1Ladite « chute des vocations » occasionnée par la raréfaction des entrées est une caractéristique connue de la vie religieuse du début du xxi^e siècle. À titre d’exemple, l’abbaye de Kremsmünster, actuellement plus gros monastère bénédictin en Autriche, bénéficiait de deux entrées stables en moyenne par an dans les années 1950, puis une par an dans les années 1960 et 1970, et enfin 0,5 par an depuis 1980 (Jonveaux, 2014). Actuellement, les vocations semblent avoir atteint un seuil plancher et ne chutent plus guère. Les statistiques des entrées dans la vie monastique mettent en lumière ce recul qui n’est cependant que la part quantitative des évolutions concernant les vocations de ces trente dernières années. Parallèlement, les hommes et les femmes qui se présentent à la porte des communautés ont un profil sociographique différent comparé aux générations entrées dans l’après-guerre ou jusqu’aux années 1990, ce qui occasionne de nécessaires évolutions dans l’approche de la formation.

2Je me propose dans cet article d’interroger les évolutions concernant le profil des vocations et des voies d’accès à la vie monastique. Quelles sont les évolutions majeures observables dans ces profils ? Comment s’élaborent aujourd’hui les chemins qui conduisent à la vie monastique ? Devant la baisse de leurs effectifs, due autant au recul des entrées qu’au vieillissement, les communautés cherchent-elles à recruter activement des novices ? Enfin, dans quelle mesure les évolutions des profils des entrants modifient-elles la formation à la vie monastique ?

4Après avoir présenté les évolutions notables dans le profil des entrants, je m’interrogerai sur les voies d’accès à la vie monastique et à leurs mutations, notamment du fait de l’arrivée d’Internet. Enfin, la troisième partie s’intéressera aux défis qu’apportent ces nouveaux profils dans la formation des novices.

La mutation des profils 

Les caractéristiques sociographiques des entrants

Tableau 1. Évolution de l’âge d’entrée dans la vie monastique pour la congrégation bénédictine autrichienne de 1952 à 2024.

Date d’entrée	Âge moyen d’entrée	Âge minimum d’entrée	Âge maximum d’entrée	Nombre de cas
1952-1965	22,1	16	37	172
1966-1980	22,2	16	41	58
1981-1995	25,1	18	54	69
1996-2010	29,5	18	68	58
2011-2024	33,6	19	63	45

8L’augmentation de l’âge moyen d’entrée dans la vie monastique suit sans grande surprise les temps de l’engagement dans la société contemporaine. En 2009, l’âge moyen du premier enfant pour les femmes en France atteignait pour la première fois les 30 ans. De même, « l’âge moyen au mariage ne cesse de reculer pour les hommes comme pour les femmes […]. En 2013, il était de 37,2 ans pour les hommes et de 34,6 ans pour les femmes. Au début des années 1970, il était inférieur à 26 ans pour les hommes et inférieur à 24 ans pour les femmes » (Mazuy et al., 2015 : 436). En cela, l’âge d’entrée dans la vie monastique ne se différencie guère des âges moyens du premier enfant ou du mariage.

Tableau 2. Évolution de l’âge d’entrée dans la vie monastique par sexe pour la congrégation bénédictine autrichienne de 1952 à 2024

	Hommes				Femmes
	Âge moyen	Âge mini-mum	Âge maxi-mum	Nombre de cas	Âge moyen	Âge mini-mum	Âge maxi-mum	Nombre de cas
1952-1965	20,3	17	35	89	23,9	16	37	83
1966-1980	21,3	16	37	53	26,3	18	41	13
1981-1995	24,5	18	54	59	28,4	21	50	10
1996-2010	29,5	18	68	56	29,5	25	32	2
2011-2024	32,8	19	63	40	40,4	32	56	5

Source : (Direktorium 2011-2012 pour la période 1952-1966, puis 2023-2024 à partir de 1966).

10Même si le recul de l’âge d’entrée augmente la moyenne d’âge des communautés, il est considéré dans une certaine mesure comme un facteur favorisant la stabilité des vocations. Un jeune bénédictin autrichien explique :

Il y a sept ou huit ans, sont entrés deux qui étaient au lycée du monastère. Ils étaient tout feu tout flamme. Mais ils sont tombés amoureux pendant leurs études à Salzbourg. Ça arrive aussi. Ces deux-là sont entrés directement après le bac. Peut-être que c’était l’erreur. Peut-être qu’ils auraient dû faire leur service civique ou service militaire avant. Peut-être qu’ils auraient eu plus les pieds sur terre. (Seitenstetten, juin 2012)

11De même, le maître cistercien des novices de Jędrzejów en Pologne y voit une évolution positive vers des décisions plus réfléchies : « Concernant les vocations qui arrivent dans notre monastère, on peut voir cette tendance, j’ai le sentiment que de plus en plus de personnes conscientes viennent. […] Ce ne sont généralement pas des gens qui viennent juste après les examens finaux [baccalauréat] » (mai 2019). Le maître des novices de la Pierre-qui-Vire en France considère aussi favorablement qu’ils « rentrent plus tard, sinon ils peuvent rentrer encore adolescents, et le mûrissement au monastère se fait plus lentement » (mai 2011). Le monastère ne se considère donc plus comme une institution de socialisation première qui prendrait de grands adolescents, voire des enfants comme le prévoyait aussi la règle bénédictine (RB 70,4) pour en faire des « adultes moines ». Actuellement, la vie monastique s’adresse à des personnes déjà adultes, même si la formation nécessite une resocialisation à une nouvelle forme de vie.

