte récente confirme la réception par les Grecs de personnalités divines liées à l’Égypte comme Sarapis. Il n’y avait pas une frontière étanche entre éléments égyptiens et grecs dans les premières décennies de la ville d’Alexandrie.

  • 1 H. Brugsch (éd.), Geographische Inschriften altägyptischer Denkmäler, I, Leipzig, 1857, p. 240.

2L’image cultuelle de Sarapis combinait des traits vénérables des divinités barbues grecques, désignées comme des Vatergottheiten en allemand, vêtues d’un chiton et d’un himation, avec des matières égyptiennes qui teintaient en bleu sombre la peau de ce dieu des enfers lié aux tombes. La légende rapportée par Tacite et Plutarque qui attribuait à Bryaxis cette statue venue de Sinope est une invention qui date de Vespasien, mais ce Sarapis, qui affiche apparemment son origine grecque, est en fait lié au mont Sinope près de Memphis, dont le nom serait la transcription en grec de l’égyptien Sen-Hapi, résidence d'Apis1. Les sanctuaires alexandrins de Boubastis et de Sarapis relient la ville dès ses premières décennies à une Égypte à la grecque.

3Le temple d’Arsinoé Zéphyritis, au cap Zéphyrion près de Canope, à l’ouest d’Alexandrie, est une fondation de l’amiral Callicratès, sous Ptolémée II, où la reine Arsinoé II était assimilée à Aphrodite Euploia, protectrice de la navigation. On connaît plusieurs caps dont le nom vient du Zéphyr, vent de l’ouest ou du nord-ouest, notamment en Italie du Sud, où le « cap du Zéphyr » abrite la tombe de Myrto, la jeune Tarentine, dans le poème de Chénier, qui tire son nom de la mer de Myrto, la partie sud-ouest de la mer Égée. Le Zéphyr, synonyme pour nous d’un souffle léger, n’est pas toujours un vent doux mais peut être impétueux, comme le décrit Homère (Iliade, IV, vers 422-423) : « ainsi, sur la rive retentissante, les vagues de la mer, se succédant les unes aux autres, se dressent sous l’effet du Zéphyr ».

4Les fouilles sous-marines menées dans la baie d’Aboukir ont mis au jour trois statues colossales qui suivent le schéma de la statue-pilier : une personnification d’Hapi, la crue du Nil, accompagne un couple lagide. Le même sanctuaire égyptien d’Héracleion abritait une très grande stèle de Ptolémée VIII, haute de 6,10 m. Le couple royal peut être contemporain et figurer le roi avec sa sœur-épouse Cléopâtre II. La comparaison avec un portrait de Physcon découvert à Cyrène confirme que le même Ptolémée était figuré à Héracleion.

5Les trouvailles de portraits lagides à Cyrène et dans son port d’Apollonia, qui enrichissent l’iconographie de la dynastie, notamment pour Ptolémée III et Bérénice II et Ptolémée VIII, sont concentrées à Cyrène dans le sanctuaire d’Apollon, sur l’agora et dans le temple de Zeus.

6À Alexandrie, l’espace était saturé par le roi : l’espace urbain évidemment, avec les images royales et celles de ses proches, même les maîtresses de Ptolémée II, mais aussi l’espace mental, avec les poètes de cour, comme Posidippe de Pella, qui oriente la description d’une statue de Philitas de Cos vers un éloge du Philadelphe.

7La seconde conférence a permis de présenter le Musée gréco-romain d’Alexandrie, rouvert au public le 11 octobre 2023 après treize années de fermeture, que le directeur d’études a visité lors de sa mission à Alexandrie. De nombreuses trouvailles du Boubasteion d’Alexandrie, en cours de publication, y sont exposées dans une vitrine qui rassemble une grande quantité de sculptures et de terres cuites. Au musée du Louvre, on pourra découvrir à partir du mois de juin les chefs d’œuvre de la collection Torlonia, une exposition placée sous la direction de Carlo Gasparri, Salvatore Settis et Martin Szewczyk (elle a ouvert le 26 juin 2024 et sera prolongée jusqu’au 6 janvier 2025). Le catalogue, où le directeur d’études a écrit un essai sur « La modernité de la sculpture hellénistique vue de Rome », réunit des sculptures de grandes collections romaines constituées à partir du xvie siècle pour la collection Giustiniani et du xviiie siècle pour la collection Albani et celles du sculpteur Cavaceppi ; s’y sont ajoutées des trouvailles faites dans les fouilles conduites au xixe siècle dans des propriétés Torlonia.

8M. Morgan Belzic, dont la thèse sur Les sculptures funéraires de Cyrénaïque, VIᵉ s. av. – IVᵉ s. apr. J.-C. a été soutenue le 15 mai 2022, a présenté le 8 décembre 2023 des trouvailles de sculptures en marbre annoncées dans des communiqués de presse, qui auraient été faites à Taposiris Magna en décembre 2021. Ces portraits funéraires et divinités funéraires, qui viennent de Cyrénaïque, ne peuvent provenir de ce site de la Maréotide, où les tombes ne sont pas rupestres comme à Cyrène. Margot Tomi a présenté le 15 décembre 2023, sa thèse sur Xoana et idoles archaïsantes à l’époque hellénistique. Divinités féminines d’Asie Mineure, qui a été soutenue le 18 décembre.

9M. Paolo Gallo, directeur d’études invité, a présenté en mai des conférences suivies par un public nombreux (voir son résumé).

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Notes

1 H. Brugsch (éd.), Geographische Inschriften altägyptischer Denkmäler, I, Leipzig, 1857, p. 240.

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Pour citer cet article

Référence papier

François Queyrel, « Archéologie grecque »Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques, 156 | 2025, 142-143.

Référence électronique

François Queyrel, « Archéologie grecque »Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques [En ligne], 156 | 2025, mis en ligne le 02 avril 2025, consulté le 19 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/ashp/7891 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13mt1

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Auteur

François Queyrel

Directeur d'études, École pratique des hautes études-PSL — section des Sciences historiques et philologiques

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