Archéosciences et histoire de l’environnement
Résumé
Programme de l’année 2023-2024 : Géoarchéologie des ports antiques en Méditerranée.
Texte intégral
- Formation sur le terrain aux techniques des carottages dans la lagune de Venise (septembre-octobre 2023) ;
- thème du séminaire intensif de l’année : géoarchéologie des milieux deltaïques et lagunaires, risques et vulnérabilités (décembre 2023, pour 20 h de cours magistraux) ;
- école pratique à Nysiros (Grèce) dans le cadre de l’université Civis (mars-avril 2024) ;
- colloque à Venise From vulnerability to valorisation: interdisciplinary approaches to coastal heritage conservation in the face of global change, 31 mai 2024 ;
- école pratique d’été de géo-bio-archéologie à la station EPHE-PSL de Dinard (juin 2024) en commun avec la section des Sciences de la vie et de la terre. L’école d’été a porté principalement sur le colmatage de la baie du Mont-Saint-Michel et ses impacts sur l’occupation humaine sur la longue durée.
1Dans le cadre d’un financement acquis auprès de la direction des relations internationales de la faculté ALLSH d’Amu, nous avons assuré, du lundi 25 septembre au dimanche 1er octobre 2023, une formation de terrain à Lio Piccolo dans la lagune de Venise, qui a pu former une dizaine d’étudiants aux techniques de carottage et d’échantillonnage en fonction des problématiques scientifiques développées (mobilité du niveau marin, déformations des rivages, impacts de l’anthropisation, dynamiques courantologiques, recherches paléo-géographiques, reconstitutions paléo-environnementales, problème d’accessibilité et de navigation…). La mission était dirigée par Christophe Morhange et elle a eu pour objectif principal la formation aux techniques de carottages à percussion en contexte archéologique. Il s’agissait essentiellement d’un transfert de compétences techniques et d’expertise géo-archéologique à Venise et dans la lagune à l’attention des mastérants et des doctorants italiens. Le site de carottages retenu était l’île de Torcello. Première zone de peuplement de la lagune à partir du sixième siècle de notre ère, Torcello est devenue l’île la plus peuplée et compte quelques milliers d’habitants au dixième siècle. L’envasement de ses canaux et la propagation de la malaria ont conduit l’île à être peu à peu désertée. De nos jours, Torcello ne compte plus que huit habitants ! Nous avons pu effectuer sept carottages et récupérer plus de 300 échantillons, en collaboration avec les équipes des prof. D. Callaon et D. Cottica (université de Venise). Pendant toute la semaine des conférences théoriques ont alterné avec des applications sur le terrain. Samedi 30 septembre, une journée Portes ouvertes-Carottes ouvertes à Torcello a permis d’accueillir le grand public et plus d’une cinquantaine de vénitiens a pu découvrir les méthodes pluridisciplinaires de l’archéoscience.
2Le thème de l’année universitaire 2023-2024 a porté particulièrement sur la géoarchéologie des milieux deltaïques et lagunaires. Les conférences ont eu lieu au campus de Grands Moulins de l’université Paris-Cité, du lundi 4 décembre au vendredi 8 décembre, sous la forme de conférences magistrales et de séances de tutorat, sous un format intensif pour attirer plus d’étudiants et d’auditeurs possible en partenariat avec le master Dynarisk, en collaboration avec A. Bivolaru de l’université de Venise, qui a effectué 10 h de cours magistral. L’effectif s’est élevé à 22 auditeurs et étudiants. Un séminaire EPHE-PSL commun avec William Van Andringa et Salomon Ferreol (CNRS, Strasbourg) a été organisé le 20 mars 2024 à l’INHA. L’objectif était de présenter aux étudiants du master d’archéologie et d’histoire de l’art de l’EPHE-PSL les thèmes de recherche de la géo-archéologie portuaire en Méditerranée, en particulier les environnements antiques de Portus et de Tarragone.