Les milieux sociaux et niveaux d’étude des novices

12L’augmentation de l’âge d’entrée dans la vie religieuse est mise en lumière par Yann Raison du Cleuziou (2011) pour l’ordre apostolique des dominicains de la province de France entre 1910 et 1950. S’y trouve déjà corrélée une augmentation du niveau d’étude chez les novices que l’on retrouve dans le cas des congrégations bénédictines actuelles. Les chiffres présentés ici confirment et accentuent des tendances apparues dès les décennies 1930 ou 1940.

13Le recul de l’âge d’entrée s’accompagne en effet d’une augmentation du niveau d’étude et des expériences professionnelles que les novices apportent en entrant, ce qui est recommandé par la plupart des communautés actuelles. Certaines posent des conditions d’entrée, par exemple d’avoir un baccalauréat ou appris un métier manuel. L’une des raisons invoquées est de permettre une réinsertion plus rapide en cas de sortie. Parallèlement, les novices apportent ainsi de plus grandes compétences et expériences qui sont des atouts pour les communautés, notamment pour leur économie.

Des mutations dans les motivations pour devenir moine/moniale ?

17Les motivations d’entrée dans la vie monastique évoluent dans le temps et l’espace. En Autriche jusqu’à la fin des années 1990, une motivation centrale pour les hommes était de devenir prêtre, d’acquérir le statut social reconnu de curé de paroisse, tout en bénéficiant du soutien d’une communauté. Selon la distance à la communauté, certains moines habitent au presbytère de la paroisse et ne viennent au monastère que pour les moments importants (cérémonie, chapitre, etc.). À Kremsmünster, la moitié des moines habitent dans les cures. Un moine autrichien décrit ainsi ce processus :

Je veux devenir prêtre et une communauté serait bien. Je pense que la première voie est toujours la vocation au sacerdoce et ensuite la décision, est-ce que je le fais dans l’ordre. Parce que c’est peut-être plus confortable et ainsi de suite. Et que l’on soit appelé à être moine avant et que l’on veuille ensuite devenir prêtre, je pense que ce serait l’idéal. (Sankt Paul, février 2015)

18Toutefois, la génération entrée environ à partir des années 2000 ne souhaite plus vivre en tant que moine comme curé de paroisse. Un bénédictin de Sankt Paul, alors âgé de 28 ans, explique :

J’ai décidé de devenir moine, pas prêtre. […] Ce sont pour moi deux vocations différentes. D’un côté, chacun de nous devrait avoir la vocation à la vie monastique et la soigner. Pour moi, la prière des heures quotidienne est importante, cette structuration de l’emploi du temps. La prêtrise ensuite, c’est une vocation en soi qui est liée à la pastorale dans les paroisses, ce que je n’aspire pas à faire. (février 2015)

19On assiste à une nouvelle différenciation des vocations et à une spécification de la vie monastique, pour laquelle les jeunes moines cherchent à la distinguer de la vocation de prêtre diocésain. Cette vocation est le processus inverse de celui décrit par Hervieu-Léger pour des monastères français et belges des années 1970, lorsqu’elle évoque un processus de « désacralisation de l’état monastique » (2017 : 518). Ces frères aspirent à vivre plus de vie communautaire et à réinsérer des travaux manuels : le moine bénédictin précédemment cité a ainsi développé une activité d’apiculture.

20Pour les femmes, jusqu’aux années 1970, une motivation à l’entrée dans la vie monastique était une forme d’émancipation vis-à-vis d’autorités masculines, père ou mari. En outre, les sœurs de certaines communautés avaient la possibilité de suivre des formations professionnelles, même si cela concernait plus les communautés apostoliques que monastiques. Une sœur de Steinerkirchen en Autriche, communauté de bénédictines actives, explique : « Les monastères avant donnaient aussi la possibilité aux femmes de faire des formations auxquelles elles n’avaient sinon pas accès. […] C’était pour beaucoup un saut » (novembre 2012). Avec l’accès élargi aux études supérieures pour les femmes, ce type de motivation sociale a perdu de son poids, au moins en Europe.

21Une question de l’enquête menée en 2015 auprès de jeunes catholiques interroge ce qui motiverait à entrer dans la vie monastique. Les deux réponses qui arrivent en tête sont la vie communautaire et les offices réguliers (34 %). Le désir explicite d’une vie communautaire, retrouvé également chez la jeune génération actuelle de moines et moniales (Jonveaux, 2018 : 105), occupe une place paradoxale et peut être interprété comme une réponse à l’individualisme de la société. Mais inversement, la vie communautaire arrive aussi dans le questionnaire en troisième position de ce qui apparaît aux jeunes catholiques le plus difficile s’ils entraient au monastère. Elle est en effet citée par les moines et moniales comme premier domaine de l’ascèse (Jonveaux, 2018 : 106). La vie en communauté est donc d’une part recherchée et apparaît d’autre part comme un défi dans la société de l’individu. Anna Clot-Garrell relève dans le monastère de moniales qu’elle a étudié en Catalogne l’entrée de la vocation monastique dans un projet de vie personnelle qui allie autant recherche de vie communautaire qu’affirmation de l’individualité :

They did not perceive this vocation as necessarily entailing passive adaptation nor a sacrifice of their cultivated individual autonomy. Responding to God’s call was portrayed in terms of self-fulfilment, yet this self-realisation was not articulated as being in contradiction with their express desire for communal life and personal change in relation to, for instance, a life centered on prayer or common property. (Clot-Garrell, 2017 : 29)

Le choix de la communauté

23Toutes les communautés monastiques ne subissent pas la même crise dans leur recrutement. Certaines n’ont pas eu de nouvelles entrées depuis plusieurs décennies, comme l’abbaye des bénédictines de Nonnberg à Salzbourg, qui n’a pas eu d’entrée stable entre 1999 et 2015. Trois nouvelles entrées ont eu lieu entre 2015 et 2023. Inversement, d’autres, comme l’abbaye de Heiligenkreuz en forêt viennoise, atteignent des effectifs jamais atteints. Cette abbaye cistercienne, très présente dans les médias sociaux et connue pour son chant grégorien, a annoncé en 2017 avoir atteint son niveau le plus élevé depuis sa fondation en 1133 avec 101 moines. Sans creuser ici l’attractivité des différents types de communautés qui devrait faire l’objet d’une autre enquête, comment s’élabore le chemin vers l’entrée dans un monastère ?

Les voies d’accès à la vie religieuse

24Les voies d’accès à la vie religieuse diffèrent dans chaque pays selon l’implantation des monastères dans la société. La France et l’Autriche sont, concernant leur paysage monastique, deux cas heuristiques, car situés à deux extrêmes de l’éventail européen. Alors que la Révolution française a coupé les monastères des paroisses, une réforme menée en Autriche entre 1780 et 1788 a au contraire affirmé le rôle dit social des monastères. Sous le règne de l’empereur Joseph II (1765-1790), les monastères autrichiens furent soumis à une politique visant à supprimer toute communauté n’ayant pas d’activité jugée utile pour la société (Schmitz, 1948-1956). Influencé par les théories de l’économiste Quesnay, l’empereur imposa aux monastères de nombreuses réformes, requérant notamment des monastères masculins la prise en charge de nouvelles paroisses. Ainsi, l’abbaye de Göttweig reçut neuf nouvelles paroisses portant son nombre toujours actuel à trente-six. L’historien Josef Wodka affirme : « Actuellement, dans aucun pays, les ordres religieux ne sont aussi intensément impliqués dans la pastorale paroissiale qu’en Autriche » (1966 : 108). Les monastères masculins, non soumis à la clôture papale contrairement aux femmes, durent aussi ouvrir des écoles pour répondre à la qualification d’« utilité sociale ». Une partie de la Pologne, où se trouve le monastère de Jędrzejów, appartenant alors à l’Empire austro-hongrois, a aussi été soumise à cette politique. La présence intramondaine des monastères masculins en Autriche dans les paroisses et les écoles constitue encore actuellement un lien direct des communautés avec leurs potentiels milieux de recrutement. Un moine de Seitenstetten, monastère bénédictin en Basse-Autriche, affirme : « Ma ville d’origine est une paroisse de Seitenstetten. […] Oui, j’avais déjà un lien. La plupart des moines ici viennent de nos paroisses » (juin 2012). Dans le questionnaire de 2015, à la question de savoir quels sont les contacts avec des monastères, 31 % répondaient avoir un monastère proche de leur lieu de vie, 13 % être allé dans une école monastique et 10 % que le curé de leur paroisse est moine.