3Les principaux concepts présentés ont été :
- étagement biologique le long des côtes rocheuses ;
- indicateurs archéologiques de variations du niveau marin relatif ;
- différentes trajectoires du niveau marin relatif depuis 6 000 ans ;
- géoarchéologie des ports en contexte de plage de poche ;
- géoarchéologie des ports en contexte deltaïque ;
- géoarchéologie des ports en contexte lagunaire ;
- géoarchéologie des ports en contexte fluvial ;
- géoarchéologie du delta du Danube par A. Bivolaru ;
- géoarchéologie de la lagune de Venise par A. Bivolaru ;
- cellule sédimentaire littorale et connectivité sédimentaire ;
- dérives littorales et régularisation des littoraux meubles ;
- de la ria transgressée à la progradation deltaïque (exemples de l’Argens, du delta du Rhône et du colmatage de la ria de Burmarad à Malte) ;
- mobilité des côtes meubles et forçages ;
- néo-castrophisme, paléo-risques et factoids ;
- impacts d’origine anthropique (dragages, pollutions, budget sédimentaire...).
4L’école pratique à Nysiros (Grèce) dans le cadre de l’université Civis (mars-avril 2024) a traité de la vulnérabilité des îles volcaniques en Méditerranée orientale, en particulier des processus et des risques naturels. Elle a permis d’établir des relations scientifiques et pédagogiques nouvelles et interdisciplinaires entre l’EPHE-PSL, Aix-Marseille Université, l’université nationale et kapodistrienne d’Athènes (Grèce), l’université Libre de Bruxelles (Belgique) et l’université de Bucarest (Roumanie). En effet, les volcans sont des laboratoires ouverts, offrant aux différents scientifiques ainsi qu’aux étudiants l’occasion de découvrir de près un volcan actif, ses potentialités et les risques associés. L’île de Nisyros est aussi un futur géoparc de l’Unesco, situé dans la partie sud-est de l’arc volcanique hellénique, dans la mer Égée. Elle présente des environnements exceptionnels, notamment des cratères hydrothermaux et des dômes volcaniques. Le programme a été structuré en une école intensive de onze jours, commençant par des cours en ligne durant six jours (pour 36 heures, dont 6 heures assurées par C. Morhange) suivi d’un programme d’activités pratiques et d’ateliers à Nysiros pendant cinq jours (40 heures de tutorat de terrain, dont une journée assurée par C. Morhange sur les indicateurs de mobilité du niveau marin) du 8 au 12 mai 2024. Nous avons accueilli 32 étudiants en provenance des universités d’Aix-Marseille, d’Athènes, de Tubingen, de Bruxelles et de Bucarest.
5Le colloque hybride, co-organisé par l’EPHE-PSL à l’université de Venise, avait pour thème principal « From vulnerability to valorisation: interdisciplinary approaches to coastal heritage conservation in the face of global change ». Il a rassemblé une trentaine de collègues. Les différentes interventions ont porté sur :
- « Storm surges flooding Venice: a comparison between the historical events, nowadays and future risks », par D. Camuffo, Istituto di Scienze dell’Atmosfera e del Clima, CNR (Italie) ;
- « Entangled in the water. Geoarchaeological insights in the safeguard of the Lagoon of Venice Unesco Heritage Sites against global change », par A. Bivolaru et al., université Ca’Foscari de Venise (Italie) ;
- « Lead, a Roman fingerprint in environmental archives from the Mediterranean basin and its modern inheritance », par A. Veron, CNRS-Cerege, Aix-Marseille Université (France) ;
- « “Bitter Lemons of Cyprus”: A story on the risks and vulnerabilities of the archaeological sites of Cyprus », par J. Gatt, CCJ, Aix-Marseille Université (France), et l'université de Chypre ;
- « Tunisia and Saudi Arabia – Water from the Seas, Water from the Skies. Assessing past and future on cultural heritage sites in Tunisia and Saudi Arabia », par K. Schorle, CNRS, CCJ, Aix Marseille Université.
- « Coastal archaeology and climate change in the Middle East: contextualising global projections », par G. Andreou, Department of Archaeology, university de Southampton (G.B.) ;
- « The vulnerable coastal heritage of Arwad reef in the era of global environmental shifts », J. Anbar, CCJ, Aix-Marseille Université et l’université nationale et kapodistrienne d’Athènes (Grèce) ;
- « The triple threat: Urbanization, Flooding and Erosion Endangering the Persian Gulf Coastal Archaeology », par M. Pourkerman, Research Institute for Earth Sciences, Geological Survey of Iran ;
- « Geoarchaeology of global changes in the time of the Anthropocene », par C. Morhange, Cerege, Aix Marseille Université, EPHE-PSL, Aoroc, Imera (France).