25Toutefois, les sources traditionnelles liées à la proximité se tarissent tandis que les cercles géographiques de recrutement s’élargissent. Une source essentielle de recrutement monastique était le lycée abbatial. Un moine de Seitenstetten, alors directeur de l’école, raconte : « Bien sûr, les élèves apprennent à connaître les moines. Moi-même, j’ai rencontré les moines ici. Je ne savais pas que ça existait. J’ai eu un professeur de mathématiques que j’ai beaucoup apprécié, c’est l’une des raisons pour lesquelles je suis entré au monastère » (juin 2012). De même, le monastère de Kremsmünster possède un lycée pour les élèves de 10 à 18 ans qui s’accompagnait auparavant d’un important internat. L’école abbatiale fonctionnait comme un lieu de primosocialisation à la vie religieuse par le rythme de vie et la discipline, la proximité de la communauté et la familiarisation avec les lieux. Toutefois, même avant la fermeture de l’internat en 2015, l’école ne jouait plus ce rôle. Dans cette communauté, un seul moine âgé de plus de 65 ans n’a pas effectué sa scolarité à l’école abbatiale. En revanche, seulement 6 % des moines âgés de moins de 44 ans y sont passés. La mixité et la réduction progressive de l’internat ont peu à peu effacé l’idée d’une primosocialisation monastique de l’école. Les sources de recrutement qui établissaient une continuité s’amenuisent donc. La déconnexion des lieux de primosocialisation religieuse établissant une continuité dans le parcours vocationnel a aussi été observée pour les dominicains par Yann Raison du Cleuziou : « De la même manière, la proportion des frères qui sont passés par un Petit Séminaire chute de 37,3 % entre 1910 et 1920 à 10 % entre 1940 et 1950 » (2011 : 120).

Internet, une aide au choix ?

27Si les vocations de proximité se font moins courantes, y compris dans les pays où les moines sont présents dans l’espace public, comment les nouveaux entrants prennent-ils connaissance des monastères qui pourraient leur convenir ? Dans les ordres monastiques, chaque monastère est autonome et le vœu de stabilité attache la personne à un monastère particulier. Dans les pays de longue tradition monastique comme le sont la France et l’Autriche, le choix est possible entre plusieurs – voire de nombreux – monastères du même ordre. Il existe en France trente-six monastères de bénédictines et vingt-cinq de bénédictins, ce qui offre un large choix à l’intérieur d’une même famille monastique. En revanche, dans les congrégations apostoliques comme les dominicains ou les franciscains, l’entrée se fait dans la congrégation, non pas dans une maison particulière qui change selon les étapes de la vie religieuse (noviciat, formation) et les charges reçues. Le choix s’effectue en fonction de la congrégation et non pas en fonction d’une communauté ou d’un lieu particulier.

28La présence des communautés en ligne par leur site internet ou sur les réseaux sociaux (Jonveaux, 2013) offre désormais aux individus intéressés par la vie monastique un choix apparemment élargi et à portée de main avec la possibilité d’entrer en contact à distance. En termes économiques, il y a atomicité des offres et une transparence accrue grâce à Internet dans les informations disponibles. De nombreux jeunes moines et moniales ont affirmé en entretien avoir connu leur communauté sur Internet. Par exemple, un cistercien de Heiligenkreuz en 2012 : « L’Internet joue un rôle dans 95 % des vocations. Les gens vont sur Internet aujourd’hui lorsqu’ils cherchent une communauté, c’est certain. C’était la même chose pour moi. » Ou un jeune cistercien étudiant à l’université de Graz en 2011 : « J’ai cherché une communauté, j’ai googlisé et j’ai trouvé Rein qui était suffisamment radical. » Déjà en 2008, Jean-François Mayer soulignait l’importance pour les communautés d’être présentes en ligne pour le recrutement : « Nous arrivons même à l’étape suivante, où un monastère qui n’aurait pas de site “manquerait” de vocations potentielles, puisque tout jeune intéressé par les questions religieuses va probablement – de plus en plus – recourir à Internet comme premier pas dans sa quête […] » (2000 : 73). Non pas que la vocation en soi naisse sur Internet, mais les recherches sur les sites des communautés accompagnent l’élaboration de la décision, le choix de la communauté et l’information sur les étapes d’entrée.

29Les sites des communautés monastiques proposent le plus souvent un onglet « Devenir moine/moniale ? ». Cet onglet est, sur la plupart des sites, accessible en deuxième niveau, à l’intérieur d’un onglet « communauté » ou « vie monastique ». Les pages sur l’entrée dans la vie monastique sont en général assez objectives, reprenant les différentes étapes jusqu’à la profession ainsi que l’idée d’éprouver la vocation, très prégnante dans la règle de Benoît. Le site de l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes évoque « une longue période de probation » quand celui de la Pierre-qui-Vire parle de la « rencontre de deux volontés : celle du demandeur et celle de la communauté ». La rhétorique est celle de la vocation comme appel, qui doit être éprouvée, et non pas d’un positionnement marketing qui chercherait à attirer les recrues. Les témoignages personnels sont assez rares. Lors d’un entretien avec deux novices du monastère de Kremsmünster en 2018, où nous avons regardé ensemble plusieurs sites de communautés, ceux-ci disaient ne pas trouver attractif un monastère qui mise sur le marketing pour attirer des novices.

30L’élargissement de l’offre monastique grâce à Internet permet d’une part, de réduire l’impact de la distance sur le choix des communautés et d’autre part, de faire des choix plus objectifs en comparant diverses options. Ce comportement de choix rationnel est parfois encouragé par les religieux eux-mêmes qui n’hésitent pas à conseiller de visiter plusieurs communautés avant d’établir un choix définitif.

Une politique de recrutement ?

31Acculés devant le manque de renouvellement de leurs effectifs dû autant au vieillissement des communautés qu’à la raréfaction des entrées, les monastères développent-ils une politique rationnelle et active de recrutement ? Cherchent-ils à se faire attractifs vis-à-vis d’un public potentiellement cible ?

32Lors d’une formation en 2014 pour maîtres et maîtresses des novices des ordres cisterciens et trappistes francophones et germanophones à laquelle j’étais invitée, la réponse a été unanimement négative à ma question de savoir si les communautés développaient une politique de recrutement. L’idée serait que les vocations monastiques ne peuvent faire l’objet d’une politique réfléchie. Derrière cette réponse se trouvent d’une part la fidélité à une théologie de la vocation (appel de Dieu) ou de l’élection, comme dirait Max Weber, et d’autre part la prudence de ne pas attirer des profils qui ne correspondraient pas aux attentes de la communauté. Comme l’explique un cistercien polonais, être moine, « c’est répondre à l’appel à vivre dans une telle proximité avec Dieu, à servir Dieu et l’homme sur différents plans » (2019). Un jeune moine de Heiligenkreuz (2012) affirme : « On ne peut pas expliquer une vocation avec une formule mathématique. Il y a toujours un mystère. » L’approche religieuse de la vocation, censée être entre les mains de Dieu, semble nier de prime abord une approche objective du recrutement, même si le simple fait d’avoir des pages internet expliquant comment entrer dans la communauté est en soi un acte favorisant les entrées, comparé aux monastères non présents en ligne.

33Il est vrai que « même si les monastères sont confrontés à une moyenne d’âge en augmentation, les supérieurs des communautés vont sélectionner avec grande prudence les postulants. » (Anchisi, Amiotte-Suchet, 2022 : 150) Toutefois, certains, par peur de disparaître, ouvrent leurs portes plus largement, y compris à des cas jugés par d’autres communautés comme difficiles. Un monastère en Autriche est connu pour cela et est critiqué dans les entretiens par d’autres abbés. En Pologne, le maître des novices de Jędrzejów raconte que c’était le cas de son monastère sous l’ancien abbé :

Cela a changé ces deux dernières années, mais avant, il y avait plus de personnes qui ne rentraient pas dans les cases. C’était aussi dû à la réputation que nous avions du monastère, c’était dû aux précédents abbés qui étaient miséricordieux à leur avis, téméraires à mon avis. Et si quelqu’un ne correspondait pas bien, par exemple, s’il avait été renvoyé du séminaire, les abbés précédents l’ont accepté. […] Quand je suis devenu maître des novices, il y avait beaucoup de ces personnes qui avaient échoué au séminaire, qui étaient à la recherche de quelque chose. J’ai travaillé un peu ce réseau et maintenant ils ne viennent plus. C’était très souvent que les prêtres avaient un garçon qui ne savait pas quoi faire de lui-même, et il lui disait : « Alors va chez les Cisterciens », c’était l’idée que l’on pouvait entrer facilement. Maintenant, ce n’est plus vrai. (mai 2019)

34Certains regrettent cependant que la question du recrutement ne soit pas posée de manière plus systématique. Un jeune moine autrichien explique en entretien que les monastères n’ont pas de « vision » concernant le recrutement. Il ajoute : « Ce qui manque cruellement, c’est un programme innovant. » Pour autant, si une politique de recrutement en soi n’est pas identifiable dans la majorité des communautés, celles-ci développent néanmoins des stratégies pour accroître leur visibilité. Dans un contexte comme celui de la France où les moines et moniales ne sont guère présents dans l’espace public et où l’exculturation de la société (Hervieu-Léger, 2003 : 87) creuse un écart toujours plus grand entre les représentations de la vie monastique dans l’imaginaire collectif et sa réalité vécue, les monastères travaillent à se rendre plus visibles en passant notamment par les réseaux sociaux. Ils proposent également de plus en plus d’offres de découverte de la vie monastique à destination des 16-35/40 ans, dont la promotion passe largement par leurs réseaux sociaux.