6L’école d’été de géo-bio-archéologie EPHE-PSL de Dinard, s’est tenue du lundi 17 au vendredi 21 juin 2024. Elle a été partiellement financée par les deux sections SHP (programme gradué Sciences historiques) et SVT, ainsi que par l’institut Arkaia d’Amu. Son objectif était la formation pluridisciplinaire de 9 étudiants en master et en doctorat (dont 4 masterants relevant de l’EPHE-PSL) sous la co-direction de E. Feuten (Decu EPHE-PSL, SVT, MNHN) et de Christophe Morhange (Decu EPHE-PSL, SHP, AMU), avec la participation de B. Caline (géologue), C. Bizien (archéologue, directrice du Centre régional d’archéologie d’Alet à Saint-Malo), A. Bouët (biologiste spécialiste de sciences participatives à l’association Planète Mer), A.-E. Marcel (restaurateur du monument historique au Petit Bé), E. Motte (géographe, post-doctorante) et de A. Colin (CR EPHE-PSL-Dinard, CGEL). Les principaux objectifs ont été :
- Initiation à l’analyse des paysages selon une zonation verticale de l’étage infra-littoral à l’ad-littoral dans un contexte macrotidal, en particulier en baie du mont Saint-Michel. Découverte géomorphologique et bio-sédimentologique de l’estran. Rôle des massifs d’hermelles dans le fonctionnement des cellules sédimentaires.
- Analyse des forçages littoraux sur la longue durée (mobilité relative du niveau marin, budget sédimentaire) et mobilité des rivages littoraux et estuariens en fonction de différents paramètres (houle, marée…), en particulier dans la baie du Mont-Saint-Michel et la baie de Saint-Malo.
- Approche pluri-disciplinaire de l’analyse des paysages littoraux et estuariens (géomorphologie, biologie marine, sédimentologie, archéologie, histoire de l’art et perception des paysages...). E. Motte a particulièrement insisté sur la mobilité des paysages littoraux de la côte d’Émeraude et de la ria de la Rance grâce à 3 siècles d’iconographie.
- Impacts et enjeux de l’anthropisation en contexte littoral. Analyse diachronique des risques et des vulnérabilités. Tentative de lecture des paysages littoraux médiévaux au Mont-Dol et néolithiques à Lillemer.
7Le lundi 17 juin a été consacré à la présentation des terrains puis à une sortie géographique le long des rivages de la Rance.
8Mardi 18 et mercredi 19 juin, les stagiaires ont pu découvrir les principaux paysages de la baie du Mont-Saint-Michel (polders, herbus, slikke…) selon un étagement vertical et un zonage est/ouest. Les principaux processus comme l’envasement de la baie orientale comparée au bio-détritisme de la baie externe occidentale ont été présentés et détaillés par B. Caline, en particulier les étapes du comblement de l’estuaire du Couesnon, les aménagements récents pour le rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel et le fonctionnement du nouveau barrage à marée. C. Bizien nous a ensuite présenté le prisme sédimentaire du fond de la baie du Mont-Saint-Michel en relation avec les occupations humaines sur la longue durée. Nous avons pu visiter le site archéologique néolithique et le musée de Lillemer ainsi que la tourbière. À Hirel, l’atelier de bouilleur de sel antique nous a été présenté, ainsi que le site paléolithique du Mont-Dol.
9Le jeudi 20 juin a été consacré à la présentation puis à l’étude pluridisciplinaire de l’estran du secteur de Saint-Enogat par lidar porté sur drone sous la direction de A. Collin et de C. Bizien. Atelier de biologie participative avec A. Bouët et E. Feunteun.
10Vendredi 21 juin, nous avons eu l’opportunité d’être reçu par A.-E. Marcel, restaurateur du fort Vauban du Petit Bé au large de Saint-Malo. Nous avons eu une démonstration éclairante, véritable manifeste actualiste pour une archéologie du geste, permettant de restituer un fort militaire du début du xviiie siècle. Analyse de la perception de la mobilité des paysages littoraux et des ports de Saint-Malo grâce à une intervention de qualité de la géographe Edwige Motte à propos des peintures et des photographies anciennes. Un atelier final de restitution en salle par les quatre groupes d’étudiants a clôturé cette école pratique.
Pour citer cet article
Référence papier
Christophe Morhange, « Archéosciences et histoire de l’environnement », Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques, 156 | 2025, 506-509.
Référence électronique
Christophe Morhange, « Archéosciences et histoire de l’environnement », Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques [En ligne], 156 | 2025, mis en ligne le 02 avril 2025, consulté le 16 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/ashp/8244 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13mun
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