35Le site vie-monastique.com et les pages des réseaux sociaux associées ont pour but de présenter la vie monastique aux jeunes. Ces week-ends ou semaines intitulés « week-end vocation » ou « stage monastique » visent explicitement dans leur formulation à se poser la question de la vie monastique. Contrairement aux retraites plus larges proposées sur le même site, ces retraites ne sont pas mixtes, les communautés de femmes n’invitant que des femmes et inversement. La communication médiatique se poursuit après l’événement par des vidéos de témoignage de participants postées en ligne. Toutefois, la rhétorique utilisée ne vante pas directement l’entrée dans la vie monastique de la communauté en question, mais invite à se poser la question de la vocation en général. Cette stratégie de recrutement se veut indirecte pour ne pas nier la dimension spirituelle d’appel de Dieu. Par exemple, en juin 2024, les sœurs dominicaines de Notre-Dame-de-Chalais proposent : « Découvrir la vie des sœurs moniales. Week-end vocations ». Celles de la Coudre invitent en avril 2024 à un : « Séjour monastique jeunes. Venez vivre six jours avec les sœurs de l’abbaye de La Coudre » à destination des « jeunes femmes ». Les visuels utilisés se veulent modernes et attrayants, on ne peut nier alors une forme de marketing ou de mise en valeur du produit monastique. Ce site internet adopte en parallèle une stratégie plus indirecte de découverte de la vie monastique par des retraites sur des sujets plus larges ou par la recension de communautés monastiques ayant des offres vis-à-vis des scouts. Celles-ci permettent d’établir un premier lien avec un public potentiellement cible. En Autriche, plusieurs monastères comme Kremsmünster ou Heiligenkreuz ont développé cette stratégie en proposant un groupe de jeunes une fois par mois attaché à la communauté.

36La communication joue donc non seulement un rôle essentiel pour le recrutement dans un contexte où les monastères sont peu présents dans le tissu social, mais elle est aussi mobilisée par les communautés qui cherchent parallèlement à ne pas affirmer de stratégie directe de recrutement, afin de préserver l’approche religieuse de la vocation.

Les défis pour la formation monastique

37Le nouveau profil des novices et leur trajectoire ante-vie religieuse entraînent des défis pour la formation monastique. Entrer dans la vie monastique correspond à deux processus conjoints de désocialisation et de resocialisation dans ce qui est, selon un moine français, « un peu une autre planète ». La socialisation monastique en vue de l’acquisition d’un nouvel habitus ne se veut pas cumulative, mais vise un renouvellement complet qui efface théoriquement la socialisation antérieure dans le monde.

Adapter la formation aux nouveaux profils

38Les vocations de continuité ou à l’aube de l’âge adulte nécessitent pour la formation une moindre dé-socialisation. Le sociologue Roland Girtler (2020) montre en effet dans son livre sur les écoles abbatiales comment les élèves étaient pour une part déjà socialisés au monde monastique. L’augmentation de l’âge d’entrée dans cette vie induit une accumulation plus grande d’expériences en tant qu’adulte autonome. Or, l’entrée au monastère nécessite un abandon de certaines formes d’autonomie pour un mode de vie défini de l’extérieur, par la règle. La règle constitue pour Max Weber une « approche méthodique de l’homme tout entier » (2002 : 195) orientée vers le but unique du salut. Pour le maître des novices de Jędrzejów, le recul de l’âge après une certaine limite augmente les difficultés de la formation :

• 12 Il est à noter une différence de perception des âges d’entrée entre la Pologne et d’autres pays ét (...)

Il y a aussi ceux qui viennent, supposons à l’âge de 30 ans12, ce sont des vocations qui sont difficiles à former. Il est difficile de faire sortir cet homme quelque part, c’est vrai, d’en faire un moine. Il a ses habitudes, ses suppositions, sa façon de penser et très souvent, ces personnes partent. (mai 2019)

39Comme le souligne le maître des novices de la Pierre-qui-Vire, les entrants ne passent plus directement d’un régime de dépendance (famille, internat) à un autre comme cela l’était souvent avant les années 1960 :

Quand je suis rentré au monastère, il y a 50 ans […] souvent ils rentraient à 17 ans ou 18 ans. En plus, ils étaient dans des écoles cathos, internats, etc. Je me souviens d’un frère, il ne savait pas trop ce qu’était une femme avant d’entrer au monastère. Ça, maintenant c’est terminé, donc, de ce côté-là, il y a quand même une certaine maturation. Ils entrent au monastère en renonçant à une fuite, ils savent ce que c’est. Je dirais, il y a peut-être quelque chose qui est intégré à ce niveau-là, et qui fait qu’ils ne considèrent pas la sexualité ou les relations sexuelles comme le grand inconnu qui fait peur ou je ne sais pas quoi. Ils n’ont pas forcément eu tous des relations sexuelles, mais ils ont eu au moins une relation amoureuse ou ils ont été amoureux. […] Ça a complètement changé. (mai 2011)

40La formation intègre petit à petit les expériences affectives et la question des relations de genre. On observe en effet dans la vie monastique une mutation du rapport à la chasteté qui ne nie pas la sexualité, mais la réinvestit de manière religieuse (Jonveaux, 2018 : 193). Le tabou de la sexualité s’efface peu à peu dans certaines communautés grâce à sa verbalisation qui laisse place à la réaffirmation de l’identité sexuelle. L’ascèse monastique, autant dans la chasteté que le rapport à l’autorité ne peut en effet s’établir que dans un régime de plausibilité par rapport à ce qui est vécu dans la société et évolue notamment au gré de ce qu’apportent les nouveaux entrants. Anna Clot-Garrell observe dans un monastère de moniales une « redéfinition de l’obéissance en termes de liberté » (2017) qui s’adapte au profil des nouvelles novices.

41À cela, il faut ajouter que le recul de la transmission religieuse dans la famille a pour conséquence de moindres connaissances chez les novices, surtout en France, où il y n’y a pas de cours de religion à l’école, contrairement à l’Autriche. Les maîtres des novices disent souvent devoir reprendre le catéchisme de base. En Pologne, l’un des pays d’Europe à avoir la part la plus importante de catholiques dans sa population (80 % se déclarent catholiques en 2023), des jeunes se présentent à la porte des monastères sans réellement savoir ce qui les attend. Le maître des novices de Jędrzejów explique :

En plus des vocations qui restent, il y a des jeunes qui viennent, je ne sais pas s’il faut appeler ça des vocations, parce que les jeunes viennent, mais sans aucune orientation de ce qu’est la vie monastique, aucune idée de ce qu’ils doivent faire dans la vie, parfois très maladroits dans la vie. C’est une forme d’évasion et ce sont des gens qui partent très vite, après deux semaines. Depuis que je suis maître, j’ai même vu beaucoup de gens qui sont partis avant. (mai 2019)

42L’enquête menée fin 2023 par La Croix a montré qu’un tiers des séminaristes a fréquenté une communauté nouvelle. Danièle Hervieu-Léger cite comme viviers de vocations monastiques les « rassemblements de familles et de jeunes émanant des communautés nouvelles » (2017 : 542). Or, ces nouveaux courants du catholicisme issus d’orientations charismatiques impriment un rapport à la spiritualité. Les postulants issus de ces milieux présentent pour une part le profil de ce que Meunier et Perreault identifient chez les jeunes Québécois comme un « catholicisme de virtuose ». Ce dernier, basé sur le ressenti, se caractérise par le fait que « le virtuose fasse montre de son exemplarité en prônant – parfois davantage qu’en adoptant – une éthique et une ascèse renforcées » (2023 : 454). En effet, selon une maîtresse des novices française, les sœurs venant de ces mouvements arrivent avec une soif d’ascèse sévère (dormir dans la chapelle, jeûner complètement les jours sans viande de la communauté) qui doit être tempérée en arrivant au monastère. L’une d’elles évoquait des novices arrivant avec une spiritualité fondée sur l’émotionnel, mais, « qui se rendent compte après un an qu’elles n’ont pas de véritable relation avec Jésus » et parfois sortent. Comme le souligne Sylvain Parisie, il s’agit, notamment dans la prière charismatique, pour le croyant d’extérioriser « les émotions que suscite en lui ce rapport avec Dieu » (2005 : 348). Or la spiritualité des ordres monastiques de tradition bénédictine donne peu de place à l’extériorisation des émotions personnelles dans le cadre de la prière communautaire, hautement ritualisée.

Vers une formation monastique individuelle ?

43Les noviciats actuels subissent une restructuration fondamentale dans l’individualisation de la formation qui ne s’adresse le plus souvent désormais qu’à une ou deux personnes. À des époques de flux de vocations plus importants, le postulat et le noviciat constituaient des groupes à part entière, détachés de la communauté avec leur dynamique propre. Un ancien abbé de la Pierre-qui-Vire raconte :

Maintenant, ils rentrent goutte à goutte. Donc les relations entre la communauté et le novice ne sont plus celles qu’on avait autrefois. On était un groupe cohérent et un peu séparé. Pour que le mauvais exemple des anciens ne fasse pas de mal aux jeunes qui arrivent ! On les mettait à part, maintenant boum ! Et de fait, ça modifie les relations, par plus de maîtrise en principe. (mai 2011)

44La réduction de ces groupes à une unique personne supprime l’échange entre pairs. Comme l’explique un moine trappiste du Mont-des-Cats dans les Hauts-de-France, qui était maître des novices dans leur fondation à Madagascar :

Pour les novices eux-mêmes, ce qui leur manque c’est d’être avec d’autres novices, parce que pour bien évoluer dans le noviciat ou le postulat, le fait d’être avec d’autres du même âge, c’est très bénéfique. Pour eux, et pour le maître des novices, ça facilite, c’est une meilleure… Pour le discernement et aussi psychologiquement, c’est un meilleur climat pour évoluer sainement. (avril 2014)

45L’échange entre pairs doit alors être remplacé par d’autres moyens. Un bénédictin de Kremsmünster proposait d’utiliser la visioconférence pour pallier ce manque. La congrégation bénédictine autrichienne s’est aussi posé la question d’un noviciat commun sur le modèle des ordres apostoliques. De même, Hervieu-Léger cite pour la France l’idée d’une « propédeutique à la vie monastique […] qui ne semble pas avoir fait son chemin » (2017 : 548) jusqu’à présent. Des rencontres annuelles sont cependant organisées en Autriche pour réunir les novices des différents ordres pour des temps d’échange.

La « recharge en charisme » des vocations individuelles

46La rareté des vocations monastiques recharge chacune en charisme vis-à-vis de la société. Cela signifie que chaque nouvel entrant est susceptible de devenir une figure médiatisée. L’individualisation de l’entrée dans la vie monastique et de ses différentes étapes (prise d’habit, professions) en fait des cérémonies personnelles alors qu’elles étaient auparavant vécues en groupe. L’abbaye bénédictine d’En Calcat compte encore en 2012 quatre moines qui ont fait profession en 1952. De même, quatre moniales encore présentes en 2012 ont fait profession en 1962 à l’abbaye bénédictine de Dourgne. La combinaison de l’individualisation et de la rareté de ces événements entraîne une médiatisation de la personne plutôt que de l’événement comme cela serait pour un groupe. Ainsi, en juin 2021, les journaux autrichiens relayaient des articles sur la plus jeune novice d’Autriche. Un exemple particulièrement parlant a été en août 2022 la consécration d’une vierge à Salzbourg. Il ne s’agit pas ici à proprement parler de vie monastique, mais cet exemple est significatif pour la vie consacrée actuelle. Les médias ont largement relayé cette cérémonie qui est ainsi devenue un événement. Nous sommes ici en présence de ce qu’Arnaud Mercier (2018) appelle une « lecture événementielle » et de ce qu’il nomme dans sa typologie un « événement révélé par les médias » où ces derniers se font « le support privilégié de mise au jour d’un phénomène aussitôt interprété comme un événement, lecture que les publics peuvent accepter et s’approprier, amplifiant du coup l’événement » (Mercier, 2018 : 137). On a assisté ici à une événementialisation et médiatisation de la cérémonie orchestrée par la communauté charismatique de Loretto dont la jeune femme est membre. Elle a été relayée par les médias qui en ont fait un événement national notamment parce qu’ils l’ont porté à la connaissance d’un public peu socialisé dans l’Église qui ne connaissait pas ce type d’engagement religieux.

Conclusion

47La chute des vocations, qui renvoie à leur recul quantitatif, n’est qu’une part de l’évolution des vocations monastiques sur ces trente dernières années. Retenons parmi les évolutions notables le recul de l’âge d’entrée, qui reflète celui de l’âge moyen pour d’autres engagements de vie dans la société. Il est corrélé en partie à l’augmentation du niveau d’étude des entrants et de leurs expériences professionnelles. À cela s’ajoutent de manière qualitative des profils religieux différenciés et des approches plus individualistes du rapport à l’autorité et l’obéissance. Une mutation significative est en outre celle des voies d’accès à la vie monastique, dans le passage de vocations de continuité souvent liées à une primosocialisation dans une institution religieuse à des vocations de rupture. Cette recherche de rupture s’accompagne d’un élargissement des cercles géographiques de recrutement où la présence des communautés sur Internet joue un rôle essentiel. Acculées devant la perspective de leur propre disparition, des communautés développement des stratégies de communication pour faire connaître la vie monastique à un public potentiellement cible, tout en niant une politique de recrutement pour ne pas entrer en contradiction avec la dimension d’appel divin attachée aux entrées monastiques. Parallèlement, la raréfaction des entrées et l’individualisation des étapes d’initiation à la vie monastique rechargent chaque vocation en charisme en leur donnant une visibilité médiatique. L’approche par le genre des parcours vocationnels serait ici une perspective de recherche intéressante.

48Enfin, la réalité d’interruption dans le recrutement, parfois pendant plusieurs décennies, et le vieillissement des communautés aboutissent à des questionnements sur la pertinence de continuer à ouvrir ses portes à de nouvelles recrues. Anchisi et Amiotte-Suchet relèvent que certaines « [refusent] même l’entrée à des postulantes qui se présenteraient, considérant qu’une communauté de religieuses exclusivement âgées n’offre pas un environnement favorable à la vie contemplative » (2022 : 144). Ce positionnement est ressorti d’une discussion lors du chapitre d’une congrégation cistercienne auquel j’étais invitée en avril 2024. Les abbés et abbesses déconseillaient à une communauté de sœurs âgées de 62 à 95 ans d’accepter une postulante de 27 ans. Au-delà de la question de l’existence du recrutement, c’est donc celle de sa pertinence même qui est posée pour certaines communautés dans le contexte de mutations ici esquissé.